Les soins du nom et de la postérité sont donc frivoles ; l’honneur qu’on rend à la mémoire des hommes illustres, une erreur puérile, puisqu’il est ridicule d’honorer ce qui n’est plus ; la religion des tombeaux, une illusion vulgaire ; les cendres de nos pères et de nos amis, une vile poussière qu’il faut jeter au vent et qui n’appartient à personne ; les dernières intentions des mourants, si sacrées parmi les peuples les plus barbares, le dernier son d’une machine qui se dissout,… etc. » Ce lieu se rapproche du conséquent comme le lieu cause de l’antécédent. […] « M. le Tellier ne ressemble pas à ces âmes oisives qui n’apportent d’autre préparation à leurs charges que celle de les avoir désirées ; qui mettent leur gloire à les acquérir et non pas à les exercer ; qui s’y jettent sans discernement et s’y maintiennent sans mérite, et qui n’achètent ces titres vains d’occupations et de dignités, que pour satisfaire leur orgueil et pour honorer leur paresse : il se fit connaître au public par l’application à ses devoirs, la connaissance des affaires, l’éloignement de tout intérêt. » A ces exemples connus la littérature contemporaine pourrait en ajouter beaucoup d’autres.
Cependant le spectacle du monde le plus étrange et le moins attendu se présenter à eux : de grands corps énormes qui paraissent avoir des ailes blanches2, qui volent sur la mer, qui vomissent du feu de toutes parts, et qui viennent jeter sur le rivage des gens inconnus, tout écaillés de fer, disposant comme ils veulent des monstres qui courent sous eux, et tenant en leurs mains des foudres dont ils terrassent tout ce qui leur résiste. […] Mais les Grecs, qui étaient si raffinés, n’ont-ils pas cru longtemps que la lune était ensorcelée, et que des magiciennes la faisaient descendre du ciel pour jeter sur les herbes une certaine écume malfaisante1 ?
Jetez un vaisseau en péril sur cette scène de la mer, tout change : on ne voit plus que le vaisseau. […] « Tous les bruits de la nature : les vents, ces haleines formidables qui mettent en jeu les innombrables instruments disposés dans les plaines, sur les montagnes, dans le creux des vallées, ou réunis en masse dans les forêts ; les eaux, qui possèdent une échelle de voix d’une étendue si démesurée, à partir du bruissement d’une fontaine dans la mousse jusqu’aux immenses harmonies de l’Océan ; le tonnerre, voix de cette mer qui flotte sur nos têtes ; le frôlement des feuilles sèches, s’il vient à passer un homme ou un vent follet ; enfin, car il faut bien s’arrêter dans cette énumération qui serait infinie, cette émission continuelle de bruits, cette rumeur des éléments toujours flottante, dilatent ma pensée en d’étranges rêveries et me jettent en des étonnements dont je ne puis revenir.
La multitude des livres, dit Sénèque, au lieu d’enrichir et d’éclairer l’esprit, ne sert qu’à y jeter le désordre et la confusion. […] Pour dire qu’il a cinquante-huit ans, Boileau emploie ce tour noble et harmonieux : Mais aujourd’hui qu’enfin la vieillesse venue, Sous mes faux cheveux blonds déjà toute chenue, A jeté sur ma tête avec ses doigts pesants Onze lustres complets surchargés de trois ans.
Il traverse l’Inde, qu’il partage en Inde occidentale, ou en deçà du Gange, et en Inde orientale, ou au-delà du Gange, et va se jeter dans le golfe de Bengale par plusieurs embouchures.
Il prend sa source au pied du mont Viso en Piémont, dans le marquisat de Saluces, sur la frontière du Dauphiné, traverse une partie de l’Italie, et, après avoir reçu plusieurs rivières, va se jeter par plusieurs embouchures dans le golfe de Venise.
C’est tout, ce que la France poétique avait à sa disposition quand l’éclosion et l’épanouissement des deux grandes littératures antiques vinrent inonder de lumières nouvelles, remuer et enthousiasmer les intelligences : l’aurore de la Renaissance, qui avait jeté quelques lueurs dès la fin du xve siècle, se leva radieuse sur le xvie . […] On les lui rendit ; il les accepta en homme d’esprit, désarma toute colère, et, heureux jusqu’au bout, il s’endormit et mourut sous les fleurs sans épines que ses vainqueurs, généreux sans danger, jetèrent sur sa tombe. […] Contre les bucherons de la forêt de Gastine175 Escoute, bucheron, arreste un peu le bras ; Ce ne sont pas des bois que tu jettes à bas ; Ne vois-tu pas le sang, lequel degoute à force Des Nymphes qui vivoient dessous la dure escorce176 ? […] Transis475, desesperés, il n’y a plus de mort Qui soit pour vostre mer des orages le port : Que si vos yeux de feu jettent l’ardente veüe A l’espoir du poignard, le poignard plus ne tue. […] D’esprit triste et confus, de misere accablé, En horreur à moy-mesme, angoisseux536 et troublé, Je me jette à tes piés ; soy-moy doux et propice !
Voici le grec exactement traduit : « Pluton lui-même, le roi des enfers, s’épouvante dans ses demeures souterraines ; il s’élance de son trône et jette un cri, tremblant que Neptune, dont les coups ébranlent la terre, ne vienne enfin à la briser, et que les régions des morts, hideuses, infectes, dont les dieux même ont horreur, ne se découvrent aux yeux des mortels et des immortels. » Le tableau est complet ; il n’y a pas un trait faible ou inutile : tout est frappant, tout va en croissant. […] Vers l’horizon obscur tel le soleil naissant Jette à peine, au milieu des vapeurs nébuleuses, De timides rayons et des lueurs douteuses ; Ou tel, lorsque sa sœur offusque ses clartés, Pâle, et portant le trouble aux rois épouvantés, Il épanche à regret une triste lumière, Des désastres fameux sinistre avant-courrière ; Mais à travers la nuit qui nous glace d’effroi, Tous les astres encore reconnaissent leur roi7.
Mais autant les hommes de génie sont rares, autant l’inspiration du ciel visite rarement l’homme de génie lui-même ; il a ses moments d’enthousiasme, comme le volcan ses éruptions flamboyantes ; puis il retombe dans le silence et l’obscurité, comme s’il était consumé par ses propres efforts : Ainsi, quand l’aigle du tonnerre Enlevait Ganymède aux cieux, L’enfant, s’attachant à la terre, Luttait contre l’oiseau des dieux ; Mais entre ses serres rapides L’aigle, pressant ses flânes timides, L’arrachait aux champs paternels, Et, sourd à la voix qui l’implore, Il le jetait, tremblant encore, Jusques aux pieds des immortels. […] Il ne faudrait pas, sans doute, vouloir appliquer ce système dans toute sa rigueur et à toutes les littératures ; mais il suffit de jeter un coup d’œil sur l’histoire pour en saisir la justesse et la vérité.
Du bord de la mer, on avertit un malheureux naufragé de la planche à laquelle il peut s’accrocher ; on lui jette, si l’on peut, un cordage. […] Bien loin de là, ils vérifieront, à qui mieux mieux, l’admirable axiome de ce Machiavel qui avait tout vu : Tout le mal de ce monde vient de ce qu’on n’est pas assez bon ou assez méchant , et leur molle indécision nous jettera dans la guerre civile, s’ils n’y prennent garde.
Aussi, quand il avait observé, réfléchi et arrêté son idée, rien ne le troublait ; il ne se laissait point jeter ou entretenir, par les idées d’autrui, ni par le désir de l’approbation, ni par la crainte de la contradiction, dans un état de doute et de fluctuation continuelle. […] Libelles, pamphlets, calomnies, injures, interruptions, menaces, huées, éclats de rire, sifflets, n’étaient tout au plus que des cailloux jetés dans le courant de sa parole, voilà tout.
L’Enfant L’homme enfant, jeté par le ciel sur la terre, s’y montre d’abord nu, faible, sans défense, sans intelligence ; son premier cri est un gémissement, son premier accent est une plainte, sa première sensation est une douleur. […] La naïveté est une grande ressemblance de l’imitation avec la chose ; c’est de l’eau prise dans le ruisseau et jetée sur la toile. » Diderot. […] Enfin nous touchâmes aux premiers tronçons de colonnes, aux premiers blocs de marbre que les tremblements de terre ont jusqu’à plus d’un mille des monuments mêmes, comme les feuilles sèches jetées et roulées loin de l’arbre après l’ouragan, etc., etc.
Hyperbole Du grec Hyper, au-delà, et Ballô, jeter. […] Ainsi Boileau, pour nous faire connaître qu’il a une perruque et cinquante-huit ans, se sert de cette périphrase : Mais aujourd’hui qu’enfin la vieillesse venue, Sous mes faux chevaux blonds, déjà toute chenue, A jeté sur ma tête, avec ses doigts pesants, Onze lustres complets surchargés de trois ans,… Mascaron, dans son Oraison funèbre de Turenne, nous annonce que Turenne fut enseveli dans le tombeau de nos rois : Le roi, pour donner une marque immortelle de l’estime et, de l’amitié dont il honorait ce grand capitaine, donne une place illustre à ses glorieuses cendres, parmi ces maîtres de la terre, qui conservent encore, dans la magnificence de leurs tombeaux, une image de celle de leurs trônes. […] Égisthe se retourne, enflammé de furie ; À côté de son maître il le jette sans vie. […] Jetez-vous votre langue aux chiens ? […] Ton génie alarmé te parle par ma bouche : Il me pousse, il me presse, il me jette à tes pieds.
Mais si vous ne jetez plus sur Antioche que des regards de colère, mon peuple ne sera plus mon peuple ; je ne le reverrai plus. […] L’admiration qu’elle commande n’est pas l’effet d’un goût réfléchi qui connaît les règles, mais l’éruption subite et involontaire de l’âme ravie et jetée hors d’elle-même. […] Il ne faut pas confondre la pureté avec le purisme, qui, par des scrupules minutieux, jette le style dans la sécheresse et dans la contrainte. […] La seconde fois il s’en sert avec finesse pour jeter le ridicule sur la torture donnée aux esclaves de Clodius. […] L’un, par de vifs et continuels efforts, emporte l’admiration du genre humain, et fait taire l’envie ; l’autre jette d’abord une si vive lumière, qu’elle n’osait l’attaquer.
Il jette un coup d’œil dans la mansarde ; il y règne la misère ; il voit une femme malade, couchée sur un grabat La pitié entre dans son cœur ; il tire d’un petit sac le produit de sa journée et le donne à ces pauvres gens. […] D’abord le bon abbé est déconcerté, puis bientôt l’ouvrier lui apprend qu’il est connu pour honnête homme dans son quartier, mais que depuis longtemps il est sans ouvrage, que sa femme est malade, qu’il n’a pas de quoi la faire soigner, qu’il ne peut plus donner de pain à ses deux enfants, qu’il doit plusieurs termes à son propriétaire, et qu’il est sorti de chez lui pour aller se jeter dans la rivière ; mais qu’il a été arrêté dans ce dessein par la curiosité qu’il a eue d’entrer à l’église, comme tout le monde ; qu’il a entendu dire qu’il y a une Providence qui veille sur tous ; que cette idée est fausse, et qu’il a voulu venir, avant de se noyer, prouver à l’abbé Beauregard que la Providence ne veille pas sur tout le monde. […] Le duc fait venir Bavalan, gouverneur du château, et lui donne l’ordre d’enfermer son ennemi dans un sac de cuir, et vers l’entrée de la nuit, de le jeter à la mer. […] Il n’est donc pas inutile de jeter un coup d’œil sur le style épistolaire, et de voir si ce genre de composition admet quelques règles.
Tout contrefacteur ou débitant de contrefaçons de cet Ouvrage sera poursuivi conformément aux lois. Toutes mes Editions sont revêtues de ma griffe. Avant-propos. Le succès toujours croissant de la nouvelle Méthode, à laquelle ce Cours est adapté, nous dispense d’en faire l’éloge, et d’ajouter un tardif et obscur hommage aux suffrages éminents qui l’ont accueillie dès son apparition. En offrant au public ce recueil, nous n’avons point la prétention chimérique de suivre pas à pas la théorie de l’auteur, de présenter chacun des exercices qui composent notre ouvrage, comme le développement spécial d’une règle de la Méthode.
La forme naturelle est la narration ; mais pour donner plus d’animation à votre style, pour y jeter de la variété, pour mieux faire saisir les intentions et le caractère de vos héros, vous avez recours au dialogue, vous cédez la parole à vos personnages. […] Une digression également irréprochable de tous points c’est ce magnifique éloge des lettres que Cicéron a jeté dans la défense du poëte Archias et que tous les siècles ont répété.