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70. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre III. — Ornements du Style, qui consistent dans les Mots ou Figures »

Grâce aux dieux mon malheur passe mon espérance ! […] Cette hyperbole est un peu outrée pour dire que la beauté passe rapidement. […] On se console pourtant, parce que de temps en temps on rencontre des objets qui vous divertissent, des eaux courantes, des fleurs qui passent : on voudrait s’arrêter… Marche, marche. Et cependant on voit tomber derrière soi tout ce qu’on avait passé : fracas effroyable ! […] Madame cependant a passé du matin au soir, ainsi que l’herbe des champs ; le matin, elle fleurissait, avec quelles grâces !

71. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre IX. De quelques autres figures qui appartiennent plus particulièrement à l’éloquence oratoire. »

Et si tout ce qui passe par tant de canaux, s’altère d’ordinaire, et ne revient jamais à nous comme il a été dit dans sa source ; pourquoi voudriez-vous que les discours qui vous regardent vous seul, fussent exempts de cette destinée, et méritassent plus d’attention et de silence » ? […] Restes d’Israël, passez à la droite ; froment de Jésus-Christ, démêlez-vous de cette paille destinée au feu : ô Dieu ! […] S’il y a eu quelque dérangement dans les premières années de ce prince, l’âge y eut plus de part que le cœur : l’occasion put le trouver faible ; elle ne le rendit jamais vicieux ; et le reste de ses jours, passés depuis dans la règle, montrent assez que l’égarement n’avait été qu’un oubli, et qu’en se rendant au devoir, il s’était rendu à lui-même ». La prétermission feint de passer sous silence ce que l’orateur dit néanmoins très clairement, ou de ne faire qu’effleurer les choses qu’il se propose d’inculquer avec le plus de force. […] Il n’est d’ailleurs guère de figures, parmi celles que je passe sous silence, qui ne rentrent plus ou moins dans celles que je viens d’analyser ; cette liste, qui peut s’étendre ou se resserrer, au gré de chaque rhéteur, me paraît avoir ici l’étendue convenable.

72. (1883) Morceaux choisis des classiques français (prose et vers). Classe de troisième (nouvelle édition) p. 

  Tous ces jours passeront ; ils passeront en foule Sur la face des mers, sur la face des monts, Sur les fleuves d’argent, sur les forêts où roule Comme un hymne confus des morts que nous aimons. […] N’ayant que l’embuscade pour tout moyen d’industrie, il passe des heures, des jours entiers à la même place, immobile, au point de laisser douter si c’est un être animé. […] Il n’est pas nécessaire que ces gens-là soient tous d’un mérite accompli ; il suffit de lier commerce extérieur avec ceux qui passent pour les plus honnêtes gens. […] — Mais j’ai des biens en foule, et je puis m’en passer. […] Et vous, Nymphes des eaux, filles de Jupiter, Autant qu’aux jours passés votre asile m’est cher.

73. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section troisième. La Tribune sacrée. — Chapitre VI. Massillon. »

C’est avec un pareil langage que l’on touche, que l’on pénètre les cœurs les plus indifférents, et que l’on porte la persuasion dans les moins disposés à se laisser persuader ; parce qu’avec un léger retour sur soi-même, il est impossible qu’on ne trouve passa conscience d’accord avec l’orateur, et que l’on ne se rende pas à sa voix. […] Les raisonnements de cette espèce de philosophie sont en conséquence de ses principes : cela est naturel ; et en voici la preuve : « On ne sait (dit le philosophe) ce qui se passe dans cet autre monde dont on nous parle. […] Les hommes se le sont persuadés eux-mêmes, ou plutôt la nature le leur a appris sans le secours des maîtres ; et seul, depuis le commencement des choses, il a passé des pères aux enfants, et s’est toujours maintenu sur la terre. […] Craignez cet avenir que vous vous efforcez de ne pas croire : ne nous demandez plus ce qui se passe dans cette autre vie dont on vous parle ; mais demandez-vous sans cesse à vous-même ce que vous faites dans celle-ci : calmez votre conscience par l’innocence de vos mœurs, et non par l’impiété de vos sentiments : mettez votre cœur en repos, en y appelant Dieu, et non pas en doutant s’il vous regarde. […] Voyez ce tableau du pécheur mourant : « Alors le pécheur mourant ne trouvant plus dans le souvenir du passé que des regrets qui l’accablent ; dans tout ce qui se passe à ses yeux, que des images qui l’affligent ; dans la pensée de l’avenir, que des horreurs qui l’épouvantent : ne sachant plus à quoi avoir recours, ni aux créatures qui lui échappent, ni au monde qui s’évanouit, ni aux hommes qui ne sauraient le délivrer de la mort, ni au Dieu juste qu’il regarde comme un ennemi déclaré, dont il ne doit plus attendre d’indulgence, il se roule dans ses propres horreurs ; il se tourmente, il s’agite pour fuir la mort qui le saisit, ou du moins pour se fuir lui-même.

74. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre IX. Poésies fugitives. »

Quant à son temps, bien sut le dispenser : Deux parts en fit, dont il soulait74 passer L’une à dormir et l’autre à ne rien faire. […] Les meilleurs épigrammatistes latins sont Catulle, né à Vérone l’an 86 avant Jésus-Christ, et Martial, né en Espagne vers le milieu du premier siècle de l’ère chrétienne, qui passa la plus grande partie de sa vie à Rome. […] Thémire est une fleur nouvelle Qui subira la même loi ; Rose, tu dois briller comme elle : Elle doit passer comme toi. […] Mais qu’on ne passe point les bornes d’une critique fine et d’une raillerie délicate. […] Voici quelques couplets d’un vaudeville de Panard, qui peut passer pour un modèle : Que ducs et pairs, seigneurs et magistrats,     Trouvent souvent sur leur passage     Des gens qui leur rendent hommage,         Cela ne me surprend pas.

75. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Alfred de Musset 1810-1857 » pp. 564-575

Le passé. — L’avenir Du temps que j’étais écolier, Je restais un soir à veiller Dans notre salle solitaire. […] a la malibran 3 fragments Sans doute il est trop tard pour parler encor d’elle ; Depuis qu’elle n’est plus, quinze jours sont passés, Et dans ce pays-ci quinze jours, je le sais, Font d’une mort récente une vieille nouvelle. […] Venez, rhéteurs païens, maîtres de la science, Chrétiens des temps passés et rêveurs d’aujourd’hui1, Croyez-moi, la prière est un cri d’espérance ! […] Et pourtant elle est éternelle, Et ceux qui se sont passés d’elle Ici-bas ont tout ignoré1. […] Passer comme un troupeau les yeux fixés à terre, Et renier le reste, est-ce donc être heureux ?

76. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Balzac, 1596-1655 » pp. 2-10

Balzac 1596-1655 [Notice] Né à Angoulême, Jean-Louis Guez de Balzac, membre de l’Académie française, passa presque toute sa vie sur les bords de la Charente, au fond de son château, dans un isolement égoïste et superbe, qui, loin de nuire à sa renommée, donnait à ses écrits l’autorité d’oracles impatiemment attendus. […] Si elle prend courage, et si elle se déborde quelquefois, ses efforts et ses torrents ne font que passer. […] Nous ne devons pas nous jouer de la raison, ni faire passer pour plaisante4 celle à qui nous avons l’obligation d’être sérieux. […] Et, pour passer du spécieux à l’utile, elle réunissait les Grecs divisés, et formait les ligues contre les Barbares : elle était la liaison du sénat avec le peuple, et la barrière entre Philippe et la liberté1. […] Le soleil n’agit pas de toute sa force, comme il fit dès le mois d’avril de l’année passée, quand il brûla les herbes naissantes.

77. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Fléchier, 1632-1710 » pp. 124-132

… Mort de Turenne Il passe le Rhin et trompe la vigilance d’un général habile et prévoyant2. […] Tous entreprennent son éloge ; et chacun, s’interrompant lui-même par ses soupirs et par ses larmes, admire le passé, regrette le présent et tremble pour l’avenir. […] Ses mœurs étaient aussi pures que sa doctrine, et je ne puis me souvenir de cet air de candeur et de vérité, qui accompagnait ses actions et ses paroles, et qui le rendait si agréable, que je ne regrette le temps que j’ai passé loin de lui. […] Voici un échantillon des vers de Fléchier : Apostrophe à Rome Non, Rome, tu n’es plus au siècle des Césars, Où parmi les horreurs de Bellone et de Mars, Tu portais ton orgueil sur la terre et sur l’onde ; Et bravant le destin des puissances du monde, Tu faisais voir en pompe aux peuples étonnés Des souverains captifs et des rois enchaînés… Tout cet éclat passé n’est qu’un éclat frivole, On ne redoute plus l’orgueil du Capitole, Et les peuples instruits, charmés de tes vertus, Adorent ta grandeur, et ne la craignent plus. […] On vit dans les villes par où son corps a passé les mêmes sentiments que l’on avait vus autrefois dans l’empire romain, lorsque les cendres de Germanicus furent portées de la Syrie au tombeau des Césars.

78. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — [Notice] Maurice de Guérin, 1810-1839. » pp. 598-606

Mon Dieu, comment se fait-il que mon repos soit altéré par ce qui se passe dans l’air, et que la paix de mon âme soit ainsi livrée au caprice des vents ? […] Féli1 pour le même labeur ; les heures d’étude et d’épanchement poétique, qui nous mènent jusqu’au souper ; ce repas qui nous appelle avec la même douce voix et se passe dans les mêmes joies que le dîner, mais moins éclatantes, parce que le soir voile tout, tempère tout ; la soirée qui s’ouvre par l’éclat d’un feu joyeux, et, de lecture en lecture, de causeries en causeries, va expirer dans le sommeil ; à tous les charmes d’une telle journée ajoutez je ne sais quel rayonnement angélique, quel prestige de paix, de fraîcheur et d’innocence, que répandent la tête blonde, les yeux bleus, la voix argentine, les ris, les petites moues pleines d’intelligence d’un enfant qui, j’en suis sûr, fait envie à plus d’un ange, qui vous enchante, vous séduit, vous fait raffoler avec un léger mouvement de ses lèvres, tant il y a de puissance dans la faiblesse ! […] Mais, le danger passé, la proie regagne les champs, va revoir le soleil et la liberté ; elle retourne toute joyeuse à son tapis de serpolet et d’herbes savoureuses, qu’elle a laissé à demi brouté ; elle reprend les habitudes de sa vie errante et sauvage. […] Il disait ailleurs : « Je me dresse à moitié sur mon lit et j’écoute passer l’ouragan, et mille pensées qui dormaient, les unes à la surface, les autres au plus profond de mon âme, s’agitent et se lèvent. « Tous les bruits de la nature : les vents, ces haleines formidables qui mettent en jeu les innombrables instruments disposés dans les plaines, sur les montagnes, dans le creux des vallées, ou réunis en masse dans les forêts ; les eaux, qui possèdent une échelle de voix d’une étendue si démesurée, à partir du bruissement d’une fontaine dans la mousse jusqu’aux immenses harmonies de l’Océan ; le tonnerre, voix de cette mer qui flotte sur nos têtes ; le frôlement des feuilles sèches, s’il vient à passer un homme ou un vent follet ; enfin, car il faut bien s’arrêter dans cette énumération qui serait infinie, cette émission continuelle de bruits, cette rumeur des éléments toujours flottante, dilatent ma pensée en d’étranges rêveries et me jettent en des étonnements dont je ne puis revenir.

79. (1866) Morceaux choisis des classiques français, à l’usage des classes supérieures : chefs d’œuvre des prosateurs et des poètes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouvelle édition). Classe de seconde

Ils la passent. […] Mais ce qui se passe dans nous est-il moins incompréhensible ? […] Quelle est donc l’immensité de la ligne qui passe d’une polaire à l’autre ? […] Quand vous auriez commencé à vivre avec le monde, le passé ne vous paraîtrait pas plus long ni plus réel. […] Croyons-nous que les jours à venir aient plus de réalité que les jours passés ?

80. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre VI. De l’élocution et du style. »

Pourtant il y a un art de dire noblement les petites choses, de relever les plus minces sujets, de donner aux objets mêmes qui répugnent un caractère d’élégance qui les fasse passer. […] Un juge, l’an passé, me prit à son service ; Il m’avait fait venir d’Amiens pour être suisse. […] La métaphore donne de la hardiesse, de l’originalité à la pensée : la poésie l’emploie sans cesse ; le langage philosophique peut s’en passer. […] On se console pourtant, parce que, de temps en temps, on rencontre des objets qui vous divertissent, des eaux courantes, des fleurs qui passent ; on voudrait s’arrêter… Marche ! […] Et cependant, on voit tomber derrière soi, tout ce qu’on avait passé : fracas effroyable !

81. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Voltaire, 1694-1778 » pp. 253-281

Je passe ma vie à courir pour me partager entre ma mère et mon mari ; M. […] Vous avez passé votre jeunesse1, vous deviendrez bientôt vieux et infirme ; voilà à quoi il faut que vous songiez. […] N’oubliez point vos amis, et ne passez point des mois entiers sans leur écrire un mot. […] Il y a encore, à ce que j’entends dire, quelques-uns de ces beaux esprits subalternes qui passent leur vie dans les cafés, lesquels font à la mémoire de M. […] Il disait dans une autre lettre : « Il faut qu’un homme de lettres se prépare à passer sa vie entre la calomnie et les sifflets.

82. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — Première partie. Règles générales du style. — Chapitre III. Des ornements du style » pp. 119-206

Nous allons passer en revue ces différents ornements dans les trois articles suivants. […] Nous avons dit que les tropes sont des figures qui changent le sens des mots, et les font passer de leur signification propre à une signification étrangère. […] L’allégorie sert très bien à faire passer des reproches ou des avis, et à exprimer avec délicatesse une louange ou une demande qui pourrait déplaire sans cette précaution. […] — Mais j’ai des biens en foule, et je puis m’en passer. […] Car il vaut mieux encore se passer de transitions que d’en employer de mauvaises.

83. (1863) Principes de rhétorique et de littérature appliqués à l’étude du français

Au reste, chez les grands poëtes comiques, l’intrigue ne se passe jamais absolument des mœurs. […] Chez l’orateur, le bon sens est le fond de l’éloquence ; la passion et les peintures passent après lui. […] Tous ajoutèrent à la gloire de la littérature et de la langue ; mais l’âge de la perfection était passé. […] Plusieurs sont passés dans la langue commune, comme ironie, apostrophe, métaphore, hyperbole. […] Ont-elles passé, il n’y paraît plus, tout est effacé, il n’en reste aucune trace.

84. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Pascal, 1623-1662 » pp. 56-71

Sainte-Beuve a dit de lui : « On s’élève, on se purifie, dans les heures qu’on passe en tête à tête avec cet athlète, ce héros, ce martyr du monde moral et invisible. […] Mais si notre vue s’arrête là, que l’imagination passe outre ; elle se lassera plus tôt de concevoir que la nature de fournir. […] Je sais, Madame, que je pourrai être suspect d’avoir recherché de la gloire en le présentant à Votre Majesté, puisqu’il ne sauroit passer que pour extraordinaire quand on veut qu’il s’adresse à elle. […] Les derniers peuvent, si je ne me trompe, aussi bien que les premiers, passer pour des souverains. […] Cet écrit a été intitulé arbitrairement par Bossut : De l’autorité en matière de philosophie, et ce titre a passé dans toutes les éditions subséquentes des Pensées.

85. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Pascal. (1623-1662.) » pp. 35-39

Nous anticipons l’avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours ; ou nous rappelons le passé, pour l’arrêter comme trop prompt : si imprudents, que nous errons dans les temps qui ne sont pas nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient ; et si vains, que nous songeons à ceux qui ne sont plus rien, et échappons1 sans réflexion le seul qui subsiste. […] Que chacun examine ses pensées : il les trouvera toujours occupées au passé et à l’avenir. […] Le présent n’est jamais notre fin : le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. […] Les enfants sont, à cet égard, plus heureux que les hommes faits : « Ils n’ont, dit La Bruyère, ni passé ni avenir ; et, ce qui ne nous arrive guère, ils jouissent du présent. » 3.

86. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Bernardin de Saint-Pierre. (1737-1814.) » pp. 153-158

Tout enfant, il lisait avec une curiosité passionnée la Vie des saints ou le récit des travaux apostoliques des jésuites, et poursuivi par le souvenir de ses lectures, il cherchait naïvement aux alentours de la ville une Thébaïde où il pût passer ses jours dans la prière et la contemplation. […] Le respect, l’amitié, la colère, semblent passer tour à tour de l’un à l’autre comme dans le cœur des hommes, et ces passions versatiles ne sont au fond que les jeux des vents. […] Les hommes se bercent de vaines illusions autour de quelques vapeurs qui s’élèvent de la terre, tandis que la mort, comme un oiseau de proie, passe au milieu d’eux, et les engloutit tour à tour sans interrompre la foule qui cherche le plaisir. […] Que leurs grâces divines passent dans mes écrits et ramènent mon siècle à vous, comme elles m’y ont ramené moi-même !

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