Vous voyez que les deux poëtes laissent au lecteur le soin de faire mentalement entre la louange et l’encens, entre Napoléon et l’aigle, une comparaison qui amène la métaphore elliptique, pour ainsi dire, qu’ils ont employée. […] « Il faut, dit Quintilien, avoir soin d’être conséquent, et ne pas faire comme beaucoup de gens qui, après avoir commencé par une tempête, finissent par un incendie ou une ruine ; ce qui est extrêmement vicieux102. » Condillac explique ce que c’est qu’une métaphore préparée, en citant madame de Sévigné : « Vous êtes bonne quand vous dites que vous avez peur des beaux esprits. […] Evitez avec soin dans vos métaphores l’anachronisme et l’abus des mots techniques. […] Veut-il peindre les orages des passions qui grondent dans le cœur du jeune homme, à l’approche de la puberté, « Ulysse, s’écrie-t-il, ô sage Ulysse, prends garde à toi ; les outres que tu fermais avec tant de soin sont ouvertes ; les vents sont déjà déchaînés ; ne quitte plus un moment le gouvernail, ou tout est perdu. » Et dans son cinquième livre, quel charme n’ajoute pas l’allusion au tableau de la visite de Sophie dans l’atelier du menuisier où travaille Emile ?
Il ne voit rien dans de si faibles avantages qui soit assez bon et assez solide pour remplir son cœur, et pour mériter ses soins et ses désirs ; il a même besoin d’efforts pour ne les pas trop dédaigner. […] Pascal a dit : « On charge les hommes, dès l’enfance, du soin de leur honneur, de leur bien, de leurs amis, et encore du bien et de l’honneur de leurs amis… Ainsi on leur donne une charge et des affaires qui les font tracasser dès la pointe du jour. […] Il ne faudrait que leur ôlertons ces soins ; car alors ils se verraient, ils penseraient à ce qu’ils sont, d’où ils viennent, où ils vont, etc »(Pensées, art. […] Bossuet a dit : « Ces terres et ces seigneuries qu’il avait ramassées comme une province, avec tant de soins et de travail, se partageront en plusieurs mains, et tous ceux qui verront ce grand changement diront, en levant les épaules et en regardant avec étonnement les restes de cette fortune ruinée : Est-ce là que devait aboutir toute cette grandeur formidable au monde ? […] ne vous reposez point sur vos descendants pour le soin de votre mémoire et pour la durée de votre nom : les titres passent, la faveur s’évanouit, les dignités se perdent, les richesses se dissipent, et le merite dégénère.
» Libre d’ambition, de soins debarrassé, » Je me plais dans le rang où le ciel m’a placé : » Et, pauvre sans regret, ou riche sans attache, » L’avarice jamais au sommeil ne m’arrache. […] Crois-tu la conserver sans soins ? […] Le sage trouve tout cela dans son âme, et il est difficile au lecteur de ne pas ouvrir la sienne à ses discours : Heureux qui de ses mains cultive les sillons Où son champêtre aïeul planta ses pavillons, Qui demande à la terre un tribut légitime, Pour nourrir les mortels, l’épuise et la ranime, Et par l’utile effort d’un soin toujours nouveau, En devient l’économe et non pas le fardeau. […] Quand pourrai-je, tantôt goûtant un doux sommeil, Et des bons vieux auteurs amusant mon réveil, Tantôt ornant sans art mes rustiques demeures, Tantôt laissant couler mes indolentes heures, Boire l’heureux oubli des soins tumultueux, Ignorer les humains, et vivre ignoré d’eux !
Pour la parfaite symétrie du diseours, il eût fallu, sans doute, que l’opposition entre la condition des grands et celle des autres hommes eût été nettement dessinée des deux parts ; mais on peut dire, pour justifier l’écrivain, d’abord qu’il est aisé de conclure l’une de l’autre, et qu’en laissant ee soin à l’auditeur, l’orateur a acquis le mérite de la précision ; ensuite que l’antithèse prêtant à des développements plus brillants et plus complets dans les deux articles qui suivent, il pouvait se dispenser de la formuler ici, et que, en la supprimant ainsi d’un côté pour la conserver de l’autre, il a obtenu la variété. […] Mais n’oubliant pas qu’il s’adresse spécialement ici aux hautes classes de la société ; que, s’il parle des autres hommes, ce n’est que d’une façon accessoire et pour faire ressortir la position des grands, l’orateur s’arrête plus longtemps sur ces derniers ; il explique quel résultat produit chez eux, dans le domaine de la passion, ce privilége de la naissance qui, leur ayant donné tout le reste, leur permet de s’occuper exclusivement du plaisir, sans en être distraits par les soins de la fortune. […] Les soins qu’elle exige sont autant de moments dérobés à la volupté ; le désir de parvenir suspend du moins des passions qui de tout temps en ont été l’obstacle : on ne saurait allier les mouvements sages et mesurés de l’ambition avec le loisir, l’oisiveté, et presque toujours le dérangement et les extravagances du vice ; en un mot la débauche a toujours été l’écueil inévitable de l’élévation ; et jusqu’ici les plaisirs ont arrêté bien des espérances de fortune et l’ont rarement avancée. […] La naissance leur a tout donné ; ils n’ont plus qu’à jouir, pour ainsi dire, d’eux-mêmes ; leurs ancêtres ont travaillé pour eux ; le plaisir devient, pour ainsi dire, l’unique soin qui les occupe ; ils se reposent de leur élévation sur leurs titres ; tout le reste est pour les passions.
Mais de vos premiers ans quelles mains ont pris soin ? […] Tous les jours je l’invoque, et d’un soin paternel Il me nourrit des dons offerts sur son autel4. […] En vain de ce présent ils m’auraient honoré Si votre cœur devait en être séparé ; Si tant de soins ne sont adoucis par vos charmes1, Si, tandis que je donne aux veilles, aux alarmes, Des jours toujours à plaindre et toujours enviés2, Je ne vais quelquefois respirer à vos pieds. […] Songez-y donc, madame, et pesez en vous-même Ce choix digne des soins d’un prince qui vous aime, Digne de vos beaux yeux trop longtemps captivés, Digne de l’univers à qui vous vous devez4.
Comme défauts dans la confirmation on peut recommander d’éviter : 1° le soin de prouver ce qui est évident ; 2° le souci d’épuiser une preuve suffisamment saisie par l’auditeur ; 3° la précaution de relever des détails futiles ou surabondants. […] Il aura soin à cet effet de réduire à quelques syllogismes toute l’argumentation qu’on lui a opposée, tantôt il devra employer l’analyse, pour découvrir, en jetant à bas toute la pompe des ornements, si les pensées sont vraies, si on n’a point donné pour certain ce qui était douteux, ou pour avouer ce qui était contesté. […] 4° Parmi ces matériaux, il choisit les plus beaux qu’il fait travailler avec soin, et rejette ceux qui sont calcinés ou de mauvaise qualité. — C’est le choix des pensées et le travail préliminaire qui doit décider de leur admission dans la composition.
Joubert disait ailleurs à une personne qu’il voyait fléchir sous le poids de ses tristesses : « La vie est un devoir si le soin de l’entretenir est le seul dont il plaise au ciel de nous charger, il faut attiser ce feu sacré, en s’y chauffant de son mieux jusqu’à ce qu’on vienne nous dire : c’est assez. » 1. […] Montaigne a dit : « Nous troublons la vie par les soins de la mort, et la mort par les soins de la vie : l’une nous ennuie, l’autre nous effraye. » 1.
Relisez avec soin la plupart des ouvrages qui ont paru de 1750 à 1760, pièces de théâtre, romans, écrits philosophiques, discours académiques, compositions sérieuses et légères ; examinez le caractère général que présente en ces divers écrits la prose française : on la dirait épuisée, étiolée. […] Il a redonné du ton à la langue, mais aux dépens du naturel ; il a porté le soin jusqu’à l’afféterie, laissé paraître l’effort, prodigué les grands mouvements, gâté souvent l’éloquence par la déclamation, et frayé la route à la rhétorique. […] Ainsi, pour produire l’illusion, on a mis au théâtre un grand soin dans ces derniers temps à la vérité historique du costume2.
Bécanes, dont la plus touchante est celle où sont énumérés les soins donnés à une madone par la bergère Thestylis, nous n’avons point encore de pastorales véritablement chrétiennes. […] Pan a soin des brebis, Pan a soin des pasteurs, Et Pan peut me venger de toutes vos rigueurs.
Par les soins d’un si grand roi, la France entière n’est plus, pour ainsi parler, qu’une seule forteresse qui montre de tous côtés un front redoutable. […] mais ce sont là les soins de l’autorité, ce n’en est pas le plaisir. […] Le duc d’Enghien eut autant de soin de les épargner qu’il en avait pris pour les vaincre. […] que par les soins de l’homme elle est brillante et pompeusement parée ! […] J’en aurai soin.
. — J’ai placé ce problème après le précédent, parce qu’il m’a semblé que la rédaction en devait être postérieure une première note, jetée d’abord sur des tablettes, est ici développée avec plus de soin. […] xlviii. — Sur ces divers modes, consulter la Notice de Vincent, qui renvoie avec soin aux travaux de ses prédécesseurs.
On m’a souvent pour une obole, J’exige des soins assidus : Si l’on me perd, on se désole ; Si l’on me gagne, on ne m’a plus. […] Autour de moi quelque soin qu’on se donne, Pour être plus poli, je n’en suis pas moins dur.
D’autres temps, d’autres soins. […] Et qui vous a chargé du soin de ma famille ? […] C'était pendant l’horreur d’une profonde nuit ; Ma mère Jézabel devant moi s’est montrée, Comme au jour de sa mort pompeusement parée ; Ses malheurs n’avaient point abattu sa fierté ; Même elle avait encor cet éclat emprunté Dont elle eut soin de peindre et d’orner son visage, Pour réparer des ans l’irréparable outrage : « Tremble, m’a-t-elle dit, fille digne de moi ; Le cruel Dieu des Juifs l’emporte aussi sur toi. […] Le rejet, ou enjambement, un des plus beaux ornements des vers latins, doit être évité avec le plus grand soin dans notre versification. […] J’eus soin de vous nommer, par un contraire choix, Des gouverneurs que Rome honorait de sa voix ; Je fus sourde à la brigue, et crus la renommée ; J'appelai de l’exil je tirai de l’armée, Et ce même Sénèque et ce même Burrhus Qui depuis...
Parure de l’enfance, avec soin conservée, etc. […] Villemain, qui a établi entre elle et la Pharsale de Lucain un curieux parallèle, est une suite de beaux passages plutôt qu’un beau poëme ; mais le style y est en plus d’une rencontre admirable de facilité et de richesse ; et la versification de cette œuvre, au jugement de La Harpe, qui l’a analysée avec beaucoup de soin et généralement bien appréciée, la place parmi les monuments les plus remarquables de la poésie française. […] I, sc. 1 : … Cette croix qui sur vous fut trouvée, Parure de l’enfance, avec soin conservée, etc.
Aussi Fléchier les a-t-il accumulées avec soin pour exciter davantage les regrets dans tous les cœurs. […] Exemple : Le Khalife Omar donne l’ordre d’incendier la bibliothèque d’Alexandrie si merveilleusement enrichie par les soins des Ptolémées, et il établit ainsi son raisonnement : Ou la bibliothèque d’Alexandrie contient ce qui est dans le Khoran, ou elle ne le contient pas ; Si elle le contient, elle est inutile, et il faut la brûler ; Si elle ne le contient pas, elle est inutile encore ; donc il faut la brûler également, comme étant inutile. […] 1° Exemple à pari, ou de parité : François Ier mit tous ses soins et son orgueil à protéger les lettres et les arts en France : aussi Louis XIV, prenant ce prince pour modèle, favorisa-t-il les artistes, les hommes de lettres, et les génies de tout genre, pour rendre son nom et son règne à jamais célèbres. […] Que ne me laissais-tu le soin de ma vengeance ? […] Nous le verrions encor nous partager ses soins : Il m’aimerait peut-être ; il le feindrait du moins.
L’orateur, emporté par son imagination, supprime le troisième terme et laisse à l’auditeur le soin de le suppléer. […] Cur. — Mais admettons que toutes ces circonstances soient aussi contraires à l’accusé qu’elles lui sont favorables, et que le hasard ait pris autant de soin à le charger, qu’il en a mis à le disculper, il resterait encore à démontrer qu’il avait quelque intérêt à commettre un acte si détestable.