On peut dire que ses lettres ne charment pas seulement l’esprit du lecteur, mais qu’elles le purifient et l’élèvent68. […] Tout écrivain, pour écrire nettement, doit se mettre à la place de ses lecteurs, examiner son propre ouvrage comme quelque chose qui lui est nouveau, qu’il lit pour la première fois, où il n’a nulle part, et que l’auteur aurait soumis à sa critique, et se persuader ensuite qu’on n’est pas entendu seulement à cause que l’on s’entend soi-même, mais parce qu’on est en effet intelligible213. […] Si j’osais vous donner un conseil, ce serait de songer à être simple, à ourdir votre ouvrage d’une manière bien naturelle, bien claire, qui ne coûte aucune attention à l’esprit du lecteur.
Lorsqu’elle est placée au commencement de la fable, le lecteur a le plaisir, en suivant le fil de la narration, de juger si chaque trait s’y rapporte exactement à la vérité énoncée. […] Le poète étant dans l’obligation de précautionner ses lecteurs contre le mauvais goût, doit indiquer les sources où l’on pourrait le puiser, et peut par conséquent nommer les ouvrages. […] Il a de la gaieté, de la force, et même des grâces : mais ce poète peu décent doit être redouté du chaste lecteur.