Enfin, et ceci est la principale raison, le jugement du législateur ne porte pas sur un point spécial, mais sur des cas futurs et généraux, tandis que les membres d’une assemblée et le juge prononcent sur des faits actuels et déterminés, sans laisser d’être influencés, souvent, par des considérations d’amitié, de haine et d’intérêt privé, ce qui fait qu’ils ne peuvent plus envisager la vérité avec compétence, mais que des sentiments personnels de joie ou de peine viennent à offusquer leurs jugements. […] Nous portons autant de jugements différents, selon que nous anime un sentiment de tristesse ou de joie, d’amitié ou de haine. […] Les choses qui sont en espérance sont agréables lorsque, dans le moment actuel, elles nous paraissent devoir nous procurer une grande joie ou un grand profit, ou nous profiter sans peine ; ce sont, en général, toutes celles qui réjouissent le plus souvent, soit au moment où elles ont lieu, soit quand on les espère, soit encore lorsqu’on s’en souvient. […] Cela posé, il en résulte nécessairement qu’un ami est celui qui prend sa part de joie dans ce qui nous est bon et sa part de chagrin dans ce qui nous afflige, non pas en vue de quelque autre intérêt333, mais eu égard à la personne aimée.
L’interrogation peut être employée avec convenance lors même que l’émotion n’est pas plus vive que celle qui résulte naturellement de la poursuite de quelque raisonnement serré et pressant ; mais les exclamations n’appartiennent qu’aux plus fortes émotions de l’âme, à la surprise, à l’admiration, à la joie, à la colère et autres passions analogues. […] C’est ainsi qu’il suffit qu’un seul individu entre dans une société avec des marques non équivoques de mélancolie ou de joie empreintes sur sa figure, pour répandre ce sentiment dans toute l’assemblée. […] Fondons la liberté sur les lois et une sage constitution, et bientôt vous verrez les trônes s’écrouler, les sceptres se briser, et les peuples, étendant les bras vers vous, proclamer par des cris de joie la fraternité universelle. » Mais les principes exagérés de ces orateurs paraissaient trop modérés à l’anarchie qui avait déjà succédé à la révolution, il lui fallait du sang.