Il n’y a pas dans la nature, telle qu’il la sent, d’objets inanimés ; tout a vie, il le sait. […] Sur le tombeau d’un petit enfant Nature d’où tout sort, nature où tout retombe, Feuilles, nids, doux rameaux que l’air n’ose effleurer, Ne faites pas de bruit autour de cette tombe ; Laissez l’enfant dormir et la mère pleurer4 ! […] Nature au front serein, comme vous oubliez ! […] Il est comme instinctif, ce contraste entre nos douleurs et l’impassibilité de la nature ! […] Philtre mystérieux des dons de la nature ; Alambic distillant l’herbe et les fleurs pour nous ; Mamelle appétissante où boit la soif de tous ; Flanc fécond qui, donnant à la ferme ravie Ou la crème ou le lait, nous prodigue sa vie ; La vache, ô doux enfants, qui lui refuserait Un regard, un sourire, et qui ne l’aimerait ?
Horace a prouvé, par le meurtre de sa sœur, que l’amour de la patrie triomphe des sentiments de la nature, mais périra-t-il lui-même ? […] En portant cette loi, les anciens n’ont été que les interprètes de la nature. […] Vous avez été leurs mères selon la grâce, depuis que leurs mères selon la nature les ont abandonnés. […] Elle donne enfin les lois qui règlent toute conclusion et en déterminent la nature d’après celle de l’ouvrage entier. […] La nature du drame ne comporte point l’action du hasard, ou, pour parler autrement, l’Intervention immédiate de la Providence.
Remarquez bien qu’Aristote, qui n’était pas un pédant, savait que l’art oratoire, comme tous les autres arts, n’est qu’une imitation de la nature, et qu’en écrivant sa Rhétorique, il voulait seulement généraliser ses observations sur l’éloquence, et n’avait pas la prétention d’en tracer les règles. […] Vivre pour l’art, c’est renaître, c’est se renouveler comme la nature, qui, sans cesse, renouvelle ses aspects. Si je travaille d’après vous, je travaille d’après les règles, et non d’après la nature. […] L’éloquence est un don fort commun que la nature accorde aux hommes comme le chant aux oiseaux, l’adresse aux singes et la vivacité aux écureuils. […] Il n’y a pas d’exorde modeste et insinuant ; il y a des exordes appropriés aux circonstances, à la nature du procès, au caractère de l’auditoire.
Ce n’est pas que la justesse en soit inattaquable ; bien au contraire : on a dit avec raison que cet auteur calomniait souvent la nature humaine. […] Ce qui fait que la plupart des petits enfants plaisent, c’est qu’ils sont encore renfermés dans cet air et dans ces manières que la nature leur a donnés, et qu’ils n’en connaissent point d’autres2. […] Je ne prétends pas, par ce que je dis, nous renfermer tellement en nous-mêmes, que nous n’ayons pas la liberté de suivre des exemples et de joindre à nous des qualités utiles ou nécessaires que la nature ne nous a pas données. […] Les passions sont les seuls orateurs qui persuadent toujours : elles sont comme un art de la nature, dont les règles sont infaillibles ; et l’homme le plus simple, qui a de la passion, persuade mieux que le plus éloquent qui n’en a point.
Ce genre n’a donc pas de bornes déterminées ; il peut comprendre tous les traités, réguliers ou non, sur la philosophie, sur la morale, sur les arts et les sciences ; tous les livres de théorie, les études et les descriptions de la nature, les livres d’éducation, etc. […] La Bruyère, dans ses Caractères, n’écrit pas comme Buffon ou comme Bernardin de Saint-Pierre dans leurs études de la nature ; Aristote ne ressemble pas à Platon. […] Fontenelle, dans ses ouvrages scientifiques, nous montre souvent mal à propos le bel esprit ; mais on aime à voir Buffon orner de brillantes couleurs ses descriptions de la nature ; Chateaubriand, dans le Génie du Christianisme, animer de sa puissante imagination les preuves qu’il donne au sentiment religieux ; et Platon faire circuler dans ses dialogues philosophiques le souffle inspiré de la poésie35.
On voit qu’ils sont tirés de la nature même, ou, comme disaient les anciens, des entrailles du sujet (ex visceribus rei). […] Et ne croyez pas que ce fût sur des matières que Dieu semble avoir livrées à la dispute des hommes, c’était sur la nature de Dieu même, sur son existence, sur l’immortalité de l’âme, sur la véritable félicité. […] Autant de siècles, autant de nouvelles extravagances sur l’immortalité et la nature de l’âme : ici, c’était un assemblage d’atomes ; là, un feu subtil ; ailleurs, un air délié ; dans une autre école, une portion de la Divinité. […] Quelques-uns la faisaient passer d’un corps à un autre corps, de l’homme au cheval, de la condition d’une nature raisonnable à celle des animaux sans raison. […] L’avocat qui demande établit d’abord la question, ou constate le fait selon la nature de la cause.
Elle a chanté chez les anciens avec Hésiode et Lucrèce les phénomènes de la nature ; avec Virgile, le travail et la vie des champs. […] Tout le monde sait bien que la nature fait l’un, inspire les autres ; sans cela, l’orateur ne serait qu’un comédien. […] Une pareille haine ne serait pas un défaut, mais une dépravation de la nature et le plus grand de tous les vices. […] La poésie, l’histoire et la philosophie ont toutes le même objet, et un très-grand objet : l’homme et la nature. […] C’est à la science seulement qu’il appartient de décrire la nature tout entière, dans sa laideur comme dans sa beauté.
Tout ce monde visible n’est qu’un trait imperceptible dans l’ample sein de la nature. […] Car, enfin, qu’est-ce que l’homme dans la nature ? […] Car ce qui est nature aux animaux, nous l’appelons misère en l’homme, par où nous reconnaissons que, sa nature étant aujourd’hui pareille à celle des animaux, il est déchu d’une meilleure nature qui lui était propre autrefois111. […] Notre chair change bientôt de nature. […] Pourquoi les ouvrages de la nature sont-ils si parfaits ?
La grâce a donc un caractère plus instinctif, plus naïf que l’élégance, l’élégance s’apprend mieux que la grâce ; celle-ci provient plutôt de la nature, l’autre de l’art ; au physique, on dira un costume élégant, et une tournure gracieuse ; les enfants en général sont gracieux, ils cessent de l’être quand ils deviennent élégants. […] Le seul précepte à donner, quand il est absolument nécessaire de reproduire la naïveté, c’est que l’auteur étudie alors son personnage au point de faire, plus que partout ailleurs, abstraction de sa propre nature, pour s’identifier complétement avec lui. […] L’excellent dans la plaisanterie ne peut guère avoir lieu sans une observation assidue, sans des réflexions intenses et qui supposent une nature sérieuse et méditative. […] Sans prétendre donc, avec Victor Hugo, que le grotesque et le grave, marchant si souvent de front dans la nature, doivent être aussi mêlés et confondus dans l’art, nous pouvons dire qu’il est peu de sujets et peu de génies qui ne se prêtent à l’enjouement du style, que la langue de la plaisanterie forme presque la moitié de la langue populaire, qu’il faut done l’étudier soigneusement, et que si en effet le style enjoué demande plus de naturel encore que le sérieux, cette étude bien dirigée ne servira qu’à perfectionner la nature. […] C’est dans l’enjouement, en effet, qu’il est difficile de savoir s’arrêter ; le rire est si bonne chose de sa nature, qu’il semble à plusieurs que tous les moyens sont bons pour le provoquer.
. — lieux applicables aux parties du sujet On conçoit quel parti l’on peut tirer, pour le développement de l’idée, de l’examen de sa nature ou de la définition ; de l’examen du signe qui la représente ou de l’étymologie ; de l’examen des éléments qui la composent ou de l’analyse. […] N’est-ce pas là, en effet, comme agissent Aristote, par exemple, quand il dit, à propos des contraires : « si l’on vous allègue les lois, appelez-en à la nature, et si l’on fait parler la nature, rangez-vous du côté des lois ; » et Quintilien, quand il développe la théorie et les règles du mensonge oratoire, qu’il appelle, par euphémisme, une couleur, colorent ? […] Décrirez-vous les merveilles de la nature, l’ordre éternellement nouveau de l’univers, sans chercher à remonter aux causes contingentes et à la cause première de ces prodiges si réguliers ? […] Bernardin de Saint-Pierre, dans les Études de la nature, cherche-t-il à prouver que le sentiment de la Divinité est nécessaire à l’homme ?
C’est la nature même parlant naïvement selon le caractère, la passion, la condition. […] On sait les exploits qui signalèrent en lui, dès l’abord, un de ces élus qui font miracle par un don de nature. […] il t’a établi pour t’en servir ; il a mis, pour ainsi dire, en tes mains toute la nature, pour l’appliquer à tes usages ; il t’a même permis de l’orner, et de l’embellir par ton art ; car qu’est-ce autre chose que l’art, sinon l’embellissement de la nature ? […] O justesse dans la vie, ô égalité dans les mœurs, ô mesure dans les passions, riches et véritables ornements de la nature raisonnable, quand est-ce que nous apprendrons à vous estimer ? […] La nature ne manque pas de faire naître dans tous les pays des esprits et des courages élevés ; mais il faut aider à les former.
Ils veulent que pour eux tout soit, dans la nature, Obligé de s’immoler6. […] Il y a toujours en lui un observateur et un peintre de la nature humaine. […] Nous avons d’abord le nôtre, qui est celui que nous recevons de la nature, celui qui nous sert à raisonner, suivant le degré qu’il a, qui devient ce qu’il peut, et qui ne sait rien qu’avec le temps. […] La science, de sa nature, aime à paraître ; car nous sommes tous orgueilleux. […] Ce n’est pas le tableau de la nature, c’est la nature même ; elle est là, sous vos yeux, dans sa vivante réalité et sa libre allure.
Trop souvent, dans leur passion de l’antique, ils préfèrent l’imitation des anciens à l’imitation directe de la nature. […] Ils oublient que si la vraie poésie consiste dans l’imitation d’une nature choisie, il ne faut pas trop restreindre le champ de cette belle nature. […] Véritable amant de la nature, de la pure et simple nature, il aspire, comme Virgile, au bonheur de passer sa vie dans une champêtre et douce solitude. […] Plusieurs de ces poètes de salon ou de boudoir affectent de chanter la nature, mais c’est pour la défigurer en prétendant l’embellir. […] La Harpe y a relevé une quantité étonnante de fautes de toute nature.
La nature a son ironie : Le livre échappa de ma main. […] Partout où l’amitié consacre un cœur aimant, Partout où la nature allume un sentiment, Dieu n’éteindra pas plus sa divine étincelle Dans l’étoile des nuits dont la splendeur ruisselle, Que dans l’humble regard de ce tendre épagneul, Qui conduisait l’aveugle et meurt sur son cercueil !!! […] La poésie et les beaux-arts servent à développer dans l’homme ce bonheur d’illustre origine qui relève les cœurs abattus, et met à la place de l’inquiète satiété de la vie le sentiment habituel de l’harmonie divine dont nous et la nature faisons partie. […] L’éloquence de ce tableau est dans le contraste entre la folie des fureurs humaines et l’impassible sérénité de la nature. […] C’est peint d’après nature.
Précepte fondé en raison, car il rentre parfaitement dans le principe formulé plus haut : Toute règle est l’expression d’un besoin de notre nature. […] L’harmonie générale dépend soit de la nature individuelle des sons, c’est ce qu’on nomme euphonie, soit de leur alliance et de leur succession, d’où naît le rhythme. […] La nature des divers peuples est modifiée par une foule de circonstances. L’idiome contracte des habitudes, résultat de ces circonstances et de la nature, et l’ensemble de ces habitudes forme ce qu’on appelle le génie de la langue. […] Quelle fut en Grèce la conséquence de cette heureuse nature de langage, à laquelle contribuaient d’ailleurs le climat, l’éducation, le libre essor de la vie extérieure et l’instinct général de l’art ?
« Il y en a, dit Pascal, qui masquent toute la nature. […] Sans doute, vous vous rappelez bien des périphrases pour rendre ces mots : il fait nuit ; comparez-les ensemble, et, si elles appartiennent à de vrais écrivains, vous remarquerez comment elles se modifient d’après l’analogie des idées, d’après la nature des sentiments, et enfin d’après le caractère des ouvrages ; car ce sont là les trois influences auxquelles doit obéir la périphrase. […] Que l’ensemble de la métaphore soit répréhensible, je l’accorde, mais Voltaire, loin de voir une périssologie dans le second vers, y eût trouvé une opposition énergique, s’il en eût rapproché celui qui précède : Et quand il forcera la nature à se taire. « Mon père, dit Nieomède, pourra faire taire la nature dans son cœur, mais mes conquêtes parleront, elles parleront toujours, sans cesse ; quelque chose qui arrive, celles-là du moins ne se tairont pas. » Je ne vois là qu’un pléonasme de bon aloi. […] Un père veut dire qu’il pleure sa fille morte, tandis que, selon les lois de la nature, c’est elle qui devrait le pleurer : Sur mon tombeau ma fille devrait faire Ce que je fais maintenant sur le sien.
L’ordre est une condition essentielle de la beauté : la nature nous en offre le modèle et l’exemple ; les anciens étaient tellement frappés de cette vérité, qu’ils ont donné à l’univers le nom de Cosmos, qui signifie ordre. Les arts, qui imitent la nature, doivent aspirer comme elle à l’ordre, à l’harmonie. […] Le ton de l’exorde dépend de la nature du sujet, et de la position de l’orateur à l’égard de l’auditoire. […] « Messieurs, dans un procès de cette nature, la moralité des accusés devant nécessairement influer sur la décision des juges, il conviendrait de rappeler ici les heureuses qualités dont la nature a doué la moitié la plus intéressante de nos clients ; mais si je disais tout ce que valent les chiens, nous aurions trop à rougir6. […] Le malheureux est pestiféré : tout s’éloigne de lui, tout le fuit avec une sorte d’horreur ; son chien est le seul être qui, dans la nature entière, se montre sensible à sa misère, l’en console par ses caresses, et l’adoucisse en la partageant.
Il a fait la part de tous avec une libéralité d’invention qui rappelle l’inépuisable vertu des forces créatrices dont le mystère se cache au sein de la nature. […] C’est la nature même parlant naïvement, selon le caractère, la passion, la condition. […] La philosophie est un présent du ciel ; elle nous a été donnée pour porter nos esprits à la connaissance d’un Dieu par la contemplation des merveilles de la nature ; et pourtant on n’ignore pas que souvent on l’a détournée de son emploi, et qu’on l’a occupée publiquement à soutenir l’impiété. […] Je doute qu’une si grande perfection soit dans les forces de la nature humaine ; et je ne sais s’il n’est pas mieux de travailler à rectifier et adoucir les passions des hommes, que de vouloir les retrancher entièrement. […] Apprenez enfin qu’un gentilhomme qui vit mal est un monstre dans la nature ; que la vertu est le premier titre de noblesse ; que je regarde bien moins au nom qu’on signe qu’aux actions qu’on fait ; et que je ferais plus d’état du fils d’un crocheteur qui serait honnête homme, que du fils d’un monarque qui vivrait comme vous1.