Tel était l’état de la synagogue lorsque Dieu, touché des gémissements et des calamités de son peuple, lui suscita Samuel, ce prophète chéri du ciel, qui renouvela le gouvernement, qui répandit une onction sainte sur les princes de sa nation, et qui jugea l’assemblée d’Israël selon la loi. Ce prophète, qui d’abord, sous les yeux du grand prêtre Héli, invoqua le Seigneur dans le calme et dans la retraite du sanctuaire ; qui depuis, consulté de tout Israël à Silo, où il avait choisi sa solitude, parut à la tête du peuple de Dieu, fut connu depuis Dan jusqu’à Bersabée, régla les différends des tribus, rétablit le culte du Seigneur, et fut le censeur des rois et des princes du peuple ; et qui enfin, dépositaire des vérités de la loi, fut reconnu fidèle dans ses paroles, parce qu’il avait vu le Dieu de lumière, confondit Amalec, et brisa l’insolence des princes de Tyr et de tous les chefs des Philistins. […] Il quitte sa solitude et devient le législateur des tribus ; il renouvelle la face de l’État, et les princes sont touchés de l’onction et de la grâce de ses paroles. […] C’est ainsi qu’il instruit les princes, non seulement par des discours et par des paroles, mais encore par des effets et par des exemples. […] Non, mes frères, si la piété n’avait comme consacré ses autres vertus, ni ces princes ne trouveraient aucun adoucissement à leur douleur, ni ce religieux pontife aucune confiance dans ses prières, ni moi-même aucun soutien aux louanges que je dois à un si grand homme.
A Chantilly, qu’on appelait l’écueil des mauvais ouvrages, protégé par le crédit d’un prince qui avait le goût de la fine raillerie, il put faire provision d’expérience, tracer impunément de malins portraits, et se vouer à un genre périlleux, sans craindre les orages. […] Image naïve des peuples, et du prince qui les gouverne, s’il est bon prince2 Giton ou le riche Giton a le teint frais, le visage plein, et les joues pendantes, l’œil fixe et assuré, les épaules larges, l’estomac haut, la démarche ferme et délibérée : il parle avec confiance, il fait répéter celui qui l’entretient, et il ne goûte que médiocrement tout ce qu’il lui dit ; il déploie un ample mouchoir3, et se mouche avec grand bruit ; il crache fort loin, et il éternue fort haut ; il dort le jour, il dort la nuit, et profondément ; il ronfle en compagnie ; il occupe à table et à la promenade plus de place qu’un autre ; il tient le milieu en se promenant avec ses égaux ; il s’arrête, et l’on s’arrête ; il continue de marcher, et l’on marche ; tous se règlent sur lui ; il interrompt, il redresse ceux qui ont la parole ; on ne l’interrompt pas, on l’écoute aussi longtemps qu’il veut parler, on est de son avis ; on croit les nouvelles qu’il débite. […] Son caractère est noble et facile, inspire le respect et la confiance, et fait que les princes nous paraissent grands et très-grands, sans nous faire sentir que nous sommes petits1. […] On ne tarit point sur les Pamphiles : ils sont bas et timides devant les princes et les ministres, pleins de hauteur et de confiance avec ceux qui n’ont que de la vertu, muets et embarrassés avec les savants ; vifs, hardis et décisifs avec ceux qui ne savent rien. […] Paître dans la langue sainte, c’est gouverner, et le nom de pasteur signifie le prince tant ces choses sont unies !