[Notice] Gresset, dont Amiens, sa patrie, a consacré la mémoire en lui érigeant une statue1, fut un de ceux qui, sous le règne de Louis XV, conservèrent à la poésie, un peu déchue, le plus d’originalité et de relief. […] Gresset n’avait que vingt-quatre ans quand il donna, après quelques autres pièces de poésie, ce modèle de plaisanterie légère et déliée que J. […] C’est ce que recommande Fénelon : « Il ne faut prendre, si je ne me trompe, que la fleur de chaque objet, et ne toucher jamais que ce qu’on peut embellir. » Ce précepte est surtout applicable à la poésie, qui, remarque un critique moderne, « est l’essence des choses : or, il faut bien se garder d’étendre la goutte d’essence dans une masse d’eau ou dans des flots de couleur. La poésie ne consiste pas à tout dire, mais à tout faire rêver ».
Quelques préceptes sur la poésie épique. — 153. […] Objet que la poésie se propose. […] Origine et éloge de la poésie. — 408. […] Mais la médiocrité en poésie ! […] Mais en poésie !
Le serment de Louis le Germanique sera le premier monument de la prose officielle, comme le cantilène de sainte Eulalie est le premier symptôme de la poésie populaire. […] C’est donc par la poésie que se révèle le génie de notre race, si éminemment douée pour la prose. […] En même temps, Guillaume de Lorris, qui commence le Roman de la Rose, sans l’achever, représente bien l’invasion des procédés scolastiques, introduisant, jusque dans le domaine de la poésie galante, les pâles fantômes de l’abstraction. […] Au lieu d’être impersonnelle, comme jadis, et de traduire les instincts de la foule, la poésie tend à se faire individuelle ; c’est affaire de rhétorique et passe-temps d’oisiveté. […] La poésie n’eut pas aussi brillante fortune.
Nisard juge ainsi un maître contemporain envers lequel il est peu suspect de complaisance : « Il a rendu sa pensée visible par un talent de description nouveau dans l’histoire de notre poésie. […] Cette poésie prodigieuse a fait peur, presque autant qu’elle aura été admirée. […] Sa poésie est universelle. […] Ouvrez à deux battants la porte à tous les sujets ; que l’art soit votre seul maître, mais que ce maître règne en despote… Sa poésie est un musée où la barbarie est représentée comme la civilisation, où le magot de la Chine grimace à côté de l’Apollon, où le sublime et le hideux figurent au même titre, comme deux formes de l’extraordinaire. » 2. […] Cette poésie religieuse est d’une mélancolie supérieure, et tout à fait saine.
Il fit pour la langue française ce que son maître Henri IV avait fait pour la France1 En lisant ses prédécesseurs, on comprend le soupir d’aise qui échappe à Boileau dans ce vers : Enfin, Malherbe vint… S’il eut peu de sensibilité, d’imagination et d’invention, s’il ne craignit pas d’être appelé le tyran des mots et des syllabes, il façonna l’instrument et le moule de la poésie. […] En poésie ce mot pouvait être masculin. […] Malherbe fut le créateur de la poésie lyrique. […] La poésie du roi-prophète, amollie par Desportes, délayée par Godeau, noyée dans la diffusion par Racan, se retrouve ici avec l’éclat des images et la profondeur du sentiment religieux.
La parole est l’instrument de la poésie ; la poésie la façonne à son usage et l’idéalise pour lui faire exprimer la beauté idéale. […] ils ne le peuvent, et par là ils reconnaissent la supériorité de la parole et de la poésie. […] Et le genre humain fait comme les artistes : Quelle poésie ! […] La musique seule a quelque chose de plus pénétrant que la poésie, mais elle est vague, elle est bornée, elle est fugitive. Outre sa netteté, sa variété, sa durée, la poésie a aussi les plus pathétiques accents.
Je ne dis rien des poëtes ; car il ne s’agit pas ici de poésie, et je n’admets pas le style poétique en prose ; la lecture des poëtes est excellente pour préparer à écrire, pour mettre en train, en quelque sorte. J’ai toujours remarqué qu’un beau morceau de poésie, lu avant de composer, et tout haut, s’il est possible, éveille l’imagination, échauffe le cœur, transporte dans les régions de l’idéal. […] « La poésie, l’histoire et la philosophie, dit Buffon, que je ne puis rappeler assez, ont toutes le même objet, et un très-grand objet, l’homme et la nature. La poésie la peint et l’embellit, elle peint aussi les hommes ; elle les agrandit, elle les exagère, elle crée les héros et les dieux. […] Sans le style, il est impossible qu’il y ait un seul bon ouvrage en aucun genre d’eloquence ou de poésie. » Aussi Quintilien comparait-il l’invention et la disposition séparées de l’élocution à une épée qui ne sortirait jamais du fourreau.
Outre les substitutions de mots, il y a aussi dans les lettres et les syllabes des altérations qui sont d’un fréquent usage dans la poésie. […] Cette idée fait donc image dans le vers et en augmente la poésie. […] combien elle donne de poésie à cette pensée, flevit senex ! […] La poésie aime à se parer de comparaisons riches, nobles, touchantes, afin de plaire à l’imagination et au sentiment, et d’ajouter au sujet de nouvelles beautés. […] C'est que la poésie perdait de sa naïveté primitive, à mesure qu’elle s’éloignait de la simplicité des mœurs antiques.
Après le traité de la Poésie, le traité du Style, et bientôt la Rhétorique. Le traité du Style, comme celui de la Poésie, présente, à mes yeux, de nombreux avantages sur tous les ouvrages de ce genre. […] Monsieur le Vicaire général, Mes occupations ne m’ayant pas permis, à mon grand regret, d’examiner moi-même vos trois volumes sur le Style, la Poésie et la Rhétorique, j’en ai confié l’examen aux professeurs de littérature de mon petit séminaire. […] Il renferme, en substance, tous les préceptes légués par les anciens, et reproduits par les modernes, sur l’art d’écrire, sur la poésie et sur l’éloquence.
Puisque l’importance des belles-lettres est proclamée d’une voix unanime, quelle serait la position d’un jeune homme, dans la bonne société, s’il n’était pas initié à la connaissance des principes littéraires, s’il ignorait les règles relatives aux éléments, aux qualités, aux ornements du style, ainsi que les moyens de se former à l’art d’écrire, et s’il ne possédait pas des notions exactes sur la poésie et sur l’éloquence ? […] Quelques établissements ne consacrent que deux années à la littérature, et ne peuvent par conséquent s’occuper de l’étude de la poésie. […] On pourrait d’ailleurs, dans ce cas, mettre le Traité de la poésie entre les mains des élèves comme livre de lecture : ce qui serait d’autant plus facile à faire que cet ouvrage est, au dire de beaucoup de juges compétents, agréable à lire.
Ce fils de la Grèce et de la France, qui à une haute inspiration joignait une raison parfaite, trouva notre poésie comme épuisée par deux siècles de gloire, et entreprit de la régénérer. […] Moins célèbre de son temps que son frère Marie-Joseph, l’auteur de Fénelon et de Tibère, André, bien plus poëte que lui cependant, a laissé, entre autres travaux, un morceau inachevé sur l’Invention, où ses idées sur les réformes que pouvait recevoir notre poésie sont consignées. […] André Chénier a essayé de transporter dans la versification française plusieurs des procédés habituels à la poésie grecque et latine. […] On peut lire, au début du Phèdre de Platon, la gracieuse légende des premiers chanteurs qui, passionnés pour la poésie, oubliérent de se nourrir, et étant morts de faim, furent métamorphosés en cigales.
Hymne est féminin lorsqu'il désigne les hymnes qui se chantent à l'église, mais la poésie l'emploie aussi au masculin dans ce cas. […] Et la poésie peut admettre cette exception, si l'euphonie ou la rime le demande. […] Mais dans ce cas, la poésie peut rejeter une règle qui n'est pas généralement suivie1. […] La poésie se nourrit de descriptions ; mais le discours oratoire les rejette toutes les fois qu'elles ne sont pas un des moyens que nécessite la cause. […] Trois choses principales, l'action, la morale et la poésie constituent l'épopée.
Ce sont elles qui donnent à la poésie et à l’éloquence la vie, l’âme, comme une espèce d’action et de mouvement. […] Cette figure, rare en prose, se rencontre assez souvent en poésie. […] Il y a des métaphores permises, belles même en poésie, qui en prose paraîtraient absurdes ou peu naturelles. […] Cette figure, qui se rencontre souvent dans la poésie et surtout dans l’ode, a l’enflure à redouter. […] C’est ici que la poésie et l’éloquence touchent de plus près à la peinture.
C’est la même que posait Horace à propos de la poésie : Natura fieret laudabile carmen, an artc Quæsitum est… Et aujourd’hui, comme alors, l’unique réponse péremptoire est celle d’Horace, quand il exige la collaboration, pour ainsi dire, de l’art et de la nature : … ego nec studium sine divite vena, Nec rude quid possit video ingenium ; alterius sic Altera poscit opem res… On dit de l’écrivain ou de l’orateur qui entraîne, qui charme, qui intéresse, qu’il a du génie ou de l’esprit. […] La poésie épique, l’élégie, l’ode, l’histoire elle-même se chantaient et se récitaient par les rues, sur les places, aux jeux d’Olympic et de Némée. […] Et quoique la philosophie, la poésie et l’histoire se fussent successivement retirées du domaine de la littérature orale, ceux qui vinrent plus tard ne changèrent rien au mode consacré. […] Le style, quelque matière que l’on traite d’ailleurs, lettres, récits, dialogues, descriptions, dissertations, résumés, drames, mœurs, passions, polémique, est de son ressort ; elle ne doit pas craindre même d’aborder la poésie, du moins en ne la considérant que sous les faces qui lui sont communes avec la prose, et sans empiéter sur le domaine de la poétique proprement dite.