/ 379
51. (1875) Poétique

Or il est clair que les imitations dont nous parlons ne sont différentes que selon la diversité qui se trouve dans leurs sujets. […] Voilà les parties de la tragédie quant à leur nombre et à leur étendue ; on a parlé précédemment de celles qui la constituent dans son espèce. […] Il en a été suffisamment parlé dans les ouvrages qu’on a publiés sur cette matière. […] Le poète, étant imitateur, doit parler lui-même le moins qu’il est possible ; car aussitôt qu’il se montre, il cesse d’être imitateur. […] Ainsi premièrement, si la chose employée par le poète n’était pas possible dans l’art dont il parle, c’est une faute.

52. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre X. Petits poèmes. »

Nous ne parlerons ici que des quatre principaux. […] Le poète est inspiré par les muses, et doit en parler le riche et magnifique langage. […] Par exemple, Moïse fait dire à Dieu : « J’ai parlé. […] C’est la forme ordinaire des dithyrambes, dont nous parlerons tout à l’heure. […] Il n’y eut pas un seul être qui ne parlât pour s’unir à l’hommage que l’homme rendait.

53. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section II. De l’Art d’écrire agréablement. — Chapitre I. Du style. » pp. 181-236

Un écrivain ne pense, ne parle que pour les autres. […] Il vaut mieux se taire, que de parler pour n’être pas entendu. […] … Mais ces connaissances sont utiles et nécessaires à ceux qui ont besoin de l’art de parler et d’écrire. […] C’est Lusignan qui parle à Zaïre. […] C’est d’un Prince ambitieux qu’il parle.

54. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre VIII. Des Figures en général. »

De là, ces façons de parler : Il est enflammé de colère ; il marche comme une tortue ; il va comme le vent, etc. […] Ces tours et ces manières de parler sont aussi faciles à distinguer des façons de parler ordinaires, que les traits d’un visage irrité, d’avec ceux d’un visage paisible. […] ) C’est peu de faire agir, la prosopopée fait même parler les choses inanimées. […] Tantôt elle apostrophe les choses insensibles et inanimées, et les fait parler elles-mêmes ; tantôt, au lieu de rapporter indirectement les discours de ceux dont il s’agit, elle met ces discours dans leur propre bouche : elle va enfin jusqu’à faire parler les morts. […] Vous parlez en soldat, je dois agir en roi.

55. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre XII. Poésie dramatique. »

Ce sont des personnes qui s’entretiennent de leurs affaires et pour leurs intérêts : le premier de tous leurs devoirs, c’est de parler comme on parle, et de ne pas viser à l’expression poétique, qui trahirait aussitôt l’auteur et le ferait paraître aux lieu et place de son personnage. […] Un acteur qui parle seul fait ce qu’on appelle un monologue ; et quand plusieurs parlent, et qu’ils se parlent l’un à l’autre, c’est un dialogue. […] Parlons d’abord de la tragédie. […] Parlons d’abord des décorations et des machines. […] Aussi, dans toutes les pièces dont nous venons de parler, la gloire du succès est bien faible pour l’écrivain.

56. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Madame de Sévigné, 1626-1696 » pp. 76-88

Nous avons bien parlé de notre cher ami ; elle a vu Sapho2, qui lui a redonné du courage. […] Je vous prie de ne point parler de mes faiblesses ; mais vous devez les aimer et respecter mes larmes, puisqu’elles viennent d’un cœur tout à vous1. […] Vraiment, ma fille, je m’en vais bien encore vous parler de M. de Turenne. […] Le premier qui fut en état de parler répondit à nos tristes questions : nous fîmes raconter sa mort. […] Le cardinal de Bouillon parla de vous, et répondit que vous n’auriez point évité cette triste partie si vous aviez été ici.

57. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section deuxième. La Tribune du Barreau. — Chapitre premier. Objet du genre judiciaire. »

Il s’attache donc essentiellement à tout ce qui peut devenir dans l’homme le mobile d’une action ; il parle aux passions ; il cherche à toucher le cœur, autant qu’à convaincre le jugement. […] Socrate, jugé par une cour dont l’histoire ne nous a pas appris le nom, eut contre lui deux cent quatre-vingts juges : dans la cause de Milon, Cicéron parlait à cinquante-un juges ; et le succès de ces causes ne dépendait point en général de quelques juges versés dans la connaissance des lois, mais d’une assemblée de citoyens romains. […] La verbosité est un défaut souvent reproché aux avocats, et dans lequel les entraînent fréquemment la nécessité et l’habitude de parler ou d’écrire précipitamment, et presque sans préparation. […] Elle est essentiellement la marque d’un esprit irréfléchi ; car il est impossible de parler beaucoup, sans dire nécessairement beaucoup de riens ; et un vieux proverbe a dit il y a longtemps, qu’il vaut infiniment mieux ne rien dire, que de dire des riens. Cette insatiable avidité de parler s’exerce indifféremment sur tout, dévore tout comme un vaste incendie, et fait contracter à un jeune homme la déplorable habitude de parler de tout avec une légèreté dont on ne sent ni ne veut sentir les conséquences ; de sacrifier les ridicules des personnes présentes, la réputation et l’honneur des absents, avec une précipitation dont on serait soi-même effrayé, si une réflexion solide pouvait trouver sa place dans une tête vide d’idées, et étourdie du bruit qu’elle-même excite autour d’elle.

58. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. —  Voiture. (1598-1648.) » pp. 7-11

On m’a interrogé : j’ai dit que j’étais Savoyard ; et, pour passer pour cela, j’ai parlé le plus qu’il m’a été possible comme M. de Vaugelas2 : sur mon mauvais accent, ils m’ont laissé passer. Regardez si je ferai jamais de beaux discours qui me vaillent tant, et s’il n’eût pas été bien mal à propos qu’en cette occasion, sous ombre3 que je suis à l’Académie, je me fusse allé piquer de parler bon français. […] De sorte qu’après nous avoir ôté toutes les paroles qui lient les autres, les beaux esprits nous voudront réduire à ne parler que par signes. […] Mais, monseigneur, vous en faites trop, pour le pouvoir3 souffrir en silence ; et vous seriez injuste, si vous pensiez faire les actions que vous faites sans qu’il en fût autre chose, ni que l’on prît la liberté de vous en parler. […] Vaugelas, qui parlait et surtout écrivait fort bien, prononçait mal.

59. (1852) Précis de rhétorique

L’Éloquence est le talent de bien parler. […] Parlez-nous de la pensée fine et de la pensée délicate. — 14. […] Parlez-nous du syllogisme. — 7. […] Parlons de la narration mixte. […] Tu veux, parle.

60. (1873) Principes de rhétorique française

—  La rhétorique est l’art de bien dire, c’est-à-dire l’art de parler de manière à persuader. […] Les mœurs de celui qui parle doivent se peindre dans son discours, sans qu’il y pense. […] C., je parle d’un chrétien éclairé des lumières de la foi. […] C’est à la vue de la flotte que nous parlons et c’est Ulysse qu’on m’oppose ! […] Avocat pour et contre appelé, Jour pris, je dois parler ; je parle ; j’ai parlé !

61. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre III. — Ornements du Style, qui consistent dans les Mots ou Figures »

Et il en coûta un plat d’or à Louis XIV pour avoir parlé par métonymie. […] Dieu parle, et d’un mortel vous craignez le courroux ? […] Parle, parle, il est temps, Corneille, Cinna, acte V, sc.  […] Massillon a parlé sur le même sujet que l’abbé Poulle. […] pardonne : je te parle au nom des dieux, au nom de l’univers qui t’est confié ; je te parle pour le bonheur des hommes et pour le tien.

62. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XXII. des figures. — figures par rapprochement d’idées semblables  » pp. 301-322

Condillac veut faire sentir quelle harmonie et quelle variété amène dans un écrit cette étroite liaison des idées dont j’ai parlé en traitant de la disposition. […] Barbier plusieurs passages de ce genre, sans même parler de ceux où il pousse jusqu’au cynisme le plus effronté. […] Ne parlez pas d’un sourire stéréotypé sur les lèvres de Diane de Poitiers, ni de la silhouette de Henri IV, etc. […] Montaigne en est plein, sans parler même des citations positives, qu’il sait fondre si habilement dans son texte. […] Ceci retombe dans les jargons de société dont j’ai parlé plus haut.

63. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Molière. (1622-1673.) » pp. 29-34

Tel est, en outre, le mérite de ses vers : aussi aurons-nous l’occasion de parler de nouveau et plus longuement de Molière, en le considérant comme poëte. […] Est-ce à votre cocher, monsieur, ou bien à votre cuisinier que vous voulez parler ? […] Vous n’avez qu’à parler. […] Toujours parler d’argent ! […] Mais pour agir en habile homme, il faut parler de faire bonne chère avec peu d’argent.

64. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XII. du corps de l’ouvrage. — portrait, dialogue, amplification  » pp. 161-174

sans parler même de la mauvaise foi qui dénature à plaisir53 J’ai proscrit de l’histoire le portrait de fantaisie ; il n’est à sa place que dans le roman ; encore a-t-il ses lois. […] Que vos personnages agissent ou parlent eux-mêmes, et je les connaîtrai mieux que par tout ce que vous m’en pourrez dire. […] Que d’écrits de ce genre, où l’auteur parle tout seul sous les noms des divers personnages auxquels il prête sa plume ! […] « Messieurs, dit Mirabeau, donnez-moi quelques moments d’attention, et je vous jure qu’avant que j’aie cessé de parler, vous ne serez plus tentés de rire. » Et il ne se trompait pas. […] Je sais que bien des poëtes ont étrangement abusé de ce moyen de développement ; que certaines amplifications de Crébillon, par exemple, de Corneille lui-même, je ne veux pas parler des contemporains, sont de véritables déclamations.

/ 379