Voici comme il conta l’aventure à sa mère9 : « J’avais franchi les monts qui bornent cet Etat10, Et trottais comme un jeune rat1 Qui cherche à se donner carrière, Lorsque deux animaux m’ont arrêté les yeux : L’un doux, bénin et gracieux2 Et l’autre turbulent et plein d’inquiétude3 Il a la voix perçante et rude, Sur la tête un morceau de chair4, Une sorte de bras5 dont il s’élève en l’air Comme pour prendre sa volée, La queue en panache étalée. » Or, c’était un cochet dont notre souriceau Fit à sa mère le tableau, Comme d’un animal venu de l’Amérique6 « Il se battait, dit-il, les flancs avec ses bras, Faisant tel bruit et tel fracas, Que moi qui, grâce aux dieux, de courage7 me pique, En ai pris la fuite de peur, Le maudissant de très-bon cœur. […] Souliers plats, pour ne pas tomber ; il y à là tout un tableau. […] Cette cacophonie achève le tableau.
Destiné à captiver, à toucher une multitude assemblée, l’éloquence de la chaire doit employer une action véhémente et variée, être sensible, entraînante, et pour cela pleine d’images, de tableaux et de mouvemens. […] Le panégyriste, réduit toute la vie du héros à certaines vertus principales ; il rassemble et rapproche les détails qui se rapportent à chacune d’elles ; il forme par ce moyen des tableaux oratoires. […] C’est, en quelque sorte, le dernier coup de pinceau, après lequel on ne peut rien ajouter au tableau sans en affaiblir l’expression1. […] C’est par de magiques tableaux où tout respire, qu’on peut tour à tour arracher des larmes, faire frémir de colère, ou glacer de terreur. […] Il met sous les yeux le tableau de la force et de la faiblesse, de l’injure et de l’innocence ; il dit comment le fort a écrasé le faible, et comment le faible en gémissant a succombé.