Avant toutes choses, des vues larges et profondes, embrassant le sujet dans toutes ses parties, vous ont donné la division des matières. […] Depuis trois ou quatre ans, je suis à la piste d’un bon Traité de rhétorique écrit en vue d’un petit séminaire.
Accoutumé à la clarté de ses propres idées, il devinait avec peine ce qui était fin et enveloppé, et l’on était étonné qu’un homme qui concevait et qui s’exprimait si nettement ne pût guère aller plus loin que sa première idée et sa première vue. […] Lorsque la fortune1 a paru se lasser de le poursuivre, la mort s’est offerte à sa vue.
Un bon sens aiguisé, fin et souriant, une modération courageuse et indépendante, une ironie très-malicieuse, mais que tempèrent la bienveillance et la gaieté, une franchise qui a du tact, et un sans façon qui ne manque jamais de tenue, ou d’agrément, l’art du badinage sérieux, le don de l’épigramme ingénieuse, la nouveauté des aperçus qui rajeunissent les questions par des vues soudaines et inattendues, le secret d’instruire en amusant, et d’élever une causerie jusqu’au ton de l’éloquence : voilà les traits principaux de sa physionomie. […] Les romans ont le mérite de nous représenter un peu ce monde idéal et charmant qui n’existe nulle part sur la terre, mais dont l’image, que nous avons vue je ne sais où, est restée imprimée dans notre cerveau ; nous ne croyons pas à ces récits magnifiques, mais nous les aimons, car il n’y a de beau que ce qui n’est pas.
Enfin, faisant un effort, il les remit dans la cassette et courut à l’autre bout de la chambre se jeter sur son lit, la tête tournée vers la muraille, enfoncée dans l’oreiller, comme s’il eût voulu se dérober à la vue d’un spectre. […] Tout le monde n’est pas roi ou ministre pour avoir besoin des enseignements de l’histoire ; mais il n’est personne qui ne prenne intérêt au jeu des passions, aux portraits de ces grands caractères qui dominent des peuples entiers, à ces alternatives de gloire et d’abaissement que, de près, on nomme la fortune, mais qui, vues de loin et d’ensemble, deviennent la révélation des terribles et mystérieuses lois de l’humanité1.
Il n’y est traité directement que de la tragédie, et par occasion de l’épopée ; mais ces deux genres sont si étendus, si analogues par leur fonds et par leurs formes avec les autres genres, ils sont traités avec tant d’adresse et tant d’art, que les rapports des idées et même leurs contrastes, deviennent des vues à peu près suffisantes pour juger des autres espèces. […] Le général est ce qu’un homme quelconque, d’un caractère donné, peut ou doit dire ou faire, selon le vraisemblable ou le nécessaire que la poésie a en vue lorsqu’elle impose les noms de l’histoire. […] La troisième espèce est par le souvenir ; lorsqu’à la vue d’un objet on éprouve quelque affection marquée : comme dans les Cypriens de Dicéogène, où le héros, voyant un tableau, laisse échapper des larmes ; et, dans l’apologue d’Alcinoüs, Ulysse entend le joueur de cithare : il se rappelle un souvenir, et pleure ; ce qui le fait reconnaître. […] Le sujet eût été trop vaste et trop difficile à embrasser d’une seule vue : et s’il eût, voulu le réduire à une juste étendue, il eût été trop chargé d’incidents. […] Nous avons parlé ci-dessus de son étendue, et nous avons dit qu’il faut pouvoir en embrasser à la fois le commencement et la fin d’une seule vue.
La liaison des scènes se fait ou par la présence des acteurs, ou par leurs discours, ou par la vue, ou par quelque bruit : par la présence, quand plusieurs acteurs, entrant ou sortant, restent quelques moments sur le théâtre ; par le discours, quand ils se parlent ; par la vue, quand l’entrant a vu le sortant, ou le sortant l’entrant, ou qu’ils se sont vus tous deux ; par le bruit, quand le théâtre demeurant vide, on entend le bruit de quelqu’un qui arrive. […] Un peu plus tard on pensa à varier le spectacle : on voulut représenter des personnages mythologiques ou surhumains : il fallut les faire voler dans l’air, y soutenir des monstres, y bâtir des palais enchantés, produire enfin toutes sortes de changements à vue. […] Car les féeries sont, en général, les prodiges que l’on suppose opérés par les fées, les génies, les êtres surnaturels ; et, en termes de théâtre, on applique ce nom aux pièces dans lesquelles on exécute, à l’aide de machines, des changements à vue de décorations, de costumes, de personnages même, commandés par ces puissances.
Vous apercevez çà et là quelques bouts de voies romaines, dans des lieux où il ne passe plus personne ; quelques traces desséchées des torrents de l’hiver : ces traces, vues de loin, ont elles-mêmes l’air de grands chemins battus et fréquentés, et elles ne sont que le lit désert d’une onde orageuse qui s’est écoulée comme le peuple romain. […] Je les ai vues en détail soit à Rome, soit à Naples, excepté pourtant les temples de Pœstum, que je n’ai pas eu le temps de visiter. […] Cette voûte des cieux, mélancolique et pure, Ce demi-jour si doux levé sur la nature, Ces sphères qui, roulant dans l’espace des cieux, Semblent y ralentir leur cours silencieux ; Du disque de Phébé la lumière argentée, En rayons tremblotants sous ces eaux répétée, Ou qui jette en ces bois, à travers les rameaux, Une clarté douteuse et des jours inégaux ; Des différents objets la couleur affaiblie, Tout repose la vue, et l’âme recueillie.
Jetons hors de notre âme cette foule de petites idées, et voyons, s’il est possible, comme le vrai philosophe, par ces grandes vues qui embrassent les rapports éloignés, et décident à la fois une infinité de questions, en montrant l’endroit où mille objets viennent se toucher en secret par un côté, tandis que, par un autre, ils paraissent s’éloigner à l’infini, et ne pouvoir jamais se rapprocher. […] Libre des opinions vulgaires, et pensant d’une manière qui n’appartient qu’à lui seul, il parle un langage, vrai dans le fond, mais nouveau et singulier, qui blesserait l’oreille des autres hommes ; vaste et profond dans ses vues, et s’élevant toujours par ses notions abstraites et générales, qui sont pour lui comme des livres abrégés, il échappe à tout moment aux regards de la foule, et s’envole fièrement dans les régions supérieures.
Il ne perdra pas de vue que la barre et la tribune sont, en définitive, le premier théâtre de ses combats et de ses victoires, le point de départ de sa parole ; il s’exercera à acquérir la spontanéité d’idées et d’expressions nécessaire aux luttes journalières où il est engagé ; il travaillera son organe, il ne négligera ni l’énergie, ni la grâce de l’action. […] Ces distinctions établies, avant d’entrer dans les détails, ne perdons pas de vue les observations suivantes : 1° La rhétorique n’étant point une science, mais un art, elle exige avant tout et surtout la pratique.
La verdure gagne à vue d’œil ; elle s’est élancée du jardin dans les bosquets, elle domine tout le long de l’étang ; elle saute, pour ainsi dire, d’arbre en arbre, de hallier en hallier, dans les champs et sur les coteaux, et je la vois qui a déjà atteint la forêt et commence à s’épancher sur sa large étendue. […] La brume nous voilait le lointain des eaux, mais donnait assez d’espace à la vue pour laisser soupçonner l’infini.
De l’autre côté du fleuve, la vue est arrêtée par une chaîne de collines rougeâtres : ce sont les monts Ménélaïons. […] Dans l’enfoncement s’élevait la chaîne du mont Ida, dont les pentes, vues du point où j’étais, paraissaient douces et d’une couleur harmonieuse. […] Pensez-vous que cette poignée de Français, aujourd’hui si arrogante, puisse en soutenir la vue ? […] s’écrie-t-on à la vue d’un beau tableau, d’une noble mélodie, d’une statue vivante et expressive. […] La vue de cette déroute simulée fit perdre aux Saxons leur sang-froid ; ils coururent tous à la poursuite, la hache suspendue au cou.
Au détour d’un rocher il vit une licorne blessée, qui, furieuse à sa vue, s’élança à sa rencontre. […] dit l’enfant, qui se souvenait d’elle ; Je t’ai vue a l’automne, oh ! […] Enseveli dans une atmosphère de sable embrasé, le guide échappe à ma vue ; tout-à-coup j’entends son cri. […] La jeune déesse, à la vue des prodiges qu’elle-même a opérés, sent une joie secrète inonder son cœur. […] » La débandade ne se ralentit qu’à la vue du prince Robert, de retour enfin sur le champ de bataille avec ses escadrons.
Dans cette place éminente, il n’eut constamment en vue que la gloire du royaume et le bonheur des Français ; et il fit l’un et l’autre.
De quel charme, à leur vue, il se sent pénétrer ! […] elle est perdue : Depuis trois jours entiers nous ne l’avons point vue ; Notre pauvre Brunon ! […] Leur vue à mon foyer prête un nouvel appas : L’homme se plaît à voir les maux qu’il ne sent pas. […] Toutes ses actions, toutes ses vues, toutes ses affections ne se rapportent qu’à cet indigne objet. […] mon père, oubliez votre rang à ma vue.
Cette illustre et ancienne maison a produit tant de grands hommes, qu’il est difficile de distinguer le héros qu’a eu en vue l’auteur de le.
Vous supposerez qu’un Français du siècle dernier se réveille de nos jours après un long sommeil et vous peindrez son étonnement à la vue des changements apportés par les inventions. […] Si Louis XIV a pu constituer la meilleure armée qu’on ait vue jusque-là en Europe, c’est parce que Colbert lui a fourni les moyens de la recruter et de la nourrir ; c’est parce que Louvois l’a disciplinée et exercée. […] Enfin en éloquence, nul art ne remplace les convictions fortes ; une vue claire du sujet jointe à un violent désir de persuader, font trouver sans effort l’expression juste et lumineuse. […] Ainsi, vous ignorez les joies des fêtes, le bonheur que l’on goûte en entendant une comédie ou une tragédie qui touche notre cœur et élève notre esprit, la jouissance que procure à l’imagination la musique ou la vue d’un chef-d’œuvre de nos immortels artistes ? […] Au-delà des océans qui bornent notre vue, son regard s’est arrêté, tout rempli de commisération et d’humaine pitié, sur ces continents lointains où des peuples entiers gémissent, courbés sous le fouet impitoyable d’homme qu’ils appellent leurs maîtres ; où ces peuples qui étaient nés comme nous pour la liberté sont devenus les instruments inertes et les victimes impuissantes de je ne sais quel trafic honteux dont la seule pensée nous fait reculer d’horreur, et lèvent en vain vers le ciel leurs mains depuis longtemps chargées de chaînes !
Ne perdez pas de vue ce second point dont Boileau ne parle pas, mais qu’il supposait sans doute. […] Tantôt, c’est l’affectation de la brièveté : J’évite d’être long et je deviens obscur ; ou bien, tout au contraire, la diffusion, les périodes interminables, l’accumulation des parenthèses, des épisodes, des idées accessoires qui embarrassent le lecteur et lui font perdre de vue l’idée principale.
Ce qui est beau n’émeut pas tous les hommes au même degré : l’un en a une vue claire et distincte, l’autre n’en a qu’une perception confuse ; c’est que l’un est poète, et que l’autre ne l’est pas. […] Il est des personnes qui resteront froides et indifférentes à la lecture du Cid, à la vue d’une belle nuit constellée, d’un tableau de Raphaël ou de la coupole de Saint-Pierre ; d’autres, au contraire, seront émues et transportées.
C’est de lui que date l’ère de la science proprement dite. » Le goût des spéculations générales, la profondeur et la gravité des maximes, des vues supérieures, des leçons éloquentes sur la part qui revient à chacun dans la bonne ou la mauvaise fortune des sociétés, l’art magistral de classer les idées, de les faire manœuvrer avec puissance et précision, l’autorité qui domine un sujet et juge de haut toutes les questions : tels sont les mérites éminents de ce grand esprit qui aborda l’histoire en homme d’État, prédestiné aux luttes et aux triomphes de la parole. […] Esprit admirablement libre, plutôt à force de justesse que par richesse et flexibilité, il ne recevait ses idées de personne, ne les adoptait en vertu d’aucun préjugé, mais en toute occasion, les formait lui-même, par la vue simple ou l’étude attentive des faits, sans aucune entremise ni influence, toujours en rapport direct et personnel avec la réalité.