Bossuet. […] « Loin de nous les héros sans humanité, s’écrie Bossuet ; ils pourront bien forcer les respects et ravir l’admiration comme font tous les objets extraordinaires, mais ils n’auront pas les cœurs. » (Oraison funèbre du prince de Condé.) […] Bossuet a dit : « Par la profondeur de son génie et les incroyables ressources de son courage, il s’élève au-dessus des plus grands périls, et sait même profiter de toutes les infidélités de la fortune. » 1. […] On lit, dans les Mémoires historiques de Louis XIV : « La moindre marque de mépris qu’un prince donne d’un particulier fait au cœur de cet homme une plaie incurable. » Bossuet exprime la même idée : « Que votre puissance ne vous emporte pas à des moqueries insolentes. […] « Voyez dans quel sentier la vertu chemine. »(Bossuet, Oraison sunèbre de la reine d’Angleterre.)
À un bon sens supérieur il alliait « le don de l’élocution », et Bossuet put dire avec sincérité : « La noblesse de ses expressions vient de celle de ses sentiments. […] Ce tour est fréquent, au dix-septième siècle, dans Corneille et Bossuet. […] Voici comment Bossuet jugeait la majesté royale : « Je n’appelle pas majesté cette pompe qui environne les rois, ou cet éclat extérieur qui éblouit le vulgaire.
Montesquieu, comme Bossuet, aime à donner aux mots toute la force de la simplicité. […] Il y a sans doute plus de grandeur apparente dans la rapide esquisse de Bossuet, qui ne fait des Romains qu’un épisode de l’histoire du monde ; Rome se montre plus étonnante dans Montesquieu, qui ne voit qu’elle au milieu de l’univers. […] L’un et l’autre ont porté la concision aussi loin qu’elle peut aller ; car, dans un espace très-court, Bossuet a saisi toutes les grandes idées, et Montesquieu n’a oublié ni un fait ni une pensée. […] Bossuet, plus négligé, se contente d’être quelquefois sublime. […] Comparer le tableau tracé par Bossuet dans l’Oraison funèbre de la reine d’Angleterre.
Desèze pour Louis XVI ; l’exorde pompeux de l’oraison funèbre de Bossuet sur la mort de la reine d’Angleterre : Celui qui règne dans les cieux… ; l’exorde véhément du discours de Clytemnestre à Agamemnon, dans l’Iphigénie de Racine : Vous ne démentez point une race funeste ; Oui, vous êtes le sang d’Atrée et de Thyeste : Bourreau de votre fille, il ne vous reste enfin Que d’en faire à sa mère un horrible festin. […] La bataille de Rocroy, dans l’Oraison funèbre du prince de Condé, par Bossuet, est une admirable narration, pleine de mouvement et de grandeur. […] Telle est la péroraison de l’oraison funèbre du prince de Condé, dans Bossuet. […] Au lieu de déplorer la mort des autres, grand prince, dorénavant je veux apprendre de vous à rendre la mienne sainte : heureux si, averti par ces cheveux blancs da compte que je dois rendre de mon administration, je réserve au troupeau que je dois nourrir de la parole de vie, les restes d’une voix qui tombe et d’une ardeur qui s’éteint. » Bossuet. Pour mieux comprendre la disposition oratoire et suppléer aux citations que nous n’avons pu faire ici, il faut choisir quelque discours éloquent dans Démosthène, Cicéron, Bossuet, Bourdaloue ou Massillon, en faire l’analyse, examiner le plan, la marche, la distribution des parties : ce travail sera d’une grande utilité pour l’intelligence des principes de rhétorique énoncés ci-dessus.
Bossuet Grand homme, ta gloire vaincra toujours la monotonie d’un éloge tant de fois entendu. […] Qui veut connaître le vrai génie de Bossuet doit lire avant tout ses sermons. […] Il faut lire l’Éloge de Bossuet, par M.
viii de la IIIe partie (les Empires), où Bossuet nous montre « Dieu préparant les effets dans les causes les plus éloignées, et frappant ces grands coups dont le contre-coup porte si loin ». C’est un singulier honneur pour Balzac que d’avoir pressenti avant Bossuet cette haute manière de considérer l’histoire comme le développement dans l’espace et le temps des éternels desseins de la Providence. […] On peut rapprocher ce passage de quelques idées de Bossuet (dans sa lettre sur l’éducation du grand Dauphin) : ce grand homme voulait aussi que l’éloquence « ne fût pas une discoureuse, dont les paroles n’ont que du son ; qu’elle ne fût pas enflée et vide de choses, mais saine et vigoureuse ; qu’elle ne fût pas fardée, mais qu’elle eût un teint naturel et une vive couleur, et, pour tout éclat, celui qui sort de la vérité même ».
Bossuet abonde en pensées sublimes. […] Bossuet est grand, mais juste et naturel ; on sent qu’il s’élève sans effort. […] Il faut remarquer l’épiphonème qui termine, dans Bossuet, le parallèle de Condé et de Turenne. […] — Les batailles du prince de Condé dans Bossuet ? […] Voir page 71 [= p. 98, § Péroraison, parallèle de Condé et de Turenne par Bossuet].
S’il n’est ni dialecticien comme Bourdaloue, ni sublime et pathétique comme Bossuet, il a de l’onction, il est insinuant, il connaît intimement le cœur humain, met la passion aux prises avec la foi, et sait dire aux grands de courageuses vérités. […] Rapprocher du sermon de Bossuet, Sur la Mort, et de la Lettre écrite par Pascal à M. […] Bossuet jugeait ainsi la Majesté royale : Je n’appelle pas majesté cette pompe qui environne les rois, ou cet éclat extérieur qui éblouit le vulgaire : c’est le rejaillissement de la majesté, et non pas la majesté elle-même. […] Qu’on ne prétende pas de là néanmoins que les choses soient égales ; car il y a cette extrême différence, que la violence n’a qu’un cours borné par l’ordre de Dieu, qui en conduit les effets à la gloire de la vérité qu’elle attaque ; au lieu que la vérité subsiste éternellement, et triomphe enfin de ses ennemis, parce qu’elle est éternelle et puissante comme Dieu même. » Nous lisons dans un sermon de Bossuet sur la brièveté de la vie « Quand je fais réflexion sur les diverses calamités qui affligent la vie humaine, entre toutes les autres la famine me semble être celle qui représente mieux l’état d’une âme criminelle, et la peine qu’elle mérite.
Dans un autre genre, l’Écriture, Virgile, Bossuet, Buffon, Delille, Rosset, ont fait, à des points de vue différents, de belles prosopographies du cheval. […] Bougeant, de Condé et de Turenne par de Retz, de Cromwell et de Retz par Bossuet, de Pygmalion par Fénelon, de la Fontaine par La Harpe, de Charles XII par de Bonald, de Démosthènes et de Bossuet par Maury, de Voltaire par de Maistre, et de Charles le Téméraire par le baron de Gerlache. […] Nous mentionnerons ensuite les parallèles de Corneille et de Racine, par La Bruyère et par Lamotte ; de Bossuet et de Fénelon dans l’affaire du Quiétisme, par d’Aguesseau ; de Turenne et de Condé, par Bossuet ; de Démosthènes et de Cicéron, par Fénelon ; de Richelieu et de Mazarin, par Voltaire ; du Français et de l’Anglais, par Thomas. […] De plus l’écrivain s’efforcera, à l’exemple de La Fontaine, de Bossuet, de Mme de Sévigné, de relever et de rendre intéressantes par la diction les petites circonstances et les choses communes. […] Sénèque, Pascal, Bossuet et beaucoup d’autres, ont donné cette forme à des traités de philosophie, de religion, de morale, de politique ou de littérature.
Bossuet dit de la reine d’Angleterre : Son grand cœur a surpassé sa naissance ; toute autre place qu’un trône eût été indigne d’elle. […] Bossuet. […] s’écrie Bossuet dans l’Oraison funèbre de Madame, pouvons-nous encore entendre ces noms dans ce triomphe de la mort ? […] Pour dire que l’homme conserve jusqu’à la mort des espérances qui ne se réalisent jamais, Bossuet, ennoblissant cette idée aussi simple que vraie, la revêt d’une image sublime : L’homme marche vers la tombe, dit-il, traînant après lui la longue chaîne de ses espérances trompées. […] Perse, Tacite, Pascal, La Bruyère, La Rochefoucauld, se font remarquer par la concision ; Démosthènes, Virgile, Bossuet, Racine, sont précis ; Ovide et Voltaire sont souvent diffus.
Comparez le Catilina de Salluste et celui de Cicéron ; Condé et Turenne, dans le cardinal de Retz, dans Bossuet et dans Mme de Sévigné. Bossuet met dans ses portraits, comme ailleurs, une énergie et un entrain qui ne sont qu’à lui. […] Dans Cicéron, dans Bossuet, dans Massillon, dans Rousseau, dans Bernardin de Saint-Pierre, dans Chateaubriand, elle s’adresse plutôt au sentiment ou à l’imagination. Voyez, dans Bossuet, comme elle fait retentir jusqu’au fond du cœur les coups multipliés qui frappèrent Henriette de France, et le tonnerre imprévu qui tua Henriette d’Angleterre.
Nous opposerons un historien à un orateur, Voltaire à Bossuet. […] Voltaire nous a donné une idée nette de la bataille de Rocroy : Bossuet nous a fait admirer le vainqueur : tous deux sont arrivés à leur but par des routes différentes. […] C’est pourquoi je ne proposerais pas pour modèle à l’orateur la narration de Bossuet, si éloquente qu’elle soit. […] Bossuet, parlant devant un auditoire sympathique et attendri, n’a pas besoin de masquer ses intentions. […] Bourdaloue a la méthode et la précision ; Bossuet la majesté ; Fénelon l’onction et la grâce.
Bossuet avait à déplorer la mort d’une reine célèbre par de grands revers et de grandes vertus ; l’orateur ne voit dans ce long enchaînement de revers et de prospérités qu’une leçon éclatante que le ciel donne aux grands de la terre ; et le Psalmiste lui fournit cette grande idée, qui se féconde entre ses mains et devient le germe d’un des plus beaux discours dont s’honore l’éloquence évangélique : et nunc reges intelligite ; erudimini qui judicatis terram . […] Avant Bossuet, saint Jean Chrysostôme s’était servi, avec le même succès, de ce même texte, dans le discours adressé à l’eunuque Eutrope, au sujet de sa disgrâce ; Αεὶ μὲν, μάλιστα δὲ νῦν εκαιρον ἐπεῑν.
Dans les pertes médiocres, on surprend ainsi la pitié des auditeurs ; mais on décrit sans art une mort qu’on déplore sans feinte, etc. » Et Bossuet, dans celle du Grand-Condé : « Ce serait ici le lieu de faire voir notre Prince dans ses glorieuses campagnes qui ont été les miracles de notre siècle, et dont la postérité aura un jour droit de douter ; et peut-être même ne les croira-t-elle pas, parce qu’elles sont bien plus vraies que vraisemblables. […] La véhémence qui caractérise Bossuet ainsi que Démosthène, dit encore M. le cardinal Maury, me semble avoir sa principale source dans les interrogations accumulées qui leur sont si familières à l’un et à l’autre. Mais Bossuet n’est pas le seul de nos orateurs qui ait fait, de ce grand moyen oratoire, l’un des ressorts principaux de son éloquence : Massillon, Bourdaloue, et M. le cardinal lui-même, l’ont fréquemment employé avec succès.
Son nom ne peut être isolé du souvenir de Bossuet. […] Dans la question du quiétisme, il alarma un instant la haute raison de Bossuet ; mais, après une controverse courtoise, il fit sa soumission avec humilité. […] Il faut comparer à ce passage le sermon de Bossuet sur l’unité de l’Église. […] « Tantôt il leur lâche la bride, et par là il remue tout le genre humain. » (Bossuet, Hist. univ. […] avec quelle rapidité il s’élève de l’Occident comme par bonds et ne touche pas à terre. » (Daniel, trad. par Bossuet, Orais. fun. de Condé.)
Quand Démosthène, Cicéron, saint Bernard, Bossuet, Fénelon, ont remporté leurs beaux triomphes oratoires, c’est qu’ils étaient enflammés par de nobles pensées et par de vertueuses convictions. […] Le nom de Bossuet est inséparable de l’oraison funèbre : il a donné à ce genre un caractère de grandeur et de perfection sublime qui ne sera sans doute jamais surpassé. […] Saint François de Sales, saint Vincent de Paul, Mascaron, Bossuet, Fléchier, Bourdaloue, Fénelon, Massillon, Bridaine, Maury, Frayssinous, Maccarthy, Cœur, Ravignan, Lacordaire.
Bossuet (1627-1704.) […] On peut appliquer à Bossuet le jugement porté par Quintilien sur Démosthène : c’est qu’il fut la règle de l’éloquence elle-même98. […] Au moins nous sommes-nous attaché à montrer sous toutes ses faces, autant que possible, la richesse de cette prodigieuse nature, et à emprunter des modèles aux genres les plus divers où a excellé Bossuet. […] Il faut de préférence, dire avec l’abbé Maury que « Bourdaloue a été un des plus beaux ouvrages de Bossuet », qu’il a su imiter à la manière des grands esprits, sans se dépouiller de sa propre originalité. […] Vous verrez que nos bons écrivains, Fénelon, Bossuet, Racine, Despréaux362, employaient toujours le mot propre.