D’une main elle en abaissa les rameaux inférieurs, de l’autre elle y plaça le corps de son enfant ; laissant alors échapper la branche, la branche retourna à sa position naturelle, en emportant la dépouille de l’innocence, cachée dans un feuillage odorant. » 1. […] Ce vague de l’expression ne me déplaît pas ; car il s’agit ici des perspectives lointaines de l’infini qui nous échappera toujours.
Ulysse s’introduisant dans Troie sous le costume d’un mendiant, reconnu par Hélène, réussissant, par son secours, à s’échapper pour revenir avec Diomède enlever le Palladium : tel est le sujet de cette pièce, dont l’Odyssée (IV, 252-264 cf.
Une grosse houle venait du couchant, bien que le vent soufflât de l’est ; d’énormes ondulations s’étendaient du nord au midi, et ouvraient dans leurs vallées de longues échappés de vue sur le désert de l’Océan. […] La vie s’ouvre, souriante et pleine d’illusions dorées ; l’âme a des aspirations sans bornes ; elle entrevoit des horizons infinis ; elle n’a pas encore subi les douleurs, les meurtrissures de la vie ; elle se cabre aux difficultés, les surmonte d’un bond ; souple et légère, elle échappe à l’étreinte des pensées sérieuses ; les larmes sont une rosée qui la rafraîchit, et que la brise essuie avec le soleil. […] Heureuse métaphore qui se continue dans les trois vers suivants, où l’on croit voir le rossignol s’échapper joyeux des filets de l’oiseleur. […] Mademoiselle de Coigny fut plus heureuse que Chénier ; elle échappa à la hache révolutionnaire ; son beau voyage s’est prolongé jusqu’à nos jours.
Il y a bien en lui les éléments primitifs qui composent tout le barbare, mais modifiés par l’éducation et compliqués d’un entrecroisement de petits fils presque imperceptibles, qui échappent à une observation superficielle, et que l’orateur doit avoir patiemment étudiés et comptés, pour ainsi dire, un à un, s’il ne veut pas perdre le fruit de son éloquence. […] Quand vient son tour de parler et qu’il se lève, à le voir les yeux baissés, attachés sur la terre, son sceptre immobile dans sa main, on le prendrait d’abord pour un insensé ou pour un homme pris de vertige : mais à mesure que sa grande voix s’échappe pleine et sonore de sa poitrine et que les paroles tombent de sa bouche, pressées comme des flocons de neige, on sent que nul homme au monde ne peut lutter d’éloquence avec lui, et on oublie de regarder Ulysse. […] Une fois donc le diapason du discours donné par le prélude, malheur à l’orateur qui laissait échapper une note fausse, c’est-à-dire une intonation douteuse ou un geste excessif ! […] Tout ce qui peut frapper des âmes pieuses et des imaginations crédules, une vision divine, une voix entendue dans les airs, — moins que cela, un songe, un mot d’heureux augure échappé au hasard, — moins que cela encore, l’éternuement d’un soldat, le vol d’une chouette au moment d’un combat, tous ces incidents que la superstition commente et que la peur grossit, deviennent des instruments de ses desseins et des auxiliaires de sa politique.
Tel ruisseau qui sans bruit s’échappait de sa source et vaguait comme hésitant et en quête de son lit, grossi par ses affluents, devient un vaste fleuve qui bat triomphant ses piliers de granit : c’est l’image du discours. […] Aussitôt qu’il eut porté de rang en rang l’ardeur dont il était animé, on le vit presque en même temps pousser l’aile droite des ennemis, soutenir la nôtre ébranlée, rallier le Français à demi vaincu, porter partout la terreur et étonner de ses regards étincelants ceux qui échappaient à ses coups. » Voltaire. — « Ce fut lui qui, avec de la cavalerie, attaqua cette infanterie espagnole jusque-là invincible, aussi forte, aussi serrée que la phalange ancienne si estimée, et qui s’ouvrait avec une agilité que la phalange n’avait pas, pour laisser passer la décharge de dix-huit canons qu’elle contenait. […] Il faut que chaque fait vienne renforcer le fait qui le précède et préparer celui qui suivra ; il faut que l’ombre et la lumière soient réparties adroitement sur les côtés faibles et sur les côtés avantageux de la narration ; il faut, ce qui est plus difficile encore, que cet ordre calculé échappe à la pénétration du tribunal. […] Il crie que sa cause lui échappe, qu’on lui coupe sa belle tirade, qu’il n’a pas fini encore son : Regardez, juges, regardez.
Enfin je suis échappé des bandits, des Espagnols et de la mer : tout cela ne m’a point fait de mal, et vous m’en faites, et c’est pour vous que je cours le plus grand danger que je courrai en ce voyage.
La Rochefoucauld 1613-1680 [Notice] Grand seigneur, homme d’intrigue, mêlé à toutes les cabales de la Régence et de la Fronde, ambitieux trompé par ses espérances, malheureux à la guerre, dupe de ses amis, et victime de ses ennemis, trahi, méconnu dans ses affections et son dévouement, échappé du naufrage avec une fortune compromise et une santé détruite, n’ayant plus de ressources que du côté de l’esprit, le duc de La Rochefoucauld consola ses disgrâces par un livre où ses ressentiments lui inspirent la misanthropie d’une morale pessimiste.
Ce sont des sujets séduisants à traiter ; mais ils nous échappent quand nous voulons les saisir et les soumettre à l’analyse. […] Cette analogie nous échappe tout à fait dans les noms des objets qui ne frappent que la vue, qui ne produisent aucun son, qui n’exécutent aucun mouvement, et surtout dans les expressions appropriées à des idées morales. […] Plus une nation cultive les sciences, plus le langage y est perfectionné, et plus nous devons nous attendre à ce que la langue y abonde en particules connectives, qui expriment des rapports entre les objets, et des liaisons entre les pensées qui avaient échappé à une vue moins subtile. […] Dans le premier cas, les choses se succèdent avec une telle rapidité, que l’esprit semble n’avoir pas le loisir de s’arrêter sur le petit mot qui les unit, la particule lui échappe, et ce qu’elle devrait séparer ne forme pour lui qu’un seul tout. […] Il ne doit cependant pas nous échapper qu’une phrase où ces pauses et ces intervalles seraient d’une régularité trop sensible, aurait un air d’affectation qu’il faut soigneusement éviter.
Oui, si les gens sensés, les seuls dont l’opinion puisse être de quelque poids à mes yeux, ont jugé cet ouvrage avec quelque indulgence ; s’ils l’ont distingué des autres compilations du même genre, c’est que mon plan ne leur a point échappé ; c’est qu’ils ont retrouvé, sans doute, à chaque page, à chaque ligne de ce Cours, l’intention bien prononcée de ramener les jeunes gens à la vertu, en les rappelant à l’étude et a l’admiration du beau et du vrai, et de leur prouver qu’il ne peut y avoir ni génie, ni sensibilité sans vertus, comme il ne peut y avoir rien de solide dans le talent, sans les mœurs et la conduite.
Ce genre de composition offre à l’esprit un délassement agréable, et peut d’ailleurs laisser échapper, par intervalle, les traits d’une morale utile ou d’un sentiment agréable.
Quoiqu’élève de Ronsard, il échappa à l’affectation italienne et au fatras pédantesque en quelques sonnets où l’on aime la sensibilité d’un cœur enthousiaste.
Le premier des biens lui manquait : son âme semblait tenir à ses organes par des attaches si frêles qu’elle était près de s’en échapper au moindre souffle.
Sans toi, frêles vaisseaux, privés de gouvernail et de pilotes, toujours battus par des vents contraires, portés çà et là sur une mer semée d’écueils, nous péririons sans être plaints, ou nous échapperions pour souffrir encore. […] Je le vis périr ; le dard d’un Phénicien perça sa poitrine ; les rênes lui échappèrent des mains ; il tomba de son char sous les pieds des chevaux. […] Ce fil libérateur, il le baise, il l’adore ; Il s’en assure, il craint qu’il ne s’échappe encore : Il veut le suivre, il veut revoir l’éclat du jour ; Je ne sais quel instinct l’arrête en ce séjour.
Eux aussi, ils trouvèrent à qui parler ; et, en attendant une dictature qu’ils avaient rendue désirable1, ils n’échappèrent pas à l’ironie narquoise d’un bel esprit, Mellin de Saint-Gelais, qui vengea son maître Marot, en divertissant la cour et la ville par ses Olympiques et ses Pythiques, où il parodiait le carnaval solennel de la Pléiade. […] Soumettre la prononciation à l’écriture, c’était plier l’usage à des servitudes dont la raison lui échappait trop souvent, parce qu’elles ne furent pas toujours raisonnables. […] Ce n’est pas que le langage échappe à l’obligation d’obéir à des lois.