L’élégance est le choix, le choix en tout, choix de pensées, choix d’expressions, choix de tours, choix de nombres. […] Il faut bien dire qu’Euripide a un assez bon nombre de traits de ce genre.
On peut lui appliquer ce trait : « qui dit auteur, dit oseur. » Exorde de son quatrième mémoire 1 Si l’être bienfaisant qui veille à tout m’eût un jour honoré de sa présence et m’eût dit : « Je suis Celui par qui tout est ; sans moi tu n’existerais point ; je te douai d’un corps sain et robuste ; j’y plaçai l’âme la plus active ; tu sais avec quelle profusion je versai la sensibilité dans ton cœur et la gaieté sur ton caractère ; mais tu serais trop heureux si quelques chagrins ne balançaient pas cet état fortuné : aussi tu vas être accablé sous des calamités sans nombre ; déchiré par mille ennemis ; privé de ta liberté, de tes biens ; accusé de rapines, de faux, d’imposture, de corruption, de calomnie ; gémissant sous l’opprobre d’un procès criminel ; garrotté dans les liens d’un décret ; attaqué sur tous les points de ton existence par les plus absurdes on dit ; et ballotté longtemps au scrutin de l’opinion publique, pour décider si tu n’es que le plus vil des hommes ou seulement un honnête citoyen », je me serais prosterné, et j’aurais répondu : « Être des êtres, je te dois tout, le bonheur d’exister, de penser et de sentir ; je crois que tu nous as donné les biens et les maux en mesure égale ; je crois que ta justice a tout sagement compensé pour nous, et que la variété des peines et des plaisirs, des craintes et des espérances, est le vent frais qui met le navire en branle et le fait avancer gaiement dans sa route. […] L’acharnement de mes ennemis les a rendus peu redoutables ; leur nombre les a livrés au défaut de liaison si nécessaire en tout projet ; la haine les a conduits à l’aveuglement ; chacun de leurs efforts pour m’arrêter n’a fait qu’accélérer ma marche et hâter ma justification.
Ces règles sont au nombre de six, dont les trois premières servent à faire un bon ouvrage, et les trois autres, à le rendre aussi parfait qu’il puisse l’être.
S'il en était ainsi, la langue latine ne saurait offrir de sérieuses difficultés ; car enfin, ces règles de grammaire, que l’on a beaucoup trop multipliées, peuvent se réduire à un petit nombre ; et, si on les étudie avec méthode, il sera facile de les apprendre en peu de temps ; puis, avec un peu d’attention et de discernement, on viendra facilement à bout de les appliquer d’une manière convenable.
Ainsi, Monsieur, apprenez que je vous souhaite de bonnes années sans nombre, tous les bonheurs que vous méritez et que je suis avec un attachement très parfait, etc. […] Or, pour plaire au petit nombre, il suffit de petites choses ; pour plaire aux masses, il en faut de grandes. […] J’assemblais dans un certain lieu le plus grand nombre de gens que je pouvais, et là je leur faisais voir qu’ils étaient tous des sots. […] Quant au nombre infini de fleurs et d’oiseaux, un autre que moi peut en tenir compte. […] Croiriez vous que d’un bon nombre de galères qu’on avait dans le bon temps, cela est réduit à sept ?
« C’est pour cela que l’on a souvent dit que les tragédies ne mettent sur la scène qu’un petit nombre de familles : car les poëtes qui cherchoient des actions de cette nature en sont redevables à la fortune, et non pas à leur invention.
Saint Paulin, évêque de Noie, pour racheter des mains des Vandales le plus grand nombre possible de captifs, vendit tout ce qu’il possédait, les ornements des églises et même les vases sacrés. […] Les prisonniers de guerre appartenant à l’armée républicaine, au nombre de quatre mille, sont renfermés dans l’église de cette petite ville. […] Clodoald mérita, par la pureté de sa vie, que l’Église le mît au nombre des saints. […] L’armée des Sarrasins fut anéantie ; Abdérame fut au nombre des morts. […] Pendant le moyen âge, un grand nombre de villes d’Italie (Florence était du nombre) se gouvernaient en républiques.
« Il y a véritablement un petit nombre de génies extraordinaires, que la nature prend plaisir à former, qui trouvent tout en eux-mêmes, qui savent ce qu’on ne leur a jamais enseigné, qui ne suivent pas les règles, mais qui les font et qui les donnent aux autres. — Quant à nous, qui sommes d’un ordre inférieur, si nous n’avons que nos propres forces, et si nous n’empruntons rien d’autrui, quel moyen qu’avec un seul jugement et un seul esprit, qui n’ont rien que d’ordinaire et de médiocre, nous contentions tant de différents esprits, tant de jugements divers, à qui nous exposons nos ouvrages ?
Quand les élèves connaîtront suffisamment la structure des vers, et seront habiles à les retourner, il faudra les amener peu à peu à la composition écrite, en introduisant dans la matière des difficultés qui croîtront par degrés, selon les progrès et la force relative du plus grand nombre. […] Les substitutions, dans la versification, sont des changements de mots, de genres, de nombres, de cas, de temps, de personnes, de modes, qui facilitent la facture du vers et contribuent aussi à son élégance. […] Il suffit, en quelque sorte, qu’une épithète convienne à un mot pour qu’ils l’introduisent dans un vers On en trouve dans Homère un grand nombre, qui sont presque inséparables de leurs substantifs.
La gravité du style, à mesure que le sujet s’élève et s’agrandit, peut arriver à la noblesse, à la richesse, à la magnificence : la noblesse, qui n’emploie que les termes les plus généraux et les tournures les plus polies et les plus dignes ; la richesse, qui y ajoute l’éclat des images, l’abondance des ornements, le nombre de la phrase, ou qui encore renferme sous peu de mots des idées fécondes ; la magnificence, qui est la grandeur dans la richesse. […] Quelques pages de Cicéron, de Florus, de Fléchier, de Bernardin de Saint-Pierre, de Vergniaud, de Lamennais, de Lamartine, sont des modèles de richesse ; un grand nombre de passages des prophètes, de Platon, de Buffon, de Mirabeau, de l’Athalie de Racine, du Cosmos de M. de Humboldt, l’exorde de l’Oraison funèbre de la reine d’Angleterre, la péroraison de celle de Condé, sont des modèles de magnificence.
Au nombre des annotateurs de cette œuvre, on peut encore citer M. […] « Cette comparaison, dit La Harpe, est au nombre des plus belles qui existent dans aucune autre langue, et l’auteur ne la doit qu’à lui seul. » — Malgré cette assertion, on en reconnaîtra du moins le germe dans ces vers de Stace, Achill.
Quand ce corps a quitté son armée, ç’a été encore une autre désolation ; et, partout où il a passé, on n’entendoit que des clameurs ; mais à Langres ils se sont surpassés : ils allèrent au-devant de lui en habits de deuil, au nombre de plus de deux cents, suivis du peuple, tout le clergé en cérémonie. […] Faites donc comme cet homme, tirez les mêmes conséquences, et songez que cette même ville a été autrefois baignée du sang d’un nombre infini de martyrs ; qu’aux premiers siècles toutes les intrigues du conclave se terminaient à choisir entre les prêtres celui qui paraissait avoir le plus de zèle et de force pour soutenir le martyre ; qu’il y eut trente-sept papes qui le souffrirent l’un après l’autre, sans que la certitude de cette fin leur fît fuir ni refuser cette place où la mort était attachée, et quelle mort !
J’indique ce que veut la langue française de quiconque prend la plume ; et ces réflexions sur les lois du discours regardent, non ceux qui ont le don du discours, mais les esprits, en grand nombre, qui peuvent se perfectionner par la culture, et tirer du travail des ressources qui les sauvent du ridicule de mal écrire. […] Je ne sais si c’est la tyrannie ou la liberté qui donna naissance à l’apologue ; je me borne à remarquer qu’on a goûté ce genre dans des pays et dans des temps fort divers, et que de toutes les conventions littéraires qu’on nomme genres, il n’en est aucune dont s’accommodent un plus grand nombre d’esprits.