Mais il a un agrément particulier dans les phrases suivantes et autres semblables : Adversis ventis usi sumus. […] La phrase a une grâce particulière quand il y a un rapport de supériorité entre les deux membres. […] Elle a lieu surtout dans une phrase où il y a une proposition conditionnelle. […] Attamen, verumtamen, qui affirment avec plus de force, se mettent au commencement de la phrase. […] Mais dans cette autre phrase : Hœc si tecum patria loquatur, nonne impetrare debeat ?
Des phrases. […] Telle est cette phrase d’un grand poète qu’on trouve rarement en défaut. […] À chaque page, à chaque phrase même, ils savent varier leurs couleurs. […] Le choix et l’arrangement des mots produisent tout naturellement l’harmonie des phrases, puisqu’une phrase n’est qu’une réunion de mots formant un sens complet. […] Au contraire, supprimez une incise, la phrase aura encore un sens véritable.
Le pléonasme, dans le langage ordinaire, consiste à ajouter à la phrase des mots qui lui sont ou qui lui semblent inutiles. […] Car la première idée que porte à l’esprit la construction grammaticale de la phrase, c’est que le crime ne fait pas l’échafaud, comme on dit : le peintre fait le tableau et non pas la statue, tandis que l’auteur a voulu dire que l’échafaud ne fait pas la honte. […] M. de Balzac a écrit, dans un de ses premiers romans où il gardait l’anonyme, cette phrase incroyable : « Monsieur, répondit Charles Servigné, c’est moi qui interroge et ne le suis jamais. » Ne sous-entendez jamais dans le second membre de la phrase un mot qui n’a pas été littéralement exprimé dans le premier, ou ne le remplacez point par un pronom qui ne peut le représenter régulièrement113. Quelques-uns joignent à l’ellipse la figure que l’on remarque dans les phrases latines suivantes : … hie illius arma, Hic currus fuit. […] J’aimerais mieux appeler anacoluthes ces phrases où l’absence de certains mots change la construction sans la blesser, sert à varier la marche d’une période, et à donner de la grâce au style.
On remarquera que dans cette page, il n’y a ni expression ni phrase inutile : chaque pensée est exprimée avec assez de développement pour être facilement comprise. […] En le lisant on portera son attention sur l’étendue des phrases et des périodes qui le composent. […] L’harmonie résulte de l’arrangement, de la combinaison des mots et des phrases, des périodes et des membres ; qui les composent. […] 4° Éviter de finir les phrases par des monosyllabes, des sons secs et durs. […] 5° Finir chaque phrase ou chaque membre de phrase d’une manière flatteuse pour l’oreille.
Quelquefois une phrase suffira, si elle vaut seule un long discours. […] je suis content de vous : cette première phrase exprime la pensée de toute la proclamation. […] Merci se sauve dans les montagnes, on s’empare de ses munitions, et on le voit à la fin de la phrase franchir le Rhin en fugitif. […] La narration s’arrête, la transition est brusque, la phrase se meurt lentement, devient courte et hérissée de noms propres. […] Dans celle-ci la phrase marche libre de toute mesure et n’est assujétie qu’à l’ordre général du style.
Ces deux qualités se retrouvent jusque dans la contexture de la phrase ample et abondante, où circule un souffle puissant qui en anime, en ordonne, en soutient toutes les parties. […] Si sa phrase n’a pas l’ampleur, la plénitude, l’éclat et la force de la phrase du xviie siècle, elle ne manque pas encore, ou plutôt elle ne manque jamais d’une suffisante solidité. […] Plus de ces périodes puissantes aux membres nombreux bien joints ensemble et formant un corps sain et robuste : des phrases courtes, sans nerfs et sans muscles, incapables de porter des pensées de quelque poids. […] On avait bien porté l’analyse dans la mâle synthèse de la phrase française, qu’on l’avait toute décomposée et mise en poussière : Rousseau rétablit la période aux formes larges et opulentes. Les divers membres de chaque phrase et les phrases elles-mêmes se succédaient presque sans lien marqué : Rousseau les soumet à un enchaînement sévère qu’il rend sensible, faisant du discours l’image du raisonnement, et rappelant le style à une logique vivante.
. — Il ne faut pas se servir du pronom son, sa, ses, leur, leurs, mis pour un nom de chose, à moins que ce nom ne soit exprimé dans la même phrase. […] On emploie bien son, sa, ses, etc., pour un nom de chose, quand il est exprimé dans la même phrase. […] (Dans ces deux phrases que n’est pas relatif, mais conjonction.) […] Mais on écrira sans s deux cent dix hommes, quatre-vingt-cinq volumes, parce que dans ses phrases cent et vingt sont suivis d’un autre adjectif numéral. […] Cependant, quoique le nom de chose ne soit pas dans la même phrase, on se sert bien de son, sa, ses, quand il est régi par une préposition, comme : Paris est beau ; j’admire la grandeur de ses bâtiments.
. ; les mots ou les phrases dont elles se composent ont une forme ou figure qui leur est propre, toujours la même et ne se confondant pas avec d’autres. […] Remarquons d’abord qu’il est un assez grand nombre de figures dont il suffit de connaître la nomenclature, dont il ne reste plus rien à dire dès qu’on en a exposé la définition et l’étymologie, parce qu’elles ne comportent que certaines phrases stéréotypées, en quelque sorte, par l’usage, des espèces d’idiotismes dont il n’est pas permis de s’écarter ; parce que, en un mot, elles ne sont, comme je l’expliquerai plus tard, que des catachrèses. […] Réveiller une idée principale au moyen d’idées accessoires, déguiser des pensées tristes, pénibles, inconvenantes même, mais indispensables au sujet, enrichir la langue par des alliances de mots inattendues, donner au style, soit par le piquant des rapprochements et des oppositions, soit par le tour et le mouvement de la phrase, plus de clarté, d’énergie, d’élégance, de vivacité, de noblesse, de nouveauté, d’intérêt : voilà des mérites que nous leur reconnaissons avec tous les critiques. […] Ensuite, la seconde classe des figures de mots, où la construction seule est modifiée, devrait comprendre l’apostrophe, l’exclamation et autres formes que l’on a mal à propos rangées parmi les figures de pensée, puisque l’idée n’y est pas plus affectée que le mot, et que tout leur artifice ne consiste que dans le tour ou le mouvement donné à la phrase. […] Fontanier, divise toutes les figures en sept classes : 1° figures de diction ; 2° de construction : elles correspondent à la classification habituelle ; 3° figures d’élocution ; 4° de style : subdivisions des figures ordinaires de mots proprement dites, les premières n’affectant que quelques mots ou parties de phrase, les secondes, embrassant l’énonciation totale de la pensée ; 5° figures de signification ; 6° d’expression ; ce sont les tropes : les premières s’appliquent à un seul mot, les secondes à une proposition ; enfin, figures de pensées, absolument indépendantes des mots, les mêmes que chez les autres théteurs.
De la phrase. — 2. […] De la phrase. […] Des tours de phrase. […] Des tours de phrase. — 2. […] Des tours de phrase.
Des phrases. La phrase consiste en une ou plusieurs propositions formant un sens complet. La manière d’exprimer ses idées et de tourner les phrases s’appelle diction, élocution ou style : nous en reparlons plus loin en détail.
Il faut aussi que le langage soit beau, et que, par le choix des mots, la délicatesse des expressions, la structure de la phrase, il revête ces formes gracieuses, ces tournures élégantes qui donnent de la noblesse au style et caractérisent le véritable écrivain. […] Or, le moyen le plus simple, le plus naturel, nous disons même le moyen unique pour atteindre ce but, est de se familiariser avec les auteurs qui ont le mieux écrit en cette langue, de bien saisir le caractère propre et les formes diverses de leur style, de concevoir une idée exacte de la propriété des mots, de leur élégance, de leur disposition dans la phrase, de l’harmonie des périodes… Nous conseillons aux jeunes élèves de porter principalement leur attention sur les passages les plus saillants des modèles qu’ils auront sous les yeux, et d’en faire l’objet d’une étude toute spéciale. […] Ce serait aussi une méthode bien profitable, de composer des thèmes d’imitation sur le texte d’une version déjà expliquée et apprise de mémoire, et d’obliger les élèves à se servir des mêmes expressions et à suivre le même ordre, le même enchaînement dans la structure de la phrase.
Cicéron veut, donc que le jeune orateur donne à ses phrases un tour harmonieux : fiat quasi structura quædam ; mais il ne veut pas que le travail et la recherche s’y laissent apercevoir : nec tamen fiat operosè , parce que ce serait un travail aussi frivole qu’immense : nàm esset, quùm infinitus, tùm puerilis labor 17. […] La pensée la plus juste ou la plus agréable la blesse, si l’harmonie de la phrase ne la charme pas. […] Ce que sont les couleurs dans un tableau, les lignes tracées dans un parterre, les sons dans la musique ; les pensées, les mots et le tour de la phrase le sont dans le discours. […] Qui pourrait d’ailleurs supporter la lecture ou le débit d’un discours où toutes les phrases seraient également cadencées, symétrisées avec le même soin, dont toutes les chutes seraient ménagées avec le même art, et tomberaient avec la même harmonie ?
La gravité du style, à mesure que le sujet s’élève et s’agrandit, peut arriver à la noblesse, à la richesse, à la magnificence : la noblesse, qui n’emploie que les termes les plus généraux et les tournures les plus polies et les plus dignes ; la richesse, qui y ajoute l’éclat des images, l’abondance des ornements, le nombre de la phrase, ou qui encore renferme sous peu de mots des idées fécondes ; la magnificence, qui est la grandeur dans la richesse. […] On peut dire aussi qu’il y a richesse toutes les fois qu’une phrase, un mot même réveille plusieurs idées profondes, découvre un vaste tableau, ou fait saisir à l’instant des rapports qui semblaient ne devoir se révéler qu’à la réflexion ou à une lecture longue et variée. […] J’appellerai également riches ou fécondes ces phrases de Florus que loue Montesquieu : Florus nous représente en peu de paroles toutes les fautes d’Annibal : « Lorsqu’il pouvait, dit-il, se servir de la victoire, il aima mieux en jouir ; quum victoria posset uti, frui maluit. » Il nous donne une idée de toute la guerre de Macédoine, quand il dit : « Ce fut vaincre que d’y entrer ; introisse victoria fuit. » Il nous donne tout le spectacle de la vie de Scipion, quand il dit de sa jeunesse : « C’est le Scipion qui croît pour la destruction de l’Afrique ; hic crit Scipio qui in exitium Africæ crescit. » Vous croyez voir un enfant qui croit et s’élève comme un géant. […] La véhémence dépend moins de la force de l’expression que de la vivacité et de la variété du tour et du mouvement de la phrase. […] Le premier point à remarquer dans tous ces morceaux, c’est que la véhémence était dans le fond avant d’être dans la forme : rien de plus ridicule que de s’échauffer à froid ; le second, c’est la forme elle-même, les brusques mouvements de phrase, les constructions brisées, les accumulations, les suspensions, les interruptions fréquentes, fidèle image du désordre de l’orateur ou du personnage mis en scène.
Traducteur incomparable, original dans sa sujétion, tout ensemble hardi et retenu, maître et disciple, capable de se risquer au-delà de frontières trop étroites, ou de s’arrêter à temps, lorsque l’usage résiste à la nouveauté, il sut dérober à Plutarque sa finesse, son aisance, son agilité, ses nuances, sa phrase ondoyante, ou plutôt il le métamorphosa par cette bonhomie naïve qui semble parler en son nom lorsqu’elle interprète, et donne un air d’abandon aux servitudes d’un docte labeur. […] Car la phrase « ainsi troussée » semblait courir, comme Perrette, dans la fable du Pot au lait : « Légère et court vêtue, elle allait à grands pas, Ayant mis ce jour-là, pour être plus agile, Cotillon simple et souliers plats. » Ajoutons que cette élimination du sujet pronominal devenait une règle absolue dans les propositions négatives : Ne sçay quoy faire… Je meurs, si secouru ne suis de toy. » (Marot.) […] Car ils présentaient l’idée abstraite comme personne agissante ou objet animé ; et d’ailleurs les mots glissaient plus doucement quand ils étaient affranchis des ces le, la, les dont nos phrases sont maintenant comme saupoudrées. […] — Les substantifs et les adjectifs ne nous dépaysent pas moins, soit que les uns se forment du verbe, comme le plonge (de plonger), le réclame (de réclamer) ; soit que les autres aient force adverbiale, comme cher, haut, premier, pour chèrement, hautement, premièrement, et, dans ce cas, gardent les formes variables d’un adjectif, comme dans cette phrase : « Des choses pures humaines. » Mais finissons-en avec des remarques dont il est prudent de n’user qu’avec discrétion, si l’on ne veut pas impatienter des lecteurs aux-quels ne convient guère la sécheresse de ces études. […] Elle a de plus en plus dégagé la phrase des obstacles qui la compliquaient.
Elle réclame un grand discernement dans le choix, une grande variété dans les tours de phrases, dans l’exposition sommaire. […] Il importe donc de savoir se borner, comme il importe aussi de savoir couper une phrase trop longue et d’en faire deux ou plusieurs d’une convenable mesure. […] Enfin, cet arrangement dépend non seulement de la manière d’assortir les mots ensemble pour former les phrases, mais encore d’assortir les phrases pour former les périodes et les périodes pour former le discours. […] Aussi les tours de phrase, les expressions qu’ils emploient, en portent-ils toujours le cachet. […] Ajoutez-y le soin de ne pas commencer la phrase qui suit sur le même ton qu’on a fini celle qui précède.
Cette dernière partie comprend : 1° Les qualités générales et les défauts de la phrase ; 2° L’harmonie et ses quatre espèces, qui sont : l’harmonie des mots, des phrases, imitative et des périodes ; 3° Le choix des pensées ; 4° Les rapports des pensées entre elles, qui sont : l’Unité, la Transition et la Gradation ; 5° Les figures de grammaire ou Tropes ; 6° Les figures en général ; 7° Les qualités particulières du style, qui caractérisent le style simple, le tempéré et le sublime.
Mais que résulte-t-il, que reste-t-il de ce pompeux étalage de mots, de cet entassement de phrases vides de sens ? […] Quand il dit, par exemple, que les grands hommes pèsent sur l’univers et l’univers sur eux, cette idée, à force de vouloir être grande, peut n’être pas très claire, et, présentant plusieurs sens, ne vous arrête sur aucun ; choisissant de préférence le terme abstrait, il donne trop souvent à ses phrases une forme métaphysique qui peut fatiguer l’attention du lecteur, d’autant plus que les idées sont accumulées ; il place quelquefois des tournures et des expressions familières qui, entourées de phrases du ton le plus noble, ont un air étranger à sa diction, etc. ».