En effet, elle est toute dans le sentiment, et dans le sentiment produit à la vue d’un objet ; or, la vivacité, la violence du sentiment épuise et abat, et ne peut, par conséquent, se soutenir longtemps : Animorum incendia , dit Cicéron, celeriter restinguuntur. […] Eu général, on demande quo le poète se soutienne jusqu’à la fin à la même élévation. […] C’est alors qu’il nous élève, nous enchante et nous transporte, en unissant au sublime des sentiments et à la hardiesse des pensées toute l’énergie et la pompe des expressions, tous les charmes d’une harmonie soutenue et toujours ravissante. […] Il faut en conclure que la règle véritable pour la forme de l’ode, est qu’elle soit bien adaptée au sentiment que l’on veut exprimer, c’est-à-dire qu’elle soit régulière ou symétrique, si le sentiment a une vigueur soutenue, et irrégulière, si la vivacité de la pensée ou du sentiment produit des variations dans la marche. […] Il admet la même noblesse d’idées, la même pompe d’expressions que l’ode ; mais il en rejette les écarts et les désordres : ils seraient incompatibles avec l’art et la sagesse qu’il faut pour soutenir une allégorie.
Mais, soutenu par son sujet et par l’admiration sincère qu’il avait vouée au nom et au génie de Corneille, il se surpassa lui-même, lorsqu’à la réception du frère de ce grand homme, il parla en ces termes des obligations que lui avait la scène francaise. […] À cette époque, n’avaient point encore paru la traduction des Géorgiques par Delille, qui joint au mérite d’une élégance et d’une harmonie soutenues, celui d’une fidélité qui tient quelquefois du prodige : sa traduction de l’Énéide, dans laquelle il y a beaucoup à reprendre, mais plus encore à admirer ; son Paradis Perdu, l’une des plus belles créations de la poésie française.