Il est évident qu’il ne s’agit pas ici du prologue explicatif, dont Euripide introduisit l’usage sur la scène grecque.
On sent bien qu’il ne s’agit pas de la vertu morale, de l’honnêteté.
Le même défaut est encore plus sensible dans le passage suivant de Malherbe, où il s’agit de la pénitence de saint Pierre. […] L’image, lorsqu’il s’agit du coloris du style, est une sorte de vêtement extérieur, de voile matériel, en un mot, de représentation sensible qui, pour donner de la couleur à la pensée, une forme à l’idée, et rendre un objet sensible s’il ne l’est pas, ou plus sensible s’il ne l’est pas assez, le peint sous des traits qui ne sont pas les siens, mais ceux d’un objet analogue et mieux connu. […] Quant aux mots nouveaux, s’ils doivent toujours être proscrits des langues mortes, si ce n’est lorsqu’il s’agit d’exprimer des choses inconnues aux anciens, ils sont quelquefois admis dans les langues vivantes. […] Le langage et la pensée agissent et réagissent mutuellement l’un sur l’autre.
» C’est cette prière sans interruption que demande saint Paul : prière que beaucoup de gens de piété s’imaginent être impraticable, mais dont la pratique sera très facile à quiconque saura que la meilleure de toutes les prières est d’agir avec une intention pure, en se renouvelant souvent dans le désir de faire tout selon Dieu et pour Dieu ». […] S’agit-il de prouver la nécessité qu’impose la religion de pardonner à nos ennemis les plus déclarés ; il sait quel obstacle il va trouver dans la fierté du cœur de l’homme, eh bien !
Que vos personnages agissent ou parlent eux-mêmes, et je les connaîtrai mieux que par tout ce que vous m’en pourrez dire. […] Il s’agit d’une dame dont on veut faire apprecier le caractère par sa manière de prononcer : « Le souffle de son âme se déployait dans les replis des syllabes, comme le son se divise dans les clefs d’une flûte ; il expirait onduleusement à l’oreille, d’où il précipitait l’action du sang.
L’amplification n’est jamais mieux placée, dit Cicéron, que lorsqu’il s’agit de la perte de ses biens ou de la crainte d’en être privé. […] Mea Glycerium, inquit, quid agis ? […] Toutes les fois qu’un homme parle ou écrit, on doit supposer qu’étant un être raisonnable, il a quelque objet en vue ; d’instruire, d’amuser de persuader ses concitoyens ou d’agir sur eux d’une manière quelconque. […] L’orateur doit, en commençant, diriger les esprits de ses auditeurs vers les sentiments sur lesquels il s’efforcera d’agir par la suite. […] Il n’est certainement personne qui, en écoutant ce récit, ne se persuade qu’il s’agit ici d’un départ sans empressement et sans dessein, d’un simple voyage à la campagne.
O quid agis ?
Car il ne s’agit pas ici de pleurer la mort de cet Homme-Dieu. […] Il ne s’agit pas, dis-je, de pleurer sa mort, mais il s’agit de la méditer, il s’agit d’en approfondir le mystère, il s’agit d’y reconnaître le dessein de Dieu, ou plutôt l’ouvrage de Dieu ; il s’agit d’y trouver l’établissement et l’affermissement de notre foi : et c’est, avec la grâce de mon Dieu, ce que j’entreprends. […] Si Jésus-Christ n’eût agi en Dieu, eût-il pu, mourant sur la croix, faire connaître à ce malheureux et confesser sa divinité ? […] Il ne s’agissait pas du degré de leur puissance ; mais leur personne propre était attaquée. […] Où est l’homme, où est le sage qui sait agir, souffrir et mourir sans faiblesse et sans ostentation ?
Il a fait, il a agi avant que de savoir, ou plutôt il a su ce qu’il n’avait jamais appris. […] Une naissance auguste, un air d’empire et d’autorité, un visage qui remplisse la curiosité des peuples empressés de voir le prince6, et qui conserve le respect dans le courtisan ; une parfaite égalité d’humeur ; un grand éloignement pour la raillerie piquante, ou assez de raison pour ne se la permettre point1 : ne faire jamais ni menaces ni repròches ; ne point céder à la colère, et être toujours obéi ; l’esprit facile, insinuant ; le cœur ouvert, sincère, et dont on croit voir le fond, et ainsi très-propre à se faire des amis, des créatures et des alliés ; être secret toutefois, profond et impénétrable dans ses motifs et dans ses projets ; du sérieux et de la gravité dans le public ; de la brièveté, jointe à beaucoup de justesse et de dignité, soit dans les réponses aux ambassadeurs des princes, soit dans les conseils ; une manière de faire des grâces2 qui est comme un second bienfait ; le choix des personnes que l’on gratifie ; le discernement des esprits, des talents et des complexions3, pour la distribution des postes et des emplois ; le choix des généraux et des ministres ; un jugement ferme, solide, décisif dans les affaires, qui fait que l’on connaît le meilleur parti et le plus juste ; un esprit de droiture et d’équité qui fait qu’on le suit jusqu’à prononcer quelquefois contre soi-même en faveur du peuple, des alliés, des ennemis ; une mémoire heureuse et très-présente qui rappelle les besoins des sujets, leurs visages, leurs noms, leurs requêtes ; une vaste capacité qui s’étende non-seulement aux affaires de dehors, au commerce, aux maximes d’État, aux vues de la politique, au reculement des frontières par la conquête de nouvelles provinces, et à leur sûreté par un grand nombre de forteresses inaccessibles ; mais qui sache aussi se renfermer au dedans, et comme dans les détails4 de tout un royaume ; qui en bannisse un culte faux, suspect et ennemi de la souveraineté, s’il s’y rencontre ; qui abolisse des usages cruels et impies5, s’ils y règnent ; qui réforme les lois et les coutumes6, si elles étaient remplies d’abus ; qui donne aux villes plus de sûreté et plus de commodités par le renouvellement d’une exacte police, plus d’éclat et plus de majesté par des édifices somptueux ; punir sévèrement les vices scandaleux ; donner, par son autorité et par son exemple, du crédit à la piété et à la vertu ; protéger l’Église, ses ministres, ses droits, ses libertés1 ; ménager ses peuples comme ses enfants2 ; être toujours occupé de la pensée de les soulager, de rendre les subsides légers, et tels qu’ils se lèvent sur les provinces sans les appauvrir ; de grands talents pour la guerre ; être vigilant, appliqué, laborieux ; avoir des armées nombreuses, les commander en personne ; être froid dans le péril3, ne ménager sa vie que pour le bien de son État, aimer le bien de son État et sa gloire plus que sa vie ; une puissance très-absolue, qui ne laisse point d’occasion aux brigues, à l’intrigue et à la cabale ; qui ôte cette distance infinie4 qui est quelquefois entre les grands et les petits, qui les rapproche, et sous laquelle tous plient également ; une étendue de connaissances qui fait que le prince voit tout par ses yeux, qu’il agit immédiatement par lui-même, que ses généraux ne sont, quoique éloignés de lui, que ses lieutenants, et les ministres que ses ministres ; une profonde sagesse qui sait déclarer la guerre, qui sait vaincre et user de la victoire, qui sait faire la paix, qui sait la rompre, qui sait quelquefois, et selon les divers intérêts, contraindre les ennemis à la recevoir ; qui donne des règles à une vaste ambition, et sait jusqu’où l’on doit conquérir ; au milieu d’ennemis couverts ou déclarés, se procurer le loisir des jeux, des fêtes, des spectacles ; cultiver les arts et les sciences, former et exécuter des projets d’édifices surprenants ; un génie enfin supérieur et puissant qui se fait aimer et révérer des siens, craindre des étrangers ; qui fait d’une cour, et même de tout un royaume, comme une seule famille unie parfaitement sous un même chef, dont l’union et la bonne intelligence est redoutable au reste du monde. […] La traduction pénible dont il s’agit en cet éloge est une traduction de l’Imitation de Jésus-Christ.
Lorsqu’il ne s’agit que d’exposer un fait, de tracer un tableau rapide, de s’abandonner à un sentiment, dans certaines questions même politiques ou judiciaires, il arrive quelquefois que les développements se présentent à l’imagination en même temps que l’idée première, et marchent de front avec elle, ou en découlent tout naturellement. […] Chacun choisit l’endroit qui lui paraît le plus éclatant dans une si belle vie : tous entreprennent son éloge, et chacun, s’interrompant lui-même par ses soupirs et par ses larmes, admire le passé, regrette le présent et tremble pour l’avenir. — Synthèse : Ainsi tout le royaume pleure la mort de son défenseur, et la perte d’un seul homme est une calamité publique. » La première méthode est préférable, lorsque, dans un sujet vaste et compliqué, il s’agit de communiquer une science faite, ou de présenter dès l’abord, pour le bien faire saisir, le dessein général, l’idée première d’un ouvrage.
Qu’on se rappelle d’abord ce qui a été exposé plus haut à propos de l’amplification et de la précision en général, il ne s’agira plus ici que d’en énumérer quelques formes spéciales. […] Je ne vois pas la nécessité de mettre au rang des figures quelques substantifs employés au lieu d’adjectifs pour qualifier, Lorsque César, l’amour et l’effroi de la terre ; ou quelques adjectifs qui précèdent le substantif plutôt que de le suivre : Telle, aimable en son agir, mais simple dans son style, Doit éclater sans pompe une élégante idylle.
L’homme est fait pour l’action ; le poème, qui marche et agit, convient mieux à sa nature.
Il s’agit d’abord d’inventer des événements qui soient peu ordinaires, mais vraisemblables ; qui intéressent, attachent le lecteur ; et qui amènent des peintures vraies du cœur humain, des divers mouvements qui l’agitent, et des différentes passions qui le tyrannisent dans les différentes circonstances de la vie.
Souvenez-vous d’eux, je vous conjure, toute votre vie : souvenez-vous-en le jour d’une bataille, et dans toutes les occasions où il s’agira de faire bien ; et si ce n’est pas assez, de faire mieux que les autres (car il faut porter jusques-là son ambition), dites-vous sans cesse : Je suis devant les yeux de mes ancêtres, ils me voient ; et ne soyez pas après cela digne d’eux si vous le pouvez : ma main tremble en vous écrivant ceci ; mais c’est moins de crainte que de courage. […] On n’en agit pas de même à l’égard de ses égaux et de ses amis : mais on place le mot de Monsieur ou de Madame le plutôt qu’il se peut.
L’homme en place doit connoître le cœur humain, et les différens ressorts qui le font agir : il n’emploie alors dans ses opérations, que des agens fidèles et sûrs, intéressés à les faire réussir. […] Où est l’homme, où est le sage qui sait agir, souffrir et mourir sans foiblesse et sans ostentation ?