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44. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre III. De la partie oratoire dans les Historiens anciens. Historiens grecs. »

D’autres ont donné à leurs reproches un caractère plus grave encore ; ils ont prétendu que les acteurs introduits dans le grand drame de l’histoire, n’ayant pas tenu précisément le discours que leur prête l’historien, c’est se jouer mal à propos de la crédulité du lecteur, faire prendre le change à sa bonne foi, et l’induire gratuitement en erreur. […] Je suis, moi, ce que j’étais alors : je ne change pas, comme vous, au gré des circonstances. […] Le signal est entendu de tous ; se présenter de front, tourner l’ennemi, se déployer sur deux ailes, changer à tout moment la face du combat, est la science du simple soldat, comme des chefs eux-mêmes.

45. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — La Bruyère 1646-1696 » pp. 100-117

N’a-t-il pas dit : « Il faut rire avant d’être heureux, de peur de mourir sans avoir ri. » Observateur profond, et peintre de caractères, il excelle dans l’art d’attirer l’attention par des remarques soudaines, des traits vifs et pénétrants, des métaphores passionnées, des hyperboles à outrance, des paradoxes simulés, des contrastes étudiés, des expressions originales, de petites phrases concises qui partent comme des flèches, des allégories ingénieuses, et des morceaux d’apparat où l’esprit étincelle dans les moindres détails Le berger et son troupeau 1 Quand vous voyez quelquefois un nombreux troupeau qui, répandu sur une colline vers le déclin d’un beau jour, paît tranquillement le thym et le serpolet, ou qui broute dans une prairie une herbe menue et tendre2 qui a échappé à la faux du moissonneur, le berger, soigneux et attentif, est debout auprès de ses brebis ; il ne les perd pas de vue, il les suit, il les conduit, il les change de pâturage ; si elles se dispersent, il les rassemble ; si un loup avide paraît, il lâche son chien qui le met en fuite ; il les nourrit, il les défend ; l’aurore le trouve déjà en pleine campagne, d’où il ne se retire qu’avec le soleil. […] Il n’a fait que changer de troupeau : au lieu de paître des brebis, il paît des hommes. […] « J’ajoute que, de nos jours, Giton et Phédon changent continuellement de rôle ; il n’y a souvent de distance entre eux que celle de la hausse à la baisse dans les spéculations de la Bourse, et ce perpétuel changement de condition a son influence sur le caractère réciproque de Giton et de Phédon.

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