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32. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XXII. des figures. — figures par rapprochement d’idées semblables  » pp. 301-322

La poésie s’en accommode mieux que la prose, l’éloquence mieux que l’histoire ; le genre didactique ne la dédaigne pas, la sentence acquiert par elle plus de netteté et d’énergie : les Essayistes anglais l’ont souvent employée avec un bonheur extrême ; chez les poëtes et les orateurs, elle sera plus brillante et plus élastique ; chez les philosophes et les historiens, plus significative et plus rigoureuse. […] Assurément, il y a dans les poésies de Lamartine de riches et brillantes descriptions, des narrations suaves et touchantes, des morceaux lyriques aussi irréprochables qu’élevés, mais, en même temps, il s’y trouve des passages, et, entre autres, une certaine dédicace à Maria Anna Elisa où s’accumulent les métaphores les plus fausses et les plus incohérentes que l’on puisse rencontrer : Doux nom de mon bonheur, si je pouvais inscrire Un chiffre ineffaçable au socle de ma lyre, C’est le tien que mon cœur écrirait avant moi, Ce nom où vit ma vie et qui double mon âme ; Mais pour lui conserver sa chaste ombre de femme, Je ne l’écrirais que pour toi. […] Je conçois que, si la femme aimée vous rend parfaitement heureux, vous puissiez dire que son nom est celui de votre bonheur ; mais ce que je ne conçois pas, c’est que votre cœur écrive avant vous le chiffre de ce nom, et que vous prétendiez conserver à ce chiffre ou à ce nom une chaste ombre de femme. […] Je conçois que cette femme, nom de bonheur et lit d’ombrage, puisse encore être l’abri sous lequel végète le poëte, ou, puisque vous le préférez, l’arbre du poëte ; mais je ne conçois pas que jamais la séve puisse monter de l’abri pour couler en l’arbre, je ne conçois pas que les feuilles vertes qui refleurissent aux rameaux tombent, et tombent sur l’abri.

33. (1883) Poétique et Rhétorique (trad. Ruelle)

Variétés du bonheur. […] Ce but, en résumé, c’est le bonheur et les parties qui le constituent. […] La plupart des désirs passionnés ont pour conséquence un plaisir ; car c’est tantôt le souvenir du bonheur obtenu, tantôt l’espoir du bonheur à obtenir qui nous procure le plaisir. […] De plus, le bonheur procure en abondance les avantages corporels. […] Le bonheur nous rend plus orgueilleux et plus déraisonnables.

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