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66. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Deuxième partie. Préceptes des genres. — Chapitre second. De la narration. »

Il n’en est pas de même du philosophe, pour qui il n’y a point de situation particulière et qui doit définir rigoureusement suivant les principes généraux des connaissances humaines. […] La Justice divine et la Justice humaine. Aux deux coins de cet échafaud les deux justices sont  en présence, la Justice humaine et la Justice divine : l’une, implacable et appuyée sur un glaive, est accompagnée du Désespoir ; l’autre tenant un voile trempé de  pleurs, se montre entre la Pitié et l’Espérance. […] Le dialogue est un vêtement qui s’adapte à tous les genres, et dont l’esprit humain peut revêtir toutes les productions. […] La grandeur, l’étonnante mélancolie de ce tableau, ne sauraient s’exprimer dans des langues humaines ; les plus belles nuits en Europe ne peuvent en donner une idée.

67. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Molière 1622-1672 » pp. 379-400

Molière 1622-1672 [Notice] Molière a peint avec une vérité saisissante tous les types de la physionomie humaine ; il met en scène la cour, la ville et la province : bourgeois et nobles, marchands, médecins et hommes de lois, pédants, fâcheux, fanfarons, fripons, servantes, valets et maîtres, bel esprit, faux savoir, avarice, prodigalité, faiblesse, égoïsme, entêtement, malveillance, vanité, sottise, jalousie, libertinage, misanthropie, irréligion, hypocrisie, en un mot, son siècle, et avec lui l’humanité tout entière. […] C’est ainsi qu’aux flatteurs on doit partout se prendre Des vices où l’on voit les humains se répandre. […] Il y a toujours en lui un observateur et un peintre de la nature humaine. […] Loué, exalté et porté jusqu’aux cieux par de certaines gens qui se sont promis de s’admirer réciproquement, il croit, avec quelque mérite qu’il a, posséder tout celui qu’on peut avoir, et qu’il n’aura jamais ; occupé et rempli de ses sublimes idées, il se donne à peine le loisir de prononcer quelques oracles : élevé par son caractère au-dessus des jugements humains, il abandonne aux âmes communes le mérite d’une vie suivie et uniforme ; et il n’est responsable de ses inconstances qu’à ce cercle d’amis qui les idolâtrent. […] Jamais encore on n’avait peint l’homme, dans cette sphère de la vie, avec une vérité si profonde ; jamais on n’avait saisi avec cette sagacité pénétrante les caractères, leurs traits saillants et leurs nuances variées ; jamais on n’était descendu aussi avant dans les obscurs replis où se cachent les ressorts des actions humaines.

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