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46. (1886) Recueil des sujets de composition française donnés à la Sorbonne aux examens du baccalauréat ès lettres (première partie), de 1881 à 1885

J’y arrivai un des premiers, dès la pointe du jour, et je pus choisir une place commode sur les gradins destinés au peuple. […] Les tendances pratiques dominent tout chez ce peuple. […] Bientôt, ce théâtre semi-barbare excita le dédain du peuple, comme il excitait déjà celui des lettrés, et un arrêt du Parlement (1548), interdit à jamais la représentation des mystères. […] car enfin, les patois sont bien la langue du peuple. […] D’ailleurs, c’est de tout temps et chez tous les peuples que le Parnasse a jugé les fables de son apanage.

47. (1881) Morceaux choisis des classiques français des xvie , xviie , xviiie et xixe siècles, à l’usage des classes de troisième, seconde et rhétorique. Prosateurs

Car ledict celeste ne peut mentir, par lequel il est denoncé que le peuple sera dissipé quand la Prophetie defendra. […] L’imitation du parler, par sa facilité, suyt iucontinent tout un peuple : l’imitation du juger, de l’inventer, ne va pas si vite. […] Il est aulcungs juges qui craignent la reputation et opinion du peuple, disant : Si je juge aultrement que au desir du peuple, que dira le peuple ? […] Où est la majesté et gravité du Parlement, jadis tuteur des Roys et médiateur entre le Peuple et le Prince ? […] Alors les bourgeois de Paris seront ses gardes ; et il connoîtra combien il est plus doux d’entendre ses louanges dans la bouche du peuple que dans celle des poëtes.

48. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — J. Racine. (1639-1699.) » pp. 226-241

Favori de Louis XIV, il aimait le peuple comme Fénelon. […] Croyez-en ses transports : père, sceptre, alliés, Content de votre cœur, il met tout à vos pieds ; Sur lui, sur tout son peuple il vous rend souverain Est-ce là ce vainqueur digne de tant de haine ? […] Du peuple épouvanté j’ai traversé la presse Pour venir de ces lieux enlever ma princesse, Et regagner le port, où bientôt nos amis Viendront couverts du sang que je vous ai promis. […] Sortons de ce palais, Ou bien résolvons-nous de n’en sortir jamais ; Nos Grecs pour un moment en défendent la porte : Tout le peuple assemblé nous poursuit à main-forte. […] Allons, n’attendons pas que l’on nous environne : Nos Grecs nous rejoindront ; et tandis qu’Hermione Tient encore le peuple autour d’elle arrêté, Voilà notre chemin, sortons en sûreté.

49. (1867) Rhétorique nouvelle « Tableau des figures » pp. 324-354

N’oublions pas que la langue de l’éloquence est la langue des affaires, et que, s’adressant au peuple, elle doit être avant tout simple, précise, pratique. […] Le peuple dit : l’âme du soufflet, le roulement du tambour, un coup de vin, un pied de laitue, etc. […] Ces euphémismes abondent dans la langue des Athéniens : ils sont très-fréquents aussi dans la nôtre, parce que nous sommes comme eux un peuple sociable. […] Le peuple dit d’un homme qui sort du bagne qu’il a eu des malheurs. […] Mais choisissez ; car ne faut-il pas qu’un petit nombre périsse pour sauver la masse du peuple ?

50. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Courier, 1773-1825 » pp. 447-454

Après la chute de l’empire qu’il avait servi sans enthousiasme, mécontent, déclassé, il devint avocat de l’opposition, et se métamorphosant en ami du peuple, en vigneron matois, en canonnier à cheval, il guerroya, au nom d’un libéralisme bourgeois et tracassier, contre les petites vexations locales, les abus de pouvoir, les préfets, les maires et les gendarmes. […] Car le peuple est impertinent ; des coquins de paysans s’attaquent aux vainqueurs de l’Europe. […] Maintenant il n’y reste que ceux qui n’ont pu fuir, ou qui, le poignard à la main, cherchent encore dans les haillons d’un peuple mourant de faim quelque pièce échappée à tant d’extorsions et de rapines. […] Les monuments de Rome ne sont guère mieux traités que le peuple. […] Il s’est mis en cause commune avec Socrate, Pascal, Cicéron, Franklin, Démosthène, saint Paul, saint Basile ; il s’est environné de ces grands hommes, comme d’une glorieuse milice d’apôtres de la liberté de penser, de publier, d’imprimer ; il les montre pamphlétaires comme lui, faisant, chacun de son temps, contre une tyrannie ou contre l’autre, ce qu’il a fait du sien, lançant de petits écrits, attirant, prêchant, enseignant le peuple, malgré les plaisanteries de la cour, le blâme des honnêtes gens, la fureur des hypocrites et les réquisitoires du parquet ; les uns allant en prison comme lui, les autres forcés d’avaler la ciguë ou mourant sous le fer de quelque ignoble soldat.

51. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre IV. — Du Style. »

Les peuples, accablés à la fois par une guerre malheureuse, par les impôts et par le besoin, sont livrés au découragement et au désespoir. […] Le second, intitulé : Un Spectacle gratis, nous montre une assemblée bruyante, il est vrai, mais où nous trouvons une peinture vraie de la joie franche du peuple. […] Servius Tullius projeta l’établissement d’une république sous le commandement de deux magistrats annuels qui seraient choisis par le peuple. […] Ce germe destructeur était la jalousie du peuple contre le sénat ou des plébéiens contre les patriciens. […] Les Gracques sentirent la cause du mal ; ils défendirent le peuple, mais ils l’accoutumèrent aux grandes agitations.

52. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Mignet. Né en 1796. » pp. 504-512

L’histoire en notre siècle L’histoire se montre chez les peuples le dernier en date des arts de l’esprit. […] Une révolution philosophique qui a rendu la raison de l’histoire plus ferme ; une révolution politique qui l’a rendue plus libre ; le progrès de certaines sciences, qui lui a donné une connaissance plus complète des faits, des temps, des lieux, des hommes, des institutions ; tant d’expériences fécondes, d’événements instructifs, accumulés pour nous en un demi-siècle, des croyances abandonnées et reprises, des sociétés détruites et refaites ; les excès des peuples, les fautes des grands hommes, les chutes des gouvernements, les prodiges de la conquête et les calamités de l’invasion ; après les plus vastes guerres la plus longue paix, et l’adoration des intérêts succédant à l’enthousiasme des idées, lui ont montré les faces diverses des choses humaines, et doivent nous faire pénétrer plus avant que nos devanciers dans tous les secrets de l’histoire. […] C’est par là, en effet, qu’elle montre les fautes suivies de leurs inévitables châtiments, les desseins longuement préparés et sagement accomplis, couronnés de succès infaillibles ; c’est par là qu’elle élève l’âme au récit des choses mémorables, qu’elle fait servir les grands hommes à en former d’autres, qu’elle communique aux générations vivantes l’expérience acquise aux dépens des générations éteintes, qu’elle expose dans ce qui arrive la part de la fortune et celle de l’homme, c’est-à-dire l’action des lois générales et les limites des volontés particulières ; en un mot, monsieur, c’est par là que, devenue, comme vous le désirez, une science avec une méhode exacte et un but moral, elle peut avoir la haute ambition d’expliquer la conduite des peuples et d’éclairer la marche du genre humain1. […] N’oublions pas que le jour où les peuples s’enferment avec imprévoyance dans le cercle étroit de leurs intérêts, et où ils aiment mieux soigner leur prospérité matérielle que leur intelligence, ils commencent à déchoir. […] L’esprit de société est le partage naturel des Français : c’est un mérite et un plaisir dont les autres peuples ont senti le besoin.

53. (1866) Cours élémentaire de rhétorique et d’éloquence (5e éd.)

Aussi, comme c’est le peuple qui fait les langues, l’élocution, qui est un mérite principalement apprécié par le peuple, a donné son nom à l’art de la parole et l’a fait appeler Éloquence. […] De l’éloquence du barreau chez les différents peuples. […] Fallait-il que, dans la Grèce, un peuple se levât pour l’arrêter ? […] Il n’y a guère de prédicateurs qui ennuient plus les peuples que ceux qui ont un débit monotone. […] Mais choisissez ; car ne faut-il pas qu’un petit nombre périsse pour sauver la masse du peuple ?

54. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Voltaire 1694-1778 » pp. 445-463

Je divise en trois points le plus simple des cas ; J’ai, vingt ans, sans l’entendre, expliqué Saint-Thomas4. » Ainsi ces charlatans, de leur art idolâtres, Attroupent un vain peuple au pied de leurs théâtres. […] Mais le peuple, animé par les Seize, barricada les rues et força les troupes royales à reculer. […] Il dit ailleurs, en parlant de Paris : Mes yeux, après trente ans, n’ont vu qu’un peuple aimable, Instruit, mais indulgent, doux, vif, sociable. […] De la société les douceurs désirées Dans vingt États puissants sont encore ignorées : On les goûte à Paris ; c’est le premier des arts ; Peuple heureux ! […] L’esprit et le sentiment les font aller au delà des forces physiques, à la différence des peuples sans passion et des bêtes de somme, qui, après un temps donné, succombent sous certaines charges.

55. (1839) Manuel pratique de rhétorique

Mais si vous ne jetez plus sur Antioche que des regards de colère, mon peuple ne sera plus mon peuple ; je ne le reverrai plus. […] — Quel peuple donna les premiers Traités de rhétorique ? […] puissance tribunitienne si amèrement regrettée, et enfin rendue aux, vœux du peuple ! […] Il fut donné à celui-ci de tromper les peuples, et de prévaloir contre les rois. […] Jamais de paix entre les deux peuples. !

56. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre II. »

Chez les peuples primitifs, le poète était musicien i il préludait sur sa lyre, il s’animait au bruit de l’harmonie, il se donnait le ton et la mesure, il chantait, il composait d’inspiration ; les paroles naissaient en même temps que la musique ; de là une concordance parfaite entre le rythme musical et le rythme poétique. […]           Peuples de la terre, chantez ! […] Lève, Jérusalem, lève ta téta altière ; Regarde tous ces rois de ta gloire étonnés ; Les rois des nations, devant toi prosternés,           De tes pieds baisent la poussière ; Les peuples à l’envi marchent à ta lumière. […] « Le peuple chante ?

57. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — De Retz. (1614-1679.) » pp. 20-28

Le parlement s’en retournait ; et il était déjà sur les degrés, quand le président de Mesmes, qui était extrêmement timide, faisant réflexion sur le péril auquel la compagnie s’allait exposer parmi le peuple, l’exhorta à remonter et à faire encore un effort sur l’esprit de la reine. […] Le parlement étant sorti du Palais-Royal, et ne disant rien au peuple de la liberté de Broussel, ne trouva d’abord qu’un morne silence au lieu des acclamations passées. […] Aussitôt que l’arrêt fut rendu, l’on expédia les lettres de cachet, l’on transmit les paroles, et le premier président montra au peuple les copies, qu’il avait mises en forme, de l’un et de l’autre : mais l’on ne voulut pas quitter les armes que l’effet ne s’en fût ensuivi4. […] Il y revint le lendemain, ou plutôt il y fut porté sur la tête des peuples avec des acclamations incroyables. […] C’est ainsi qu’on lit dans les Mémoires de La Rochefoucauld : « Le premier président et le président de Mesmes répliquèrent qu’il n’y avait plus lieu de délibérer, que c’était une nécessité absolue de fléchir sous la volonté des peuples, qui n’écoutaient plus la voix du magistrat… » 2.

58. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Fontenelle. (1657-1757). » pp. 110-119

Qui leur eût dit qu’il y avait une sorte de navigation incomparablement plus parfaite ; qu’on pouvait traverser cette étendue infinie d’eaux, de tel côté et de tel sens qu’on voulait ; qu’on s’y pouvait arrêter sans mouvement au milieu des flots émus ; qu’on était maître de la vitesse avec laquelle on allait ; qu’enfin cette mer, quelque vaste qu’elle fût, n’était point un obstacle à la communication des peuples, pourvu seulement qu’il y eût des peuples au delà : vous pouvez compter qu’ils ne l’eussent jamais cru. […] Environné et accablé dans ses audiences d’une foule de gens, du menu peuple pour la plus grande partie, peu instruits même de ce qui les amenait, vivement agités d’intérêts très-légers et souvent très-mal entendus, accoutumés à mettre à la place du discours un bruit insensé, il n’avait ni l’inattention ni le dédain qu’auraient pu s’attirer les personnes ou les matières ; il se donnait tout entier aux détails les plus vils, ennoblis à ses yeux par leur liaison nécessaire avec le bien public ; il se conformait aux façons de penser les plus basses et les plus grossières ; il parlait à chacun sa langue, quelque étrangère qu’elle lui fût ; il accommodait la raison à l’usage de ceux qui la connaissaient le moins ; il conciliait avec bonté des esprits farouches, et n’employait la décision d’autorité qu’au défaut de la conciliation. […] La cherté étant excessive dans les années 1709 et 17101, le peuple, injuste parce qu’il souffrait, s’en prenait en partie à M. d’Argenson, qui cependant tâchait par toutes sortes de voies de remédier à cette calamité. […] Il a quelquefois accommodé à ses propres dépens des procès, même considérables ; et un trait rare en fait de finances, c’est d’avoir refusé, à un renouvellement de bail, cent mille écus qui lui étaient dus par un usage établi : il les fit porter au trésor royal… Autant que par sa sévérité, ou plutôt par son apparence de sévérité, il savait se rendre redoutable au peuple dont il faut être craint, autant, par ses manières et par ses bons offices, il savait se faire aimer de ceux que la crainte ne mène pas.

59. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Montesquieu 1666-1755 » pp. 148-157

Qu’on voie dans l’histoire de Rome tant de guerres entreprises, tant de sang répandu, tant de peuples détruits, tant de grandes actions, tant de triomphes, tant de politique, de sagesse, de prudence, de constance, de courage, ce projet d’envahir tout, si bien formé, si bien soutien, si bien fini, à quoi aboutit-il ? […] Les traductions sont comme ces monnaies de cuivre qui ont bien la même valeur qu’une pièce d’or, et même sont d’un plus grand usage pour le peuple ; mais elles sont toujours faibles et d’un mauvais aloi3. […] Tibère Comme on voit un fleuve miner lentement et sans bruit les digues qu’on lui oppose, et enfin les renverser dans un moment, et couvrir les campagnes qu’elles conservaient, ainsi la puissance souveraine, sous Auguste, agit insensiblement, et renversa, sous Tibère, avec violence5 Il y avait une loi de majesté 1 contre ceux qui commettaient quelque attentat contre le peuple romain. […] Il n’y eut donc plus de liberté dans les festins, de confiance dans les parentés3, de fidélité dans les esclaves : la dissimulation et la tristesse4 du prince se communiquant partout, l’amitié fut regardée comme un écueil, l’ingénuité comme une imprudence, la vertu comme une affectation qui pouvait rappeler dans l’esprit des peuples le bonheur des temps précédents. […] L’ancienne jurisprudence avait institué un tribunal pour connaître des entreprises tentées contre le peuple romain, son empire, sa dignité.

60. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section I. Des Ouvrages en Prose. — Chapitre I. Du Discours oratoire. »

Les représentants d’un peuple sont assemblés, pour discuter les grandes affaires nationales : un orateur va parler. […] Ô puissance des Tribuns40 si désirée et quelquefois rendue au peuple romain ! Tout s’est-il évanoui, jusque-là qu’un citoyen romain, dans une des provinces du peuple romain, dans une ville de ses alliés, ait été publiquement frappé de verges par l’ordre d’un homme, que ce même peuple romain avait gratuitement honoré des haches et des faisceaux ? […] Vous avez soumis des peuples innombrables, répandus en beaucoup de pays différents, formidables par leur férocité, pourvus abondamment de tout ce qui est nécessaire pour se défendre. […] Vos conquêtes, César, se liront à la vérité dans nos annales, et dans celles de presque tous les peuples ; et la postérité la plus reculée ne se taira jamais sur vos louanges.

61. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre III. Beautés de sentiment. »

Ils ne doivent la réputation dont ils jouissent chez tous les peuples, qu’au talent des traducteurs, qui ont tous cherché, et souvent réussi à les embellir : les traductions médiocres n’ont jamais eu un moment de succès. […] Qu’on leur prête maintenant le sentiment qui animait le peuple hébreu ; qu’un poète distingué, qui fasse partie lui-même de l’exil, prenne alors la lyre, se transporte sur les rives de l’Euphrate, et ne voie plus dans les Français ses frères, que les tristes Israélites, nous pourrons avoir une idée du Super flumina Babylonis, etc. ; c’est-à-dire, de la plus belle élégie connue, du morceau le plus touchant que nous offre l’antiquité164. Les circonstances ont été ce que nous venons de dire ; voyons si le poète justifiera le reste du parallèle : Voyez le triste Hébreu, sur des rives lointaines, Lorsqu’emmené captif chez un peuple inhumain, À l’aspect de l’Euphrate il pleure le Jourdain : Ses temples, ses festins, les beaux jours de sa gloire, Reviennent tour à tour à sa triste mémoire : Et les maux de l’exil et de l’oppression Croissent au souvenir de sa chère Sion. […] 170Votre peuple est mon peuple, et votre Dieu mon Dieu. […] Le fond et les détails principaux sont restés exactement les mêmes ; les noms seuls et le lieu de la scène sont changés : c’est Lavinie et Palémon, au lieu de Ruth et de Booz ; quant au lieu de la scène, il est partout où l’on voudra, et ce vague qui prive le sujet de l’intérêt attaché aux circonstances locales, ces noms, ces personnages d’idée, qui ne tiennent à rien, qui ne se lient à aucun peuple, à aucune époque historique, rejettent nécessairement cet épisode dans la classe des morceaux qui plaisent plus à l’esprit qu’ils ne peuvent toucher le cœur.

62. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre V. De l’Éloquence politique chez les Français. »

« Son esprit (dit l’abbé Sicard) était brûlant comme le soleil qui éclaira son berceau, sa tête remplie de principes justes et sains ; homme étonnant, qui mieux que lui les eût fait triompher, si d’anciens ressentiments ne l’avaient jeté dans un parti dont il faisait la force, dont il était la gloire, et dont il était sur le point de déserter les drapeaux, quand la mort vint empêcher cette réparation solennelle à la cause qu’il avait combattue jusqu’alors avec tant de courage, de talent et de persévérance. » Cependant cet athlète si redoutable, dont la seule apparition à la tribune semblait en devoir écarter tous ceux qui n’y monteraient pas pour soutenir ou défendre ses opinions ; ce turbulent tribun du peuple, qui jouissait et abusait même insolemment de toute l’influence que donne une grande popularité, trouva un adversaire digne de son talent, dans un homme qui, célèbre jusque-là par des succès dans la chaire évangélique, et par de pacifiques triomphes d’académie, ne laissait pas soupçonner en lui le publiciste profond, l’homme d’état complètement familiarisé avec tous les ressorts et tous les secrets de l’administration. […] Jamais et chez aucun peuple, il faut l’avouer, les droits respectifs des peuples et des souverains ; jamais tout ce qui intéresse la religion, les mœurs et la politique n’avait été discuté, approfondi, avec cette éloquence des choses si supérieure à celle des mots ; avec cette logique des faits qui ne laisse lieu ni au doute, ni même à la réplique. […] Mais quelle idée se fera la postérité, de ce prodigieux Mirabeau, de ce géant politique qui pesa un moment sur la France entière, et qui l’eût peut-être écrasée du poids de son ascendant populaire, si la providence n’eût brisé tout à coup l’instrument qu’elle avait daigné employer pour donner de grandes et terribles leçons aux princes et aux peuples de la terre ?

63. (1867) Rhétorique nouvelle « Troisième partie. la rhétorique » pp. 194-

Oubliez-vous que la saine politique consiste à faire tout ce qui peut rendre un peuple heureux et puissant, sans violer la justice ? […] D’un élan de sensibilité irrésistible, il déchire la robe de son client et montre au peuple ses blessures. […] Qui a privé des suffrages la majeure partie du peuple ? […] Il en est de même des fleurs de la rhétorique, avec cette différence que le peuple a oublié de les baptiser. […] Il n’y a pas de langues plus riches en figures que celles des peuples primitifs et ignorants.

64. (1882) Morceaux choisis de prosateurs et de poètes des xviii e et xix e siècles à l’usage de la classe de rhétorique

Elle avait proclamé le droit des peuples supérieur à celui des rois. […] Le peuple leur compte tout ; leur rang donne du prix à tout. […] Il fait construire ce beau pont où les peuples regardent aujourd’hui sa statue avec tendresse. […] On dirait de celui-ci qu’il commence par créer le pays, et qu’il a des hommes, des femmes, des enfants en réserve, dont il peuple sa toile comme on peuple une colonie ; puis il leur fait le temps, le ciel, la saison, le bonheur, le malheur qu’il lui plaît. […] Mais choisissez : car ne faut-il pas qu’un petit nombre périsse pour sauver la masse du peuple ?

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