[Notice] La Bruyère a dit, avec vérité, qu’il ne manquait parfois aux femmes que la correction du style pour écrire mieux que les hommes. […] Lisez la vie de saint Louis, vous verrez combien les grandeurs de ce monde sont au-dessous des désirs du cœur de l’homme. […] Vous maltraitez les huguenots, vous en cherchez les moyens, vous en faites naître les occasions : cela n’est pas d’un homme de qualité. […] Henri IV a professé la même religion, et plusieurs grands princes ; ne les inquiétez donc point : il faut attirer les hommes par la douceur et la charité ; Jésus-Christ nous en a donné l’exemple, et telle est l’intention du roi. […] Si la faveur où je suis met tout le monde à mes pieds, elle ne doit pas faire cet effet-là sur un homme chargé de ma conscience, et à qui je demande très-instamment de me conduire, sans aucun égard, dans le chemin qu’il croit le plus sûr pour mon salut.
Ciel, pavillon de l’homme, admirable nature, Salut pour la dernière fois ! […] quel frein contiendrait un vulgaire indocile Qui sait, grâce aux docteurs du moderne évangile, Qu’en vain le pauvre espère en un Dieu qui n’est pas, Que l’homme tout entier est promis au trépas ? Chacun veut de la vie embellir le passage : L’homme le plus heureux est aussi le plus sage… Jadis la poésie, en ses pompeux accords, Osant même au néant prêter une âme, un corps, Egayait la raison de riantes images ; Cachait de la vertu les préceptes sauvages Sous le voile enchanteur d’aimables fictions ; Audacieuse et sage en ses expressions, Pour cadencer un vers qui dans l’âme s’imprime, Sans appauvrir l’idée enrichissait la rime ; S’ouvrait par notre oreille un chemin vers nos cœurs, Et nous divertissait pour nous rendre meilleurs. […] en effet, c’est un homme de goût ! […] Ils feront excuser chez lui ce que le style, encore trop peu assoupli par l’exercice, a parfois de forcé et d’inégal, ce que sa pensée aussi (car il est homme de parti et de passion) présente de peu mesuré et de peu juste.
C’est en observant les hommes de génie, qui les premiers produisirent des chefs-d’œuvre, que les hommes de sens devinèrent l’art, et c’est en analysant les écrits des premiers que les seconds formèrent un recueil de préceptes. […] Un homme disposé à soutenir les opinions extrêmes pourra dire : Puisque j’ai du talent, je n’ai que faire de l’art ; je réponds : vous avez raison, si vous êtes un Homère. […] Mais les grands hommes se comptent facilement.
Vous oyrez4 crier, braire et tempester à l’appetit d’une partie hargneuse5 ; vous verrez les langues impures, venales et mercenaires mettre l’honneur des plus vertueux, illustres et grands personnaiges en compromis6, et ce dont je ne me sçaurois assez estonner, ces asnes d’Arcadie à qui les judges debvroient, à toutes les fois qu’ilz s’oublient et s’esmancipent contre la decence de leur robbe, mettre ung mords de bride, et leur fermer la bouche avec une bonne et grave reprimande, ilz les laissent divaguer de maniere qu’il semble à ces effrontez qu’ilz ont faict quelque beau chef-d’œuvre quand ilz ont, dient-ilz, bien lavé la teste7 à ung homme d’honneur, et mettent ceste haulte et sotte vanterie parmy leurs trophées… Et neantmoins ce sont ceulx ordinairement qui ont le plus de praticque1, parce qu’ilz se mettent à tous les jours, à toutes les causes ; et les bons playdeurs2, qui intenteroient ung procez sur la pointe d’une eguille3, les recherchent plus volontairement que les aultres, dont les mœurs sont composees à la prudence et modestie4 : vray ornement d’ung sçavant homme de bien, d’advocat5, lequel, faisant trop6 plus de cas de l’honneur que de gaing, ne soubtient jamais de cause contre sa conscience ; aussy la deffend il avec tant de vigueur, de force et de solides raisons, que l’on recognoist à vue d’œil7 qu’il ne se fonde pour obtenir la victoire que sur la verité et la justice de sa cause. […] L’homme de bien qui a la parole habile. […] Brantôme, Hommes illustres.
La première exclamation de l’homme sortant des mains de Dieu fut une expression lyrique. […] Il n’y eut pas un seul être qui ne parlât, pour s’unir à l’hommage que l’homme rendait à Dieu. […] Ces hommes incomparables chantaient avec une verve qu’on appellerait génie, dit Marmontel, si ce n’était pas l’inspiration même de l’Esprit divin. […] L’élévation en est le caractère ; car, ici toutes les pensées, toutes les relations sont de l’homme au Créateur. […] En cet état, l’homme repasse dans son imagination les causes de ses malheurs.
Or, si je me mêlais d’écrire, je ne voudrais pas plus ressembler à un tel homme, que je n’aimerais un nez difforme avec des cheveux d’ébène et de beaux yeux noirs. […] Le rire et les larmes provoquent chez l’homme ou la joie, ou la tristesse. […] voilà ce que ne tolèrent ni les Dieux, ni les hommes, ni les colonnes du temple d’Apollon. […] n’est-on pas un galant homme, enfin ? […] Tout homme sage l’évite et le fuit, épouvanté ; les enfants crient après lui, et le poursuivent étourdiment dans les rues.
Si, dès le principe, l’auteur a soin, quand ses conceptions sont absolument neuves, de fixer et de bien définir sa terminologie : quand elles ne le sont pas, de se conformer au langage reçu, et d’éviter, autant que possible, le charlatanisme des termes techniques et l’affectation des formes étranges, il sera compris de tous les hommes intelligents, et son ouvrage gagnera en mérite et en renommée, même auprès des masses. […] Le vrai talent est de contenter à la fois la foule et les hommes d’élite, de se faire entendre des plus vulgaires, en se faisant estimer des plus habiles. […] Il est naturel de croire que les langues ont d’abord été fondées sur des analogies avouées par la raison humaine ; mais une foule de circonstances, l’origine d’un peuple, son mélange plus ou moins durable, plus ou moins complet avec d’autres, l’infinie variété de relations des hommes entre eux ou avec les choses, les rapides et continuelles vicissitudes des idées et des intérêts, que sais-je ? […] Celui-ci consiste dans des tours de phrases particuliers, dans un usage singulier des mots, dans l’art de relever les petites idées froides, puériles, communes, par une expression recherchée. » Et le xviiie siècle, toujours un peu moralisant, ajoute : « On peut le pardonner aux femmes, il est indigne d’un homme. […] Mais que nos romanciers aient poussé le fétichisme de la couleur locale jusqu’à salir leurs récits de ce hideux jargon ; qu’à la suite d’un homme d’imagination, la tourbe servile des imitateurs se soit ruée dans cette voie : voilà ce qui était indigne et abominable, ce qu’aucune théorie d’art ne peut justifier, ce que la rhétorique, comme la morale, repousse avec dégoût !
Aussi la gaieté d’un homme heureux éclate-t-elle dans tous ses ouvrages. […] (Valère paraît en désordre comme un homme qui a joué toute la nuit.) […] Ce Sénèque, monsieur, est un excellent homme. […] Locution proverbiale qui veut dire, en parlant d’une chose, qu’elle est d’une exécution difficile, et appliquée à un homme, qu’on ne peut rien obtenir de lui. […] On disait également d’un homme, par métaphore, qu’il avait l’air d’un premier pris, lorsque sa contenance était triste et embarrassée.
Henri, fils du duc de Lorraine, était venu la joindre avec mille chevaux et deux mille hommes de pied ; le duc de Parme y avait envoyé quatre cents chevaux et douze cents hommes de pied wallons ; Christophe de Bassompierre, qui, longtemps avant la mort de Henri III, était allé faire des levées en Allemagne, y avait amené trois cornettes de reîtres ; Jacques Colalte, au service du roi d’Espagne, deux régiments de lansquenets et quelque cavalerie allemande ; le duc de Nemours, trois mille fantassins et la plus belle gendarmerie que l’on eût su voir ; et Balagny, les meilleures troupes qu’il avait pu tirer du Cambrésis : tellement que toutes ces forces jointes ensemble faisaient près de quatre mille chevaux et plus de quinze mille hommes de pied. […] Non, non, sire, il n’y a ni couronne ni honneur pour vous delà la mer : si vous allez au-devant du secours d’Angleterre, il reculera ; si vous vous présentez au port de la Rochelle en homme qui se sauve, vous n’y trouverez que des reproches et du mépris.
C’étoit un homme d’un caractère doux, sage et circonspect ; ayant beaucoup de finesse et de mesure dans l’esprit, avec un courage toujours conforme aux circonstances ; n’employant jamais la force qu’au défaut des autres moyens ; possédant sur-tout à un degré supérieur l’art de connoître les hommes, et de les employer à propos. […] Ce dernier traité fut, suivant le président Hénault, le fruit des réflexions du cardinal Mazarin, qui montra bien, dit-il, que l’art de lire dans l’avenir n’étoit pas une chimère pour les hommes vraiment politiques.
combien d’hommes corrompus et pleins d’iniquité, qui se produisent avec tout le faste et toute l’ostentation de la probité ! […] Tous les autres vices des hommes sont exposés à la censure, et chacun a la liberté de les attaquer hautement ; mais l’hypocrisie est un vice privilégié qui, de sa main, ferme la bouche à tout le monde, et jouit en repos d’une impunité souveraine. […] Combien crois-tu que j’en connaisse qui, par ce stratagème, ont rhabillé adroitement les désordres de leur jeunesse, et, sous un dehors respecté, ont la permission d’être les plus méchants hommes du monde ? […] Admirons l’homme autant que l’orateur, le caractère comme le talent.
Enfin les messieurs revenaient, et ce moment si attendu n’apportait pas un grand changement dans la manière d’être des femmes : les hommes continuaient leur conversation auprès de la cheminée ; les femmes restaient dans le fond de la chambre, distribuaient les tasses de thé ; et quand l’heure du départ arrivait, elles s’en allaient avec leurs époux, prêtes à recommencer le lendemain une vie qui ne différait de celle de la veille que par la date de l’almanach et par la trace des années, qui venait enfin s’imprimer sur le visage de ces femmes comme si elles eussent vécu pendant ce temps. […] Je lui demandai s’il connaissait le duc de Mendoce. — Fort peu, répondit-il ; mais je sais seulement qu’il n’y a point d’homme dans toute la cour d’Espagne aussi pénétré de respect pour le pouvoir. […] Ce n’est pas un méchant homme ; il préfère ne pas faire du mal, et ne s’y décide que pour son intérêt. […] Je ne connais aucune femme et même aucun homme qui soit plus convaincu de son immense supériorité sur tout le monde, et qui fasse moins peser cette supériorité. » 2.
Le but moral de ce genre est d’inspirer à l’homme l’amour de la paix et des douces joies que procure la vie des champs, afin de le détourner des agitations et de la corruption des villes. […] La pastorale est, pour ainsi dire, la peinture de l’âge d’or mis à la portée des hommes. C’est le règne des plaisirs innocents, de la paix, de ces biens pour lesquels les hommes se sentent nés, quand leurs passions leur laissent quelques moments de silence pour se reconnaître. En un mot, c’est la retraite riante et commode d’un homme qui a le cœur pur, et qui ne connaît ni l’ambition, ni le luxe, ni les emportements, ni les remords. […] On serait tenté de regarder la pastorale comme une des plus anciennes formes de la poésie, et de croire que la vie champêtre des premiers hommes dut les engager à chanter les riants tableaux de la campagne et les objets qui y ont rapport.
Ce n’est point à l’instruction de cette classe d’hommes qu’il s’est principalement voué. […] Mais l’homme judicieux et sensé a été bien loin de le regarder comme un arrêt décisif ; et le vrai connaisseur n’admire pas moins le plus grand nombre des Odes sacrées de l’auteur de Didon. […] Mais l’auteur doit toujours être personnellement respecté, à moins que l’opinion publique ne l’ait jeté dans la classe de ces hommes vicieux et méchants, autant par principe que par habitude. […] Rien de plus scandaleux dans la république littéraire, rien de plus déshonorant pour l’homme de lettres lui-même, que ce style malignement épigrammatique, ces déclamations pleines de fiel, cette raillerie amère et insultante, ces personnalités basses, ces injures atroces qui peuvent tout au plus amuser les sots et les méchants, mais qui révoltent toujours le lecteur honnête et raisonnable, et qui ne répandent jamais la moindre lumière sur la question agitée. […] Lucien a fait aussi des Dialogues pour censurer les vices des hommes, pour jeter du ridicule sur les faux Dieux, et sur les philosophes du paganisme.
Tout homme qui n’est ni commissaire, ni général, ni valet ou courtisan des uns ou des autres, ne peut manger un œuf. […] Un bruit, un souvenir mêlé avec celui de désastres fameux ; mais rien qui soit proprement d’eux ; nul monument, nulle œuvre de leur intelligence qui les représente aux hommes. […] On peut dire même que ces hommes-là gagnent à mourir, et que leur âme, qu’ils ont mise tout entière dans leurs ouvrages, y paraît plus noble et plus pure, dégagée de ce qu’ils tenaient de l’humanité ; mais vos guerriers1, leurs équipages, leur suite, leurs tambours, leurs trompettes font tout leur être, et, perdant cela, qu’ils vivent ou meurent, les voilà néant2. […] Nous n’avons pas cité ses pages satiriques : son chef-d’œuvre en ce genre est le Pamphlet des pamphlets ; voici comment le jugeait Armand Carrel : « Ce lumineux et mordant génie a rencontré enfin la langue qui convient à ses amères impressions sur les hommes et les choses de son temps, et il va marcher armé de toutes pièces. […] Il s’est mis en cause commune avec Socrate, Pascal, Cicéron, Franklin, Démosthène, saint Paul, saint Basile ; il s’est environné de ces grands hommes, comme d’une glorieuse milice d’apôtres de la liberté de penser, de publier, d’imprimer ; il les montre pamphlétaires comme lui, faisant, chacun de son temps, contre une tyrannie ou contre l’autre, ce qu’il a fait du sien, lançant de petits écrits, attirant, prêchant, enseignant le peuple, malgré les plaisanteries de la cour, le blâme des honnêtes gens, la fureur des hypocrites et les réquisitoires du parquet ; les uns allant en prison comme lui, les autres forcés d’avaler la ciguë ou mourant sous le fer de quelque ignoble soldat.
Il s’attache donc essentiellement à tout ce qui peut devenir dans l’homme le mobile d’une action ; il parle aux passions ; il cherche à toucher le cœur, autant qu’à convaincre le jugement. […] Ici l’orateur a affaire à un petit nombre de juges, qui sont en général des hommes vénérables et par la gravité de l’âge, et par la dignité du caractère et des fonctions. […] Il y avait chez les Romains une classe d’hommes appelés Pragmatici, qui se chargeaient de donner à l’orateur tous les renseignements nécessaires sur la loi intéressée dans la cause qu’il entreprenait de défendre. […] Répétons-le donc encore ici, puisque l’occasion s’en présente naturellement, et ne craignons jamais de revenir souvent sur des vérités utiles : Ce n’est pas au barreau, ce n’est pas dans l’homme public seulement, que cette verbosité est condamnable ; elle est déplacée partout, ridicule partout, lors toutefois qu’elle ne finit pas par être odieuse.
Jusque-là des traits heureux de naïveté, de brillants essais, de téméraires hardiesses, avaient fait la gloire de Marot, de du Bellay, de Ronsard : Malherbe inaugura, non plus la poésie de telle province, de telle école, de tel homme, mais la véritable poésie française. […] La fierté du gentilhomme, la vivacité impatiente de l’homme d’épée et jusqu’à l’humeur incisive et quelque peu querelleuse du Normand (il était né à Caen vers 1555), tout concourait en lui merveilleusement au succès du rôle dont il se chargea. […] Mais, ô loi rigoureuse à la race des hommes ! […] O roi, qui du rang des hommes T’exceptes par ta bonté, Roi qui de l’âge où nous sommes Tout le mal as surmonté ; Si tes labeurs, d’où la France A tiré sa délivrance, Sont écrits avec que foi3, Qui sera si ridicule Qu’il ne confesse qu’Hercule Fut moins Hercule que toi4 ?
. — La Préposition est un mot qui sert à joindre le nom ou pronom suivant au mot qui la précède ; par exemple, quand je dis : le fruit de l’arbre, de marque le rapport qu’il y a entre fruit et arbre ; quand je dis : utile à l’homme, à fait rapporter le nom homme à l’adjectif utile ; quand je dis : j’ai reçu de mon père ; de sert à joindre le nom père au verbe reçu, etc. ; de, à, sont des prépositions ; le mot qui suit s’appelle le régime de la préposition. […] Compagnie de cent hommes, outre les officiers.
Bossuet Grand homme, ta gloire vaincra toujours la monotonie d’un éloge tant de fois entendu. […] Ils semblaient oublier que la justice et la vérité sont la loi commune de tout écrivain, et que celui qui parle sur les livres des autres, au lieu d’en faire lui-même, n’est pas un ennemi naturel des gens de lettres, mais un homme de lettres moins entreprenant ou plus modeste2. […] C’est ce jugement pur et fin, composé de connaissances et de réflexions, que possèdera d’abord la critique ; il a pour fondement l’étude des anciens, qui sont les maîtres éternels de l’art d’écrire, non pas comme anciens, mais comme grands hommes. […] Dans un esprit faible et impuissant, le bon goût se rappetisse, se rétrécit, devient craintif et superstitieux, et se proportionne à la mesure de l’homme médiocre qui s’en sert aussi timidement pour juger que pour écrire1.
Mais quand Racine dit : Quel est ce glaive enfin qui marche devant eux ; quand Corneille crée l’expression que nous avons déjà remarquée : Et tous trois à l’envi s’empressaient ardemment A qui dévorerait ce règne d’un moment ; quand, d’autre part, des hommes de talent se laissent entraîner aux vicieuses métaphores que nous avons signalées plus haut, il est bien évident que ce ne sont plus là des figures de domaine public, dont on ne doit tenir aucun compte à l’écrivain ; elles appartiennent en propre à celui qui les a créées, et peuvent, en conséquence, être étudiées comme formes à imiter ou à fuir. […] Tantôt la partie est prise pour le tout : La tête, pour l’homme entier, J’ignore le destin d’une tête si chère ; on paye tant par tête ; le toit, le seuil, le foyer, le feu lui-même, pour la maison : ce village compte tant de feux ; la Porte, pour l’empire ottoman, expression qui se rattache aussi à la métonymie ; cent voiles, pour cent vaisseaux ; un fleuve ou une ville, pour un royaume et ses habitants, La Seine a des Bourbons, le Tibre a des Césars ; une saison, pour toute l’année : il compte quinze printemps, etc. […] Ainsi l’on nomme juif ou arabe celui dont on veut blâmer l’impitoyable avarice ; grec, l’homme qui trompe au jeu ; ermite, celui qui recherche la solitude ; bénédictin, l’homme savant et studieux, etc. […] Comme la métaphore, l’hyperbole compare ; mais au lieu de comparer à des idées semblables, elle compare à des idées plus grandes ou moindres : plus blanc que neige, aussi vite que le vent, cet homme meurt de faim, moins que rien, Vous êtes le phénix des hôtes de ces bois, etc. […] Vous vous dites le plus malheureux des hommes, celle que vous aimez est la plus belle des femmes ; personne ne le croit que vous ; et cependant, non-seulement on vous pardonne de l’affirmer, mais que cette infortune soit réellement étrange, cette beauté réellement extraordinaire, la vertu de votre bonne foi peut aller jusqu’à vaincre notre incrédulité.
Un homme tranquille se contente de penser, de réfléchir ; il ne dit pas ce qu’il pense au public : ce n’est que quand il sent un grand trouble au-dedans de lui-même qu’il éclate, qu’il marche à grands pas, qu’il fait des gestes et prononce des mots. […] Lorsque ce grand homme commençait à vieillir, Racine, né avec un génie heureux, un goût exquis, entra dans la carrière et donna une nouvelle forme à la tragédie. […] Disons plutôt, avec Domairon, que le poème comique est, en général, celui où l’on introduit sur la scène des personnages qui font une action amusante et risible, mais commune, c’est-à-dire relative, au caractère aux mœurs, à la manière de vivre des hommes dans la société ordinaire. […] Le ridicule est encore chargé quand on fait contraster les travers entre eux, ou avec la raison droite et la décence, lorsqu’on fait figurer un jeune homme prodigue à côté d’un père avare ; lorsque, sur la même scène, on voit un homme sensé et un joueur de trictrac qui vient lui tenir des propos impertinents ; une femme ménagère, à côté d’une savante ; un homme poli et humain à côté d’un misanthrope. […] Le Margitès d’Homère, poème où était représenté un homme fainéant, qui n’était bon à rien, donna l’idée du comique.
Règles pour les ouvrages de littérature Ce que je viens de dire, doit faire juger qu’il y a des règles pour la composition des ouvrages de littérature ; règles qui, émanées de la saine raison, fondées sur la nature du cœur humain, sont invariables, et indépendantes du caprice des hommes, et qui, par conséquent, ont été et seront les mêmes dans tous les temps et chez toutes les nations. […] En fait d’ouvrages de littérature, l’esprit est dans l’homme la faculté de penser et de raisonner ; le génie, la faculté d’imaginer et d’inventer ; le goût, la faculté de discerner et de sentir. […] L’homme même, qui ne lit que pour distraire son ennui, retire de la connaissance de ces règles, les plus grands avantages.
Si le discernement est nécessaire dans les choses purement matérielles, que sera-ce lorsqu’il s’agit de former tout ce qui constitue l’homme moral, goût, jugement, opinions, sentiments et désirs ; que sera-ce quand il s’agit souvent de la foi, c’est-à-dire du bonheur dans le présent et dans l’avenir ? […] Un célèbre docteur avait dit : Timeo hominem unius libri ; et M. de Bonald assure que de deux hommes également favorisés de la nature, celui-là réussira mieux dans l’art d’écrire et possédera surtout la manière la plus originale, qui aura lu le plus souvent et avec le plus de fruit un petit nombre d’excellents ouvrages et moins d’ouvrages médiocres. Il n’y a pas un grand homme, pas un sage, qui n’ait fini par restreindre à un très petit nombre d’écrivains favoris l’élite imposante des amis que la lecture lui avait donnés, parmi les maîtres de la parole. — Les commençants qui veulent se former un goût sûr et un bon style, doivent donc lire peu de livres, et les choisir dans le genre de leur talent. […] Mille choses qui échappent à un homme qui lit, n’échappent point à un homme qui traduit.
Un homme lisant. […] Des hommes lisant. […] On dit : un homme obligeant, une femme obligeante ; ce ne sont pas des participes, parce qu’ils n’ont pas de régime : mais quand je dis, cette femme est d’un bon caractère, obligeant tout le monde quand elle peut ; obligeant est ici participe, puisqu’il a le régime tout le monde.
Un jeu de mots Un homme, devisant1 avec une femme de Paris, laquelle se vantoit d’estre la maistresse, luy disoit : « Sy j’estois vostre mary, je vous garderois bien de faire tout a vostre teste. — Vous ! […] » L’homme, en fermant la main, lui dit : « En voilà un ! […] Le Pot au lait Comparaison des alquemistes 1 à la bonne femme qui portoit une potée de lait au marché 2 Chascun sçait que le commun langaige3 des alquemistes, c’est qu’ilz se promettent un monde de richesses, et qu’ilz sçavent des secrets de nature que tous les hommes ensemble ne sçavent pas ; mais à la fin tout leur cas s’en va en fumée…4 et ne les sçauroit-on mieux comparer qu’à une bonne femme qui portoit une potée de laict au marché, faisant son compte ainsi : qu’elle la vendroit deux liards ; de ces deux liards elle en5 achepteroit une douzaine d’eufz, lesquelz elle mettroit couver, et en auroit une douzaine de poussins ; ces poussins deviendroient grands.. et vaudroyent cinq solz la pièce ; ce seroit un escu et plus, dont elle achepteroit deux cochons, masle et femelle, qui deviendroyent grands et en seroient une douzaine d’autres, qu’elle vendroit vingt solz6 la pièce après les avoir nourriz quelque temps : ce seroyent douze francs, dont elle achepteroit une jument qui porteroit un beau poulain, lequel croistroit et deviendroit tant gentil : il saulteroit et feroit hin7.
J’ai peu lu ces auteurs ; mais tout n’irait que mieux, Quand de ces médisants l’engeance tout entière Irait, la tête en bas, rimer dans la rivière. » Voilà comme on vous traite : et le monde effrayé Vous regarde déjà comme un homme noyé. […] Si l’on vient à chercher pour quel secret mystère Alidor, à ses frais, bâtit un monastère : « Alidor, dit un fourbe, il est de mes amis, Je l’ai connu laquais, avant qu’il fût commis ; C’est un homme d’honneur, de piété profonde, Et qui veut rendre à Dieu ce qu’il a pris au monde. » Voilà jouer d’adresse et médire avec art ; Et c’est avec respect enfoncer le poignard1. […] c’est un si bon homme ! […] Ce qui nous portera à les excuser, c’est qu’au rapport de Saint-Simon, Boileau, bien qu’il ait excellé dans la satire, était cependant l’un des meilleurs hommes du monde. […] Corneille a dit, en imitant le poëte latin : « L’utile a besoin de l’agréable pour s’insinuer dans l’amitié des hommes. » 3.
Mais si, semblables à des hommes en extase, nous continuons, comme au premier instant, de voir à la fois cette multitude d’objets différents, nous n’en saurons pas plus, lorsque la nuit surviendra, que nous n’en savions lorsque les fenêtres qui venaient de s’ouvrir se sont tout à coup refermées. […] L’homme sans prévention fait le départ du bon et du mauvais, et assigne à chaque partie sa qualité, quelle que soit celle de la partie voisine. […] Il était si peu nécessaire de recourir à des formes si acerbes envers un homme d’esprit, d’excellent ton, et membre de l’Académie française, que Boivin, qui, dans le même temps, en 1715, soutenait le même parti que madame Dacier dans son Apologie d’Homère ne se les est jamais permises. […] Lucien a fait aussi des dialogues pour censurer les vices des hommes, pour jeter du ridicule sur les faux dieux et sur les philosophes du paganisme. […] Tenez votre parole en grand homme, et laissez faire Ménas, qui n’a rien promis.
Oui, ses œuvres ressemblent à la vie même de leur auteur qui, tour à tour moine, docteur et curé, fut avant tout poète, homme de libre étude et de libre plaisir. […] Foy de gentil homme, il vault mieulx pleurer moins et boire d’aduantaige. […] La robe était le vêtement commun des hommes et des femmes. […] Ce mot, qui se prend maintenant en mauvaise part, signifiait homme du peuple, domestique, soldat. […] Homme gros et fort.
Homme de bien, dont la vie est un exemple comme ses œuvres sont des modèles, aussi cordial dans l’éloge que sincère et vif dans le blâme, il a l’autorité d’un censeur et d’un juge. […] Que les vers ne soient pas votre éternel emploi : Cultivez vos amis, soyez homme de foi1 ; C’est peu d’être agréable et charmant dans un livre ; Il faut savoir encore et converser et vivre. […] Je lis encore dans Régnier : L’âge au soin se tournant, homme fait il acquiert Des biens et des amis, si le temps le requiert ; Il masque ses discours comme sur un théâtre, Subtil, ambitieux, l’honneur il idolâtre ; Son esprit avisé prévient le repentir, Et se garde d’un lieu difficile à sortir. […] Je demande un poëte aimable, proportionné au commun des hommes, qui fasse tout pour eux. et rien pour lui. Je veux un sublime si familier, si doux et si simple, que chacun soit d’abord tenté de croire qu’il l’aurait trouvé sans peine, quoique peu d’hommes soient capables de le trouver.
Toutes ces dryades affligées que je vis hier, tous ces vieux sylvains qui ne savent plus où se retirer, tous ces anciens corbeaux établis depuis deux cents ans dans l’horreur de ces bois, ces chouettes qui, dans cette obscurité, annonçaient, par leurs funestes cris, les malheurs de tous les hommes : tout cela me fit hier des plaintes qui me touchèrent sensiblement le cœur ; et que sait-on même si plusieurs de ces vieux chênes n’ont point parlé, comme celui où était Clorinde1 ? […] Le voilà donc mort, ce grand ministre, cet homme si considérable qui tenait une si grande place, dont le moi, comme dit M. […] J’ai ouï dire qu’un homme d’un très-bon esprit tira une conséquence toute contraire sur ce qu’il voyait dans cette grande ville, et conclut qu’il fallait que la religion chrétienne fût toute sainte et toute miraculeuse de subsister ainsi par elle-même au milieu de tant de désordres et de profanations. Faites donc comme cet homme, tirez les mêmes conséquences, et songez que cette même ville a été autrefois baignée du sang d’un nombre infini de martyrs ; qu’aux premiers siècles toutes les intrigues du conclave se terminaient à choisir entre les prêtres celui qui paraissait avoir le plus de zèle et de force pour soutenir le martyre ; qu’il y eut trente-sept papes qui le souffrirent l’un après l’autre, sans que la certitude de cette fin leur fît fuir ni refuser cette place où la mort était attachée, et quelle mort ! […] L’on veut qu’une religion subsistante par un miracle continuel, et dans son établissement, et dans sa durée, ne soit qu’une imagination des hommes !
Le vase, qui d’abord d’une pure liqueur A rempli son argile encor vierge et nouvelle, A son premier parfum il restera fidèle4 ; Car l’homme dont l’étude eut d’abord les amours, De son premier penchant se ressouvient toujours. […] Le cœur se reconnaît, Et l’homme tout entier quelques instants renaît, Soudain jeune, en voyant quelque pierre oubliée Où d’un ancien bonheur la mémoire est liée, Quelque nom, que sa main sur le hêtre a gravé, Et que mieux que son cœur l’écorce a conservé. […] Et moi, sans mouvement, muet à ce langage, Je me crois un moment un homme d’un autre âge. […] Il a dix milles de long, compte 5,000 habitants, 3,000 écus de revenus et une armée de 400 hommes.
L’esprit de l’homme était naturellement disposé alors à l’admiration, à la surprise. […] La terre tremble au loin sous son maître qui tonne : Les animaux ont fui ; l’homme éperdu frissonne. […] L’homme éperdu frissonne, est bien faible auprès de mortalia corda humilis stravit pavor, qui joint à la force et à la beauté de l’expression, le mérite de peindre par le mouvement et par la coupe du vers ; et cette belle chute dejicit ! […] Je saisirai toutes les occasions de consacrer ou de réhabiliter, dans un ouvrage classique, la mémoire des hommes qui ont honoré les lettres françaises par leurs mœurs, leurs talents, et l’usage respectable qu’ils en ont fait. […] Ses Poésies Sacrées surtout, la partie la plus recommandable de ses Œuvres, devinrent, pour le patriarche de la secte, la source d’une foule de plaisanteries, plus dignes, pour la plupart, d’un bateleur de la foire, que d’un homme tel que Voltaire.
La pensée est la première faculté de l’homme, et l’art d’exprimer les pensées est le premier des arts. […] La plupart des hommes de nos jours n’ont vécu que dans les assemblées politiques. […] Lamartine a dit, en parlant de l’homme : Borné dans sa nature, infini dans ses vœux, L’homme est un Dieu tombé qui se souvient des cieux. […] Pour dire que l’homme conserve jusqu’à la mort des espérances qui ne se réalisent jamais, Bossuet, ennoblissant cette idée aussi simple que vraie, la revêt d’une image sublime : L’homme marche vers la tombe, dit-il, traînant après lui la longue chaîne de ses espérances trompées. […] On dit d’un homme en colère : il rugit ; on dit de même : c’est un lion ; on dit encore : tel qu’un lion altéré de sang, etc.
L’homme de génie, au contraire, vivement impressionné par la vue de l’objet, en pénètre les véritables beautés, et le présente à nos regards sous un aspect qui frappe à l’instant l’imagination et l’échauffe. […] Delille a exprimé cette règle dans les vers suivants : Souvent dans vos tableaux placez des spectateurs ; Sur la scène des champs amenez des acteurs : … Oui, l’homme aux yeux de l’homme est l’ornement du monde. […] Or, on peut avoir à peindre le temps où un événement s’est passé, le lieu où il est arrivé, l’événement lui-même, l’extérieur d’un homme ou d’un animal, et les mœurs. […] Deux hommes se trouvaient ainsi réunis dans le même homme ; on ne pouvait dire lequel était le plus admirable, ou de Paul l’ignorant, ou de Paul le prophète, puisque c’était à la simplicité du premier qu’était accordée la sublimité du second. […] Il est toujours pénible pour l’homme de cœur de refuser un service.
L’homme qui les cultive dans le sein de l’opulence et des honneurs, n’en est que plus heureux et plus grand à nos yeux ; ses dignités en reçoivent un nouveau lustre. […] paraît condamné à traîner, loin des hommes, une existence pénible et pleine d’amertume, puise dans les Lettres un courage ferme et d’abondantes consolations : elles lui font oublier ses disgrâces, ses revers, et lui tiennent lieu d’amis, de rang et de fortune. […] En un mot, dans tous les lieux, dans tous les âges, dans tous les états de la vie, cette étude si variée, si attrayante, nous procure les plaisirs les plus délicats, les plus purs et les plus durables que puisse goûter l’homme qui pense.
Le premier est l’observation attentive, assidue et intelligente de soi, des hommes et des choses. […] L’étude des mœurs et des passions n’est pas moins féconde pour l’invention, puisque les observations à cet égard ont pour objet l’homme et la nature dans un temps, un lieu et des circonstances données, et que le sujet le plus habituel de l’écrivain est nécessairement la nature et l’homme. […] Pour connaître l’homme, l’écrivain doit d’abord s’étudier lui-même, puis étudier les autres dans les diverses modificacations que leur font subir les éléments suivants : l’âge, le sexe, le tempérament, le climat, le pays, le siècle, la religion, les institutions politiques et sociales, l’éducation, les travaux et les habitudes journalières, enfin, la combinaison de tous ces éléments avec les objets naturels ou artificiels qui les environnent, ce qui constitue la couleur locale. […] La plus grande hauteur de pensée et de style constitue le sublime, qui est en dehors des préceptes de l’art, et qu’on peut définir, en littérature, l’expression vraie de tout sentiment et de toute idée qui élève l’homme au-dessus de lui-même. […] Le style figuré est dans la nature de l’homme, car il prend sa source dans des qualités et des besoins communs à tous, penchant à l’imitation, association d’idées, imagination, passion, etc.
Tous ne sont-ils pas unanimes pour répéter le précepte d’Horace : … Si vis me flere, dolendum est Primum ipsi tibi… vérité si incontestable aux yeux de Boileau, qu’il se contente de la traduire : Pour me tirer des pleurs, il faut que vous pleuriez ; et qu’ailleurs, après avoir accordé à l’amour une place dominante dans les écrits, comme dans les sentiments et les actions des hommes, il ajoute : Mais pour bien exprimer ces caprices heureux, C’est peu d’être poëte, il faut être amoureux. […] Corneille, le plus pacifique des hommes, a dû ressentir la haine monstrueuse de Cléopâtre ; Molière, le plus généreux, les transes ridicules de l’avare ; Voltaire, le plus sceptique, le religieux enthousiasme de Lusignan ; Shakespeare enfin, toutes les passions, car en est-il une qui lui ait échappé ? […] Mais en même temps, il ne manquait ni de talent, ni d’énergique volonté ; il sentit qu’il s’égarait, il commanda à sa passion, l’homme fit place à l’orateur, et l’assemblée émue lui prouva que, pour communiquer aux autres son indignation, il faut d’abord la dominer soi-même. […] Cicéron le comparerait à l’homme ivre qui tombe inopinément au milieu d’une assemblée à jeun, vinolentus inter sobrios.
Fouquet, qui l’était présentement de M. le prince, cet homme d’une capacité distinguée de toutes les autres, dont la bonne tête était capable de contenir tout le soin d’un Etat ; cet homme donc que je connaissais, voyant que ce matin à huit heures la marée n’était pas arrivée, n’a pu soutenir l’affront dont il a cru qu’il allait être accablé, et, en un mot, il s’est poignardé. […] Ils avaient fait ici une manière d’entrée à mon fils ; Vaillant avait mis plus de quinze cents hommes sous les armes, tous fort bien habillés, un ruban neuf à la cravate ; ils vont en très-bon ordre nous attendre à une lieue des Rochers. […] « C’est la pensée, dit Pascal, qui fait l’être de l’homme et sans quoi on ne le peut concevoir » ; et le même encore : « Je manque à faire plusieurs choses à quoi je suis obligé. » 1.
Ex. : Dieu est bon, l’homme méchant. […] On ne serait point compris en disant cent estomacs pour cent hommes. […] Jamais mission plus sublime ne fut donnée à l’homme. […] C’est la parole de Dieu qui sort de la bouche de l’homme. […] La race de Japhet — les hommes.
L’apologue est une petite épopée ou l’on peut mettre en action les dieux, les hommes, les animaux et les êtres inanimés. […] Si elle est présentée avec une tournure heureuse et piquante, avec un style simple, riant, gracieux et surtout naïf, elle revêt un charme inexprimable ; elle devient un puissant auxiliaire pour initier l’homme à la sagesse, aux idées morales et pratiques, aux règles du bon sens, de la justice et de la raison. […] Ses ingénieux récits restèrent dans la mémoire des hommes, et l’on en fit par la suite différents recueils en prose.
La terre stérile sous les flots de sang qui l’inondent devient cruelle et barbare comme les hommes qui la ravagent, et l’on s’égorge en mourant de faim. […] Dans la tragédie de Polyeucte, Sévère parle des chrétiens en homme politique ; il est précis : Ils font des vœux pour nous qui les persécutons. […] Si n’y eust il galant homme parmi eux, qui ne le regrettait ; et le venait voir qui pouvait, comme une belle relique, en passant et chassant toujours ; car il avait cette coustume de leur faire la guerre la plus honneste du monde et la plus courtoise ; et y eu eust aucuns qui furent si courtois et bons, qu’ils le voulurent emporter en quelque logis là près ; mais il les pria qu’ils le laissassent dans le camp mesme qu’il avait combattu, ainsi qu’il convenait à un homme de guerre et qui avait toujours désiré de mourir armé. […] un homme faible et misérable, incapable de rien faire sans lui, tandis qu’il n’a pas besoin de moi pour accomplir ses desseins. […] Disons dès l’abord que ce genre de style, ainsi que les pensées qu’il dénature, ne saurait plaire aux esprits délicats, aux hommes de goût, qui recherchent en général tout ce qui peut laisser dans leur esprit, soit de belles expressions, soit de nobles sentiments qui les charment.
Par le choix et l’opportunité des accessoires dans les choses, par l’analyse des caractères dans les hommes, la narration ou la thèse prévient les objections, répond d’avance à toutes les questions, rend probables les rencontres les plus merveilleuses, les assertions les plus paradoxales. […] Creuser patiemment son sujet, s’identifier avec les hommes, les faits ou les idées dont on s’occupe ; ne dédaigner aucun détail ; s’intéresser soi-même à l’antagonisme des forces contraires qui fait le nœud de tout récit ; en ordonner l’action et la résistance avec l’habileté stratégique d’un grand général, et, comme l’écrivain a cet avantage sur le général qu’il dispose à la fois des deux partis, ménager les succès, faire pencher alternativement la balance, de manière à tenir l’anxiété du lecteur éveillée jusqu’au dénoûment : voilà ce qui donne la véhémence et le pathétique dans les grands sujets ; dans les petits, la grâce, la finesse, la naïveté ; partout, le choix des détails, la variété des tours ; et voilà ce qui nous attache à une exposition quelle qu’elle soit. […] dites-vous ; voilà l’hommes de Quintilien ; que ne disait-il : Je m’embarquai ? […] Ce n’est pas que je blâme le pittoresque dans la description ; loin de là ; je ne condamne que l’abus ; mais je crois aussi qu’elle ne va réellement au cœur de l’homme, qu’autant qu’on y introduit l’homme ; c’est l’éternelle devise de Poussin : Et in Arcadia ego.
Son effrayante clairvoyance arrache tous les masques, perce de ses regards toutes les physionomies, met l’homme à découvert. […] Fénelon Ce prélat était un grand homme maigre, bien fait, pâle, avec un grand nez, des yeux dont le feu et l’esprit sortaient comme un torrent, et une physionomie telle que je n’en ai point vu qui y ressemblât, et qui ne se pouvait oublier quand on ne l’aurait vue qu’une fois. […] Ses manières y répondaient dans la même proportion, avec une aisance qui en donnait aux autres, et cet air et ce bon goût qu’on ne tient que de l’usage de la meilleure compagnie et du grand monde, qui se trouvait répandu de soi-même dans toutes ses conversations : avec cela une éloquence naturelle, douce, fleurie ; une politesse insinuante, mais noble et proportionnée ; une élocution facile, nette, agréable ; un air de clarté et de netteté pour se faire entendre dans les matières les plus embarrassées et les plus dures ; avec cela un homme qui ne voulait jamais avoir plus d’esprit que ceux à qui il parlait, qui se mettait à la portée de chacun sans le faire jamais sentir, qui les mettait à l’aise et qui semblait enchanté ; de façon qu’on ne pouvait le quitter, ni s’en défendre, ni ne pas chercher à le retrouver. […] Rapprochez de ce portrait tracé par un contemporain celui que fit à distance un homme d’esprit très-fin, Joubert : « Fénelon nage, vole, opère dans un fluide ; mais il est mou : il a plutôt des plumes que des ailes. […] Ramsay, élève de ce célèbre archevêque, m’a écrit ces mots : « S’il était né en Angleterre, il aurait développé son génie, et donné l’essor sans crainte à ses principes, que personne n’a connus. » Citons encore M. de Sacy : « Le Télémaque est le livre d’un grand poëte, d’un sage, d’un homme de génie, auquel a manqué pourtant l’une des plus précieuses qualités : la candeur, la vraie simplicité d’âme, une certaine naïveté de bon sens, qui fera le charme éternel d’Homère et de Bossuet.
Mais telle est la nature des choses humaines : l’éloquence peut servir, et n’a que trop servi les passions ; mais il faut de l’éloquence pour les combattre : et l’on sait que le bien et le mal se confondent dans tout ce qui est de l’homme. […] Dans toutes les sciences, l’Angleterre a compté des hommes profondément instruits. Elle a des philosophes, des historiens, des poètes du premier mérite ; et il serait difficile aux autres nations de trouver beaucoup d’hommes à opposer aux Newton, aux Hume, aux Pope. etc.
C’est un corps animé d’une infinité de passions différentes, qu’un homme habile fait mouvoir pour la défense de la patrie : c’est une troupe d’hommes armés qui suivent aveuglément les ordres d’un chef, dont ils ne savent pas les intentions : c’est une multitude d’âmes, pour la plupart viles et mercenaires, qui, sans songer à leur propre réputation, travaillent à celle des rois et des conquérants : c’est un assemblage confus de libertins, qu’il faut assujétir à l’obéissance ; de lâches qu’il faut mener au combat ; de téméraires, qu’il faut retenir ; d’impatients, qu’il faut accoutumer à la confiance, etc. » Malgré le respect dû au nom de Fléchier, et surtout à l’oraison funèbre de Turenne, son plus bel ouvrage, qui ne voit, dans le premier de ces deux morceaux, le véritable orateur, l’écrivain plein de son sujet ; et, dans le second, le rhéteur presque uniquement occupé du soin d’assembler et de faire contraster des mots ? […] Je t’ai toujours vu le plus infortuné des hommes et le plus tranquille, etc. »
Le Sage 1668-1747 [Notice] Breton d’origine, (Sarzau Morbihan) très-fier et très-jaloux de son indépendance, Alain René Le Sage quitta un modeste emploi de finance pour se faire homme de lettres. […] Malgré tout cela, je lui trouvais l’air d’un homme de qualité, sans doute parce que je savais qu’il en était un. […] Par là je passai dans son esprit pour un homme qui avait une connaissance délicate des vraies beautés d’un ouvrage. « Voilà, s’écria-t-il, ce qu’on appelle avoir du goût et du sentiment ! […] J’embrassai de bon cœur ses jambes cagneuses, et je me regardai comme un homme qui était en train de s’enrichir. « Oui, mon enfant, reprit l’archevêque, dont mon action avait interrompu le discours, je veux te rendre dépositaire de mes plus secrètes pensées.
Abaissez-vous, pliez-vous, appetissez-vous pour vous proportionner à ces enfants ; ne regardez ni avec dégoût ni avec dédain leurs misères, leurs maladies, leur éducation basse et grossière : Jésus-Christ, souveraine sagesse, éternelle raison de Dieu, a choisi pour compagnie et amis en ce monde, des pêcheurs grossiers, ingrats, incrédules, lâches, infidèles ; il a passé sa vie avec eux pour les instruire patiemment : il a fini sa vie sans les redresser entièrement… Les maisons qui ont commencé par des personnes ferventes, simples, mortes à elles-mêmes, ont bien de la peine à subsister longtemps ; on voit encore trop souvent que de grands instituts formés par des patriarches pleins d’un esprit prophétique et apostolique, avec le don des miracles, sont bientôt ébranlés par des tentations ; tout se relâche, tout s’affaiblit, tout se dissipe : la lumière se change en ténèbres ; le sel de la terre s’affadit et est foulé aux pieds : que sera-ce donc d’une communauté qui n’est soutenue d’aucune congrégation, qui est à la porte de la cour, dépendante des rois et des hommes du siècle qui seront auprès d’eux en faveur, qui aura de grands biens pour flatter les passions et pour exciter celles des gens du monde, et qui a été élevée d’abord jusqu’aux nues, sans avoir posé les fondements profonds de la pénitence, de l’humilité et de l’entier renoncement à soi-même ? […] Je ne suis pas plus grande dame que je n’étais rue des Tournelles, où vous me disiez fort bien mes vérités1 ; et si la faveur où je suis met tout le monde à mes pieds, elle ne doit pas produire cet effet-là sur un homme chargé de ma conscience, et à qui je demande instamment de me conduire dans le chemin qu’il croit le plus sûr pour mon salut. […] Je ne sais si c’est vous qui leur inspirez la fierté qu’elles ont, ou si ce sont elles qui vous donnent celle qu’on admire3 en vous : quoi qu’il en soit, comptez que vous serez insupportable à Dieu et aux hommes, si vous ne devenez plus humble et plus modeste que vous ne l’êtes. […] Il vous aurait édifiée, le pauvre homme, si vous aviez vu son humilité dans sa maladie, et son repentir sur cette recherche de l’esprit2 ; il ne s’adressa point alors à un directeur à la mode, mais à un bon prêtre de sa paroisse.
Beau et nouveau font au féminin belle, nouvelle, parce qu’au masculin, on dit aussi bel, nouvel, devant une voyelle ou une h muette : bel oiseau, bel homme, nouvel appartement. […] Digne de récompense, content de son sort, utile à l’homme, semblable à son père, propre à la guerre. […] L’homme est le régime de l’adjectif utile, parce qu’il est joint à cet adjectif par le mot à.
. — Ce pronom est des deux genres : masculin, si c’est un homme qui parle ; féminin, si c’est une femme. […] 35. — Il est des deux genres ; masculin, si c’est à un homme qu’on parle ; féminin, si c’est à une femme. […] On met ce devant les noms qui commencent par une consonne ou une h aspirée : ce village, ce hameau : on met cet devant une voyelle ou une h muette : cet oiseau, cet homme.
Qui ne s’est figuré, avec délices, une petite retraite bien sûre, bien modeste, où l’on n’aurait plus à s’occuper que du beau et du vrai en eux-mêmes, où l’on ne verrait plus les hommes et leurs passions, les affaires et leurs ennuis, l’histoire et ses terribles agitations, qu’à travers ce rayon de pure lumière que le génie des grands écrivains a répandu sur tout ce qu’il représente ? […] Tant qu’il y aura des hommes sur la terre, ils voudront savoir d’où ils viennent et où ils vont ; ils mettront donc au premier rang la religion et la philosophie. […] que la théorie de Pélisson s’applique bien à ces grands hommes, et qu’il est vrai que la solidité est, avant tout, le caractère de leur éloquence !
En parlant non comme un livre, mais comme un homme, il a exercé la plus saine influence sur la jeunesse qui l’a toujours applaudi, bien qu’il ne l’ait jamais flattée. […] Oui, il n’y a plus, à ce moment, sur les eaux, que la voix du Seigneur, et celle de l’homme que la foi unit à Dieu. […] Dans ce péril extrême, le capitaine fit monter un homme au petit mât de hune, souhaitant, plus qu’il ne l’espérait, que l’on pût découvrir quelque vaisseau secourable sur la surface de l’Océan.
En vain j’ai cherché le reste des années qui m’étaient comptées, et je me suis dit : Je ne verrai plus le Seigneur dans la terre des vivants, je ne verrai plus l’homme mon semblable, ni l’habitant de la terre du repos. […] …………………………… Vous ne m’avez fait la guerre Que pour me donner la paix, …………………………… Heureux l’homme Qui……………… Trouve la santé de l’âme Dans les souffrances du corps. […] Il ne restait au poète Gray qu’un pas à faire, pour nous laisser le modèle accompli de l’élégie sacrée et héroïque ; et les tombes royales de Westminster étaient dignes d’inspirer celui qui avait dit aux humbles sépultures de l’homme champêtre les chants de paix et de consolation. […] Mais c’est moins encore par les beautés de détails, par des traits épars et isolés, que cette étude peut influer sur une composition quelconque ; c’est par le ton général, par la couleur religieuse qu’elle prête au style par l’onction dont elle pénètre les sentiments, par la grandeur enfin qu’elle donne aux pensées C’est là ce qui constitue la véritable originalité ; ce qui fait d’un écrivain un homme à part, et donne à toutes ses productions un caractère particulier. […] Partout on reconnaît l’homme vraiment formé à la bonne école, mais jaloux aussi d’établir la sienne et de prendre sur notre Parnasse un rang particulier : la postérité le lui assignera.
Le complaisant intéressé C’est bien le meilleur des hommes que Physcon3 ; il n’a rien à lui, pas même sa conscience4 : tout est à ses amis, et il a constamment eu le bonheur de compter parmi eux tous les gens au pouvoir. […] Un Je me trompais 6 a souvent tant de grâce, et peut conduire un homme si loin ! […] On a dit encore : « Il faut ménager le vent aux têtes Françaises, et le choisir ; car tous les vents les font tourner. » « Les Français sont les hommes du monde les plus propres à devenir fous, sans perdre la tête.
Considérez dans le monde un homme bien élevé : son ton est parfait, ses manières simples, naturelles ; il est aimable sans prétention, agréable sans fadeur. […] L’homme de bien se fait sentir dans ses écrits ; on le suit avec plaisir, on l’aime, on se laisse doucement persuader par sa parole. […] Les passions tiennent essentiellement à notre nature ; on ne peut être homme sans passions ; elles n’ont en elles-mêmes rien de mauvais ; tout dépend de l’usage qu’on en fait. […] L’homme, sollicité d’un côté par le bien et de l’autre par le mal, a son libre arbitre pour choisir.
L’aigle blessé a mort Sur la neige des monts, couronne des hameaux, L’Espagnol a blessé l’aigle des Asturies2, Dont le vol menaçait ses blanches bergeries ; Hérissé, l’oiseau part, et fait pleuvoir le sang, Monte aussi vite au ciel que l’éclair en descend3, Regarde son4 soleil, d’un bec ouvert l’aspire, Croit reprendre la vie au flamboyant empire ; Dans un fluide d’or il nage puissamment, Et parmi les rayons se balance un moment : Mais l’homme l’a frappé d’une atteinte trop sûre ; Il sent le plomb1 chasseur fondre dans sa blessure ; Son aile se dépouille, et son royal manteau Vole comme un duvet qu’arrache le couteau. […] La main se réfléchit sur les meubles vernis ; Nul tableau sur les murs ne fait briller l’image D’un pays merveilleux, d’un grand homme ou d’un sage ; Mais, sous un cristal pur, orné d’un noir feston, Un billet en dix mots qu’écrivit Washington8. […] Oui, cette relique est sainte, — car Washington est le plus grand homme de tous les pays et de tous les âges. […] « Il apparaît de temps en temps sur la face de la terre des hommes rares, exquis, qui brillent par leur vertu, et dont les qualités éminentes jettent un éclat religieux.
Il me semble qu’il doit faire impression sur tout homme bien organisé. […] J'ai vu plusieurs hommes de bien qui ne désiraient que la nourriture et l’entretien du corps. […] Un homme âgé de trente ans a pu en faire l’expérience. […] Vous verrez dans moi un homme très-humain et très-libéral. […] L'homme de bien méprise les plus grands honneurs, quand il y a des injustices.
Les poètes sont les auteurs de poèmes : eu égard à la forme de langage qu’ils emploient, c’est-à-dire à ce qu’ils s’expriment en vers, ce sont des versificateurs ; mais ce mot est souvent pris en mauvaise part, pour désigner l’homme qui a le talent de bien tourner des vers, mais qui n’a ni l’invention nécessaire, ni le génie propre à composer des poèmes durables. […] Lamotte, homme de beaucoup d’esprit, mais qui n’avait pas le sentiment des arts, fut le premier qui mit au rang des épopées ce beau roman politique, apparemment pour se ménager à lui-même le droit singulier de faire des tragédies et des odes en prose1. » Enfin, Dussault, critique célèbre de l’époque impériale, a dit avec autant d’élégance que de justesse : « La versification est tellement essentielle à la poésie, qu’on ne peut raisonnablement regarder comme des poètes ceux qui ont secoué ce joug. […] Cette étude fait bientôt juger qu’il y a des règles pour leur composition, règles qui, émanées de la saine raison et fondées sur la nature du cœur humain, sont peu variables, presque indépendantes du caprice des hommes, et, par conséquent, ont été et seront à peu près les mêmes dans tous les temps et chez toutes les nations.
« C’est faute de plan, dit Buffon, c’est pour n’avoir pas assez réfléchi sur son objet, qu’un homme d’esprit se trouve embarrassé et ne sait par où commencer à écrire. […] Dans les questions variées, difficiles, que l’on ne peut résoudre sans une analyse parfois savante et compliquée ; dans les études sur les hommes ou les choses ; dans les longs récits, vrais ou fictifs ; dans l’éloquence qui conseille ou dissuade, loue ou blâme, accuse ou défend, il faut songer à eux autant qu’au sujet. […] Si l’on songe aux éléments dont parfois il se compose, on ne trouvera pas inopportun en bien des occasions de rappeler aux jurés leur haute mission, de stimuler soit leur sensibilité, car ils sont hommes, soit leur sévérité, car ils sont juges. […] Mais puisqu’à nos désirs le destin fut hostile, (Et disaut, de la main il essayait ses yeux Comme mouillés de pleurs), qui succédera mieux Aux armes qu’eu mourant un grand homme vous laisse, Que celui qui donna ce grand homme à la Grèce ?
S’il n’eut pas, comme quelques autres, cette patience scrupuleuse qui poursuit dans un genre et atteint la perfection, il fut dans presque tous également supérieur ; il réunit en lui une prodigieuse variété de talents qui, disséminés, auraient suffi à l’illustration de plusieurs hommes. […] Villemain, en traçant le tableau du dix-huitième siècle, s’est naturellement beaucoup occupé de Voltaire ; car aucun homme n’a exercé, en bien comme en mal, plus d’influence sur l’esprit français : on peut voir surtout ses 4e, 7e, 8e, 9e, 10e et 25e leçons. Outre cet auteur et quelques autres que nous avons indiqués dans nos extraits de prose comme devant être consultés sur lui, nous signalerons La Harpe dans différentes parties de son Cours de littérature ; Ducis, discours de réception à l’Académie française (il y fut le successeur de Voltaire) ; Fontanes, discours préliminaire, celui qui précède sa traduction de l’Essai sur l’homme de Pope, etc. […] Louis XV s’était rendu justice en refusant la dédicace d’un ouvrage où un roi père de ses sujets et un grand homme était célébré. […] Beau portrait du calme qu’une âme forte conserve au milieu des dangers : Duplessis-Mornay, qui a laissé aussi des Mémoires curieux sur les événements et les guerres auxquels sa vie a été mêlée, se montra même sur les champs de bataille un sage, ami des hommes : ce qui ne l’empêchait nullement d’être un héros.
Les sons, sains être figurés, peuvent fournir, et ont fourni à l’homme, soit par leur nature, soit par leur durée, une sorte de langage inarticulé pour exprimer, au moins jusqu’à un certain point, un certain nombre de choses. Les hommes, n’ayant d’abord que le geste pour se communiquer leurs idées, imitèrent la figure et le mouvement des objets qu’ils voulaient représenter. […] Qui ne serait tenté de s’écrier, avec un commentateur d’Horace (Lambin), que de pareils vers ne sont pas d’un homme, mais d’un dieu ! […] (L’Homme des Champs.
Aucun homme ne s’y est montré supérieur. […] C’est la lettre missive ; c’est le genre de composition dont l’étude porte ses fruits pendant toute la vie, et à ce point de vue, c’est le plus important pour le plus grand nombre des hommes. […] Cela n’est pas difficile ; les hommes ne sont que trop disposés à croire à l’ existence de leur mérite, et quand ils obtiennent une faveur, ils s’imaginent que rien n’est plus naturel, et qu’ils reçoivent la récompense due à leurs services. […] Il serait plus beau de les rapporter à Dieu qui est le maître de toutes grâces ; mais cette abnégation entière de soi-même, et ce haut sentiment de l’intervention divine dans les événements de ce monde, ne sont pas donnés à tous les hommes.
La vie brillante de ce grand seigneur ne l’eût pas sauvé de l’oubli ; mais il avait le goût de l’observation, et le petit volume des Maximes que lui inspira l’étude des hommes a suffi pour l’immortaliser. […] Rien n’est plus désagréable qu’un homme qui se cite lui-même à tout propos4. […] Les passions sont les seuls orateurs qui persuadent toujours : elles sont comme un art de la nature, dont les règles sont infaillibles ; et l’homme le plus simple, qui a de la passion, persuade mieux que le plus éloquent qui n’en a point.
Les plus avisés, ceux devant lesquels on ne dit rien impunément, vont plus loin ; ils savent saisir une ressemblance entre les caractères des hommes et ceux des animaux : j’en sais qui ont cru voir telle de ces fables se jouer dans la maison paternelle. […] J’y vois beaucoup de luxe imité de luxe d’autrui, et qui n’a même pas l’originalité d’un caprice personnel satisfait ; j’y vois des hommes d’âge mûr qui s’entourent de joujoux, et qui, moins heureux que leurs enfants, ne peuvent pas les casser quand ils s’en dégoûtent. […] On lit dans Bernardin de Saint-Pierre : « Si ses fables n’étaient pas l’histoire des hommes, elles seraient encore pour moi un supplément à celle des animaux. » 1.
On croit que c’est le même qu’Oannès, un des dieux syriens, et qui étoit représenté sous la figure d’un monstre, avec deux têtes, des mains et des pieds d’homme, et une queue de poisson. Ces idolâtres croyoient qu’il étoit sorti de la Mer Rouge, et qu’il avoit enseigné aux hommes, les arts, l’agriculture, les loix, etc.
Fidèles à notre plan, qui est de mettre le plus qu’il est possible nos préceptes en exemples, et les exemples eux-mêmes en opposition, nous allons rapprocher ici deux hommes d’une tournure d’esprit tout à fait différente, et qui, en portant malgré eux cet esprit dans leurs ouvrages, ont également contribué à corrompre et à perdre enfin l’éloquence académique : c’est Fontenelle et Thomas. […] Ce qui assure encore à Fontenelle une supériorité marquée sur ses nombreux et maladroits imitateurs, c’est qu’il possédait à fond tous les sujets qu’il a traités ; c’est que bien loin d’affecter l’érudition, il répand sans affectation les connaissances les plus variées ; c’est que l’astronome comme le moraliste, le médecin comme le géomètre, le philosophe comme l’homme d’état, reconnaissent dans Fontenelle l’homme versé dans chacune de leurs parties, comme s’il eût consacré sa vie à l’étudier. […] Les bornes qui, dans ces deux routes contraires, ont pu arrêter deux hommes de cette espèce, ce ne sont pas les bornes de leur esprit, mais celles de l’esprit humain ».
C’est que, dans l’attente de cet état, où l’on n’arrive pas tout d’un coup, il faut supporter des retardements capables non-seulement d’exercer, mais d’épuiser toute la patience ; que, durant de longues années, il faut languir dans l’incertitude du succès, toujours flottant entre l’espérance et la crainte, et souvent, après des délais presque infinis, ayant encore l’affreux déboire de voir toutes ses prétentions échouer, et ne remportant, pour récompense de tant de pas malheureusement perdus, que la rage dans le cœur et la honte devant les hommes. […] Et n’est-ce pas (je ne ferai point ici de difficulté de le dire, non pour décréditer la piété, à Dieu ne plaise, mais pour condamner hautement les abus qui s’y peuvent glisser, et qui s’y sont glissés de tout temps), n’est-ce pas par la voie d’une fausse piété, qu’on a vu les plus faibles sujets s’élever aux plus hauts rangs ; les hommes les moins dignes de considération et de recommandation être néanmoins les plus recommandés et les plus considérés, et, sans d’autres titres ni d’autre mérite qu’un certain air de réforme, emporter sur quiconque la préférence, et s’emparer des premières places ? […] Bourdaloue disait ailleurs : « De là vient que, par une triste décadence, le terme d’homme dévot, de femme dévote, qui par sa propre signification exprime ce qu’il y a de plus respectable dans le christianisme, porte présentement avec soi comme une tache qui eu obscurcit tout l’éclat et le ternit. » 1.
Ainsi l’on dit : il a été, il a vécu, pour dire qu’un homme est mort. […] Il en est ainsi de la vérité pour les hommes. […] Elle s’adresse à Dieu et aux hommes. […] Quand donc au mont qu’Académique on nomme, De roc en roc grimperas-tu, rare homme ? […] Heureux l’homme à qui Dieu donne une sainte mère !
[Notice] Peu d’hommes ont plus que Voltaire remué par leur génie et rempli de leur nom le monde : aucun n’a plus fortement agi sur son temps. […] « Voilà un étrange homme, dit le roi, qui s’imagine qu’il n’est pas plus beau d’être brûlé que d’être prisonnier. » Un autre garde, nommé Rosen, s’avisa de dire que la maison de la chancellerie, qui n’était qu’à cinquante pas, avait un toit de pierres, et était à l’épreuve du feu, qu’il fallait faire une sortie, gagner cette maison et s’y défendre. « Voilà un vrai Suédois ! […] Charles, qui n’avait autour de lui que soixante hommes, osa résister à l’armée des Turcs.
Les réflexions que le poète Andrieux fait sur la mobilité du caractère de l’homme, sont pleines de vérité : L’homme est dans ses écarts un étrange problème : Qui de nous en tout temps est fidèle à soi-même ? […] L’abbé Beauregard comprend alors qu’il a affaire à un homme exaspéré par la misère ; il le reprend avec douceur, le console, le soulage, lui remet de l’argent, et rend un père à sa famille en lui prouvant qu’il y a une Providence. […] Je prie votre imagination de n’aller ni à droite ni à gauche car : » Cet homme-là, sire, c’était moi-même. […] Il vous faudrait un homme uniquement occupé à recueillir les médailles que vous remportez. […] J’allai voir le feu de joie qu’un homme de ma connaissance avait entrepris.
Deux vérités opposées s’éclairent en se rapprochant, comme deux couleurs opposées se font ressortir l’une l’autre ; exemples : La jeunesse vit d’espérance, la vieillesse de souvenir ; — ce ne sont pas les places qui honorent les hommes, mais les hommes qui honorent les places. — Pourquoi la forme de la phrase ne chercherait-elle pas à exprimer un contraste que comporte si bien le fond de l’idée ? […] Analysez toutes ces figures, et vous conclurez que toutes se rattachent à l’ironie, en ce sens que l’idée exprimée n’y est pas à elle-même son but, et qu’il n’en est aucune à laquelle ne puisse s’appliquer le mot fameux de Talleyrand : « La parole a été donnée à l’homme pour déguiser sa pensée. » Ne perdez pas de vue ce caractère de double entente ; c’est lui qui justifie non-seulement le rang que j’assigne à ces formes du discours, mais le nom même de figures que je leur donne. […] Commander aux hommes, et leur donner des lois ?
Le commun des hommes nage entre les deux extrémités. » Le mot nager vient mal après ces deux classes d’esprits : cette figure avait besoin d’être préparée. […] Que Prométhée dévoré par un vautour soit l’emblème de l’homme ambitieux et cupide, je le veux bien ; mais que l’or soit tout à la fois une divinité, un asile et un vautour représenté par Prométhée ! […] Barbier, qui voulut dépasser Juvénal en hyperboles et en crudité d’expression, est un homme d’un talent remarquable, mais il a dans ses vers, le même défaut que Timon l’Athénien dans sa prose. […] Sans vouloir assurément faire de nos jeunes auteurs les émules des précieuses, je n’aime pas voir un homme sérieux prêter, même par inadvertance, aux épaisses gaillardises de quelques bouffons. […] La chasteté naturelle dans le langage annonce l’homme bien élevé et de bon goût, comme la chasteté volontaire dans les mœurs indique la puissance et l’énergie du talent.
A un seul homme.] […] vii : c’est un moyen trop commode, pour un homme d’esprit, de corriger Aristote.
Le poète, alors, ne se contentait pas de censurer en général les vices et les travers de l’homme, il traduisait les individus sur la scène, avec leur nom, leur costume, leur physionomie : cette licence ne put être arrêtée que par des lois sévères. […] La satire est un discours en vers, où l’on attaque directement les vices et les travers des hommes, de même que les erreurs de l’esprit et le mauvais goût littéraire.
L’e muet, comme à la fin de ces mots, homme, monde : on l’appelle muet, parce que le son en est sourd et peu sensible. […] 6. — La lettre h ne se prononce pas dans certains mots, l’homme, l’honneur, l’histoire, etc., qu’on prononce comme s’il y avait l’omme, l’onneur, l’histoire ; alors on l’appelle h muette.
Voyez quel exorde magnifique Fléchier a su tirer de la rare conformité que lui offraient les livres saints entre le héros des Machabées, et le grand homme (Turenne) qu’il allait célébrer : nous ne taririons pas sur ces exemples, et nous nous sommes arrêtés à quelques-uns des plus marquants, pour convaincre les jeunes orateurs de la nécessité de se familiariser de bonne heure avec ces sources inépuisables de tous les genres de beautés. […] C’est à eux que l’éloquence sacrée doit son origine et ses modèles en même temps : ce nouveau genre d’éloquence était absolument inconnu aux anciens ; et saint Augustin les défie de montrer aucun temple, aucune assemblée, où, par l’ordre et au nom de leurs Dieux, on fît un devoir aux hommes du mépris des richesses, de la fuite des honneurs et de l’horreur du luxe.
;On sait que ce grand poëte fut aussi un homme de cœur ; il combattit les excès de la démagogie, et mérita d’être une des pures victimes que la terreur fit périr sur l’échafaud1. […] Je ne connais point de grands hommes qui n’aient adopté de modèles. […] Mais ces grands hommes, en imitant, sont demeurés originaux, parce qu’ils avaient à peu près le même génie que ceux qu’ils prenaient pour modèles ; de sorte qu’ils cultivaient leur propre caractère, sous ces maîtres qu’ils consultaient et qu’ils surpassaient quelquefois ; au lieu que ceux qui n’ont que de l’esprit sont toujours de faibles copistes des meilleurs modèles, et n’atteignent jamais leur art : preuve incontestable qu’il faut du génie pour bien imiter, et même un génie étendu pour prendre divers caractères ; tant s’en faut que l’imagination donne l’exclusion au génie. » 1.
Cet homme est farce pour Farceur. Cet homme est farceur.
Ainsi chantait l’ancien des hommes vaut-il mieux que : ainsi parlait le vieillard, — même dans ce qu’on nomme prose poétique ? […] J’appelle ellipse dure, laborieuse, celle, par exemple, de la Fontaine lui-même à la fable 2 du livre X, l’Homme et la Couleuvre. C’est l’homme qui répond au serpent : … Tes raisons sont frivoles. […] … Voltaire a mieux compris le tour latin, et, malgré l’inconcevable distraction qui lui a fait prendre, comme au singe de la Fontaine, le nom d’un port pour un nom d’homme, je préfère sa forme, Phénisse veille et pleure !
La conversation s’engage sur le mérite poétique et littéraire de ces deux grands hommes ; c’est à qui élèvera plus haut la gloire de son héros. […] Telle est donc l’heureuse influence des hommes supérieurs, que lors même que les siècles ont dégénéré, leur seule idée réveille et ranime pour un moment quelques étincelles, du moins, des vertus ou des talents qui les ont immortalisés !
Les passions sont la vie même de l’homme et le mobile de tous ses actes : ce qui le pousse à agir, c’est toujours un sentiment d’amour ou de haine. […] Les démons du Paradis perdu peuvent rivaliser un instant avec la foudre de Jéhovah ; ce merveilleux plait à l’imagination sans la blesser ; mais si vous mettiez des hommes à la place, il n’y aurait plus de vraisemblance. […] Le poème épique est la plus vaste des compositions humaines : le génie seul peut parvenir à l’embrasser ; aussi toutes les richesses de l’imagination et du style doivent concourir à son ornement ; toutes les connaissances sur Dieu, sur l’homme, sur la nature, peuvent y entrer : c’est ainsi qu’Homère est universel, et que ses poèmes sont le tableau complet de son époque.
Les hommes de génie ont considéré la nature et l’ont embellie en l’imitant ; puis des esprits observateurs ont analysé ces productions, et après avoir découvert le secret de leurs beautés, ont fait part aux autres hommes du résultat de leurs investigations, et leur ont indiqué la voie qu’ils devaient suivre.
« Le peu de rimes de notre langue fait que, pour rimer à hommes, on fait venir comme on peut le siècle où nous sommes, l’état où nous sommes, tous tant que nous sommes 6. […] *** Tel par la caravane au désert oublié L’homme cherche de l’œil la trace d’un seul pié 11. […] Annibal l’a prédit, croyons-en ce grand homme : Jamais on ne vaincra les Romains que dans Rome. […] Les deux rimes hommes et sommes n’ont été employées que huit fois par Racine, et une seule fois par Boileau ; mais ces deux poètes n’ont pas d’autres rimes en ommes. […] « Comme le grec est aujourd’hui assez ignoré de la plupart des hommes, et qu’il n’est pas possible de leur faire voir Pindare dans Pindare même, j’ai cru que je ne pouvais mieux justifier ce grand poète qu’en tâchant de faire une ode en français à sa manière, c’est-à-dire pleine de mouvements et de transports, où l’esprit parût plutôt entraîné du démon de la poésie, que guidé par la raison.
Il se souvient qu’il est homme, et qu’il commande à des hommes ».
Dans sa correspondance à la fois militaire, politique, diplomatique et intime, nous voyons tour à tour le chef de parti, le roi reconnu par une moitié de la France, combattu par l’autre, le vainqueur, le souverain populaire, mais surtout l’homme lui-même nous offrant toujours le parfait modèle d’un caractère habile et chevaleresque, d’un naturel ouvert et généreux, d’une imagination preste et originale. […] A certaines vérités rudes, mais tempérées par la bonhomie et la belle humeur, on reconnaît le roi qui fait fi de la rhétorique, porte l’épée au côté, sait mener son monde et le ranger à l’obéissance, est passé maître dans l’art de gagner les esprits et de séduire les plus récalcitrants, possède l’expérience des hommes, ne dédaigne pas la ruse quand la loyauté serait peine perdue, et mêle l’adresse aux bons propos, à l’indulgence, à une bonté vraie quoique toujours très clairvoyante.
L’homme en qui n’est pas développé le goût littéraire, a comme un sens de moins : il ne peut participer aux plus douces et aux plus pures jouissances de la vie intellectuelle. L’éducation littéraire embrasse l’homme tout entier.
Et ce qui prête au sentiment de ces grands hommes une autorité bien plus respectable encore, c’est que les détails de leur vie ne furent jamais en contradiction avec leurs discours : c’est qu’ils ne conseillaient rien qu’ils n’eussent d’avance pratiqué eux-mêmes, et que tout ce qu’ils disaient de la vertu n’était que le tableau de leurs pensées, et l’histoire fidèle de leurs actions. […] Il s’agissait moins de faire une rhétorique nouvelle, je le répète, que de consacrer un ouvrage vraiment utile à démontrer l’accord indispensable et constant chez les véritables grands hommes, de la vertu et de l’éloquence, des mœurs et des talents.
Or, pour persuader un auditoire composé d’hommes sensés, il faut d’abord commencer par le convaincre. […] On sent bien qu’un tel homme n’aurait persuadé personne à Athènes ou à Rome, et qu’on n’y eût été convaincu que de son ineptie ou de sa perversité.
Elle ne peut avoir que deux objets : ou il s’agit de conduire les hommes par le devoir, et c’est alors dans les principes du juste et de l’injuste qu’elle puise ses forces et ses moyens : ou il s’agit de les déterminer par leur intérêt, et c’est leur passion qu’il faut émouvoir. […] L’honneur, la gloire, la vertu, l’orgueil national, les principes de l’équité peuvent beaucoup sans doute sur l’esprit des hommes assemblés ; mais rien ne les détermine plus puissamment que les motifs d’utilité publique.
Ce précepte effectivement, qui donne pour règle de ne point garder quelquefois de règles, est un mystère de l’art qu’il n’est pas aisé de faire entendre à des hommes sans aucun goût…, et qu’une espèce de bizarrerie d’esprit rend insensibles à ce qui frappe ordinairement les hommes. » (Discours sur l’Ode.
Ce mal bizarre, qui a quelque chose du dragon et du lutin tout à la fois, se joue à ravager un homme. […] Et il se fit un silence pendant lequel le petit jeune homme s’avise d’improviser un distique latin à la louange de l’Empereur, qui, prenant son parti en habile homme, se mit à dire en souriant : « C’est bon, c’est bon, je t’entends, je t’entends. » Et puis, étendant gravement la main : — « Va, tu seras content de moi.
Partout le sol était brûlant, et l’air étouffant retentissait du bourdonnement des insectes, qui cherchaient à se désaltérer dans le sang des hommes et des animaux. […] J’aurai présenté de beaux tableaux, j’aurai consolé, fortifié et rassuré l’homme dans le passage rapide de la vie. […] Le bruit des eaux, des bois, de la foudre et des vents, qui tombent et se brisent contre les rochers ébranlés et fracassés ; les cris et les hurlements des hommes et des animaux, pêle-mêle emportés dans un tourbillon de sable, de pierres et de débris, tout semble annoncer les dernières convulsions et l’agonie de la nature. » On devra étudier aussi le récit d’une tempête que subit Bernardin aux environs de Madagascar, et qu’il raconte à un ami dans une lettre, sans préoccupation littéraire.
Œdipe ne monta sur le trône de Thèbes ; qu’après avoir deviné l’énigme que proposait le sphinx155, et qui présentait les trois âges de l’homme, l’enfance, la virilité et la vieillesse, sous la figure d’un animal, qui, le matin, marche à quatre pieds ; vers le milieu du jour, à deux, et le soir, à trois. […] Mais avertir le lecteur de rassembler, par exemple, la 2e, la 3e, la 5e, la 7e lettre qu’on désigne par des chiffres, c’est avilir la poésie, et justifier en quelque sorte ce que l’on dit de ces petites pièces de vers ; que ce ne sont que des puérilités que l’homme de goût dédaigne et réprouve. […] Mais l’homme de lettres un peu célèbre, et celui qui est né avec quelque talent poétique, les regardent comme des bagatelles, dont ils ne doivent que très rarement, et peut-être jamais s’occuper. […] Bénissons le siècle où nous sommes : L’Hymen, en comblant tous nos vœux, Promet au monde de grands hommes, Et de grands rois à nos neveux.
Son effrayante clairvoyance fait tomber tous les masques, perce de ses regards toutes les physionomies, met l’homme à découvert. […] Le président du Harlay 3 M. de Harlay était un petit homme, vigoureux et maigre, un visage en losange4, un nez grand et aquilin, des yeux beaux, parlants perçants, qui ne regardaient qu’à la dérobée, mais qui, fixés sur un client ou sur un magistrat, étaient pour5 le faire rentrer en terre ; un habit peu ample, un rabat presque ecclésiastique, et des manchettes plates comme eux, une perruque fort brune et fort mêlée de blanc, touffue, mais courte, avec une grande calotte par dessus.
Hère, n. m. homme sans mérite ou sans fortune. […] Corps, n. m. de l’homme, des animaux, portion de matière.
Tels sont : Humains, mortels, pour Hommes. […] Pour dire que l’homme vertueux n’a rien à redouter sur la terre, Racine fait ainsi parler Joab : Celui qui met un frein à la fureur des flots, Sait aussi des méchants arrêter les complots. […] Les hommes après l’or s’empressent et se foulent. […] La vie est un fardeau pour l’homme désœuvré. […] L’homme de la nature est le chef et le roi.
Si dans le portrait d’un homme bon par excellence vous parlez de la méfiance, variété de caractère qui modifie la bonté, vous détruisez l’harmonie. […] L’exorde pompeux doit être préféré par l’orateur, quand une circonstance solennelle rassemble autour de lui une foule d’hommes accourus pour entendre sa parole. […] Ainsi, pour m’expliquer par un exemple, le jeune poète qui aura de l’attrait pour la tragédie devra lire et relire Racine, qui est à peu près parfait ; et ce n’est que plus tard qu’il pourra lire Pierre Corneille, qui a mêlé à d’admirables beautés des défauts tels, qu’ils sont inconcevables dans ce grand homme.
Figurez-vous quelque chose de la désolation de Tyr et de Babylone, dont parle l’Écriture : un silence et une solitude aussi vastes que le bruit et le tumulte des hommes qui se pressaient jadis sur ce sol. […] Le rossignol Lorsque les premiers silences de la nuit1 et les derniers murmures du jour luttent sur les coteaux, au bord des fleuves, dans les bois et dans les vallées, lorsque les forêts se taisent par degrés, que pas une feuille, pas une mousse ne soupire, que la lune est dans le ciel, que l’oreille de l’homme est attentive, le premier chantre de la création entonne ses hymnes à l’Éternel. […] En vain, dans nos champs cultivés, l’imagination cherche à s’étendre ; elle rencontre de toutes parts les habitations des hommes ; mais, dans ces régions sauvages, l’âme se plaît à s’enfoncer dans un océan de forêts, à planer sur le gouffre des cataractes, à méditer au bord des lacs et des fleuves, et, pour ainsi dire, à se trouver seule devant Dieu2.
Vous m’eussiez vu dans les plus effrayantes montagnes du monde, au milieu de douze ou quinze hommes les plus horribles que l’on puisse voir, et qui ont chacun deux ou trois balafres sur le visage et deux pistolets et deux poignards à la ceinture : ce sont les bandits qui vivent dans les montagnes des confins du Piémont et de Gênes. […] A dire la vérité, monseigneur, je ne sais à quoi vous avez pensé : et ç’a été, sans mentir, trop de hardiesse, et une extrême violence à vous d’avoir, à votre âge, choqué deux ou trois vieux capitaines que vous deviez respecter, quand ce n’eût été que pour leur ancienneté ; fait tuer le pauvre comte de Fontaine, qui était un des meilleurs hommes de Flandre, et à qui le prince d’Orange n’avait jamais osé toucher ; pris seize pièces de canon qui appartenaient à un prince qui est oncle du roi et frère de la reine4, avec qui vous n’aviez jamais eu de différend ; et mis en désordre les meilleures troupes des Espagnols, qui vous avaient laissé passer avec tant de bonté.
Le Sage 1668-1747 [Notice] Breton d’origine, très-fier et très-jaloux de son indépendance, Alain René Le Sage quitta un modeste emploi de finance pour se faire homme de lettres. […] Je n’avais pas encore mangé le premier morceau, que l’hôte entra, suivi d’un homme qui l’avait arrêté dans la rue.
Étude littéraire et philologique sur la langue du XVIe siècle « J’escris, dit Montaigne, un livre à peu d’hommes et à peu d’années. […] Notre langue ne fut pas moins fidèle à son berceau, quand elle disait : « mil chevaux, et deux mille hommes. » Elle se souvenait que mil provient de mille, qui désigne un singulier, tandis que mille, dérivé de millia, contient l’idée de plusieurs milliers. […] Mais nous n’en avons pas fini avec les élégances du pronom démonstratif, dont l’office fut également heureux dans les phrases où plusieurs mots pouvaient, sans inconvénient d’obscurité, le séparer de son relatif, témoin ce vers de Ronsard : « Celuy n’est pas heureux qu’ on monstre par la rue. » ou même avec inversion : « Qui n’est homme de bienceluy n’est pas personne « De qui l’en puisse dire… » Est-il besoin de signaler ici le latinisme qui… ille ? […] A force de tamiser le dictionnaire, le zèle des puristes prit parfois le bon grain pour l’ivraie, et notre langue fut exposée au même péril que l’Homme entre deux âges, dans cette fable où La Fontaine nous montre deux veuves lui arrachant l’une les cheveux noirs, parce qu’ils sont trop jeunes, l’autre les blancs parce qu’ils sont trop vieux. […] Non contents de rétablir c dans les mots où il existait en latin, ils l’accordèrent libéralement à ceux que leur étymologie en affranchissait, et ils dirent craincte pour crainte, parce qu’ils ne voyaient pas que craindre dérive de tremere par la mutation ordinaire de emere en eindre : (geindre de gemere). — Une erreur non moins grave nous valut scavoir, que l’on tira faussement de scire et non de sapere, (sapire, savire). — Au lieu de s’effacer, comme dans l’ancien idiome, l’h latin s’afficha dans le nouveau, qui, tout en écrivant avoir (d’habere), se contredit dans homme (de hominem), et hostel (d’hospitale).
Tout en regrettant qu’il ait troublé la paix du monde chrétien, bornons-nous à dire quelques mots de l’homme et de l’écrivain. […] C’était comme une fenêtre ouverte à d’autres libertés. — Parmi bien d’autres prescriptions tyranniques, citons celle qui interdisait aux hommes les chaînes d’or et d’argent, aux femmes les dorures et les broderies.
La légèreté et le pédantisme sont trop souvent le caractère des livres de ce genre ; ici, les notions sont précises, renseignement est grave et bienveillant, et l’on sent partout l’homme de goût. […] Monsieur le Professeur, J’ai fait examiner par un homme très compétent le volume intitulé : Poétique, etc.
Tous peuvent penser et dire que tout est vanité dans ce monde, mais si cette triste vérité apparaît à un puissant roi, homme de génie ; si au milieu des grandeurs, des plaisirs, des études, chaque découverte, chaque succès, chaque volupté nouvelle la lui confirme, ce n’est plus une idée qu’il formulera, c’est un cri presque involontaire qui lui échappera : « O vanité des vanités ! […] est pour l’homme de goût la plus heureuse rencontre d’idée et d’expression à la fois gracieuse, piquante et rapide. […] En voici un dans son admirable lettre sur la mort de Turenne : « Chacun conte l’innocence de ses mœurs, la pureté de ses intentions, son humilité éloignée de toutes sortes d’affectations, la solide gloire dont il était plein, sans faste et sans ostentation, aimant la vertu pour elle-même, sans se soucier de l’approbation des hommes, une charité généreuse et chrétienne. » L’énallage est une figure de syntaxe.
A te dire le vrai, cher marquis, il m’assomme : Notre cerf relancé va passer à notre homme, Qui, croyant faire un coup de chasseur fort vanté, D’un pistolet d’arçon qu’il avait apporté Lui donne justement au milieu de la tête, Et de fort loin me crie : « Ah ! […] Génin. — Signalons enfin les beaux vers par lesquels Boileau honora dans sa VIIe épître la mémoire de cet homme illustre, tout en s’efforçant de soutenir le courage de Racine contre les dégoûts dont l’abreuvaient ses ennemis.
Les vers suivants, le dernier surtout, en présentent un bel exemple : Ici-bas la douleur à la douleur s’enchaîne, Le jour succède au jour et la peine à la peine, Borné dans sa nature, infini dans ses vœux, L’homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux. […] En prose, le style sublime est celui de l’histoire et de la philosophie, quand elles s’occupent de ce qu’il y a de plus élevé, c’est-à-dire de Dieu, de l’homme et de la nature, et souvent celui des oraisons funèbres, des sermons, des discours politiques, des plaidoyers, etc. […] Le torrent des siècles, qui entraîne tous les hommes, coule devant ses yeux ; il y voit avec indignation de faibles mortels, emportés par ce cours rapide, l’insulter en passant, vouloir faire de ce seul instant tout leur bonheur, et tomber au sortir de là entre les mains éternelles de sa colère et de sa justice. […] Faire et dire ce qui convient, voilà ce qui constitue l’homme parfait et l’excellent écrivain.
Voilà comment Alcander fut chastié12 par Lycurgus, et la punition qu’il en receut : c’est que de mal conditionné jouvenceau13, oultrageulx et temeraire qu’il estoit au paravant, il devint homme tres sage et tres modéré. […] » Non, pas cela, dit-il, mais c’est bien chose merveilleuse, qu’un homme ayant des pieds puisse endurer ton babil. » Et à un autre semblable qui luy disoit, apres un long procez12 qu’il luy avoit fait : Je t’ay bien rompu la teste, philosophe, de mon parler » : Non as, respondit-il, point autrement13 : car je n’y ai point pensé14.
Ne louons en lui que les dons de Dieu, et déplorons les fragilités de l’homme ; n’excusons pas ce qu’il a condamné, et dans le temps que l’église offre ici la victime de propitiation, et que ses chants lugubres demandent au Seigneur qu’il le purifie des infirmités attachées à la nature, ne craignons pas de parler comme elle prie, et d’avouer qu’il en a été capable. […] Fléchier, par exemple, dans l’oraison funèbre de Turenne : « N’attendez pas de moi, Messieurs, que j’ouvre à vos yeux une scène tragique ; que je vous montre ce grand homme étendu sur ses propres trophées ; que je vous découvre ce corps pâle et sanglant, auprès duquel fume encor la foudre qui l’a frappé ; que je fasse crier son sang comme celui d’Abel ; que je rassemble à vos yeux les tristes images de la Religion et de la Patrie éplorées.
L’homme de guerre est devenu chevalier ;son épée semble moins lourde, son armure moins impénétrable. […] Dans les dernières années de Charles VI, « le pouvre homme Cimelier » rimera aussi la Chronique de Duguesclin. […] Le Provençal appelle encore Franciot un beau parleur. — Le François voit volontiers un Gascon dans l’homme du midi.
« Tous les bruits de la nature : les vents, ces haleines formidables qui mettent en jeu les innombrables instruments disposés dans les plaines, sur les montagnes, dans le creux des vallées, ou réunis en masse dans les forêts ; les eaux, qui possèdent une échelle de voix d’une étendue si démesurée, à partir du bruissement d’une fontaine dans la mousse jusqu’aux immenses harmonies de l’Océan ; le tonnerre, voix de cette mer qui flotte sur nos têtes ; le frôlement des feuilles sèches, s’il vient à passer un homme ou un vent follet ; enfin, car il faut bien s’arrêter dans cette énumération qui serait infinie, cette émission continuelle de bruits, cette rumeur des éléments toujours flottante, dilatent ma pensée en d’étranges rêveries et me jettent en des étonnements dont je ne puis revenir. […] Il se condamnait lui-même, et s’accusait au lieu de s’irriter contre la dureté des hommes.
La plus terrible et la dernière fut la mort de tous les premiers-nés sans exception, soit hommes, soit animaux, que les anges du Seigneur firent périr en une seule nuit.
., d’une maison féconde en grands hommes, et des plus anciennes et des plus illustres de France.
Cet homme atrabilaire fut possédé de la démangeaison de critiquer les meilleurs auteurs connus de son temps.
Cette illustre et ancienne maison a produit tant de grands hommes, qu’il est difficile de distinguer le héros qu’a eu en vue l’auteur de le.
Mais sa modération, son désintéressement, une simplicité respectable, une noble indifférence pour les honneurs, en un mot toutes les qualités qui rendent l’homme véritablement grand, au sein de la grandeur même, ne l’ont pas moins immortalisé.
L’homme est naturellement trop indolent pour se charger volontiers d’une tâche aussi laborieuse ; et quelques éloges que l’on donne à l’auteur profond, dont on a enfin percé les ténèbres, on serait rarement tenté de le relire une seconde fois11. […] C’est dans son admirable Essai sur l’Homme, que le mérite du poète anglais se fait principalement sentir : c’est là que la précision morale était aussi indispensable que celle du style, et que l’une et l’autre se devaient fortifier et éclairer mutuellement.
Malgré cette frénésie, les hommes sensés, et dignes appréciateurs du vrai mérite, pensèrent, comme l’on pense encore aujourd’hui, que la mémoire de ce grand ministre ne périra jamais.
Tous les historiens le dépeignent comme un homme, dont les mœurs, naturellement austères, ne pouvoient être adoucies par la raison.
Nous soumettons donc, avec le sentiment que nous inspire un travail sérieux, cette troisième édition de notre Traité d’élégance et de versification à la critique des hommes spéciaux, espérant que leur jugement, s’il est le résultat d’un examen consciencieux, lui sera entièrement favorable.
Ajoutons à cela que les lettres peignent, non seulement les hommes, mais encore toute la physionomie d’une époque : le meilleur tableau du règne de Louis XIV est certainement le recueil des lettres de madame de Sévigné.
Envoyé en Flandres en 1709, il attaqua les Impériaux à Malplaquet, près de Mons, leur tua vingt mille hommes, et perdit le champs de bataille, qu’il n’auroit pas perdu, s’il n’avoit pas été dangereusement blessé dans l’action.
J’ai pensé aussi qu’en mettant sous les yeux des jeunes gens des morceaux choisis de nos meilleurs écrivains, je pouvais bien par occasion leur apprendre un trait d’histoire ; leur faire connaître un homme célèbre, un Dieu, un héros de la fable, la situation d’une ville, d’un pays, etc.
Pour joindre un nom à un mot précédent, on met de ou à devant ce nom ; fruit de l’arbre ; utile à l’homme.
En un mot, nous ne blâmons point l’homme, mais nous blâmons la chose. […] Je ne parle plus du reste des hommes.
« Qui ne sait traiter que l’espèce, dit Vico, diffère autant de celui qui s’élève jusqu’au genre que l’homme qui voit les objets de nuit et au flambeau diffère de celui qui les contemple à la lumière du soleil. » Quand on peut, dans une cause particulière, dans une discussion actuelle, rattacher son argumentation à quelque grand principe, à quelque vérité d’un ordre élevé, soit en morale, soit en politique, on lui donne une gravité, une autorité, une abondance, que les spécialités ne comportent pas. […] L’imitation, l’habitude, la passion exercent une puissante influence sur les hommes ; qu’il ait souvent recours à l’induction et à l’exemple, parfois même à l’argument personnel, argumentum ad hominem, qui tourne les vices et les torts de nos adversaires contre leurs doctrines et leurs prétentions ; qu’il préfère la gradation au sorite ; que l’amplification soit fréquente, le dilemme rare, peu de circonstances permettent de le produire à coup sûr.
L’on a vu jusqu’à présent comment les mots se joignent ensemble pour former un sens : les mots ainsi réunis font une phrase ou proposition 1 : la plus petite proposition doit avoir au moins deux mots, le sujet et le verbe, comme je chante, vous lisez, l’homme meurt : souvent le verbe a un régime, comme je chante un air, vous lisez une lettre, etc.
XVI, 1847) Homère peint les hommes meilleurs.]