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2. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Brizeux, 1803-1858 » pp. 557-563

combien de fois, la nuit, Ou quand j’erre le jour dans la foule et le bruit, Tu m’apparais !  […] les bruits, les odeurs, les murs gris des chaumières, Le petit sentier blanc et bordé de bruyères2, Tout renaît, comme au temps où, pieds nus, sur le soir, J’escaladais la porte, et courais au Moustoir ; Et, dans ces souvenirs où je me sens revivre, Mon pauvre cœur troublé se délecte et s’enivre ! […] qu’on entende partout Le bruit saint du travail, et d’un peuple debout. […] Un poëte qui n’a pas fait beaucoup le bruit dans le monde ; car il pratiquait volontiers cette maxime d’un sage : Le bruit ne fait pas de bien, le bien ne fait pas de bruit. — Esprit vraiment démocratique, dans le sens le plus pur et le plus sincère de ce mot, ami des choses simples, des vertus cachées, des existences laborieuses, esprit indépendant s’il en fut, il n’a jamais flatté personne, ni les grands, ni les petits. » 1.

3. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Lamartine 1790-1869 » pp. 506-523

On n’entendait au loin que le cri du grillon, Au lieu du bruit vivant, des voix entremêlées Qui montent, tous les soirs, du fond de ces vallées. […] L’œil fixé sur mon toit sans bruit et sans fumée, J’approchais, le cœur gros, de ma porte fermée, Là, quand mon pied poudreux heurta mon pauvre seuil, Un tendre hurlement fut mon unique accueil ; Hélas ! […] Mais prends ta voix de fête, et sonne sur ma tombe Avec le bruit joyeux d’une chaîne qui tombe   Au seuil libre d’une prison1 ! […] — Demande à Philomèle Pourquoi, durant les nuits, sa voix douce se mêle Au doux bruit des ruisseaux sous l’ombrage roulant. […] Mais il y eut en effet le bruit d’une délivrance dans son glas funèbre ; celle du génie échappant aux injustices, aux calomnies, aux ingratitudes du présent, pour entrer rayonnant et calme dans sa glorieuse immortalité.

4. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Casimir Delavigne 1794-1843 » pp. 524-529

O champs de Pressagni, fleuve heureux, doux coteaux, Alors, peut-être, alors mon humble sépulture   Se cachera sous les rameaux, Où souvent, quand mes pas erraient à l’aventure, Mes vers inachevés ont mêlé leur murmure   Au bruit de la rame et des eaux. […] LES LIMBES 3 Comme un vain rêve du matin, Un parfum vague, un bruit lointain, C’est je ne sais quoi d’incertain   Que cet empire ; Lieux qu’à peine vient éclairer Un jour qui, sans rien colorer, A chaque instant près d’expirer,   Jamais n’expire1. […] Assis sur la rive opposée, Je te vois, lorsque le soleil Sur tes gazons boit la rosée, Sourire encore à ton réveil, Et d’un brouillard pâle entourée, Quand le jour meurt avec le bruit, Blanchir comme une ombre adorée Qui nous apparaît dans la nuit. […] Rappelons la pièce de M. de Lamartine, intitulée Adieu : Oui, j’ai quitté ce port tranquille, Ce port si longtemps appelé, Où, loin des ennuis de la ville, Dans un loisir doux et facile, Sans bruit mes jours auraient coulé.

5. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre VII. De l’Harmonie imitative. »

Faut-il peindre le bruit des vagues qui se brisent en courroux sur leurs rivages ? […] Le bruit de la mer au milieu du calme de la nuit ? […] Frangeret ad saxum ; le bruit des os fracassés est dans frangeret, et le vers s’arrête avec la masse qui reste immobile sur le pavé de l’antre. […] Au premier sifflement des vents impétueux, Tantôt au haut des monts d’un bruit tumultueux On entend les éclats ; tantôt les mers profondes Soulèvent en grondant et balancent leurs ondes : Tantôt court sur la plage un long mugissement, Et les noires forêts murmurent sourdement24. […] Up the high hill he heawes a huge round stone, vaut bien Λᾶαν ἄνω ὤθεσκε ποτὶ λόφον ; et thunders impetuous down, peint la chute et fait entendre le bruit de la pierre.

6. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Voltaire, 1694-1778 » pp. 158-174

Plus soucieux encore de plaire que d’instruire, de charmer que d’être utile, il chercha surtout le bruit, l’éclat, la gloire, la première place dans un siècle sur lequel il régna, et dont l’influence régnait elle-même sur l’Europe. […] Mon cher ami, je suis enfin vis-à-vis ce beau portail2, dans le plus vilain quartier de Paris, dans la plus vilaine maison, plus étourdi du bruit des cloches qu’un sacristain ; mais je ferai tant de bruit avec ma lyre, que le bruit des cloches ne sera plus rien pour moi. […] Les gens de lettres font grand bruit de toutes ces petites querelles ; le reste du monde ou les ignore, ou en rit. […] Voltaire n’était pas aussi malheureux qu’il le dit de vivre ainsi en plein tourbillon : le mouvement, le bruit, était son élément ; il s’y trouvait comme le poisson dans l’eau. […] Le 2 août de la même année, Voltaire écrivait à D’Alembert : « Le bruit court que vous venez avec un autre philosophe ; il faudrait que vous le fussiez terriblement l’un et l’autre pour accepter les bouges indignes qui me restent dans mon petit ermitage ; ils ne sont bons tout au plus que pour un sauvage comme Jean-Jacques, et je crois que vous n’en êtes pas à ce point de sagesse iroquoise » 1.

7. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Supplément aux exemples. »

Du bruit, du vide, amis, voilà, je pense,          Le portrait de beaucoup de gens. […]           Il ne m’écoute pas, il fuit ; Il court dans une fête (et j’en entends le bruit) Finir son heureuse journée. […] Bruit plus doux que le bruit d’un essaim qui s’enfuit.

8. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Bernardin de Saint-Pierre. (1737-1814.) » pp. 153-158

Le bruit du tonnerre, qu’ils portent dans leurs flancs, retentit comme le rugissement du lion céleste. […] Les noirs écueils blanchissent au loin et font entendre des bruits affreux, entrecoupés de lugubres silences. […] Cependant ces grands corps insensibles font entendre des bruits profonds et mélancoliques. […] Il n’y a point de voix dominantes : ce sont des sons monotones, parmi lesquels se font entendre des bruits sourds et profonds, qui nous jettent dans une tristesse pleine de douceur.

9. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Lebrun Né en 1785 » pp. 498-505

Je tressaille en songeant aux paisibles soirées, Sous les regards du maître, au devoir consacrées, Quand, devant le pupitre en silence inclinés, Nous n’entendions parfois, de nous-même étonnés, Que, d’instant en instant, quelques pages froissées ; Ou l’insensible bruit des plumes empressées, Qui, toutes à l’envi courant sur le papier, De leur léger murmure enchantaient l’écolier. […] J’ai reconnu cet air si vif des bois, Qu’avec tant de plaisir j’aspirais autrefois ; Le long frémissement qui court sous les ombrages, Semblable au bruit sans fin qui montait des rivages, Et cette odeur de mousse et de feuilles dans l’air, Et les pommiers penchés par le vent de la mer. […] Mais cette tour de l’aigle, autrefois tant aimée, Où la muse avec moi si souvent enfermée, Loin de tous les regards et loin de tous les bruits, Me livra tant de jours et de fécondes nuits2 ; Oh ! […] Ce fut dans cette retraite que s’éveillèrent ses instincts poétiques. « J’avais, dit-il, pour toute compagnie un beau levrier, pour toute distraction quelques ruches d’abeilles, au bruit desquelles j’allais lire les Géorgiques… Tout ce qui m’entourait était à moi, à la manière de Rousseau : j’en étais plus que le maître, j’en étais le possesseur. » 1.

10. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Delille 1738-1813 » pp. 464-472

J’aimais à voir le flot, d’abord ride légère, De loin blanchir, s’enfler, s’allonger et marcher, Bondir tout écumant de rocher en rocher, Tantôt se déployer comme un serpent flexible, Tantôt, tel qu’un tonnerre, avec un bruit horrible, Précipiter sa masse, et de ses tourbillons Dans les rocs caverneux engloutir les bouillons2. Ce mouvement, ce bruit, cette mer turbulente, Roulant, montant, tombant en montagne écumante, Enivraient mon esprit, mon oreille, mes yeux ; Et le soir me trouvait immobile en ces lieux3. […] Ce ruisseau dont mes yeux tyrannisaient les ondes1, Rebelles comme moi, comme moi vagabondes ; Ce jardin, ce verger, dont ma furtive main Cueillait les fruits amers, plus doux par le larcin2 ; Et l’humble presbytère, et l’église sans faste ; Et cet étroit réduit que j’avais cru si vaste3, Où, fuyant le bâton de l’aveugle au long bras, Je me glissais sans bruit, et ne respirais pas. […] J’entends, la nuit, et de mon lit, le bruit des vagues ; et ce son monotone et sourd m’invite doucement au sommeil.

11. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Courier 1773-1825 » pp. 238-242

A minuit, on monte à cheval ; on arrive sans bruit aux portes de Luynes ; point de sentinelles à égorger, point de postes à surprendre ; on entre, et, au moyen de mesures si bien prises, on parvient à saisir une femme, un barbier, un sabotier, quatre ou cinq laboureurs ou vignerons, et la monarchie est sauvée2 ! […] L’appeler, faire du bruit, je n’osais ; m’échapper tout seul, je ne pouvais ; la fenêtre n’était guère haute, mais en bas deux gros dogues hurlant comme des loups… En quelle peine je me trouvais ; imaginez-le si vous pouvez. […] Dès que le jour parut, toute la famille, à grand bruit, vint nous éveiller, comme nous l’avions recommandé.

12. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre III. Du Sublime dans les Compositions littéraires. »

Les eaux couvraient au loin les rochers et les monts, Mais au bruit de sa voix les ondes se troublèrent,             Et soudain s’écoulèrent             Dans des gouffres profonds. […] La mer, dans l’excès de sa rage, Se roule en vain sur le rivage Qu’elle épouvante de son bruit ; Un grain de sable la divise, L’onde écume, le flot se brise, Reconnaît son maître et s’enfuit. […] L’enfer s’émeut au bruit de Neptune en furie : Pluton sort de son trône, il pâlit, il s’écrie : Il a peur que ce Dieu, dans cet affreux séjour, D’un coup de son trident ne fasse entrer le jour ; Et, par le centre ouvert de la terre ébranlée, Ne fasse voir du Styx la rive désolée, Ne découvre aux mortels cet empire odieux, Abhorré des mortels, et craint même des dieux5. […] Au bruit de Neptune en furie, est une de ces tournures heureuses, dit La Harpe de ces figures de diction qui donnent au style la véritable élégance poétique.

13. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Bernardin de Saint-Pierre, 737-1814 » pp. 357-367

L’air emportait la voix, et ne permettait d’ouïr que le sifflement aigu des vergues et des cordages, et les bruits rauques des flots, semblables aux hurlements des bêtes féroces. […] Cependant ces grands corps insensibles font entendre des bruits profonds et mélancoliques. […] Il n’y a point de voix dominantes, mais des sons monotones, parmi lesquels se font entendre des bruits sourds et profonds, qui nous jettent dans une tristesse pleine de douleur. […] Le bruit des eaux, des bois, de la foudre et des vents, qui tombent et se brisent contre les rochers ébranlés et fracassés ; les cris et les hurlements des hommes et des animaux, pêle-mêle emportés dans un tourbillon de sable, de pierres et de débris, tout semble annoncer les dernières convulsions et l’agonie de la nature. » On devra étudier aussi le récit d’une tempête que subit Bernardin aux environs de Madagascar, et qu’il raconte à un ami dans une lettre, sans préoccupation littéraire.

14. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Première partie — Chapitre I. — Défauts et qualités de la phrase »

Mille sons qui heurtent son oreille, ne sont pour lui qu’un bruit confus ; ses pieds ne peuvent le porter, ses mains ne savent rien saisir, sa peau délicate ne sent rapproche des objets extérieurs que par le choc douloureux qu’ils lui font éprouver. […] On peut citer comme exemple de pureté les lignes suivantes de Buffon : Le Cheval La plus noble conquête que l’homme ait jamais faite, est celle de ce fier et fougueux animal, qui partage avec lui les fatigues de la guerre et la gloire des combats : aussi intrépide que soc maître, le cheval voit le péril et l’affronte il se fait au bruit des armes, il l’aime, il le cherche et s’anime de la même ardeur. […] Et plus loin pour imiter le bruit du char d’Hippolyte qui se brise, et vole de tous côtés : L’essieu crie et se rompt : l’intrépide Hippolyte Voit voler en éclats tout son char fracassé. […] Chateaubriand, en décrivant le spectacle d’une belle nuit dans les déserts du Nouveau-Monde, peint avec perfection le retentissement immensément prolongé dans le lointain du bruit de la cataracte du Niagara : « Tout était silence et repos, hors la chute de quelques feuilles, le passage brusque d’un vent subit, les gémissements rares et interrompus de la hulotte ; mais au loin, par intervalles, on entendait les roulements solennels de la cataracte du Niagara, qui, dans le calme de la nuit, se prolongeaient de désert en désert, et expiraient à travers les déserts solitaires. » Delille représente parfaitement le bruit que fait le moulin pour réduire le café en poudre : Moi seul contre la noix qu’arment ses dents de fer, Je fais en le broyant crier son fruit amer. Et ailleurs il exprime ainsi le bruit régulier occasionné par des marteaux qui frappent l’enclume : Et leurs bras vigoureux lèvent de lourds marteaux Qui tombent en cadence et domptent les métaux.

15. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Voltaire 1694-1778 » pp. 445-463

Plus soucieux encore de plaire que d’instruire, de charmer que d’être utile, il chercha surtout le bruit, l’éclat, la gloire, la première place dans un siècle sur lequel il régna, et dont l’influence régnait elle-même sur l’Europe. […] Voltaire se jugeait peut-être lui-même en disant : « Je suis comme les petits ruisseaux : ils sont transparents, parce qu’ils sont peu profonds1. » Paris Je crois voir à la fois Athène et Sybaris2 Transportés dans les murs embellis par la Seine : Un peuple aimable et vain, que son plaisir entraîne, Impétueux, léger, et surtout inconstant, Qui vole au moindre bruit, et qui tourne à tout vent, Y juge les guerriers, les ministres, les princes ; Rit des calamités dont pleurent les provinces ; Clabaude le matin contre un édit du roi, Le soir, s’en va siffler quelque moderne, ou moi ; Et regrette, à souper, dans ses turlupinades3, Les divertissements du jour des barricades4. […] Le bruit avait couru que Voltaire venait de mourir. […] Un profond calme, un stupide silence, Succède au bruit de leur impertinence : Chacun redoute un honnête entretien ; On veut penser, et l’on ne pense rien. […] Le bruit avait couru que Voltaire venait de mourir.

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