C’est un hommage que Cicéron se plaisait à leur rendre, en avouant que, s’il était orateur lui-même, il l’était devenu dans les promenades de l’académie, et non pas à l’école des rhéteurs. […] Tantôt, l’orateur ne cherche pas uniquement à plaire, il s’efforce d’instruire et de convaincre ; il emploie tout son art, il rassemble toutes ses forces pour détruire les préventions qui peuvent s’élever contre lui ou contre sa cause, pour réunir ses preuves et les disposer de la manière la plus favorable à sa défense.
— Le sujet exigeait-il que l’auteur s’attachât particulièrement à plaire ? […] — Comment l’orateur réussit-il à plaire ? […] Mais il y -a des discours et des circonstances où l’orateur doit s’attacher particulièrement à plaire. […] Vous immolez à votre souveraine grandeur de grandes victimes, et vous frappez, quand il vous plaît, ces têtes illustres que vous avez tant de fois couronnées. […] Mais aussi que ne font-ils pas, quand il plaît à Dieu de s’en servir !
On dirait de celui-ci qu’il commence par créer le pays, et qu’il a des hommes, des femmes, des enfants en réserve, dont il peuple sa toile comme on peuple une colonie ; puis il leur fait le temps, le ciel, la saison, le bonheur, le malheur qu’il lui plaît. […] Français2 tant qu’il vous plaira, l’amour de la patrie n’inspire point de ces démarches périlleuses, et surtout en faveur d’un inconnu. […] oh oui, je crois le savoir à présent… Si cet homme vous avait été envoyé par… — Épargnez, s’il vous plaît !
Ainsi l’auteur qui a dit : Maison à louer, laquelle a deux portes, trois fenêtres, du logement pour quatre maîtres, même pour cinq en un besoin, deux caves, un grenier à foin ; maison que le propriétaire avec sa baguette d’enchanteur, peut transporter, au gré du locataire, dans quelque quartier qu’il lui plaira ; maison qui porte un écriteau tiré de Barème et de l’algèbre, et dont le nom, aussi bien que celui de l’enchanteur, se lit dans le calendrier : cet auteur, dis-je, a proposé une énigme, dont le mot est une voiture, nommée fiacre. […] Rousseau le modèle du genre qui doit plaire à tous les bons esprits, même aux plus rigides. […] Si ce dessein vous plut, Sylvie, Le premier jour du mois de mai. […] Je pourrai citer aussi ces quatre vers du chevalier de Cailly, sur le portrait de Louis XIV qu’on avait peint sans couronne : Que cette majesté me plaît !
Plus soucie encore de plaire que d’instruire, de charmer que d’être utile, il chercha surtout le bruit, l’éclat, la gloire, la première place dans un siècle sur lequel il régna et dont l’influence régnait elle-même sur l’Europe. […] C’est un discernement prompt comme celui de la langue et du palais, et qui prévient comme lui la réflexion ; il est, comme lui, sensible et voluptueux à l’égard du bon ; il rejette, comme lui, le mauvais avec soulèvement ; il est souvent, comme lui, incertain et égaré, ignorant même si ce qu’on lui présente doit lui plaire, et ayant quelquefois besoin, comme lui, d’habitude. […] Le public, amoureux des nouveautés, court après eux ; il s’en dégoûte, et il en paraît d’autres qui font de nouveaux efforts pour plaire ; ils s’éloignent de la nature encore plus que les premiers ; le goût se perd ; on est entouré de nouveautés qui sont rapidement effacées les unes par les autres ; le public ne sait plus où il en est, et il regrette en vain le siècle du bon goût, qui ne peut plus revenir. […] Vous plairez aux hommes, à qui vous dites leurs vérités, mais vous ne les corrigerez pas3. […] Il avait le besoin de plaire encore plus que de dominer ; il trouvait plus de plaisir à mettre en jeu ses séductions que sa force.
J’en verse5, et plût à Dieu qu’à force d’en verser, Ce cœur trop endurci se pût enfin percer ! […] Seigneur, de vos bontés il faut que je l’obtienne6 ; Elle a trop de vertus pour n’être pas chrétienne ; Avec trop de mérite il vous plut la former, Pour ne vous pas connaître et ne vous pas aimer, Pour vivre des enfers esclave infortunée, Et sous leur triste joug mourir comme elle est née. […] Tout ce qui vous plaît, ce sont les habitudes vulgaires. […] Vous leur faites des yeux, vous leur faites des bouches, Qui ne savent que c’est de voir et de parler ; Et leurs plus vifs regards sont bénins ou farouches, Comme il vous plaît les ciseler. […] J’ai souhaité longtemps d’agréer à vos yeux ; Aujourd’hui je veux plaire à l’Empereur des cieux ; Je vous ai divertis, j’ai chanté vos louanges ; Il est temps maintenant de réjouir les anges, Il est temps de prétendre à des prix immortels Il est temps de passer du théâtre aux autels.
Nous appelons ordinairement ce langage style oriental, parce qu’il plaît surtout aux peuples placés à l’orient de l’Europe. […] Les philosophes, qui ne cherchent qu’à prouver, s’en servent presque toujours sans dissimuler sa nudité scolastique ; les orateurs, qui veulent plaire par la variété, et ne pas laisser apercevoir les moyens qu’ils emploient pour arriver à leur but, cachent souvent le syllogisme sous les fleurs de leur langage. […] Mais le poëte, l’orateur académique, et en général tous les écrivains qui s’attachent plus à plaire qu’à convaincre, cherchent des transitions plus ingénieuses et plus imprévues. […] Un saint se plaît dans l’austérité ; un philosophe est sévère dans sa morale ; un supérieur a le commandement rude. […] Pascal a dit admirablement : « La douceur de la gloire est si grande qu’à quelque chose qu’on l’attache, même à la mort, on l’aime. » Dans cette phrase, comme dans tout ce qu’il a écrit, Pascal subordonne les mots à la pensée ; il ne cherche point à plaire à l’oreille, il lui sut lit de ne point la blesser.
Le jeune âge se plaît aux compositions gaies et spirituelles, la maturité aime des sujets plus graves. […] Toute imitation plaît, quelle que soit la nature de l’objet imité ; la vérité de l’imitation produit ce sentiment de plaisir. […] Satisfait de se faire comprendre, l’auteur ne cherche à plaire, ni à l’imagination, ni à l’oreille. […] Mais cette éloquence est plutôt fleurie que vigoureuse, destinée plutôt à plaire et à flatter qu’à convaincre et à persuader. […] À Dieu ne plaise !
La douceur de l’esprit est un air facile et accommodant, et qui plaît toujours quand il n’est point fade. […] Mille gens déplaisent avec des qualités aimables ; mille gens plaisent avec de moindres talents. […] Les habiles par imagination se plaisent tout autrement à eux-mêmes que les prudents ne se peuvent raisonnablement plaire. […] Mais aussi que ne font-ils pas, quand il plaît à Dieu de s’en servir ! […] J’en verse, et plût à Dieu qu’à force d’en verser, Ce cœur trop endurci se pût enfin percer !
Il lui fallait parler à une société polie son propre langage, et lui plaire par le discernement des convenances. […] Oui, monsieur, que l’ignorance rabaisse tant qu’elle voudra l’éloquence et la poésie, et traite les habiles écrivains de gens inutiles dans les États, nous ne craindrons point de dire, à l’avantage des lettres et de ce corps fameux dont vous faites maintenant partie, que du moment que des esprits sublimes, passant de bien loin les bornes communes, se distinguent, s’immortalisent par des chefs-d’œuvre comme ceux de monsieur votre frère, quelque étrange inégalité que, durant leur vie, la fortune mette entre eux et les plus grands héros, après leur mort cette différence cesse : la postérité, qui se plaît, qui s’instruit dans les ouvrages qu’ils lui ont laissés, ne fait point de difficulté de les égaler à tout ce qu’il y a de plus considérable parmi les hommes, et fait marcher de pair l’excellent poëte et le grand capitaine.
On l’applique indistinctement à tout ce qui plaît, soit dans le style, soit dans les pensées. […] Il n’est point de serpent, ni de monstre odieux, Qui, par l’art imité, ne puisse plaire aux yeux.
Écrivain juste, clair, exact, uni, probe comme sa pensée, il a l’expression ferme, nette, appropriée, simple sans bassesse, noble sans recherche ; il songe à instruire plus qu’à plaire, et nous émeut par la force pénétrante de la vérité. […] Et n’est-ce pas (je ne ferai point ici de difficulté de le dire, non pour décréditer la piété, à Dieu ne plaise, mais pour condamner hautement les abus qui s’y peuvent glisser, et qui s’y sont glissés de tout temps), n’est-ce pas par la voie d’une fausse piété, qu’on a vu les plus faibles sujets s’élever aux plus hauts rangs ; les hommes les moins dignes de considération et de recommandation être néanmoins les plus recommandés et les plus considérés, et, sans d’autres titres ni d’autre mérite qu’un certain air de réforme, emporter sur quiconque la préférence, et s’emparer des premières places ?
La finesse est une qualité que l’on aime à rencontrer dans un auteur, non-seulement parce que l’esprit plaît généralement, mais parce que l’amour-propre est flatté par celui qui nous a cru capable d’entendre plus qu’il ne nous disait. […] « Une des choses qui nous plaît le plus, dit Montesquieu, c’est le naïf, mais c’est aussi le style le plus difficile à attraper : la raison en est qu’il est précisément entre le noble et le bas ; il est si près du bas, qu’il est très-difficile de le côtoyer toujours sans y tomber. » De part ni d’autre, l’appréciation ne me paraît rigoureusement juste. […] Les facéties qui nous plaisent le plus sont, par la loi du contraste, celles que leur auteur débite sérieusement ou qui viennent de graves personnages.
La poésie dramatique est celle qui plaît le plus universellement, parce qu’elle représente les choses devant les yeux. […] Un personnage invente peut avoir le caractère qu’il plaira au poëte de lui donner. […] Il ne me plaît pas, moi. […] On convient en effet qu’il manque d’une certaine vivacité de plaisanterie : il plaît beaucoup plus qu’il ne fait rire. […] Un chant ne peut plaire, s’il est monotone.
Plaire. […] Je plais. […] Il plut. […] Plaire au Seigneur.
Le sentiment d’autrui n’est jamais pour lui plaire : Il prend toujours en main l’opinion contraire, Et penserait paraître un homme du commun, Si l’on voyait qu’il fût de l’avis de quelqu’un. […] Mes gens à la science aspirent pour vous plaire, Et tous ne font rien moins que ce qu’ils ont à faire, Raisonner est l’emploi de toute ma maison, Et le raisonnement en bannit la raison. […] C’est l’esprit que la vanité de plaire nous donne, et qu’on appelle, autrement dit, la coquetterie. […] Le marchand le plus mince Élève ses enfants comme des fils de prince ; Sa fille, qu’en tous lieux il se plaît à vanter, N’entend rien au ménage, et ne sait pas compter ; En revanche elle fait des vers, de la musique, Et l’on trouve un piano… dans l’arrière-boutique.
L’expression est l’âme de tous les ouvrages qui sont faits pour plaire à l’imagination. […] Comme il y a des femmes à qui il sied bien de n’être point parées, l’élocution simple nous plaît, même sans ornements. […] Plus riche que le simple, plus humble que le sublime, tous les ornements lui conviennent, et ce qui le distingue enfin, c’est l’art de plaire. […] Cet auteur plaît quand on le considère par morceaux détachés ; mais il lasse quand on le lit de suite. […] Voulez-vous délasser l’attention, et un moment vous occuper à plaire ?
Va, d’un débit heureux l’innocente imposture, Sans la défigurer embellit la nature ; Et les traits que la muse éternise en ses chants, Récités avec art, en seront plus touchants : Ils laisseront dans l’âme une trace durable Du génie éloquent empreinte inaltérable, Et rien ne plaira plus à tous les goûts divers Qu’un organe flatteur déclamant de beaux vers. […] je chanterai, Si mes chansons peuvent vous plaire.
Par rapport au premier point, c’est-à-dire l’étude des preuves de la vérité de la religion, je ne crois pas avoir besoin de vous avertir, mon cher fils, que la persuasion, ou la conviction à laquelle on peut parvenir en cette matière par l’étude et par le raisonnement, ne doit jamais être confondue ni même comparée avec la foi, qui est un don de Dieu, une grâce singulière qu’il accorde à qui lui plaît, et qui exige d’autant plus notre reconnaissance, que nous ne la devons qu’à la bonté de ce Dieu, qui a bien voulu prévenir en nous la lumière de la raison même par celle de la foi. […] Le désir lui présente de loin l’image trompeuse d’une parfaite félicité ; l’espérance, séduite par ce portrait ingénieux, embrasse avidement un fantôme qui lui plaît.