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13. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Cousin, 1792-1867 » pp. 492-503

Relisez avec soin la plupart des ouvrages qui ont paru de 1750 à 1760, pièces de théâtre, romans, écrits philosophiques, discours académiques, compositions sérieuses et légères ; examinez le caractère général que présente en ces divers écrits la prose française : on la dirait épuisée, étiolée. […] Le comble de l’art pour une pièce de théâtre serait de vous persuader que vous êtes en présence de la réalité. […] Ainsi, pour produire l’illusion, on a mis au théâtre un grand soin dans ces derniers temps à la vérité historique du costume2. […] Si l’Ariane que je vois et que j’entends était la vraie Ariane qui va être trahie par sa sœur, à cette scène pathétique où la pauvre femme, qui déjà se sent moins aimée, demande qui donc lui ravit le cœur jadis si tendre de Thésée, je ferais comme ce jeune Anglais qui s’écriait en sanglotant et en s’efforçant de s’élancer sur le théâtre : « C’est Phèdre, c’est Phèdre », comme s’il eût voulu avertir et sauver Ariane ! […] Le premier hôpital est plus rempli de pitié et de terreur que tous les théâtres du monde.

14. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section cinquième. La Tribune académique. — Chapitre III. Discours académiques de Racine, de Voltaire et de Buffon. »

Nul goût, nulle connaissance des véritables beautés du théâtre : les auteurs aussi ignorants que les spectateurs ; la plupart des sujets extravagants et dénués de vraisemblance ; point de mœurs, point de caractères ; la diction encore plus vicieuse que l’action, et dont les pointes et de misérables jeux de mots faisaient le principal ornement : en un mot, toutes les règles de l’art, celles même de l’honnêteté et de la bienséance partout violées. […] » La scène retentit encore des acclamations qu’excitèrent à leur naissance le Cid, Horace, Cinna, Pompée, tous ces chefs-d’œuvre représentés depuis sur tant de théâtres, traduits en tant de langues, et qui vivront à jamais dans la bouche des hommes. […] Homère exprime tout ce qui frappe les yeux : les Français, qui n’ont guère commencé à perfectionner la grande poésie qu’au théâtre, n’ont pu et n’ont dû exprimer alors que ce qui peut toucher l’âme. — Le langage du cœur et le style du théâtre ont entièrement prévalu : ils ont embelli la langue française, mais ils en ont resserré les agréments dans des bornes un peu trop étroites.

15. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Saint-Marc Girardin. Né en 1801. » pp. 534-541

L’art doit être spiritualiste Quand le théâtre fait prévaloir les émotions du corps sur les émotions de l’esprit, il se rapproche du cirque ; mais il en est aussitôt puni par une prompte décadence. […] L’âme, dans ses douleurs, est patiente et variée, parce qu’elle est immortelle ; tandis que le corps, après souffrir, ne sait que mourir : c’est la seule variété et la seule péripétie qu’il sache mettre dans ses douleurs ; et de là aussi, au théâtre, la stérilité et la monotonie des souffrances matérielles. […] Les caractères étranges et singuliers, qu’il est de mode de mettre sur le théâtre et dans les romans, font le même effet ; ils fatiguent parce qu’ils sont uniformes, parce que leur bizarrerie est comme une sorte de ressort qui tire toujours leur pensée et leurs actions du même côté, et dont le jeu est bien connu. […] Aujourd’hui même que le roman et le théâtre visent, à qui mieux mieux, à l’horrible ; aujourd’hui que le vice a pris des allures fières et hautaines qui déconcertent la vertu, cette manie de mettre le grand dans l’horrible, et le beau dans le mal, n’est pas autre chose qu’une tentative faite par l’homme pour atteindre à cet idéal qu’il cherche toujours, et qu’il place, selon les opinions du temps, tantôt dans le bien, tantôt dans le mal, mais qu’il ne trouve jamais.

16. (1867) Rhétorique nouvelle « Deuxième partie. L’éloquence du barreau » pp. 146-

Comme le même souffle de vent retentit avec des modulations différentes en passant de la plaine à la montagne et de la montagne à la forêt, de même elle change d’accent en changeant de théâtre. […] Pour juger des effets que pouvait produire sur le théâtre de l’éloquence cette libre expansion des sentiments de la nature, éloignons un moment notre pensée des enceintes étroites où s’exerce timidement l’art moderne, devant un public restreint d’oisifs délicats, de jurés bourgeois ou campagnards, de juges interprètes scrupuleux et inflexibles de la loi. […] De même qu’un artiste exagère les proportions des statues qui doivent orner les fûts des colonnes ou les sommets des édifices, de même il donne à sa voix et à son action une ampleur digne du théâtre qu’il domine du regard et du geste. […] que de coups de théâtre ! […] Rome est le vrai théâtre de l’éloquence judiciaire, comme Athènes est celui de l’éloquence politique.

17. (1882) Morceaux choisis des prosateurs et poètes français des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cours supérieur. Poètes (2e éd.)

L’idée lui en fut suggérée par la vogue de l’Astrée et par l’ambition de réussir au théâtre. […] Il a tout renouvelé au théâtre : sujets, sentiments, style, jeu, costumes, décorations. […] Dès l’année suivante, 1669, il reparut sur le théâtre tragique avec un chef-d’œuvre, Britannicus. […] Combien sont nombreux ceux qui ont posé devant son talent d’observation et qu’il a fait revivre au théâtre ! […] Son théâtre est une des parties de ce bagage qui demande le plus d’être allégée.

18. (1881) Morceaux choisis des classiques français des xvie , xviie , xviiie et xixe siècles, à l’usage des classes de troisième, seconde et rhétorique. Poètes

Molière n’est plus restreint au Misanthrope, Corneille à quatre, Racine à trois de ses tragédies ; le cadre étroit du théâtre dit classique a été élargi, ou plutôt supprimé ; plusieurs comédies de Molière sont mises entre les mains des élèves de troisième, de seconde et de rhétorique ; plusieurs des tragédies de Corneille et de Racine sont dans les deux premières classes, leur théâtre complet est ouvert aux élèves de la dernière. […] Choisir nos citations dans celles de ses comédies en vers qui sont restées en dehors du programme, afin de compléter la connaissance de cette partie de son théâtre. […] L’expression complète de cette fusion, dans la comédie, sont la personne et le théâtre de Pierre Larivey (1540-1611), Italien francisé, Florentin d’origine par son père, Champenois et Troyen de naissance, imitateur de la comédie latine et de la comédie italienne. […] S’il n’est plus lu, il a eu au moins la gloire assurée d’avoir attaché son nom à la première date mémorable du théâtre français. […] Mais d’autres travaux le détournèrent du théâtre.

19. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre VII. Satire. »

La satire touche de près à la comédie ; chez les Grecs, elle prit même naissance sur le théâtre : les comédies d’Aristophane sont essentiellement satiriques. […] À Rome, la satire commença aussi sur le théâtre, dans les vers fescenniens.

20. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Racine. (1639-1699.) » pp. 83-90

Nul goût, nulle connaissance des véritables beautés du théâtre. […] La scène retentit encore des acclamations qu’excitèrent a leur naissance le Cid, Horace, Cinna, Pompée, tous ces chefs-d’œuvre représentés depuis sur tant de théâtres, traduits en tant de langues, et qui vivront à jamais dans la bouche des hommes. […] Ou plutôt, en général, dans les compositions du théâtre : « In comœdia maxime claudicamus », a dit Quintilien, X, 1.

21. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Chefs-d’œuvre de poésie. — Regnard. (1655-1709.) » pp. 242-253

Outre cet enjouement, beaucoup de verve le distingue : son invention est facile et originale, les expressions et les tours piquants abondent dans ses vers parfois négligés ; mais on regrette qu’il n’ait pas donné à son théâtre un caractère assez moral. […] Hector, derrière le théâtre. […] Boileau louait dans Regnard « le don de n’être pas médiocrement plaisant », et Voltaire pensait que « celui qui ne goûte point les comédies de Regnard n’est pas digne d’admirer Molière. » La Harpe a dit aussi : « Regnard a su être grand comique sans ressembler à Molière : ce qui le caractérise, c’est une gaieté soutenue, un fonds inépuisable de saillies et de traits plaisants. » Il faut voir à son sujet, outre le Cours de littérature de La Harpe, les feuilletons recueillis de Geoffroy, en regrettant d’ailleurs l’absence de travaux critiques plus complets sur cet écrivain, dont le théâtre mériterait un annotateur diligent.

22. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre IX. » pp. 98-101

. — Lessing, dans sa Dramaturgie, va plus loin qu’Aristote et soutient que la tragédie a le même droit que la comédie sur les sujets d’invention  mais l’histoire du théâtre moderne, ainsi que celle du théâtre grec, confirme la judicieuse réserve de notre philosophe.

23. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Madame de Staël 1766-1817 » pp. 218-221

Corinne disait encore : « Il y a dans les plus petites villes d’Italie un théâtre, de la musique, des improvisateurs, beaucoup d’enthousiasme pour la poésie et les arts, un beau soleil ; enfin, on y sent qu’on vit ; mais je l’oubliais tout à fait dans la province que j’habitais, et j’aurais pu, ce semble, envoyer à ma place une poupée légèrement perfectionnée par la mécanique, elle aurait très-bien rempli mon emploi dans la société. […] Corinne disait encore : « Il y a dans les plus petites villes d’Italie un théâtre, de la musique, des improvisateurs, beaucoup d’enthousiasme pour la poésie et les arts, un beau soleil ; enfin, on y sent qu’on vit ; mais je l’oubliais tout à fait dans la province que j’habitais, et j’aurais pu, ce semble, envoyer à ma place une poupée légèrement perfectionnée par la mécanique, elle aurait très-bien rempli mon emploi dans la société.

24. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Corneille 1606-1684 » pp. 310-338

L’héroïsme est le principal ressort de son théâtre ; il nous propose des vertus altières et de grands caractères, dans une langue nerveuse et concise qui exprime par de sublimes accents le triomphe du devoir sur la passion. […] Chez cette race nouvelle Où j’aurai quelque crédit, Vous ne passerez pour belle Qu’autant que je l’aurai dit1 Corneille se juge lui-même 2 La fausse humilité ne met plus en crédit ; Je sais ce que je vaux, et crois ce qu’on m’en dit ; Pour me faire admirer, je ne fais point de ligue, J’ai peu de voix pour moi, mais je les ai sans brigue ; Et mon ambition, pour faire plus de bruit, Ne les va point quêter de réduit en réduit1 ; Mon travail sans appui monte sur le théâtre, Chacun en liberté l’y blâme ou l’idolâtre ; Là, sans que mes amis prêchent leurs sentiments, J’arrache quelquefois leurs applaudissements ; Là, content du succès que le mérite donne, Par d’illustres amis je n’éblouis personne. […] Ces strophes sont une nouveauté dans notre théâtre. […] Étendant le cercle du drame, c’est-à-dire de l’imitation de la vie humaine, Corneille a mis sur son théâtre, comme dans le monde, des personnages petits et bas à côté des personnages grands et généraux : Félix, dans polyeucte, à côté de Pauline, de Polyeucte et de Sévère ; Prusias, Arsinoé et Flaminius, dans Nicoméde, à côté de Nicomède et d’Attale ; Ptolémée et Cléopâtre enfin, dans la Mort de Pompée, à côté de Cornélie et de César. » M. […] J’ai souhaité longtemps d’agréer à vos yeux ; Aujourd’hui je veux plaire à l’Empereur des cieux ; Je vous ai divertis, j’ai chanté vos louanges ; Il est temps maintenant de réjouir les anges, Il est temps de prétendre à des prix immortels Il est temps de passer du théâtre aux autels.

25. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Prosper Mérimée Né en 1803 » pp. 286-290

Chaque coup de théâtre, chaque surprise est amenée naturellement, et semble indispensable. Ces mérites, vous les admirerez dans Colomba, un chef-d’œuvre, où nous voyons régner une sorte de fatalité morale qui rappelle le théâtre antique.

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