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23. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section quatrième. Genre Démonstratif. Les Panéryriques. — Chapitre VI. Des éloges funèbres. »

» Si quelqu’un d’entre eux mérita un reproche, quels yeux oseront percer le voile dont elle a couvert leurs faiblesses ? […] combien l’avilissement qui suivrait un moment de faiblesse, est-il plus insupportable à des cœurs généreux qu’une mort, oserai-je dire, insensible, qui surprend le guerrier à l’instant où il n’est pénétré que de la conscience de ses forces et du sentiment de la félicité publique ?

24. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Voiture, 1598-1648 » pp. 21-25

Mais s’il eût manqué au premier, ceux qui crient à cette heure que ç’a été une résolution téméraire, hors de temps1 et au-dessus de nos forces, de vouloir attaquer et abattre celles d’Espagne, n’auraient-ils pas dit qu’il ne fallait pas recommencer une entreprise où trois de nos rois avaient manqué, et à laquelle le feu roi n’avait osé penser ? […] À dire la vérité, ç’a été trop de hardiesse et de violence à vous d’avoir, à l’âge où vous êtes, choqué deux vieux capitaines que vous deviez respecter, quand ce n’eût été que pour leur expérience ; fait tuer le pauvre comte de Fontaine1, qui étoit à ce qu’on dit, un des meilleurs hommes des Flandres, et à qui le prince d’Orange2 n’avoit jamais osé toucher ; pris seize pièces de canon qui appartenoient à un prince, oncle du roi, frère de la reine, et avec qui vous n’aviez jamais eu de différend, enfin mis en désordre les meilleures troupes des Espagnols, qui vous avoient laissé passer avec tant de bonté.

25. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Bourdaloue, 1632-1704 » pp. 133-137

Ce qui fit un héros du prince de Condé J’appelle le principe de ces grands exploits cette ardeur martiale qui ; sans témérité ni emportement, lui faisait tout oser et tout entreprendre ; ce feu qui, dans l’exécution, lui rendait tout possible et tout facile ; cette fermeté d’âme que jamais nul obstacle n’arrêta, que jamais nul péril n’épouvanta, que jamais nulle résistance ne lassa, ni ne rebuta ; cette vigilance que rien ne surprenait ; cette prévoyance à laquelle rien n’échappait ; cette étendue de pénétration avec laquelle, dans les plus hasardeuses occasions, il envisageait d’abord tout ce qui pouvoit ou troubler, ou favoriser l’événement des choses : semblable à un aigle dont la vue perçante fait en un moment la découverte de tout un vaste pays ; cette promptitude à prendre son parti, qu’on n’accusa jamais en lui de précipitation, et qui, sans avoir l’inconvénient de la lenteur des autres, en avait toute la maturité ; cette science qu’il pratiquait si bien, et qui le rendait si habile à profiter des conjonctures, à prévenir les desseins des ennemis presque avant qu’ils fussent conçus, et à ne pas perdre en vaines délibérations ces moments heureux qui décident du sort des armées ; cette activité que rien ne pouvait égaler, et qui, dans un jour de bataille, le partageant, pour ainsi dire, et le multipliant, faisait qu’il se trouvait partout, qu’il suppléait à tout, qu’il ralliait tout, qu’il maintenait tout : soldat et général tout à la fois, et, par sa présence, inspirant à tout le corps d’armée, jusqu’aux plus vils membres qui le composaient, son courage et sa valeur, ce sang-froid qu’il savait si bien conserver dans la chaleur du combat, cette tranquillité dont il n’était jamais plus sûr que quand on en venait aux mains, et dans l’horreur de la mêlée ; cette modération et cette douceur pour les siens, qui redoublaient à mesure que sa fierté pour l’ennemi était émue ; cet inflexible oubli de sa personne, qui n’écouta jamais la remontrance, et auquel constamment déterminé, il se fit toujours un devoir de prodiguer sa vie, et un jeu de braver la mort ; car tout cela est le vif portrait que chacun de vous se fait, au moment que je parle, du prince que nous avons perdu ; et voilà ce qui fait les héros1. […] Massillon a dit : « L’ambition, ce désir insatiable de s’élever au-dessus et sur les ruines même des autres ; ce ver qui pique le cœur et ne le laisse jamais tranquille ; cette passion qui est le grand ressort des intrigues et de toutes les agitations des cours, qui forme les révolutions des États, et qui donne tous les jours à l’univers de nouveaux spectacles ; cette passion qui ose tout, et à laquelle rien ne coûte, rend malheureux celui qui en est possédé.

26. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XX. des qualités accidentelles du style. — élégance, finesse, naiveté, enjouement  » pp. 274-288

L’Hippolyte de Pradon ose dire à Aricie : Depuis que je vous vois, j’abandonne la chasse, Elle fit autrefois mes plaisirs les plus doux, Et quand j’y vais, ce n’est que pour penser à vous. […] Sa lettre à Horace est un chef-d’œuvre, comme vérité, et, si j’ose le dire, comme tour de force. […] Oserai-je dire qu’ils ont aussi parfois le défaut de leur qualité ?

27. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Balzac. (1594-1655.) » pp. 2-6

Mais les plus intelligents étaient les plus retenus et les plus timides à se faire entendre ; ils n’osaient se déclarer sur quoi que ce soit ; ils ne parlaient qu’en tremblant et en hésitant des affaires de l’autre vie : ils consultaient et délibéraient toujours, sans jamais se résoudre ni prendre parti. […] Il y a une faiseuse de bouquets, je ne l’ose nommer Eloquence, qui est toute peinte et toute dorée, qui semble toujours sortir d’une boîte, qui n’a soin que de s’ajuster et ne songe qu’à faire la belle ; qui, par conséquent, est plus propre pour les fêtes que pour les combats, et plaît davantage qu’elle ne sert2, quoique néanmoins il y ait des fêtes dont elle déshonorerait la solennité et des personnes à qui elle ne donnerait point de plaisir.

28. (1866) Morceaux choisis des classiques français, à l’usage des classes supérieures : chefs d’œuvre des prosateurs et des poètes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouvelle édition). Classe de seconde

Je m’en souviens ; et, après ce que vous avez entendu, comment osé-je parler, comment daignez-vous m’entendre ? […] Les prédicateurs n’osent plus parler pour les pauvres, à la vue d’une foule de créanciers dont les clameurs montent jusqu’au ciel. […] Or, j’ose dire ici que la garde de ce précieux dépôt est principalement remise en vos mains et confiée à votre fidélité. […] Il n’avait pour garnison que quatre cents soldats et les citoyens, et il osa se défendre. […] Si j’osais vous donner un conseil, ce serait de songer à être simple, à ourdir votre ouvrage d’une manière bien naturelle, bien claire, qui ne coûte aucune attention à l’esprit du lecteur.

29. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — Boileau, (1636-1711.) » pp. 212-225

On sera ridicule, et je n’oserai rire3 ! […] C’est ainsi que Lucile, appuyé de Lélie, Fit justice en son temps des Cotins d’Italie, Et qu’Horace, jetant le sel à pleines mains, Se jouait aux dépens des Pelletiers romains4 C’est elle qui, m’ouvrant le chemin qu’il faut suivre, M’inspira, dès quinze ans, la haine d’un sot livre, Et, sur ce mont fameux où j’osai la chercher, Fortifia mes pas et m’apprit à marcher. […] Trait emprunté à Perse, qui dans sa Ier satire avait osé, dit-on, désigner par là Néron à la moquerie des Romains.

30. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Boileau 1636-1711 » pp. 401-414

Les stances avec grâce apprirent à tomber, Et le vers sur le vers n’osa plus enjamber. […] » Nous lisons dans Régnier : Maints fascheux accidents surprennent sa vieillesse : Soit qu’avec du soucy gaignant de la richesse, Il s’en deffend l’usage, et craint de s’en servir, Que tant plus il en a, moins s’en peut assouvir ; Ou soit qu’avec froideur il face toute chose, Imbécile, douteux, qui voudroit et qui n’ose, Dilayant, qui tousjours a l’œil sur l’avenir, De léger il n’espère et croit au souvenir : Il parle de son temps, difficile et sévère ; Censurant la jeunesse, use des droits d’un père Il corrige, il reprend, hargneux en ses façons, Et veut que tous ses mots soient autant de leçons. […] Il est plaisant qu’il soit permis de dire aux gens par écrit ce qu’on n’oserait pas leur dire en face !

31. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section quatrième. Genre Démonstratif. Les Panéryriques. — Chapitre IX. Parallèle des Oraisons funèbres de Condé, par Bossuet et de Turenne, par Fléchier et Mascaron. »

L’un, par de vifs et continuels efforts, emporte l’admiration du genre humain, et fait taire l’envie : l’autre jette d’abord une si vive lumière qu’elle n’ose l’attaquer. — Et afin que l’on vît toujours dans ces deux hommes de grands caractères, mais divers, l’un emporté d’un coup soudain, meurt pour son pays comme un Judas Machabée ; l’autre, élevé par les armes au comble de la gloire, comme un David, comme lui meurt dans son lit, en publiant les louanges de Dieu et instruisant sa famille, et laisse tous les cœurs remplis tant de l’éclat de sa vie que de la douleur de sa mort ». […] C’est alors que les impies Salmonées osent imiter le tonnerre de Dieu, et répondre par les foudres de la terre aux foudres du ciel ; c’est alors que les sacrilèges Antiochus n’adorent que leurs bras et leurs cœurs, et que les insolens Pharaon, enflés de leur puissance, s’écrient : C’est moi qui me suis fait moi-même ».

32. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Modèles

On dirait qu’elle n’ose se montrer au grand jour comme la reine des fleurs, et pourquoi ? […] Il n’ose avouer un parent pauvre ou peu connu . […] Vous avez fait mention de ma petite Notre-Dame de plomb que je baisais dès que je voulais faire un mauvais coup ; enfin de la croix de St-Lô, par laquelle je n’osais jurer sans vouloir garder mon serment, parce que j’aurais cru mourir dans l’année si j’y avais manqué. […] Quel est l’homme aujourd’hui, si saint, si haut placé qu’il fût, qui oserait, si Dieu descendait visiblement jusqu’à lui, je ne dis pas faire des représentations, mais dire même un seul mot ? […] Moi, je vais à l’école ; il faut apprendre à lire ; Mais le maître est tout noir et je n’ose pas rire !

33. (1853) Exercices de composition et de style ou sujets de descriptions, de narrations de dialogues et de discours

Et le manoir, que nul n’osa plus habiter, tomba en ruines. […] Personne n’ose exposer sa vie. […] Comment osera-t-il se présenter ? […] des assassins osent choisir un tel prince pour leur protecteur ! […] Pieux et sage, aurait-il osé insulter les dieux par une prière sacrilège ?

34. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre quatrième. De la disposition oratoire, ou de l’Ordre mécanique du discours. — Chapitre II. Application du chapitre précédent au discours de Cicéron pour Milon. »

Leurs cris, s’ils osent en faire entendre aujourd’hui, seront un motif de plus pour vous, de conserver un citoyen qui brava constamment, pour votre salut, et cette classe méprisable et ses insolentes clameurs ». […] J’ai tué, moi (car il oserait le dire, après avoir délivré la patrie au péril de ses jours) ; j’ai tué celui que des femmes de la première distinction ont surpris voulant souiller, par un adultère infâme, les plus saints des mystères ;celui que le sénat a plus d’une fois résolu de punir de mort, pour expier, par son supplice, la profanation de nos cérémonies religieuses ; celui qui, à la tête de vils esclaves, a chassé de Rome un citoyen que le sénat, que le peuple, que toutes les nations regardaient comme le conservateur de Rome, et le sauveur de toutes les nations ; celui qui donnait et ôtait les royaumes, qui distribuait à son gré toute la terre ; celui, etc. ». […] Tout ce que je vous demande, Messieurs, c’est d’oser, en donnant votre suffrage, n’en croire que vos sentiments.

35. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre II. De l’emploi des figures dans les écrivains sacrés. »

138 … Celui qui fait sa demeure Dans les royaumes éternels ; Qui suit en tous lieux, à toute heure, Les pas incertains des mortels : Celui qui leur envoie un maître, Ce dieu qu’ils osent méconnaître, Ou qu’ils feignent de mépriser, Entend les blasphèmes frivoles Dont ils amusent les idoles Sur eux prêtes à s’écraser. […] La Justice et la Paix s’embrassent devant nous : Le glaive étincelant d’un royaume jaloux N’ose plus aujourd’hui s’irriter contre un autre. […] « Les peuples les plus redoutables ont été pour moi comme un nid de petits oiseaux, qui s’est trouvé sous ma main : j’ai réuni sous ma puissance tous les peuples de la terre, comme on ramasse quelques œufs que la mère a ahandonnés ; et il ne s’est trouvé personne qui osât seulement agiter son aile, ou faire entendre un faible cri ».

36. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Fléchier. (1632-1710.) » pp. 69-75

Nous parlons devant Dieu en Jésus-Christ, dit l’Apôtre1 ; et je puis dire comme lui2 : « Vous savez, mes frères, que la flatterie jusqu’ici n’a pas régné dans les discours que je vous ai faits. » Oserais-je dans celui-ci, où la franchise et la candeur font le sujet de nos éloges, employer la fiction et le mensonge ? […] Quel plaisir même pour ceux qui, par crainte ou par bienséance, n’osent médire des personnes qu’ils n’aiment pas, de les entendre décrier, sans hasarder de se décrier eux-mêmes !

37. (1872) Recueil de compositions françaises pour préparer au discours latin les candidats au baccalauréat ès-lettres. Première série

Mais quels sont-ils ces hommes qui préparent la guerre, qui osent affronter les glaives de César vainqueur dans de si nombreux combats ? […] Mes accusateurs eux-mêmes ont-ils osé dire que de pareils faits puissent m’être reprochés ? […] Un seul homme, Démarate de Lacédémone, réfugié à la cour de ce prince, osa lui dire la vérité. […] penses-tu que les Grecs oseront se mesurer avec moi ? […] J’ai osé l’enfreindre, parce que ce n’était ni Jupiter, ni la justice compagne des dieux Mânes, qui avaient publié cette loi.

38. (1867) Rhétorique nouvelle « Première partie. L’éloquence politique » pp. 34-145

Il put aborder sans détour des sujets que les autres orateurs n’osaient toucher ou ne touchaient qu’en tremblant. […] Ils sentirent bien en effet que celui qui osait leur parler ainsi n’était pas leur ennemi, mais leur ami dévoué, qu’il ne les blâmait pas pour le plaisir de les blâmer, mais pour obéir à sa conscience qui lui imposait le pénible devoir de les sauver en les affligeant. […] A mesure qu’il entre plus avant dans la confiance de son auditoire, il s’enhardit peu à peu, il ose enfin aborder de front la redoutable loi. […] Des orateurs vendus à Philippe ont osé entreprendre à la tribune la justification de ce prince. […] Ne s’est-il pas arrogé le droit exorbitant de consulter le premier l’oracle d’Apollon, après nous avoir enlevé à nous et aux Thessaliens et aux autres Amphictyons ce privilége que les Grecs eux-mêmes n’auraient pas osé nous disputer ?

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