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74. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section première. La Tribune politique. — Chapitre V. De l’Éloquence politique chez les Français. »

., une force d’expression, un caractère d’énergie oratoire, dont elle n’offrait pas encore de modèle, et dont nous multiplierions volontiers les exemples, si ces matières, complètement étrangères, d’ailleurs, aux études des jeunes gens, n’avaient de plus l’inconvénient de rappeler des souvenirs auxquels il est difficile de toucher, sans réveiller des passions. […] Mirabeau, dit un écrivain qui l’a bien connu, avait un grand caractère, des talents rares, quelquefois sublimes ; un choix unique d’expressions, une connaissance profonde du cœur humain : mais il était despote par essence, et, s’il eût gouverné un empire, il eût surpassé Richelieu en orgueil, Mazarin en politique. […] Son goût pour l’intrigue était excessif, et l’on ne doit en chercher la cause que dans ses besoins pécuniaires ; de sorte que ces éclairs brillants de génie, ces expressions de sentiment qui auraient honoré l’homme le plus vertueux, n’étaient pour ce profond machiavéliste qu’une simple spéculation.

75. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre IV. Thomas. »

Dans des réflexions sur la langue poétique, on retrouve la même pesanteur de style, la même recherche d’expressions et de métaphores, toujours empruntées d’objets qui ne pourraient être entendus eux-mêmes qu’à l’aide de métaphores. […] Thomas procède peut-être d’une manière un peu trop uniforme : il emploie trop souvent l’analyse et l’épuise trop souvent : il se sert quelquefois de termes de science et d’art qui présentent à l’esprit des idées trop vagues, comme les mots de calcul, de choc, de résistance, de frottement, expressions qui semblent d’ailleurs un peu sèches, lorsqu’il s’agit de morale et de littérature. Quand il dit, par exemple, que les grands hommes pèsent sur l’univers et l’univers sur eux, cette idée, à force de vouloir être grande, peut n’être pas très claire, et, présentant plusieurs sens, ne vous arrête sur aucun ; choisissant de préférence le terme abstrait, il donne trop souvent à ses phrases une forme métaphysique qui peut fatiguer l’attention du lecteur, d’autant plus que les idées sont accumulées ; il place quelquefois des tournures et des expressions familières qui, entourées de phrases du ton le plus noble, ont un air étranger à sa diction, etc. ».

76. (1897) Extraits des classiques français, seizième, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours moyens. Première partie : prose. [Seizième siècle] « XVIe siècle — Prose — Calvin, 1509-1564 » pp. -

Il ne nous appartient pas de juger l’œuvre du docteur qui, selon l’expression de Bossuet, « remua les bornes une fois posées, et se rendit l’arbitre de sa croyance ». […] Son expression est pleine, sa véhémence exempte de déclamation, son érudition de pédantisme. […] Les traits de sa physionomie disaient par leur expression combien… 7.

77. (1883) Poétique et Rhétorique (trad. Ruelle)

L’une consiste à faire passer dans notre langue toute la pensée et jusqu’aux expressions de l’auteur traduit, avec un tel souci de la fidélité littérale, que l’on retrouve, dans le texte français, le génie même du texte original. […] En effet, cette expression : a-t-il marché ? […] Maintenant, si l’on employait de telles expressions indistinctement, il y aurait énigme ou barbarisme ; énigme, si elles étaient empruntées à des métaphores, barbarisme, si elles l’étaient à des gloses. […] Ces choses sont énoncées au moyen de l’expression propre, ou bien par des gloses et par des métaphores. […] Ou encore les expressions consacrées par l’usage.

78. (1882) Morceaux choisis des prosateurs et poètes français des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cours supérieur. Poètes (2e éd.)

Homme d’instinct plus que d’étude, Régnier ne se fatigue pas à la poursuite de l’expression. […] C’est en poursuivant la vérité des sentiments qu’il rencontre toutes les richesses de l’expression. […] Ces esquisses légères composent, selon la propre expression du poète. […] Il fabriquait ses vers à force de temps, suivant ses propres expressions. […]                                             L’expression est forte.

79. (1811) Cours complet de rhétorique « Notes. »

Le seul Philoctète est dans la nature, parce que les suites de l’injure cruelle qu’il a éprouvée, l’ont livré à toutes les horreurs de la souffrance et du besoin, et qu’il n’y a plus alors d’expressions trop fortes pour suffire à l’explosion d’une haine aussi profonde, d’une rage si longtemps concentrée. […] Les amateurs d’anecdotes littéraires n’ont point oublié que Brébeuf avait d’abord commencé la traduction de l’Énéide, et que, fatigué à chaque instant par les contrariétés que lui faisait éprouver la dissonance perpétuelle de son ton boursouflé, avec la douce mélodie et le charme continu de l’expression de Virgile, il alla confier son embarras à Ségrais son ami, qui, de son côté, suait sang et eau pour se monter au ton de Lucain qu’il essayait de traduire, et que les deux amis se proposèrent et firent un échange, dont les deux poètes latins n’eurent guère à s’applaudir, mais dont Virgile surtout se trouva fort mal. […] Nous avons vu que dans la force même de l’âge, qui doit être celle du talent, M. de La Harpe s’élevait rarement et se soutenait avec peine à une certaine hauteur de pensée ou d’expression : comme le genre et le style tempérés étaient essentiellement les siens, il n’en sort guère que par des efforts d’autant plus pénibles pour le lecteur, qu’il s’aperçoit davantage de ce qu’ils ont coûté. […] Non, sans doute, on n’imite point le génie des choses ; mais il n’est que trop facile de singer celui de l’expression : il n’est que trop facile, et surtout trop commun, de se croire sublime, parce qu’on prodigue de grands mots ; et profond, parce qu’on s’enveloppe à dessein de ténèbres épaisses. […] On admira, dans la Henriade, des descriptions qui eussent étonné Boileau par leur justesse et par la poésie de leur expression.

80. (1882) Morceaux choisis de prosateurs et de poètes des xviii e et xix e siècles à l’usage de la classe de rhétorique

Il est l’expression d’un certain développement d’idées rarement circonscrit dans des dates précises. […] Madame Sand est un plus grand, plus sûr et plus ferme écrivain que Balzac ; elle ne tâtonne jamais dans l’expression. […] En un mot, cette sûreté de maître, qu’elle porte dans l’expression et la description, elle ne l’a pas également dans la réalisation de ses caractères. […] Elle consulte en tout la nature, la suit pas à pas, et en est une fidèle expression. […] La pensée rapide caractérise d’un trait ; or, plus l’expression des arts est vague, plus l’imagination est à l’aise.

81. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section quatrième. Genre Démonstratif. Les Panéryriques. — Chapitre premier. Apologie de Socrate par Platon. »

) Si l’on entend, avec Platon, par diction poétique, l’expression fidèle et l’image sensible de la pensée, présentée pour ainsi dire en relief, il est certain que cette manière d’écrire appartient à l’éloquence, comme à tous les autres genres de poésie ou de littérature. […] Il y a, dans ces divers morceaux, de la force, de l’élévation, de la vraie philosophie ; et, ce qui distingue partout le style de Platon, une noblesse et une dignité soutenues dans la pensée et dans l’expression. […] Le sujet y est sans doute pour quelque chose ; et c’est par la même raison que les éloges d’Hélène et de Busiris, du même auteur, ne sont que de misérables jeux d’esprit où il n’y a rien, absolument rien à recueillir, que cette grande leçon, que toute la pompe du style le plus harmonieux, les périodes les plus heureusement enchaînées, les chutes les plus laborieusement étudiées, le choix même des expressions et des tournures, ne rachèteront jamais, auprès du lecteur judicieux, la sécheresse du sujet et la stérilité des idées.

82. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Deuxième partie. Préceptes des genres. — Chapitre troisième. Du discours. »

Comme les moindres expressions concourent à rendre fier le vainqueur ! […] 1° Pour faire remarquer une expression, la voix appuie sur son émission. […] Cependant on les place quelquefois au milieu de vers d’une mesure plus longue, quand on veut obtenir un effet de surprise, ou faire remarquer une expression. […] L’hiatus n’est point vicieux : 1° Quand on veut citer des expressions proverbiales et des phrases toutes faites. […] En faveur de l’harmonie, la licence autorise des expressions semblables à celle-ci : .....

83. (1876) Traité de versification latine, à l'usage des classes supérieures (3e éd.) « PREMIÈRE PARTIE. DE L'ÉLÉGANCE LATINE. — CHAPITRE III. De la disposition des mots qui composent le discours. » pp. 78-143

Dès lors, la parole, qui doit être l’expression fidèle de nos pensées, se produit avec des couleurs aussi vives, et en un style aussi animé. […] Cicéron blâme avec raison les expressions suivantes : Habeo istam ego perterricrepam. […] Au commencement, parce que l’auditeur, prêtant une attention toute nouvelle, remarque mieux les beautés et les défauts des premières expressions. […] Toutes ces expressions sont admirables. […] quelle harmonie dans ces expressions !

84. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Première section. Des genres secondaires de poésie — CHAPITRE PREMIER. Du genre léger on des poésies fugitives » pp. 75-95

L’épitaphe à la gloire d’un mort est de toutes les louanges la plus noble et la plus pure, surtout lorsqu’elle n’est que l’expression vraie du caractère et des actions d’un homme de bien. […] On n’y souffre ni le moindre écart du sujet, ni un vers faible ou négligé, ni une expression impropre ou superflue, ni la répétition du même mot. La précision et la justesse des pensées, l’élégance des expressions, l’harmonie des vers, la richesse des rimes n’y doivent rien laisser à désirer. […] Tous les mots ne sont pas propres à faire une charade ; il faut qu’ils présentent une expression distincte pour chaque division que forme le mot.

85. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre XXI. » pp. 120-121

Expression qu’on trouvait dans le poëte Timothée. […] Expressions semblables dans : Platon, Lois, VI, p. 767 C  Eschyle, Agamemnon, 1132 (1123)  Alexis, cité par Stobée, CXVI, 19.

86. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre VIII. de la disposition. — unité, enchainement des idées  » pp. 98-117

On ne peut donc trop s’en occuper ; c’est même le seul moyen d’affermir, d’étendre et d’élever ses pensées ; plus ou leur donnera de substance et de force par la méditation, plus il sera facile ensuite de les réaliser par l’expression. » Le premier point à méditer dans la disposition d’un ouvrage, c’est l’unité. […] Et observez que cette fusion savante n’ôte à aucune des trois grandes divisions de l’ouvrage son caractère propre et spécial ; elles n’ont de commun, outre l’éclat et la majesté d’une expression qui répond toujours à l’élévation de la pensée, que cette précieuse unité de dessein. […] En partageant l’admiration du professeur du Lycée pour l’expression et l’harmonie de ce morceau, nous sommes loin d’en regarder la disposition comme irrépréhensible. […] Assurément ces quatre premières strophes sont admirables, mais je retrancherais la cinquième, toute gracieuse qu’en est la forme et l’expression : Je n’ai point l’heureux don de ces esprits faciles, Pour qui les doctes sœurs, caressantes, dociles, Ouvrent tous leurs trésors, Et qui, dans la douceur d’un tranquille délire, N’éprouvèrent jamais, en maniant la lyre, Ni fureurs, ni transports. […] Jusqu’ici, comme vous voyez, à l’exception de la strophe 5 et peut-être de la strophe 7, la marche de l’ode se poursuit à la fois régulièrement et poétiquement, et comme certains développements sont magnifiques d’imagination et d’expression, le poëte a su concilier la logique avec ce beau désordre qui doit être un effet de l’art.

87. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Seconde section. Des grands genres de poésie — Chapitre II. Du genre didactique. » pp. 161-205

C’est un tissu de préceptes, une suite de principes revêtus de l’expression et de l’harmonie de la poésie, ou au moins une instruction recouverte d’un voile qui déguise les leçons de l’auteur. […] Ces poésies de pure invention demandent à être animées par une grande chaleur de sentiment et embellies par une grande richesse d’expression. […] Les expressions populaires et proverbiales passent difficilement sans être rajeunies, ou très énergiques. […] Or, ces ornements consistent dans les images et les descriptions, dans les pensées, dans les allusions, dans les tours et dans les expressions. […] L’apologue peut-il être relevé par les expressions ?

88. (1866) Morceaux choisis des classiques français, à l’usage des classes supérieures : chefs d’œuvre des prosateurs et des poètes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouvelle édition). Classe de seconde

Un bon auteur, et qui écrit avec soin, éprouve souvent que l’expression qu’il cherche depuis longtemps sans la connaître, et qu’il a enfin trouvée, est celle qui était la plus simple, la plus naturelle, qui semblait devoir se présenter d’abord et sans efforts. […] Le sublime ne peint que la vente, mais en un sujet noble ; il la peint tout entière dans sa cause et dans son effet ; il est l’expression ou l’image la plus digne de cette vérité212. Les esprits médiocres ne trouvent point l’unique expression, et usent de synonymes. […] Les cygnes, sans doute, ne chantent point leur mort ; mais toujours en parlant du dernier essor et des derniers élans d’un beau génie prêt à s’éteindre, on rappellera avec sentiment cette expression touchante : C’est le chant du cygne ! […] Sophocle reprochait trois défauts à Eschyle : la hauteur excessive des idées, l’appareil gigantesque des expressions, la pénible disposition des plans ; et ces défauts, il se flattait de les avoir évités.

89. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre premier. »

Il en vint enfin (et c’était l’expression vraie de la douleur de ce grand homme) à douter si, d’après cela, l’éloquence avait fait plus de bien que de mal à la société : boni ne, an mali plus attulerit hominibus, et civitatibus copia dicendi, et summum eloquentiæ studium (de Invent. […] Tout le discours est écrit avec la même pureté, la même élégance : pas une expression ou une tournure qui ait vieilli, pas une dissonance qui choque l’oreille ; et quand on se reporte à l’époque où il fut composé, et qu’on le rapproche de morceaux d’une date beaucoup plus récente, on est également surpris de l’un et des autres.

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