La Bruyère a dit : « Balzac, pour les termes et pour l’expression, est moins vieux que Voiture : mais si ce dernier, pour le tour, pour l’esprit et pour le naturel, n’est pas moderne, et ne ressemble en rien à nos écrivains, c’est qu’il leur a été plus facile de le négliger que de l’imiter, et que le petit nombre de ceux qui courent après lui ne peut l’atteindre. » 1. […] L’heureuse combinaison des tours et la noblesse des termes sont entrés dans le trésor de la prose oratoire : l’exagération emphatique, le faux goût, la recherche, sont demeurés sur le compte de Balzac, et l’on n’a plus compris la gloire de cet écrivain, parce que les fautes seules lui restaient, tandis que ses qualités heureuses étaient devenues la propriété commune de la langue qu’il avait embellie. » 3.
Or il était, et il est peut-être impossible encore qu’une langue fournisse des termes différents pour toutes les idées et tous les objets. […] 6º Enfin, les tropes enrichissent une langue, en multipliant l’emploi et la signification d’un même terme, soit en l’unissant avec d’autres mots, auxquels il ne peut se joindre dans le sens propre ; soit en lui donnant une extension ou une ressemblance qui supplée aux termes qui manquent dans la langue. […] Le vice et la douleur n’osaient approcher d’eux ; La pauvreté, les soins, la peur, la maladie, Ne précipitaient point le terme de leur vie. […] Quand nous sommes vivement frappés de quelque idée que nous voulons représenter, il est rare que nous n’allions pas au-delà de la vérité en cherchant à l’exprimer, parce que les termes ordinaires nous paraissent trop faibles pour peindre ce que nous sentons.