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36. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XIV. de la fin  » pp. 189-202

Sans entrer dans ces détails, pour lesquels l’étude des modèles et six mois de pratique valent mieux que vingt pages de préceptes, je dirai : La péroraison, comme l’exorde, peut se tirer parfois des objets inanimés dont la vue frappera souvent l’âme du spectateur plus vivement que toutes les paroles : c’est Manlius montrant le Capitole du haut duquel son bras précipita les Gaulois, ou Mirabeau, la fenêtre d’où l’exécrable Charles IX tira sur ses sujets ; c’est l’orateur grec levant le voile de Phryné, ou Marc-Antoine comptant les marques du poignard des conjurés. […] Dans celle-ci, c’est la péroraison suppliante, commiseratio ; il termine par le tableau le plus pathétique des douleurs de son client, d’autant plus habile ici, que, connaissant la fierté du caractère de Milon, il prend pour lui-même ce rôle de suppliant que dédaignait l’accusé ; et après lui avoir ainsi concilié l’intérêt de ses juges, s’il le fait parler, les paroles qu’il lui prète ne sont plus empreintes que d’une dignité affectueuse et d’une touchante fermeté. […] Les séances de la Convention, ces formidables joutes de la paroles, où, à chaque partie, chacun mettait sa tête pour enjeu, abondent en péroraisons véhémentes. […] « En ce jour, Sire, avant que Votre Majesté reçût cette onetion divine, avant qu’elle eût revêtu ce manteau royal qui ornait bien moins Votre Majesté qu’il n’était orné de Votre Majesté même, avant qu’elle eût pris de l’autel, c’est-à-dire de la propre main de Dieu, cette couronne, ce seeptre, cette main de justice, cet anneau qui faisait l’indissoluble mariage de Votre Majesté et de son royaume, cette épée nue et flamboyante, toute victorieuse sur les ennemis, toute-puissante sur les sujets, nous vîmes, nous entendîmes Votre Majesté, environnée des pairs et des premières dignités de l’Etat, au milieu des prières, entre les bénédictions et les cantiques, à la face des autels, devant le ciel et la terre, les hommes et les anges, proférer de sa bouche sacrée ces belles et magnifiques paroles, dignes d’être gravées sur le bronze, mais plus encore dans le cœur d’un si grand roi : Je jure et promets de garder et faire garder l’équité et miséricorde en tous jugements, afin que Dieu, clément et miséricordieux, répande sur moi et sur vous sa miséricorde. » Mais où l’orateur rencontre souvent les accents les plus pathétiques, c’est lorsqu’il se met lui-même en scène, et qu’il communique à l’auditoire cette énergie de la personnalité qui met, non plus les opinions et les sentiments, mais l’homme lui-même en contact avec l’homme. […] Telle fut la puissance de parole du prédicateur, que la quète qui suivit son sermon rapporta cent cinquante mille livres en souscriptions.

37. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre II. Les Oraisons ou discours prononcés. »

Plus attentif encore à exprimer leurs mœurs qu’à admirer leurs lumières, quels aiguillons leurs paroles ne laissent-elles pas dans son esprit ! […] Il quitte sa solitude et devient le législateur des tribus ; il renouvelle la face de l’État, et les princes sont touchés de l’onction et de la grâce de ses paroles. […] C’est ainsi qu’il instruit les princes, non seulement par des discours et par des paroles, mais encore par des effets et par des exemples. […] Il s’est trouvé, dans tous les temps, des hommes qui ont su commander aux autres par la puissance de la parole. […] un ton véhément et pathétique, des gestes expressifs et fréquents, des paroles rapides et sonnantes.

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