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29. (1897) Extraits des classiques français, seizième, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours moyens. Première partie : prose. [Seizième siècle] « XVIe siècle — Prose — Amyot, 1513-1593 » pp. -

Le jeune homme, qui n’estoit point lourdaut de luy mesme, le feit vouluntiers, sans rien repliquer au contraire6 : et quand il eut demouré quelque temps auprès de luy, estant tousjours à l’entour de sa personne, il commença à congnoistre et gouster la bonté de son naturel, et l’affection7 et intention qui le mouvoit à faire ce qu’il faisoit, l’austérité de sa vie ordinaire et sa constance à supporter tous travaux, sans jamais se lasser : dont il se prit à8 l’aimer et honorer fort affectueusement, et depuis alla preschant9 à ses parents et amis que Lycurgus n’estoit pas ainsi rude ne rebours comme10 il sembloit de prime face11, ains estoit le plus doulx et le plus aimable envers les autres qu’il estoit possible. […] Car ainsi comme les citez qui par guerres ordinaires avec leurs proches voisins, et continuelles expeditions d’armes, ont appris à estre sages, aiment les justes ordonnances, et le bon gouvernement : aussi ceux qui par quelques inimitiez ont esté contraints de vivre sobrement et se garder de mesprendre15 par negligence, et par paresse, et faire toutes choses utilement et à bonne fin, ceux la ne se donnent de garde, que16 la longue accoustumance, petit à petit, sans qu’ils s’en apperçoyvent, leur apporte une habitude de ne pouvoir plus pecher, et embellir leurs meurs d’innocence, pour peu que la raison y mette la main : car ceux qui ont tousjours devant les yeux ceste sentence, Le Roy Priam et ses enfants à Troye Certainement en meneroient grand joye1, cela les divertit et destourne bien des choses dont les ennemis ont accoustumé de se resjouïr et de se mocquer.

30. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie —  Vauvenargues, 1715-1747 » pp. 336-343

Il n’imaginait point et n’inventait point ; il allait aux routes battues, et se laissait porter sans résistance au cours capricieux des événements ; mais il suivait avec célérité le fil des choses, et exécutait avec prudence tout ce qui ne demandait qu’un sens droit et une habitude ordinaire des affaires. Sa pénétration et son goût, joints au bonheur de sa mémoire, se portaient avec une indifférente facilité sur toutes choses ; mais il n’avait point cette véritable étendue de génie qui, saisissant les objets avec leurs rapports, les embrasse tout entiers et réunis ; et c’est ainsi qu’il avait des connaissances presque universelles, sans qu’on pût dire qu’il eût l’esprit vaste, contrariété assez ordinaire.

31. (1875) Poétique

C’est même le défaut assez ordinaire des poètes comme des peintres. […] Cette bonté de mœurs peut être dans tout sexe et dans toute condition : une femme peut être bonne, même un esclave ; quoique d’ordinaire les femmes qu’on met sur les théâtres soient plus mauvaises que bonnes, et que les esclaves soient toujours mauvais. […] Elle sera relevée, et au-dessus du langage vulgaire, si l’on y emploie des mots extraordinaires, je veux dire, des mots étrangers, des métaphores, des mots allongés, en somme, tout ce qui n’est point du langage ordinaire. […] L’élocution poétique sera donc au-dessus du langage ordinaire par les métaphores, les mots étrangers, les épithètes d’ornement, et par les autres espèces que nous avons indiquées ; et elle sera claire par les mots propres. […] Toutefois si le poème avait le même effet, ou à peu près, en suivant la marche ordinaire de l’art, la faute ne serait plus excusable, parce que toutes les fautes doivent être évitées, quand on le peut.

32. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre VI. Analyse du discours sur l’esprit philosophique, par le P. Guénard. »

« Par quel endroit l’esprit philosophique s’élève-t-il donc au-dessus de la foule, au-dessus même de tous les philosophes ordinaires ? […] » Libre et hardi dans les choses naturelles, et pensant toujours d’après lui-même ; flatté depuis longtemps par le plaisir délicat de goûter les vérités claires et lumineuses qu’il voyait sortir, comme autant de rayons, de sa propre substance, ce roi des sciences humaines se révolte aisément contre cette autorité, qui veut captiver toute intelligence sous le joug de la foi, et qui ordonne aux philosophes mêmes, à bien des égards, de redevenir enfants : il voudrait porter dans un nouvel ordre d’objets sa manière de penser ordinaire : il voudrait encore ici marcher de principe en principe, et former de toute la religion une chaîne d’idées générales et précises que l’on pût saisir d’un coup d’œil ; il voudrait trouver, en réfléchissant, en creusant en lui-même, en interrogeant la nature, des vérités que la raison ne saurait révéler, et que Dieu avait cachées dans les abîmes de sa sagesse ; il voudrait même ôter, pour ainsi dire, aux événements leur propre nature, et que des choses dont l’histoire seule et la tradition peuvent être les garants, fussent revêtues d’une espèce d’évidence dont elles ne sont point susceptibles ; de cette évidence toute rayonnante de lumière qui brille à l’aspect d’une idée, pénètre tout d’un coup l’esprit, et l’enlève rapidement.

33. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre quatrième. De la disposition oratoire, ou de l’Ordre mécanique du discours. — Chapitre premier. »

) Un vice essentiel, et très ordinaire cependant dans ces orateurs prétendus qui prennent le bavardage pour de l’éloquence, c’est de fonder leurs exordes sur des lieux communs qui n’ont pas le moindre rapport avec l’objet dont il est question. […] Quintilien conseille encore, avec sa sagesse ordinaire, de mesurer ses forces avant d’essayer le pathétique, et de ne point manier ce ressort puissant, mais délicat, si l’on ne se sent pas tout le talent nécessaire pour l’employer avec succès.

34. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre XIII. Genre oratoire, ou éloquence. »

Mais le prêtre n’est pas un homme ordinaire, ni un orateur parlant en son propre nom ; du haut de la chaire, une auréole mystérieuse enveloppe sa tête ; il est placé entre le ciel et la terre ; il s’adresse au sentiment le plus vif et le plus profond de la conscience, au sentiment religieux ; il n’agite pas un intérêt d’un moment, mais un intérêt éternel. […] Aussi l’éloquence sacrée n’est-elle pas un art ordinaire ; elle n’a pas besoin de ces ménagements, de ces artifices dont fait usage l’éloquence profane, et qui montrent qu’elle se défie de ses forces.

35. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Fontenelle. (1657-1757). » pp. 110-119

Ainsi, le vrai a besoin d’emprunter la figure du faux pour être agréablement reçu dans l’esprit humain : mais le faux y entre bien sous sa propre figure ; car c’est le lieu de sa naissance et sa demeure ordinaire, et le vrai y est étranger. […] Sorte d’assises extraordinaires : c’était un certain nombre de juges, choisis d’ordinaire à Paris et investis par une délégation temporaire d’une compétence universelle et sans appel, que nos rois envoyaient de temps en temps dans les provinces pour réparer les erreurs ou remédier à l’insuffisance de la justice locale.

36. (1897) Extraits des classiques français, seizième, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours moyens. Première partie : prose. [Seizième siècle] « Étude littéraire et philologique sur la langue du XVIe siècle » pp. -

Il arrive même d’ordinaire qu’elles nous plaisent surtout par leurs défauts. […] Les exemples en sont si nombreux qu’il suffira d’ouvrir notre recueil au hasard pour s’en assurer. — Même dans les verbes impersonnels, le neutre il s’effaçait d’ordinaire, et l’on disait gentiment : « Me souvient qu’Aristote… Alors tonnoit et pleuvinoit à merveilles… Bien est vray que… M’est advis que… Faut estre sage. » Cette jolie forme, nous avons eu tort de la laisser à nos villageois. […] Ainsi fit d’ordinaire le moyen âge ; il s’interdit par exemple ces lettres doubles, qui sont un des fléaux du vocabulaire, et l’encombrent le plus souvent sans raison. […] Non contents de rétablir c dans les mots où il existait en latin, ils l’accordèrent libéralement à ceux que leur étymologie en affranchissait, et ils dirent craincte pour crainte, parce qu’ils ne voyaient pas que craindre dérive de tremere par la mutation ordinaire de emere en eindre : (geindre de gemere). — Une erreur non moins grave nous valut scavoir, que l’on tira faussement de scire et non de sapere, (sapire, savire). — Au lieu de s’effacer, comme dans l’ancien idiome, l’h latin s’afficha dans le nouveau, qui, tout en écrivant avoir (d’habere), se contredit dans homme (de hominem), et hostel (d’hospitale).

37. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Seconde section. Des grands genres de poésie — Chapitre III. Du genre épique » pp. 207-250

D’après ce que nous venons de dire du genre épique, il est facile de voir qu’il y a un grand nombre de sujets susceptibles de cette forme, depuis le poème épique proprement dit jusqu’au récit le plus ordinaire. […] La mesure la plus ordinaire est de ne pas excéder, dans chaque chant, l’espace d’une heure de lecture. […] Ces paroles, qui montrent que la versification est la forme naturelle et ordinaire, quoique non absolument essentielle de la poésie, nous fournissent la réponse à la question posée plus haut. […] Le poème héroïque qui, comme on le voit, n’est que de l’histoire mise en vers, diffère du récit historique ordinaire par le ton et par le style.

38. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre IV. Genre dramatique. »

La tragédie lyrique, ne peut être astreinte aux règles fixe& et sévères de la tragédie ordinaire : destinée à plaire surtout aux yeux et aux oreilles par le jeu mimique de la scène et par l’enchantement de la musique, sa composition littéraire devient d’une importance secondaire, et la plupart du temps, le spectateur s’inquiète peu. des paroles. […] Quoique la composition littéraire de l’opéra soit trop souvent sacrifiée à la musique, et qu’elle soit le refuge ordinaire de la médiocrité, l’auteur qui tient à sa gloire ne doit pourtant pas en négliger l’ordonnance et le style. […] Ainsi, toute difformité physique ou morale, pourvu qu’elle n’ait rien de repoussant, paraît comique, parce qu’elle fait contraste avec l’idée que nous avons des convenances physiques et morales ; toute situation bizarre, toute idée singulière, extravagante, est comique, parce qu’elle contraste avec les idées simples, ordinaires et naturelles.

39. (1845) Leçons de rhétorique et de belles-lettres. Tome I (3e éd.)

Aucun effort de génie n’est capable de soutenir l’âme à une hauteur si fort au-dessus de sa situation ordinaire, vers laquelle elle tend sans cesse à retomber. […] On ne saurait douter qu’à cette époque, on ne portât plus loin l’usage des gestes et des inflexions de voix à la tribune et sur le théâtre que dans la conversation ordinaire. […] Les différents genres d’écriture dont nous avons fait jusqu’ici mention ne ressemblent en rien à nos lettres, ou à ce que nous appelons l’écriture, dans l’acception ordinaire de ce mot. […] Le français et l’italien n’ont pas de genre neutre ; en anglais (dans le discours ordinaire), tous les mots substantifs, qui ne sont pas des noms de créatures vivantes, sont neutres sans exception. […] Quoique, dans le discours ordinaire, comme je viens de l’observer, nos genres établissent la différence qui existe réellement entre les sexes, le génie de notre langue nous permet cependant de mettre, par métaphore, au masculin ou au féminin les noms des objets inanimés, toutes les fois que nous croyons qu’il en pourra résulter un plus bel effet oratoire ; et, lorsque nous en usons ainsi, nous sommes censés abandonner le style ordinaire pour employer le style figuré.

40. (1839) Manuel pratique de rhétorique

L’invention ne suppose qu’un jugement ordinaire ; l’art qu’exige la disposition est à la portée de tous, et d’ailleurs ces deux parties se rapportent à l’utilité de la cause ; mais l’élocution tourne à la gloire de l’orateur ; c’est par elle qu’il triomphe et entraîne la multitude même. […] D’abord il y a des sujets peu relevés, ordinaires, communs ; alors il s’agit seulement de présenter la pensée ou le raisonnement avec la clarté et l’ordre les plus propres à instruire et à convaincre des esprits qui ne sont occupés d’aucune prévention. […] Le style simple est celui qui, soit dans les pensées, soit dans les mots, soit dans les tours, n’a rien qui ne paraisse commun, ordinaire et facile ; il n’a ni élévation, ni éclat, ni richesse. […] La recherche, l’affectation, une froide symétrie sont des défauts ordinaires dans ce genre qui est à la portée des esprits médiocres, et c’est par là que la corruption a commencé à s’introduire dans la littérature. […] Il est inutile de dire que des pensées ordinaires ou des images communes exprimées en mots pompeux, ne seraient qu’une emphase ridicule.

41. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Notes pour l’intelligence des exemples cités dans ce premier volume. » pp. 365-408

Élevé chez les Jésuites à Bourges, où son père faisait sa résidence la plus ordinaire, il montra, dès ses études, un génie précoce, et devint un héros dans les premières années de sa jeunesse. […] On l’appelle assez souvent le Dieu de la Thrace, parce qu’il faisait son séjour ordinaire dans ce pays, dont les habitants étaient très belliqueux. […] Munich, grande et belle ville d’Allemagne, capitale de la Bavière, et la résidence ordinaire des Électeurs. […] Versailles, ville célèbre par la résidence ordinaire de nos rois, et située dans l’Île-de-France, à quatre lieues de Paris.

42. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Voltaire, 1694-1778 » pp. 253-281

Le goût peut se gâter chez une nation ; ce malheur arrive d’ordinaire après les siècles de perfection1. […] Lorsqu’on imprime que je prends à tort le titre de gentilhomme ordinaire de la chambre du roi de France, ne suis-je pas encore forcé de dire que, sans me parer jamais d’aucun titre, j’ai pourtant l’honneur d’avoir cette place, que Sa Majesté le roi mon maître m’a conservée ? […] Unie, c’est-à-dire ordinaire. […] On respecte d’ordinaire les dames dans les horreurs de la guerre ; mais le conseiller Smith et le résident Freytag, en agissant pour Frédéric, croyaient lui faire leur cour en trainant le pauvre sexe dans les boues.

43. (1843) Nouvelle rhétorique, extraite des meilleurs auteurs anciens et modernes (7e éd.)

L’enthymème ne se montre pas non plus d’ordinaire sous l’extérieur de l’école. […] La religion n’est pas pour l’ordinaire ce qui touche le plus un jeune homme du caractère de Pérolla ; on commencera donc par cette idée. […] Ce style est principalement celui des discussions ordinaires. […] Cette hardiesse, qui donne du sentiment aux êtres qui n’en ont point, est ordinaire aux passions. […] Elle est l’effet d’une imagination vivement frappée, à qui les expressions ordinaires paraissent trop faibles.

44. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre III. » p. 77

On peut, jusqu’à un certain point, combler cette lacune par un article du Grand Étymologique, où le mot tragédie est expliqué, soit par le mot τράγος, bouc, un bouc étant le prix que recevaient les vainqueurs dans les anciens concours Dionysiaques, soit par le mot τρύξ, lie de vin, ces fêtes étant d’ordinaire célébrées au temps et à l’occasion des vendanges.

45. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre IX. de la disposition. — proportions, digressions, transitions, variété  » pp. 118-130

C’est une règle qu’oublient plusieurs des romanciers actuels, ceux surtout qui écrivent d’ordinaire pour le théâtre ; ils multiplient singulièrement le dialogue ; l’habitude de la scène les emporte à chaque page. […] L’antithèse est la forme la plus ordinaire de ces transitions ; continuez de feuilleter l’oraison funèbre de Condé : — Pendant que le prince se soutenait si hautement avec l’archiduc, il rendait au roi d’Angleterre tous les honneurs qui lui étaient dus… Nous avons parlé des qualités de l’âme, venons maintenant aux qualités de l’esprit… Si les autres conquérants ont reçu une récompense aussi vaine que leurs désirs, il n’en sera pas ainsi de notre grand prince, en effet,… etc. — C’est en étudiant les auteurs qui ont ainsi travaillé leurs transitions, Racine surtout et Massillon, que vous trouverez les modèles de ces mille artifices, et que vous vous habituerez à les employer vous-même à l’occasion.

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