Cette dernière proposition respire bien franchement l’espèce de confiance qu’inspire au sauvage le sentiment de sa force ; et l’énergique concision de ce petit discours, où chaque mot est une pensée, et une grande pensée, caractérise parfaitement l’éloquence de la nature : on sent que c’est ainsi qu’un barbare a dû parler.
Le style coupé est forme de propositions courtes et indépendantes qui offrent un sens parfait. […] Pour arriver à cette fin, évitez tous raisonnements embarrassés, toutes propositions spéculatives, toutes abstractions métaphysiques. […] Après l’exorde vient la proposition ou exposition du sujet : à cet égard, nous n’avons rien à dire, si ce n’est qu’elle doit être aussi claire et distincte que possible, exprimée en mots simples et peu nombreux, sans aucune affectation. […] L’orateur le conduit pas à pas de vérité en vérité, jusqu’à ce qu’il lui arrache la conclusion comme une conséquence naturelle de la chaîne de ses propositions ; c’est en général la méthode de d’Aguesseau. […] Toute argumentation tend à prouver l’une de ces trois choses, qu’une proposition est vraie, moralement juste et convenable, qu’elle est bonne et profitable.
Chacune de ces pensées, prise séparément, se nomme membre de la période : les membres doivent être des propositions complètes et distinctes, mais unies par le sens et la prononciation.
Avestissement. Ce Cours gradué de Versions latines n’est, comme le Cours de Thèmes latins qui l’a précédé, que la syntaxe appliquée et pour ainsi dire en action. Il en suit le développement pas à pas, sans rien donner à l’inconnu, et ne présente jamais d’autres difficultés grammaticales que celles que l’élève peut résoudre à l’aide des règles précédemment étudiées(1). Tout le monde sait que les livres latins, même les plus élémentaires, qu’on fait expliquer aux commençants, sont loin de remplir cette condition. Cornélius Népos et Phèdre n’ont pas pris soin de graduer les difficultés de leur texte conformément à l’ordre de Lhomond ou de tout autre grammairien.
La Bruyère supprime la négation à cause du mot nul : c’est un latinisme qui n’est point passé dans l’usage ; on le trouve dans Montaigne : « Nulles propositions m’estonnent, nulle créance me blece. » (Essais, III. 8.)
Quand il y a dans la matière deux petites propositions unies par la conjonction et, il est quelquefois plus élégant de supprimer cette conjonction et de répéter le nom.
Exorde. « Si le sujet qui nous rassemble avait pour objet quelque nouveau débat, j’attendrais, Athéniens, que vos orateurs ordinaires eussent manifesté leur opinion ; et si leurs propositions m’avaient paru sages, j’aurais continué de garder le silence : dans le cas contraire, j’aurais exposé mon sentiment : mais puisqu’il s’agit de choses sur lesquelles ils ont plus d’une fois déjà donné leur avis, vous me pardonnerez sans doute d’avoir pris le premier la parole ; car s’ils avaient dans le temps indiqué les mesures convenables, vous n’auriez point à délibérer aujourd’hui ».
De ce principe, comme du centre, se répand la lumière sur toutes les parties de cet ouvrage ; de même qu’un peintre place dans son tableau le jour, en sorte que d’un seul endroit il distribue à chaque objet son degré de lumière, tout le discours est un ; il se réduit à une seule proposition, mise au plus grand jour par des tours variés. […] Le discours est la proposition développée ; la proposition est le discours en abrégé.
On les mène pas à pas d’une vérité connue à une autre vérité, jusqu’à ce qu’on les force, pour ainsi dire, à adopter une conclusion comme une conséquence naturelle des propositions précédentes auxquelles ils n’ont pu refuser leur adhésion. […] On trouve dans toutes les classes un certain degré de finesse et de sagacité, et l’on peut fort bien vanter l’éloquence de l’orateur, sans être persuadé de la vérité d’aucune e ses propositions. […] Une proposition fondée sur une science, sur des connaissances ou sur des faits, peut être réfutée par une science plus étendue, des connaissances plus exactes ou des faits mieux prouvés. […] Ce qui contribue le plus à embellir une composition philosophique, et à lui donner à la fois plus de grâce et d’utilité, c’est d’éclaircir les propositions que l’on met en avant par des citations empruntées à l’histoire ou à l’étude du cœur humain. […] L’on n’exige pas, il est vrai, qu’ils soient aussi strictement observés dans un poème que dans un traité en prose ; cependant il faut qu’ils y dominent assez pour que le lecteur saisisse avec facilité l’enchainement et la suite des propositions.
Et les esprits fins au contraire, ayant ainsi accoutume à juger d’une seule vue sont si étonnés quand on leur présente des propositions ou ils ne comprennent rien et où pour entrer il faut passer par des définitions et des principes si stériles qu’ils n’ont point accoutumé de voir ainsi en détail, qu’ils s’en rebutent et s’en dégoûtent. […] Prouver toutes les propositions un peu obscures, et n’employer à leur preuve que des axiomes très-évidents ou des propositions déjà accordées ou démontrées. […] Car il est sans doute que ce n’est pas une grande faute de définir et d’expliquer bien clairement des choses, quoique très-claires d’elles-mêmes, ni d’omettre à demander par avance des axiomes qui ne peuvent être refusés au lieu où ils sont nécessaires, ni enfin de prouver des propositions qu’on accorderait sans preuve. […] Prouver toutes les propositions, en n’employant à leur preuve que des axiomes très-évidents d’eux-mêmes ou des propositions déjà démontrées ou accordées ; N’abuser jamais de l’équivoque des termes, en manquant de substituer mentalement les définitions qui les restreignent et les expliquent. […] Je passe maintenant à celle de l’ordre dans lequel on doit disposer les propositions, pour être dans une suite excellente et géométrique.
La période est donc une pensée composée de plusieurs propositions ou phrases liées entre elles, et dont le sens est suspendu jusqu’à la fin.
On distingue dans l’apologue deux parties, l’action même ou le récit ; dans lequel on expose tout ce dont on veut déduire une connaissance morale, et la moralité, c’est-à-dire la proposition qui résulte du récit allégorique de l’apologue.
Il convient surtout à la proposition, à la division d’un discours, aux récits où l’orateur ne cherche qu’à instruire, et aux parties où il ne faut que discuter, c’est le style de La Bruyère, de madame de Sévigné, de La Fontaine, de madame Deshoulières, de Fontenelle, de Fénelon, etc.
La tortue écouta la proposition.