Nous lui devons autant qu’à Corneille, car il a donné à tous les penseurs un instrument capable de suffire aux plus hautes spéculations. […] Cet homme nouveau vint dire aux autres hommes que, pour être philosophe, il ne suffisait pas de croire, mais qu’il fallait penser.
Il en est de même des ouvrages de littérature ; il suffit d’entendre une page d’Homère, de Tacite, de Pascal, de Molière ou de Chateaubriand, pour que le nom de l’auteur vienne aussitôt à l’esprit. […] Selon nous, ces caractères ne suffisent pas pour constituer le sublime. […] Mais outre cette justesse absolue, mathématique, qui convient surtout aux sciences, il y a encore une justesse relative qui suffit au cœur. […] Il ne suffit pas de porter son attention sur les mots et sur les pensées, il faut encore savoir coordonner les idées entre elles, et les faire rapporter à un centre commun, à une pensée générale.
La netteté d’esprit et l’attention suffisent généralement pour arriver là dans le poëme, le discours, le roman, partout où l’écrivain prend lui-même la parole. […] Ce que j’en dis ici suffit pour la faire connaître.
Il ne suffit pas de nous présenter des violettes et des roses, des oiseaux, des ruisseaux, des zéphyrs et tous les lieux communs que tant d’auteurs ramènent sans cesse dans leurs insipides pastorales. […] Un seul objet introduit à propos suffit quelquefois pour caractériser une scène entière.
Oui, ce don suffit aux enfants ; il suffit même au commun des hommes, dans les débats de la société. […] Tout l’art en est renfermé dans les seuls préceptes que nous avons dits : ils suffisent seuls, ils prouvent seuls ; toutes les autres règles sont inutiles ou nuisibles. […] Il ne suffit pas, pour le goût, de voir, de connaître la beauté d’un ouvrage ; il faut la sentir, en être touché. […] Mais on se récrie contre plusieurs vers qui ne parurent que familiers : Il suffit ; et que fait la reine Bérénice ? […] Il suffit pour embellir les sentiments les moins nobles et les moins tragiques.
Quelquefois il suffit de prouver. […] Il ne suffit pas d’être un guide probe, il faut être un guide éclairé. […] Dans la défense surtout, une plaisanterie piquante suffit pour confondre un adversaire. […] Il ne suffit pas d’être vrai, simple, bienveillant, il faut aussi être modeste et ne parler qu’à son tour. […] Leur langue n’a pas assez de mots, leur poitrine assez d’élan, leur éloquence assez de figures, pour suffire à cette tâche.
Il suffit quelquefois du premier moyen ; mais, le plus souvent, ce n’est pas trop des trois. […] s’il suffit d’avoir des intentions louables et que l’honneur n’emprunte rien du succès, nous le savons, et Ammon ne nous le gravera pas plus profondément. […] Cependant, après le travail opiniâtre d’une semaine entière, un peu de repos leur suffit. […] et qui suffit pour la vraisemblance, pour la vérité même du récit. […] Tes principes ne sont-ils pas gravés dans tous les cœurs, et ne suffit-il pas, pour apprendre tes lois, de rentrer en soi-même et d’écouter la voix de sa conscience, dans le silence des passions ?
Suffisait-il à Corneille d’avoir lu Tite-Live, de s’en représenter vivement plusieurs scènes, d’en saisir les traits principaux et de les combiner heureusement pour faire la tragédie des Horaces ?
Le seul Philoctète est dans la nature, parce que les suites de l’injure cruelle qu’il a éprouvée, l’ont livré à toutes les horreurs de la souffrance et du besoin, et qu’il n’y a plus alors d’expressions trop fortes pour suffire à l’explosion d’une haine aussi profonde, d’une rage si longtemps concentrée. […] Soit qu’il fût persuadé que l’on ne doit pas plus composer avec le faux goût qu’avec les mauvaises mœurs, soit que le ton dur et tranchant tînt essentiellement à son caractère ou à l’inexpérience de l’âge, il crut qu’il suffisait d’avoir raison, et ne songea qu’à le prouver, insensible d’ailleurs, ou complètement sourd aux clameurs qu’il ne pouvait manquer d’exciter autour de lui. […] Ce n’est point assez, pour se placer au rang des modèles, d’ouvrir une route nouvelle ; il faut voir où cette route peut conduire les imitateurs tentés de la suivre : il ne suffit pas de créer un nouveau genre, il faut examiner si ce genre nouveau est une richesse littéraire de plus : c’est peu enfin d’introduire dans le style, des formes qu’il ne connaissait pas, et dont Fénelon, Voltaire, Buffon et Rousseau n’ont pas eu besoin pour assurer à notre langue l’empire qu’elle exercera à jamais sur toutes les langues modernes ; sans quoi l’on appauvrit la langue, au lieu de l’enrichir.
Quel qu’ait été d’ailleurs le long et triste déclin de ce grand homme, des éclairs de génie ne cessèrent, en brillant çà et là, même dans ses derniers ouvrages, de rappeler sa gloire passée2 ; et tel est le nombre des sublimes et divines beautés, comme disait Mme de Sévigné, qu’offre ce père de notre théâtre, qu’elles suffiront à jamais pour couvrir et faire pardonner ses imperfections et ses fautes. […] Croyez-vous qu’il suffit d’être sorti de moi ? […] Qu’il suffise de remarquer ici que les Sentiments sur le Cid, rédigés par Chapelain, ne sont pas tout à fait indignes, malgré les points contestables ou faux qu’ils renferment, des éloges que leur a donnés La Bruyère.
Presque jamais de portraits en pied, le buste suffit. […] Sa façon de dire les terminaisons en i faisait croire à quelque chant d’oiseau ; le ch prononcé par elle était comme une caresse, et la manière dont elle attaquait les t accusait le despotisme du cœur. » Ici toute critique est superflue, il suffit de citer.
. — tropes d’invention et tropes d’usage Nous avons fait observer que certaines figures entrent tellement dans les habitudes du discours, appartiennent si intimement au génie de la langue, que le rhéteur n’a presque rien à dire sur leur emploi, et qu’il suffit de les énoncer et de les définir. […] Or tel est aussi le caractère de la métonymie, de la synecdoque et de la catachrèse ; la différence, c’est que, pour celles-ci, la simple similitude ou analogie ne suffit plus, et qu’il faut ajouter un autre élément à la comparaison.
Il en est des livres comme des amis : un petit nombre suffit ; ce n’est pas la quantité, mais la qualité que nous devons rechercher. […] Tous les préceptes du monde ne suffisent pas pour donner du goût ; c’est par l’étude et par la comparaison des modèles qu’il se forme : l’enseignement du maître consiste à faire ressortir les beautés, à les montrer aux yeux des élèves, à exciter en eux la délicatesse du sentiment, à former leur jugement par une critique éclairée et impartiale.