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28. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Première section. Des genres secondaires de poésie — Chapitre II. Du genre pastoral » pp. 96-112

Dans quel état le poète doit-il placer ses personnages ? […] Quelquefois le poète parle lui-même ou rapporte les discours de ses personnages, comme dans la deuxième églogue de Virgile : c’est la forme épique ou narrative. […] Le lieu de la scène est ordinairement un paysage champêtre, comme les bois, les prairies, le bord des rivières, des fontaines, etc. ; ce n’est que par exception, comme dans la Magicienne, de Théocrite, que le poète place ailleurs ses personnages. […] Par conséquent, point de ces dialogues sans objet et quelquefois sans suite, point de ces personnages qui ne savent à quel propos ils commencent, ils continuent on ils finissent de parler.

29. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre II. » pp. 75-76

Aristote semble vouloir dire que Thimothée dans ses Perses et Philoxène dans ses Cyclopes ont représenté des personnages moins beaux que nature  on peut supposer aussi que le premier faisait ses personnages plus beaux que nature, et le second moins beaux.

30. (1852) Précis de rhétorique

Elle détermine le lieu de la scène, fait connaître les personnages, et explique tout ce qui est nécessaire à la clarté du récit. […] Le nœud est la partie de la narration où l’on voit les personnages à l’œuvre. […] Le lieu de la scène est choisi, les personnages sont en présence. […] La harangue historique est un discours qu’on trouve chez les historiens, quand ils cèdent la parole au personnage qu’ils ont mis en scène. […] On cherche dans l’histoire quand un personnage a paru devant une assemblée, ou quand deux personnages se sont rencontrés ; on suppose qu’ils ont parlé, et on met dans leur bouche les paroles qu’ils ont pu prononcer.

31. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XX. des qualités accidentelles du style. — élégance, finesse, naiveté, enjouement  » pp. 274-288

Voyez Racine ; quand il est forcé de mettre en scène des personnages moins tragiques, moins intéressants que les autres, ne sait-il pas les faire passer à la faveur de cette élégance soutenue, qui souvent donne un charme aux idées les plus vulgaires, aux détails les plus insignifiants ? […] Assurément tous les personnages de Molière sont naturels, Agnès est naïve. […] Le seul précepte à donner, quand il est absolument nécessaire de reproduire la naïveté, c’est que l’auteur étudie alors son personnage au point de faire, plus que partout ailleurs, abstraction de sa propre nature, pour s’identifier complétement avec lui. […] Les facéties qui nous plaisent le plus sont, par la loi du contraste, celles que leur auteur débite sérieusement ou qui viennent de graves personnages.

32. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section II. Des Ouvrages en Vers. — Notions préliminaires. »

Mais il observa attentivement différents avares ; il saisit les plus grands traits d’avarice qu’ils avaient faits ; il y ajouta, d’après la connaissance profonde qu’il avait du cœur humain, d’autres traits qu’il imagina qu’un avare est capable de faire : il réunit tous ces traits, les attribua à son personnage, et, par là, vint à bout d’en composer un caractère parfait dans son genre. […] En un mot, quelque sujet que traite le poète ; dans quelque situation qu’il se trouve, il doit agir et parler, faire agir et faire parler ses personnages aussi régulièrement, aussi parfaitement qu’on peut agir et parler dans une pareille circonstance. […] Quand il offre aux yeux un spectacle, en introduisant des personnages qui parlent et qui agissent, c’est la poésie dramatique. […] Le poète épique présente, en bien des endroits, ses personnages qui parlent et qui agissent. […] La poésie didactique renferme souvent des récits intéressants, des sentiments exprimés avec feu, et les discours directs de certains personnages.

33. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre XIII. » pp. 104-105

D’après la même théorie, toutes les pièces où le personnage intéressant fait son malheur lui-même avec connaissance de cause seraient bannies du théâtre  et l’on n’aurait jamais pensé à y faire voir l’homme victime de ses passions. […] « Aristote appelle ici fable simple celle qui n’explique que les malheurs d’un seul personnage  et il appelle double celle qui a une double catastrophe, qui est heureuse pour les bons et funeste pour les méchants, comme dans l’Électre de Sophocle, où Oreste et Électre sont enfin heureux, et où Égisthe et Clytemnestre périssent. » (Dacier.

34. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre X. Petits poèmes. »

Les personnages mis en scène dans l’apologue sont ordinairement des animaux. […] Dans les fables même où l’on prend l’essor, ce qui n’arrive guère que quand les personnages ont de la grandeur et de la noblesse, cette élévation ne détruit point la simplicité. […] L’Héroïde est une épître sérieuse, dans laquelle on fait parler un personnage agité d’une passion qui, le plus souvent, est l’amour. […] Ses acteurs n’étaient ni des héros, ni des hommes, ni des dieux ; mais des personnages tels que Polyphème, Sisyphe, etc. […] Dans les autres poèmes, en effet, le poète n’est pas le personnage mis en scène ; son art même consiste souvent à se faire oublier.

35. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — La Bruyère, 1646-1696 » pp. 155-177

Être infatué de soi, et s’être fortement persuadé qu’on a beaucoup d’esprit, est un accident qui n’arrive guère qu’à celui qui n’en a point, ou qui en a peu : malheur, pour lors à qui est exposé à l’entretien d’un tel personnage ! […] Aussi les Pamphiles sont-ils toujours comme sur un théâtre : gens nourris dans le faux, et qui ne haïssent rien tant que d’être naturels ; vrais personnages de comédie, des Floridors, des Mondoris6. […] Que sont devenus ces importants personnages qui méprisaient Homère, qui ne songeaient dans la place qu’à l’éviter, qui ne lui rendaient pas le salut, ou qui le saluaient par son nom, qui ne daignaient pas l’associer4 à leur table, qui le regardaient comme un homme qui n’était pas riche, et qui faisait un livre ? […] Il n’y a pas deux voix différentes sur ce personnage ; l’envie, la jalousie, parlent comme l’adulation : tous se laissent entraîner au torrent qui les porte, qui les force de dire d’un homme ce qu’ils en pensent ou ce qu’ils n’en pensent pas, comme de louer souvent celui qu’ils ne connaissent point. […] Le mot personnage est solennel, et marque une nuance particulière de respect.

36. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Molière, 1622-1673 » pp. 43-55

Ses personnages ont une physionomie si distincte qu’ils s’imposent à la mémoire de la postérité, et bien qu’ils soient contemporains du poëte, tous les âges se reconnaissent en eux ; car ils sont à la fois des individus qui ont leur date dans l’histoire des mœurs, et des types qui demeureront à jamais. […] Il disait que rien ne lui donnait du déplaisir comme d’être accusé de regarder quelqu’un dans les portraits qu’il fait ; que son dessein est de peindre les mœurs sans vouloir toucher aux personnes, et que tous les personnages qu’il représente sont des personnages en l’air1 et des fantômes proprement, qu’il habille à sa fantaisie, pour réjouir les spectateurs ; qu’il serait bien fâché d’y avoir jamais marqué qui que ce soit ; et que, si quelque chose était capable de le dégoûter de faire des comédies, c’étaient les ressemblances qu’on y voulait toujours trouver, et dont ses ennemis tâchaient malicieusement d’appuyer la pensée pour lui rendre de mauvais offices auprès de certaines personnes à qui il n’a jamais pensé. […] Ce personnage s’appelait Clapisson.

37. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre XIII. Genre oratoire, ou éloquence. »

Ce discours a un double but : il fait ressortir la grandeur, les talents, les vertus du personnage qu’il célèbre, en le proposant à l’admiration et à l’imitation des auditeurs ; puis il montre la mort triomphant de la grandeur et de la gloire, et l’orgueil humain confondu devant l’égalité de la tombe. Par ce double enseignement, à la fois religieux et moral, l’oraison funèbre évite de tomber dans l’écueil d’une profane et plate adulation ; elle montre la main de la Providence dans tous les évènements humains, et rapporte toute la vie du personnage à la nécessité de pratiquer la piété et la vertu. […] 3° Le panégyrique profane est un discours à la louange d’un personnage célèbre.

38. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Corneille 1606-1684 » pp. 310-338

Ses personnages excitent l’admiration plus que la terreur ou la pitié. […] Il y a, entre Géronte et don Diègue ou le vieil Horace, les différences qui séparent les personnages comiques des personnages tragiques ; mais c’est le même fond de sentiments et d’idées. […] Étendant le cercle du drame, c’est-à-dire de l’imitation de la vie humaine, Corneille a mis sur son théâtre, comme dans le monde, des personnages petits et bas à côté des personnages grands et généraux : Félix, dans polyeucte, à côté de Pauline, de Polyeucte et de Sévère ; Prusias, Arsinoé et Flaminius, dans Nicoméde, à côté de Nicomède et d’Attale ; Ptolémée et Cléopâtre enfin, dans la Mort de Pompée, à côté de Cornélie et de César. » M.

39. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XIV. de la fin  » pp. 189-202

La mort de Turnus fixe définitivement la situation de tous les personnages, et remplit toutes les promesses de l’exposition. […] J’excuse pourtant dans les narrations infinies du xviie et du xixe  siècles, quand de nouveaux personnages ont surgi à chaque chapitre, quand mille intrigues se sont croisées et compliquées, quand la moralité à recueillir de l’ouvrage demande un résumé final pour être mise dans tout son jour, j’excuse, il le faut bien, l’épilogue, ou ce que nos écrivains burlesques nomment la postface. […] Selon lui, point de dénoûment sans catastrophe, soit dans les fables qu’il appelle simples, où le héros est continuellement malheureux, jusqu’à ce qu’un dernier coup mette le comble à son infortune, soit dans celles qu’il nomme implexes, où le sort des personnages change à la fin par une péripétie.

40. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Saint-Simon, 1675-1755 » pp. 223-233

Tous les assistants étaient des personnages vraiment expressifs ; il ne fallait qu’avoir des yeux, sans aucune connaissance de la cour, pour distinguer les intérêts peints sur les visages, ou le néant de ceux qui n’étaient de rien : ceux-ci tranquilles à eux-mêmes, les autres pénétrés de douleur ou de gravité et d’attention sur eux-mêmes, pour cacher leur élargissement1 et leur joie. […] Mais, réflexion faite, le sommeil et la grossièreté du personnage les rassurèrent. […] Je ne sais pas trop si je réussis bien ; mais au moins est-il vrai que ni joie ni douleur n’émoussèrent ma curiosité, et qu’en prenant bien garde à conserver toute bienséance, je ne me crus pas engagé par rien au personnage douloureux.

41. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Cousin, 1792-1867 » pp. 492-503

Son style a grand air ; on croirait entendre un personnage du dix-septième siècle1. […] Ce qu’il y a de vrai dans cette opinion, c’est qu’une œuvre d’art n’est belle qu’à la condition d’être vivante, et, par exemple, la loi de l’art dramatique est de ne point mettre sur la scène de pâles fantômes du passé, mais des personnages empruntés à l’imagination ou à l’histoire, comme on voudra, pourvu qu’ils soient animés, passionnés, qu’ils parlent et agissent comme il appartient a des hommes et non à des ombres. […] Il nous enlève1 aux misères qui nous assiégent, et nous transporte en des régions où nous nous retrouvons encore (car nous ne voulons jamais nous perdre de vue), mais où nous nous retrouvons transformés à notre avantage, où toutes les imperfections de la réalité ont fait place à une certaine perfection, où le langage que l’on parle est plus égal et plus relevé, où les personnages sont plus beaux, où même la laideur n’est point admise, et tout cela en respectant l’histoire dans une juste mesure, surtout sans sortir jamais des conditions impérieuses de la nature humaine.

42. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Le Sage 1668-1747 » pp. 139-143

Dans ses aventures qui nous intéressent comme la biographie d’un personnage historique, nous retrouvons nos bons et mauvais instincts ; mais on lui souhaiterait plus de délicatesse morale. […] reprit-il sur le même ton : nous tenons registre de tous les grands personnages qui sont à vingt lieues à la ronde.

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