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32. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Guizot. Né en 1787. » pp. 469-478

Ce n’était point un de ces génies ardents, pressés d’éclater, entraînés par la grandeur de leur pensée ou de leur passion, et qui répandent autour d’eux les richesses de leur nature, avant même qu’au dehors aucune occasion, aucune nécessité en sollicite l’emploi. […] Je comprends que Hampden l’ait condamné ; je ne comprends pas que l’histoire, en le chargeant de ce qui fit sa ruine, ne prenne pas plaisir à lui rendre ce qui faisait sa grandeur ; et pour mon compte, je suis sûr qu’en assistant à sa glorieuse défense, à son tranquille départ pour l’échafaud, en le voyant ne baisser la tête que pour recevoir sur son passage la bénédiction d’un vieil ami de prison, j’aurais senti le besoin de lui tendre la main, de serrer la sienne, et, au dernier moment, de sympathiser avec ce grand cœur. […] « La rapidité des révolutions n’est pas moins surprenante que leur grandeur. […] Quand l’orateur souverain, pris d’une subite pensée, montait à la tribune ; quand cet homme se trouvait face à face avec son peuple ; quand il était là debout ; quand son regard sardonique et lumineux, fixé, du haut de cette tribune, sur les hommes et sur les idées de son temps, avait l’air de mesurer la petitesse des hommes sur la grandeur des idées, alors il n’était plus ni calomnié, ni hué, ni injurié ; ses ennemis avaient beau faire, avaient beau dire, avaient beau s’ameuter contre lui, le premier souffle de sa bouche ouverte pour parler faisait crouler tous ces entassements.

33. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XV. de l’élocution  » pp. 203-216

La généralisation des idées dépend de la grandeur du sujet, et le ton, à son tour, est déterminé par elle, comme, lorsqu’on parle, la disposition plus ou moins passionnée de l’esprit dépend de la grandeur des intérêts mis en jeu, et détermine à son tour le ton de la voix. […] Mais le ton de l’orateur et du poëte, dès que le sujet est grand, doit toujours être sublime, parce qu’ils sont les maîtres de joindre à la grandeur de leur sujet autant de couleur, autant de mouvement, autant d’illusion qu’il leur plaît, et que devant toujours peindre et toujours agrandir les objets, ils doivent aussi partout employer toute la force et déployer toute l’étendue de leur génie. » Maintenant, il nous reste à étudier les qualités essentielles de l’élocution, c’est-à-dire celles qui conviennent à tous les tons ; les qualités accidentelles, c’est-à-dire celles qui ne conviennent que dans tel ou tel ton ; et enfin les ornements dont l’élocution est susceptible, et que l’on comprend sous le nom général de figures. […] L’expression, le style fait toute la différence… Le style rend singulières les choses les plus communes, fortifie les plus faibles, donne de la grandeur aux plus simples.

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