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95. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Thiers. Né en 1797. » pp. 513-521

La netteté, la justesse, le naturel, l’aisance, un langage limpide, calme et transparent : telles sont ses qualités ordinaires. […] En effet, avec ce que je nomme l’intelligence, on démêle bien le vrai du faux ; on ne se laisse pas tromper par les vaines traditions ou les faux bruits de l’histoire ; on a de la critique, on saisit bien le caractère des hommes et des temps ; on n’exagère rien, on ne fait rien trop grand ou trop petit, on donne à chaque personnage ses traits véritables ; on écarte le fard, de tous les ornements le plus malséant en histoire, on peint juste ; on entre dans les secrets ressorts des choses, on comprend et on fait comprendre comment elles se sont accomplies ; diplomatie, administration, guerre, marine, on met ces objets si divers à la portée de la plupart des esprits, parce qu’on a su les saisir dans leur généralité intelligible à tous ; et quand on est arrivé ainsi à s’emparer des nombreux éléments dont un vaste récit doit se composer, l’ordre dans lequel il faut les présenter, on le trouve dans l’enchaînement même des événements ; car celui qui a su saisir le lien mystérieux qui les unit, la manière dont ils se sont engendrés les uns les autres, a découvert l’ordre de narration le plus beau, parce que c’est le plus naturel ; et si, de plus, il n’est pas de glace devant les grandes scènes de la vie des nations, il mêle fortement le tout ensemble, le fait succéder avec aisance et vivacité ; il laisse au fleuve du temps sa fluidité, sa puissance, sa grâce même, en ne forçant aucun de ses mouvements, en n’altérant aucun de ses heureux contours ; enfin, dernière et suprême condition, il est équitable, parce que rien ne calme, n’abat les passions comme la connaissance profonde des hommes. […] « Abondante, aisée, simple et lumineuse, son éloquence sait prêter un intérêt qui captive aux arides détails des affaires les plus compliquées, parcourir sans s’égarer tous les détours des questions les plus vastes, répandre sur les plus obscures le jour éclatant de l’évidence, semer comme en se jouant sur sa route les vérités brillantes et les mouvements heureux, et, cachant une méthode réfléchie sous les dehors d’une improvisation facile, déployer un art d’autant plus savant qu’il conserve tout le charme de l’abandon et tout l’entraînement du naturel ; reproduire enfin cette grandeur négligée qu’on admirait dans M.

96. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre VII. Des différents exercices de composition. »

en sont-elles moins naturelles ? […] Si l’on peint un objet de fantaisie, il n’y a pas d’exactitude à rechercher ; on ne copie plus la nature, on invente ; pourtant la description ne doit pas sortir du naturel ; si elle tombe dans l’invraisemblable, elle n’a plus aucun charme, parce que toute illusion disparaît. […] La vraisemblance tient souvent à l’art du narrateur : s’il dispose son récit d’une manière naturelle, en donnant aux événements une gradation habile, une combinaison ingénieuse, il peut rendre vraisemblables les choses les plus extraordinaires. […] N’abandonnez pas une idée que vous ne l’ayez développée convenablement passez ensuite à une autre par une transition naturelle : l’ordre ici est indispensable, car il s’agit de prouver. […] Apostrophe pleine de mouvement et de naturel.

97. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section troisième. La Tribune sacrée. — Chapitre III. Idée de l’Éloquence des Saints-Pères. »

On ne croyait pas qu’il fût permis de parler d’une manière simple et naturelle. […] Ce grand homme ne s’est point garanti des défauts de son siècle, auxquels sa vivacité naturelle lui donnait peut-être trop de pente.

98. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre premier. »

Au reste, la grande et peut-être l’unique règle de l’éloquence populaire, est de s’accommoder au naturel, au génie, au goût du peuple à qui l’on parle : c’est ce que Démosthène et Cicéron avaient parfaitement senti, et ce qu’ils ont scrupuleusement observé. […] La passion s’enflamme, les figures les plus hardies deviennent naturelles, parce qu’elles sont naturellement amenées : la chaleur du discours, l’élan du sentiment se communiquent de proche en proche, les esprits sont convaincus ; les cœurs entraînés, et la vérité triomphe.

99. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Chapitre premier. De l’art de la composition en général. »

Il ne faut pourtant pas tomber dans l’excès contraire, et corriger sans cesse de manière à enlever à un ouvrage son animation, son naturel, sa facilité : il y a des bornes à tout. […] Si toutes les parties de la composition s’enchaînent et vont au même but, les idées sa rangent d’eues- mêmes dans un ordre naturel ; cette liaison produit la clarté, et de la clarté naît l’intérêt, marque infaillible de succès.

100. (1882) Morceaux choisis des prosateurs et poètes français des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cours supérieur. Poètes (2e éd.)

En même temps, ils sacrifient le naturel au goût conventionnel, raffiné, dédaigneux et exclusif d’une société fastueuse. […] Aucun poète français ne brille par le naturel autant que lui. […] Mais qu’on ne s’y trompe pas ; ce naturel exquis était le fruit d’un travail assidu. […] Si vous ne vous voulez priver d’un bien si doux, De ses dons naturels au moins contentez-vous. […] Mais le naturel caustique le dominait et les traits mordants venaient à son esprit sans qu’il les cherchât et coulaient de sa plume sans qu’il les retînt.

101. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre V. Du Style en général, et de ses qualités. »

Ce principe est si naturel, et devient d’une exécution si indispensable, qu’il semblerait presque inutile de le rappeler ici. […] Tout cela contribue à l’élégance, mais n’y suffit pas ; elle exige encore une liberté noble, un air facile et naturel, qui, sans nuire à la correction, déguise l’étude et la gêne. Le point essentiel et difficile est de concilier l’élégance avec le naturel ; il y en a deux moyens : le choix des idées et des choses, et le talent de placer les mots.

102. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Guizot Né en 1787 » pp. 247-250

Que sera-ce lorsque les nœuds du sang, de la reconnaissance, de l’habitude, s’uniront pour changer en affection et en devoirs cet intérêt naturel que les premiers et les derniers jours de l’homme sont en possession de nous inspirer1 ? […] C’est la jeunesse, ce sont ses ignorances naturelles et ses préoccupations passionnées qui nous rendent exclusifs et âpres dans nos jugements sur autrui.

103. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Saint-Marc Girardin Né en 1801 » pp. 275-278

Son style charme tous les connaisseurs par sa souplesse, son naturel, l’aisance de son mouvement, sa vivacité sémillante, et la verve soutenue d’une haute raison1. […] Sa parole ne se gonfle pas ; elle est simple, naturelle et vive comme sa pensée même.

104. (1881) Morceaux choisis des classiques français des xvie , xviie , xviiie et xixe siècles, à l’usage des classes de troisième, seconde et rhétorique. Prosateurs

Vrayement, le bon vrayement, ie le reservoys pour le seigneur de Candale, comme bien congnoissant son naturel. […] Comme vous sçavez estre du mouton le naturel tousjours suyvre le premier, quelque part qu’il aille ? […] À Paris, où il s’établit ensuite, il travailla à la décoration des Tuileries, et fit sur son art des conférences (1575-1584), pendant le cours desquelles il publia le plus célèbre de ses ouvrages, intitulé : Discours admirable de la Nature des Eaux et Fontaines, tant naturelles qu’artificielles ; des Métaux, des Sels et Salines, des Pierres, des Terres, du Feu et des Emaux, avec plusieurs autres excellents secrets des choses naturelles. […] Il est aussi naturel à Racine et à Molière qu’à un duc et pair d’être à la cour. […] Quand on voit le style naturel, on est tout étonné et ravi ; car on s’attendoit de voir un auteur, et on trouve un homme.

105. (1872) Cours élémentaire de rhétorique

Dès lors eurent lieu des aperçus, des observations sur les procédés simples et naturels de cette primitive éloquence. […] C’est là la marche naturelle des passions : elles naissent, grandissent, éclatent. […] Joignez-y le naturel et l’harmonie. […] Elle consiste dans une succession naturelle et sensible de sons et dans la parfaite concordance de ces mêmes sons avec les objets dont ils sont l’expression. […] si naturelle à cet âge, qu’on n’a rien à redouter sous l’égide paternelle !

106. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Louis XIV, 1638-1715 » pp. 146-149

Testament politique Fragment Les rois sont souvent obligés à faire des choses contre leur inclination, et qui blessent leur bon naturel. […] Il faut se garantir contre soi-même, prendre garde à son inclination, et être toujours en défiance de son naturel.

107. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Voltaire, 1694-1778 » pp. 253-281

En les condamnant, nous devons admirer cette langue si pure, si élégante, si naturelle et si facile, qui par sa prestesse et sa justesse prête de l’agrément à toutes les idées. […] Si j’osais vous donner un conseil, ce serait de songer à être simple, à ourdir votre ouvrage d’une manière bien naturelle, bien claire, qui ne coûte aucune attention à l’esprit du lecteur. […] Cependant, comme il y a plus de soixante ans que j’en ai perdu l’habitude, je sens malheureusement qu’il m’est impossible de la reprendre, et je laisse cette allure naturelle à ceux qui en sont plus dignes que vous et moi. […] Pour la poésie, comme pour l’architecture, il faut que tous les morceaux nécessaires se tournent en ornements naturels. […] Kœnig (Samuel), mathématicien allemand (1712-1757), fut pendant trois ans secrétaire dans la maison de la marquise du Châtelet ; puis il occupa à la Haye la chaire de philosophie et de droit naturel.

108. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre V. Ouvrages historiques. »

L’ordre chronologique est toujours celui qui domine l’ensemble ; mais, quand plusieurs événements marchent à peu près de front, on ne peut sauter de l’un à l’autre avec les dates ; il faut, avant de passer au second, que le premier soit connu tout entier, ou au moins par parties assez distinctes pour offrir à l’esprit du lecteur des points d’arrêt ou de repos naturels. […] La liaison des faits dans l’histoire doit être, pour ainsi dire, aussi naturelle que la liaison des divers membres dans le corps humain. […] On distingue plusieurs sortes d’histoires : l’histoire des hommes, considérés dans leurs rapports avec la Divinité, ou l’Histoire de la religion ; l’histoire des hommes, dans leurs rapports entre eux, ou l’Histoire profane ; et l’Histoire naturelle, qui a pour objet les productions de la nature, ses phénomènes, ses variations48. […] Celle-ci contient les principes et les développements de la vraie religion ; elle expose dans le plus grand jour les maximes fondamentales de la loi naturelle ; elle apprend à tous les hommes, quels qu’ils soient, le moyen d’arriver au bonheur solide ; elle renferme les titres de tous les peuples, montre leur origine, leurs établissements divers ; elle éclaire les ténèbres des siècles les plus reculés. […] On les regarde comme supérieurs aux meilleurs historiens modernes ; on trouve qu’ils ont la marche plus libre, plus noble, plus naturelle ; des transitions plus heureuses dans le récit et l’enchaînement des faits ; plus de sagesse, de gravité, de nerf et en même temps de simplicité dans la diction ; des traits plus frappants, des coups de pinceau plus vigoureux dans la peinture des mœurs et des caractères57.

109. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Deuxième partie. Rhétorique. — Chapitre III. — Disposition »

Mais, lorsqu’il se sera fait un plan, lorsqu’une fois il aura rassemblé et mis en ordre toutes les pensées essentielles à son sujet, il s’apercevra aisément de l’instant auquel il doit prendre la plume ; il sentira le point de maturité de la production de l’esprit ; il sera pressé de la faire éclore ; il n’aura même que du plaisir à écrire : les idées se succéderont aisément et le style sera naturel et facile. » Section III. — De la Disposition oratoire Lorsque l’orateur a bien médité son sujet, il en dispose avec soin les différentes parties d’après certaines règles que nous allons indiquer : c’est ce qu’on appelle Disposition oratoire. […] Nous rapportons ici le récit de la bataille de Rocroi : Bataille de Rocroi À la nuit qu’il fallut passer en présence des ennemis, connue un vigilant capitaine, le duc d’Enghien reposa le dernier ; mais jamais il ne reposa plus paisiblement, À la veille d’un si grand jour, et dès la première bataille, il est tranquille, tant il se trouve dans son naturel ; et on sait que le lendemain, à l’heure marquée, il fallut réveiller d’un profond sommeil cet autre Alexandre. […] En résumé, l’ordonnance naturelle du discours demande : 1° Que l’auteur commence par un exorde qui lui concilié la bienveillance et l’attention des auditeurs ; 2° Qu’il expose ce sujet d’une manière claire et brève ; 3° Qu’il raconte le fait principal et les détails avec vérité, et en l’embellissant des ornements du style ; 4° Qu’il confirme, par de bonnes et solides preuves, tout ce qu’il a avancé ; 5° Qu’il réfute tous les arguments qu’on peut lui opposer ; qu’il éclaircisse les difficultés principales qu’on peut lui faire ; 6° Qu’il termine son discours par une péroraison, qui puisse allumer ou éteindre les passions selon le besoin.

110. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Première section. Des genres secondaires de poésie — Chapitre II. Du genre pastoral » pp. 96-112

A cet égard, Théocrite l’emporte sur Virgile ; ses descriptions sont plus riches en beautés naturelles et plus pittoresques que celles du poète latin. […] Si le fond du caractère des bergers doit être une aimable simplicité, il n’est nullement nécessaire qu’ils poussent cette qualité jusqu’à l’excès ; ils peuvent avoir du bon sens et de la réflexion, un esprit vif et prompt, mais toujours naturel, ennemi de l’affectation, de la recherche, des jeux de mots et des subtilités. […] Le naturel dans les couleurs est surtout de l’essence du style bucolique, et le poète ne doit être lui-même que le mieux instruit et le plus ingénieux des bergers.

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