L’art de savoir le placer dans les jours les plus favorables constitue le grand écrivain. […] On sait que C. […] Quel instrument flexible pour les mains qui savent l’employer avec habileté ! […] On ne saurait donner trop d’attention à cette étude. […] Que sais-je ?
Nous sommes tous attirés vers le désir de connaître et de savoir. — 4. […] A la gloire militaire, César ajouta le mérite du savoir et de l’esprit. — 4. […] Il est agréable de savoir. — 4. […] Tous les hommes ne savent pas s’acquitter d’un bienfait. — 9. Savoir obéir est une gloire égale à celle de commander. — 10.
Tous ceux qui ont fait quelques études, savent par cœur, et nous citent déjà cet admirable tableau d’une des plus belles comparaisons de Virgile : Qualis populeâ mœrens Philomela sub umbrà, etc. […] Lorsqu’il s’agit au contraire de relever un objet petit par lui-même, on ne saurait mettre trop de noblesse dans la comparaison, trop de grandeur dans les images que l’on emploie. […] En supposant, ce qui n’est pas, ce qui ne saurait pas être, les beautés d’ailleurs égales, il y aurait toujours, en faveur des poètes sacrés, une raison constante de supériorité que les autres ne leur disputent que par intervalle : c’est ce ton de sentiment et d’onction qui se fait remarquer partout, et qui indique à chaque instant le génie divin qui a présidé à l’ouvrage, animé l’esprit et dirigé la plume de l’écrivain. […] -C., l’Évangile en confirme jusqu’aux moindres circonstances ; si l’on y cherche enfin la prédiction et l’histoire détaillée des persécutions et des triomphes de l’église, la vérité est si frappante, que la mauvaise foi la plus décidée à tout nier, ne saurait se refuser à l’évidence des preuves. […] Comme ce début grave et solennel s’empare d’abord de l’attention, et répand dans l’âme je ne sais quelle religieuse terreur qui la prépare à quelque chose d’extraordinaire !
8° Pensées gracieuses Les pensées gracieuses inspirent je ne sais quoi de doux et d’agréable qui fait sourire de plaisir. […] Telle est cette pensée si usée : la mort n’épargne personne, mais à laquelle Malherbe a su donner les caractères de la nouveauté : Le pauvre en sa cabane où le chaume le couvre Est sujet à ses lois ; Et la garde qui veille aux barrières du Louvre N’en défend pas nos rois. […] Voici cependant M. de Broglie qui a su lui donner un air de nouveauté. […] À ce sujet, il est intéressant, dans ces duels littéraires, d’étudier de semblables œuvres au double point de vue du plan, du su jet et du style. […] Le deuxième point important consiste à savoir les lier ensemble, et faire en sorte qu’elles se succèdent régulièrement : c’est ce qu’on nomme liaison ou transition.
Il y a toujours eu du je ne sais quoi en tout M. de La Rochefoucauld4. […] Il n’a jamais été capable d’aucune affaire, et je ne sais pourquoi ; car il avait des qualités qui eussent suppléé en tout autre celles qu’il n’avait pas. […] Il a toujours eu une irrésolution habituelle ; mais je ne sais même à quoi attribuer cette irrésolution.
Rapin46, de savoir si Annibal avait les dents belles, pourvu que son historien me fasse connaître la grandeur de son génie, qu’il me montre un esprit hardi, inquiet, des pensées vastes, un cœur intrépide, et tout cela animé d’une ambition désordonnée, mais soutenue d’une constitution robuste, comme l’a dépeint Tite-Live ? […] On l’appelait, comme on sait, le stathouder des Anglais et le roi des Hollandais. Il savait toutes les langues de l’Europe et n’en parlait aucune avec agrément, ayant beaucoup plus de réflexion dans l’esprit que d’imagination. […] La nécessité d’économiser le temps a fait réunir ces petites pièces en très grande quantité dans des dictionnaires plus ou moins développés, où l’on trouve ainsi immédiatement tout ce que l’on a besoin de savoir sur tel ou tel personnage. […] Nous ne croyons pas qu’il puisse être donné aux amis de notre littérature aucun travail plus honorable ou plus utile ; et ce que nous nous plaisons d’ailleurs à proclamer avec le public, c’est qu’on ne saurait trouver ni un sujet d’ouvrage plus convenable à l’auteur, ni un auteur mieux disposé ou mieux préparé pour l’ouvrage.
Ou sachez-vous connaître, ou gardez-vous d’écrire. […] Rien de plus mal entendu que cette affectation, dans les grandes choses ; rien de plus vain, dans les petites : cette réflexion est de Marmontel, qui devait savoir mieux que personne à quoi s’en tenir à cet égard. […] Mais, nous le répéterons encore, la précision, soit dans la pensée, soit dans l’expression, ne peut produire un bon effet, qu’autant qu’elle est jointe à la plus grande clarté : les jeunes gens ne sauraient y faire trop d’attention. […] Ces caractères généraux du style sont indispensables à l’écrivain, quelque genre qu’il ait adopté et quelque sujet qu’il traite : il en est cependant une foule d’autres qui dépendent plus particulièrement de la nature même du sujet, et qu’il faut connaître et savoir distinguer.
Nous avons vu quel charme empruntaient les poésies d’Homère et de Virgile de l’heureuse variété de figures dont ces grands hommes savent enrichir si à propos leur diction. […] Ils n’en savent rien eux-mêmes : ……………… Quisquis fuit ille Deorum. […] De là ces contrastes nombreux, ces contradictions perpétuelles qui défigurent plus ou moins tout ce qui est de l’homme, et dont Homère et Virgile ne sont pas exempts eux-mêmes, parce que tout ce qui ne porte pas l’empreinte de la vérité première, tout ce qui n’émane pas directement de la source unique du beau, ne saurait l’être ni longtemps, ni constamment.
C’est peu d’aimer les vers, il les faut savoir lire ; Il faut avoir appris cet art mélodieux De parler dignement le langage des dieux ; Cet art qui, par les tons des phrases cadencées, Donne de l’harmonie et du nombre aux pensées ; Cet art de déclamer dont le charme vainqueur Assujettit l’oreille et subjugue le cœur. […] — Mais c’est que, pour s’instruire et savoir bien chanter, Il faudrait savoir écouter, Et babillard n’écouta de sa vie. […] — Je n’en sais rien.
Il est venu arrêter les pensées vagues de l’esprit humain : par son moyen, nous savons ce qu’Aristote, ce que le maître d’Aristote5, ce que les disciples d’Aristote ont ignoré. […] Depuis la publication de cette doctrine, nous disons hautement et affirmativement que le monde ne s’est pas bâti lui-même, mais qu’il y a je ne sais quoi de plus vieux et de plus ancien qui a travaillé à une si admirable architecture. […] Cette main invisible, ce bras qui ne paraît pas, donne les coups que le monde sent ; il y a bien je ne sais quelle hardiesse qui menace de la part de l’homme ; mais la force qui accable est toute de Dieu1.
On sait, messieurs, que la reine a souvent exposé sa personne dans ces conférences secrètes ; mais j’ai à vous faire voir de plus grands hasards. […] A la veille d’un si grand jour, et dès la première bataille, il est tranquille, tant il se trouve dans son naturel ; et on sait que le lendemain, à l’heure marquée, il fallut réveiller d’un profond sommeil cet autre Alexandre4. […] Restait cette redoutable infanterie de l’armée d’Espagne, dont les gros bataillons serrés, semblables à autant de tours, mais à des tours qui sauraient réparer leurs brèches, demeuraient inébranlables au milieu de tout le reste en déroute et lançaient des feux de toutes parts. […] Elle ne savait pas que le prince qui lui fit perdre tant de ses vieux régiments à la bataille de Rocroy en devait achever les restes dans les plaines de Lens. […] Madame de Sévigné, dans une lettre au comte de Bussy (1687), a fait l’analyse de cette seconde oraison funèbre, qu’elle semble presque préférer à celle de Bossuet : jugement que la postérité ne saurait confirmer.
. — Dacier : « comme on dit que cela se pratiquait autrefois. » Batteux : « la clepsydre, dont on dit qu’on s’est servi beaucoup autrefois, je ne sais en quel temps. » C’est outrer le sens du mot φασί et supposer chez Aristote l’aveu d’une ignorance qui serait bien étrange. […] « Ces expressions sont certainement très-favorables à Shakespeare et aux auteurs qui ont composé des pièces de théâtre romantiques car on ne peut leur reprocher d’avoir rassemblé en un seul tableau une plus grande quantité d’objets et d’événements que n’ont fait les poëtes grecs, s’ils ont su conserver à leurs compositions l’unité et la clarté nécessaires et c’est là, comme nous le verrons, ce qu’ils ont réellement fait. » (Schlegel, Cours de litt.
On est bien aise, longtemps même après l’événement, de savoir de quoi il a dépendu, et de connaître tôt ou tard les hommes qui ont justifié ou trompé notre confiance. […] Il poursuit : « Vous le savez Athéniens, il est parmi les peuples trois sortes de gouvernements. […] » Voulez-vous savoir ce qu’ont obtenu de vos ancêtres ceux qui vainquirent les Mèdes au bord du Strymon ? […] Au reste, si Démosthène avait triomphé avec éclat, il sut user de sa victoire avec générosité.
Avant tout, il faut bien savoir quelle nature d’argumentation est applicable aux idées que l’on veut communiquer et faire admettre. […] Si vous vous refusez à l’admettre, c’est que le rapport entre le sujet et l’attribut vous échappe, c’est-à-dire que vous ne savez comment ranger l’idée individuelle : Milon, meurtrier de Clodius, dans l’idée générale innocent. […] « Qui ne sait traiter que l’espèce, dit Vico, diffère autant de celui qui s’élève jusqu’au genre que l’homme qui voit les objets de nuit et au flambeau diffère de celui qui les contemple à la lumière du soleil. » Quand on peut, dans une cause particulière, dans une discussion actuelle, rattacher son argumentation à quelque grand principe, à quelque vérité d’un ordre élevé, soit en morale, soit en politique, on lui donne une gravité, une autorité, une abondance, que les spécialités ne comportent pas. […] Enfin il ne suffit pas d’avoir trouvé ses preuves et d’en avoir reconnu la nature, sachez encore les choisir, les disposer, les traiter.
Ce fut alors qu’il charma ses loisirs par des études historiques, où les vues pénétrantes et parfois paradoxales d’un savoir aussi précis qu’enthousiaste s’allient à l’éclat d’une forme magistrale et à cette puissance d’imagination qui rend la vie à la poussière des morts. […] Voilà les maîtres vers lesquels il faut sans cesse porter ses regards, quand on a quelques sentiments de l’art véritable, et qu’on aime cette admirable langue française, fidèle image de l’esprit et du caractère national, qui ne peut se soutenir et durer que par le perpétuel renouvellement des causes qui l’ont formée et élevée, à savoir les grands sentiments et les grandes pensées, ces foyers immortels du génie des écrivains et des artistes, aussi bien que de la puissance des nations. […] S’il savait lire en lui-même, il reconnaîtrait que si rien ici-bas ne le satisfait, c’est parce que son objet est plus élevé, et que le vrai terme où il aspire est la perfection infinie. […] L’homme religieux éprouve cette terreur ; mais il sait d’où elle vient, et il la surmonte en s’attachant aux solides espérances que lui fournissent la raison et le cœur.
Il pousse l’examen au delà de ses limites naturelles : les réponses sont toujours claires, précises, marquées au coin d’une intelligence qui sait et qui sent. […] Il sait que l’homme, être infini par sa destinée, est semé passagèrement sur un sol borné, et, no pouvant agrandir la partie commune, il agrandit son cœur pour s’y contenter de peu. […] Il ne dédaigne pas les lettres ; car les lettres, il le sait, c’est la suprématie de l’esprit ; c’est, avec l’éloquence et le goût, l’histoire du monde, la science des tyrannies et des libertés, la lumière reçue des temps, l’ombre de tous les grands hommes descendant de leur gloire dans l’âme qui veut leur ressembler, et lui apportant, avec la majesté de leur souvenir, le courage de faire comme eux.
Au sentiment de l’art antique il a su allier celui de l’art chrétien. […] Que le moindre clocher sonne le glas d’alarmes ; Que chacun sous son toit se dresse avec ses armes ; Que tout hameau lointain vierge de l’étranger Coure au-devant du flot qui nous veut submerger ; ……………… Que tout homme jaloux d’une sœur, d’une femme, Ayant à lui son champ et sa fierté dans l’âme ; Que tout chef d’une race, et tout enfant pieux Qui sait sous quel gazon reposent ses aïeux, Jurant de recouvrer cette place usurpée, Frappe un coup de sa faux, s’il manque d’une épée. […] Dans nos rudes hameaux faits pour la liberté, Où jamais magister ne s’était implanté, Son foyer souriant fut la première école ; Elle y prenait l’enfance au miel de sa parole ; Et4 par elle, aujourd’hui, du maître à l’ouvrier, Tous, en ces champs heureux, savent lire et prier.
Vous voulez savoir si deux surfaces sont d’égale longueur, vous prenez une règle et vous l’appliquez sur chacune d’elles. […] Je conjure celui qui répond oui de considérer que son plan n’est pas connu, qu’il faut du temps pour le développer, l’examiner, le démontrer ; que, fut-il immédiatement soumis à notre délibération, son auteur a pu se tromper ; que, fût-il exempt de toute erreur, on peut croire qu’il s’est trompé ; que, quand tout le monde a tort, tout le monde a raison ; qu’il se pourrait donc que l’auteur de cet autre projet, même en ayant raison, eût tort contre tout le monde, puisque sans l’assentiment de l’opinion publique, le plus grand talent ne saurait triompher des circonstances. » — Le dilemme divise les moyens de l’adversaire en propositions contradictoires et le tient enfermé dans la conclusion, comme en une impasse. […] Lieux communs Nous savons ce que les rhéteurs entendaient par lieux communs.
Ainsi disparaîtra du langage ce vague où l’esprit se perd avant d’avoir pu saisir la pensée de celui qui parle ; les mots n’en imposeront plus, et l’on saura, par exemple, qu’une beauté est sentimentale, quand elle réunit tout ce qui est capable de réveiller en nous le sentiment du beau. Or, comme cette idée générale du beau est elle-même quelque chose de vague, il faut savoir parfaitement distinguer ce qui constitue l’espèce de beauté relative à l’objet auquel on l’applique ; nous nous sommes assez étendus sur cet article au commencement de l’ouvrage, pour nous dispenser d’y revenir. […] ils existent ces monuments sacrés de l’antique et auguste douleur des premiers temps ; ces modèles achevés des chants religieux consacrés aux grandes infortunes des puissants de la terre ; et eux seuls vont nous donner l’idée et les règles de l’élégie, non point de cette élégie prétendue, qui Flatte, menace, irrite, apaise une maîtresse ; mais de la véritable, de la plaintive élégie, qui sait, les cheveux épars, gémir sur la tombe des princes ou des héros ; sur celle de Saül et de Jonathas, si tendrement pleurés par David, au second livre des Rois, ch. […] Vous, mes filles, gardez les mœurs de votre mère ; C’est non par des atours qu’elle avait su me plaire. […] » Je suis pécheur ; mais Dieu, s’il juge, est père aussi, » Et je sais qu’aisément un père est adouci.
On ne sait rien de plus sur ces deux pièces que ce que nous en apprend Aristote. […] On ne sait rien de plus sur cette pièce, dont l’auteur même est inconnu.
Mais les écrivains doués d’une oreille sensible, et d’un goût sûr et délicat, ont su trouver au besoin, dans cette même langue, si ingrate et si stérile pour les autres, des nombres analogues à la pensée, au sentiment, au mouvement de l’âme qu’ils voulaient exprimer. […] Je sais, comme un autre, qu’il se trouve de fort beaux vers dans Claudien ; des morceaux même que l’on peut mettre sans danger sous les yeux de la jeunesse : je n’ignore point qu’il y a, dans Thomas, des choses aussi bien pensées que bien écrites ; que son Essai sur les Éloges est un ouvrage neuf, plein de recherches curieuses et qui fait honneur à notre littérature, qui compte peu de morceaux oratoires plus véritablement éloquents que l’Éloge de Marc-Aurèle. Mais comme les vices que je combats ici dominent également dans ces deux écrivains ; comme je les crois, en général, de fort mauvais modèles à proposer aux jeunes gens, j’ai dû les signaler au commencement d’un ouvrage qui n’a pour but, et ne saurait avoir d’autre mérite, que de défendre les principes éternels du goût et de la raison.
C’est Dieu seul qui le sait ». […] « Voulez-vous savoir pourquoi le vrai philosophe voit l’approche de la mort de l’œil de l’espérance ? […] » Espérons donc (et nous en avons sans doute le droit), espérons que celui qui a fait de cette recherche son grand objet sur la terre, pourra s’approcher après la mort de cette vérité éternelle et céleste : celui surtout dont le cœur aura été pur ; car rien d’impur ne saurait approcher de ce qui est la pureté par excellence.
Il ne faut pas s’étonner que le roman soit devenu un genre important de littérature ; il peut avoir de graves inconvénients, nous le savons, et nous en signalerons plus loin les abus ; mais il a aussi un charme universel qui fait sa force, et dont il faut tenir compte. […] nous le savons, le roman atteint rarement le but élevé que nous venons d’indiquer. […] On ne sait rien de précis sur l’auteur, ni sur l’époque où il vécut.
Chantre des vaincus et des morts, il sut, par des notes attendries ou légères, allier la sensibilité à l’ironie, et faire venir une larme aux yeux, un sourire aux lèvres : en célébrant la bravoure, la gloire et l’amour de la patrie, il trouva le secret d’associer dans une sorte d’idéal les mots d’Empire et de Liberté. […] On sait que Béranger n’eut aucune ambition : il refusa les honneurs académiques. […] Béranger sait à merveille résumer une série d’idées dans une rapide image.
Je ne sais quoi de triste et d’amer se répandra sur nos gaietés mêmes. […] Dans ses lettres, dans ses discours, dans ses traités de philosophie et de rhétorique, tout respire je ne sais quel parfum d’honnêteté et de patriotisme. […] « Je sais que ce dernier point est contesté. […] N’arrive pas qui le veut à un savoir profond ; mais aimer les lettres, c’est encore être de la grande famille, c’est tenir à l’élite par un petit coin.
Et, en effet, il faut avoir tout vu, tout pénétré, tout embrassé, pour savoir la place précise de chaque mot. » Les plus profonds rhéteurs du xviiie siècle semblent renfermer toute la rhétorique dans la disposition et l’élocution. […] Jusqu’ici, comme vous voyez, à l’exception de la strophe 5 et peut-être de la strophe 7, la marche de l’ode se poursuit à la fois régulièrement et poétiquement, et comme certains développements sont magnifiques d’imagination et d’expression, le poëte a su concilier la logique avec ce beau désordre qui doit être un effet de l’art. […] Il a demandé qui saurait louer dignement le comte du Lue. […] La distance qu’il y a d’eux au peuple le leur montre dans un point de vue si éloigné, qu’ils le regardent comme s’il n’était pas : Ils méprisent des traits partis de si loin et qui ne sauraient venir jusqu’à eux ; et, presque toujours devenus les seuls objets de la censure publique, ils sont les seuls qui l’ignorent. […] Les soins qu’elle exige sont autant de moments dérobés à la volupté ; le désir de parvenir suspend du moins des passions qui de tout temps en ont été l’obstacle : on ne saurait allier les mouvements sages et mesurés de l’ambition avec le loisir, l’oisiveté, et presque toujours le dérangement et les extravagances du vice ; en un mot la débauche a toujours été l’écueil inévitable de l’élévation ; et jusqu’ici les plaisirs ont arrêté bien des espérances de fortune et l’ont rarement avancée.
Que vous vouliez ou non, que vous sachiez ou que vous ne sachiez pas. […] Nescire signifie aussi ne pas savoir ce qu’on a pu apprendre, ou ne pas savoir du tout ; ignorare, ignorer ce qu’on doit savoir, ne pas savoir assez. […] Sues glandibus pascuntur. […] Faire savoir qu’on est prêt à se rendre. Au figuré, faire savoir, avertir, faire entendre.
Sans compter les ressources immenses que les livres saints offrent au prédicateur qui sait en faire usage, pour donner du poids et de la solidité à son discours, combien l’art oratoire ne leur a-t-il pas d’obligations, à ne le considérer même ici que sous les rapports humains ? […] Voyez quel exorde magnifique Fléchier a su tirer de la rare conformité que lui offraient les livres saints entre le héros des Machabées, et le grand homme (Turenne) qu’il allait célébrer : nous ne taririons pas sur ces exemples, et nous nous sommes arrêtés à quelques-uns des plus marquants, pour convaincre les jeunes orateurs de la nécessité de se familiariser de bonne heure avec ces sources inépuisables de tous les genres de beautés.
Bourdaloue fut le premier qui eut toujours dans la chaire l’éloquence de la raison : il sut la substituer à tous les défauts de ses contemporains. […] Plus profond dialecticien qu’orateur disert, Bourdaloue sait mieux dégager la vérité des chaînes tortueuses du sophisme, que trouver le chemin du cœur.
Le vrai philosophe sait que la philosophie ne peut rien sans l’éloquence ; sapientiam sine eloquentiâ parùm prodesse civitatibus (Cic.) : parce que les matières qu’elle traite et les vérités qu’elle annonce ont besoin du charme de l’élocution, pour trouver un accès facile et se graver utilement dans les cœurs. […] « Il y a véritablement un petit nombre de génies extraordinaires, que la nature prend plaisir à former, qui trouvent tout en eux-mêmes, qui savent ce qu’on ne leur a jamais enseigné, qui ne suivent pas les règles, mais qui les font et qui les donnent aux autres. — Quant à nous, qui sommes d’un ordre inférieur, si nous n’avons que nos propres forces, et si nous n’empruntons rien d’autrui, quel moyen qu’avec un seul jugement et un seul esprit, qui n’ont rien que d’ordinaire et de médiocre, nous contentions tant de différents esprits, tant de jugements divers, à qui nous exposons nos ouvrages ?
La plaintive élégie, en longs habits de deuil, Sait, les cheveux épars, gémir sur un cercueil. […] Delavigne sait des chants patriotiques à la manière de Tyrtée ; les poésies de Lamartine et de Byron sont souvent des élégies au large essor26.
Ou ces objets ne leur viennent pas dans l’esprit, ou, si quelque circonstance leur en présente l’idée et les oblige à l’exprimer ; le mot propre qui les désigne est censé leur être inconnu, et c’est par un mot de leur langue habituelle qu’ils y suppléent. » Il n’y a plus de noblesse en France, politiquement parlant ; mais aucun décret, que je sache, n’a banni la noblesse de l’art et de la science. […] L’énergie et la véhémence sont plutôt le langage de la passion, de la spontanéité, du besoin d’entraîner, dût-on ne pas savoir jusqu’où l’on ira, de frapper fort, dût-on frapper moins juste. […] Quand le discours est improvisé, point de règles, bien entendu ; l’orateur obéit à une impulsion spontanée, la nature agit presque en dépit de lui-même ; seulement, qu’on ne perde pas de vue ce que j’ai dit au chapitre des Passions, sur la nécessité de savoir se maîtriser, même en ces occasions. […] On a beaucoup écrit sur cette matière depuis Longin jusqu’à nous ; mais nul que je sache ne s’est avisé de traiter de l’art du sublime ; entreprendre un tel sujet serait avouer qu’on ne le comprend pas.
D'abord je demande comment il a pu le savoir. […] Je ne sais où je suis à cause de la joie. […] Je ne sais s’ils n’ont pas dépassé la mesure. […] Ex. : Je sais que la ville sera prise. […] Je sais que la ville doit être prise.
Personne n’a plus que lui réuni l’abondance des idées et des raisonnements, la plénitude du savoir et de la raison, aux richesses de l’expression, à la vérité des tours, et surtout à ce sentiment intime qui sait mettre la justice et la vérité dans tout leur jour, pour les faire aimer de ceux même qu’il combat.
Ce n’est qu’à ceux-là que Démosthène veut devoir ; s’ils ne peuvent rien pour moi, que Neptune que j’implore, que cet autel, que la sainteté des lois me protègent aujourd’hui : et si Neptune lui-même ne peut défendre son temple contre toi, s’il ne rougit pas de livrer Démosthène au ministre d’Antipater, je saurai mourir, et jamais l’oppresseur de mon pays ne sera un dieu pour moi. — Non, je ne déshonorerai point Athènes ; je ne servirai point : je mourrai libre ; c’est la plus belle des destinées ». […] On sait d’ailleurs que l’idée première et le plan dramatique de l’éloge de Marc-Aurèle, furent fournis à Thomas par Diderot, dont la tête ardente concevait et communiquait avec chaleur aux autres des idées infiniment heureuses, qu’il n’eut ni la patience, ni peut être le talent de mettre lui-même en œuvre.
Il est facile de comprendre pourquoi les figures sont plus nombreuses et plus hardies dans la poésie que dans la prose : on sait, en effet, que sous l’influence d’une émotion forte, les objets ne paraissent pas tels qu’ils sont, mais tels que la passion les représente ; on les grossit, on les exagère, on veut intéresser les autres à l’objet de sa passion ; on compare les plus petites choses aux plus grandes, on parle aux absents comme s’ils étaient présents, on s’adresse même aux choses inanimées : ces divers mouvements de l’âme suggèrent ces tours hardis que nous appelons figures. […] Pour dire que l’homme vertueux n’a rien à redouter sur la terre, Racine fait ainsi parler Joab : Celui qui met un frein à la fureur des flots, Sait aussi des méchants arrêter les complots. […] 4° Pour les locutions familières, les expressions proverbiales, les phrases toutes faites et les noms propres composés : Le juge prétendait qu’à tort et à travers On ne saurait manquer, condamnant un pervers. […] ………………… Souvent la césure Plaît, je ne sais comment, en rompant la mesure. […] Ce serait une faute aujourd’hui de dire, comme au commencement du xviie siècle, avecque pour avec, jà pour déjà, sais-je pas pour ne sais-je pas, dedans pour dans, dessus pour sur.
Nous savons que ce but n’est pas souvent atteint, et que l’on sort rarement du théâtre, corrigé et amélioré ; c’est que les auteurs dramatiques cherchent plus souvent à plaire qu’à instruire, et que, pour avoir du succès, ils flattent les passions au lieu de les réprimer. […] Le théâtre n’est au fond qu’une illusion ; nous le savons : nous y allons pour être agréablement trompés par l’imitation de la vie ; mais nous voulons que cette imitation soit vraie, sans être pourtant une réalité. […] On va au théâtre pour trouver l’illusion ; on sait bien que tout est feint dans ce spectacle : la toile, les planches, les décorations, la lumière des lampes, les costumes, les personnages, nous savons que tout cela est factice ; notre esprit passe par-dessus tous ces mensonges, et s’intéresse pourtant à l’action qui les accompagne. […] L’âme se fait un plaisir de l’agitation que lui donne le spectacle des passions humaines, et un plaisir d’autant plus doux, qu’elle sait que ces passions ne sont qu’une image et qu’une illusion qu’elle croit sans dangers. […] Voilà, certes, pour le théâtre, une source intarissable d’émotions : si le poète sait peindre les passions avec vérité, et parler le langage de la nature-, il est sûr, en tous temps et en tous lieux, de remuer les cœurs.
Là où les imaginations ont perdu cette première candeur, le poète épique ne saurait naître ; il appartient à la jeunesse des nations et des idiomes ; seulement, si la nation est rude et l’idiome grossier, on a ces longs récits en vers qui amusaient nos aïeux ; si, au contraire, la nouvelle langue est belle et forte dès son origine, on entend la voix du Dante. […] Les modernes ont souvent agité la question de savoir si le merveilleux chrétien peut être employé comme ressort d’une action épique. […] La grandeur de l’action dépend de son importance, de sa position reculée dans le lointain des siècles, et de la manière dont le poète sait élever son sujet par des créations nobles et saisissantes, tour à tour héroïques et merveilleuses.
C’est faute de plan, c’est pour n’avoir pas assez réfléchi sur son sujet, qu’un écrivain se trouve embarrassé et ne sait par où commencer à écrire ; il aperçoit à la fois un grand nombre d’idées, et comme il ne les a ni comparées, ni subordonnées, rien ne le détermine à préférer les unes aux autres, et il demeure dans la perplexité. […] Aucun art, même la poésie, ne saurait produire ce qui n’est pas, ou ce qui ne peut pas être. […] Pour résumer, il n’est pas très difficile d’être vraisemblable dans l’invention à quiconque connaît la nature, et sait extraire de cette mère de toutes choses l’agrément, le fini, la beauté, la perfection. […] Par mœurs oratoires on entend d’abord quatre qualités essentielles à tout orateur qui a la prétention légitime de plaire, savoir : la probité, la modestie, la bienveillance et la prudence.
Mais il faut savoir, et Pline nous l’apprend lui-même, que le discours réellement prononcé en présence du prince, n’était qu’un simple remerciement très court, adapté au lieu et à la circonstance : ce ne fut qu’au bout de quelques années qu’il le publia tel qu’il nous est parvenu. […] Nous sommes toujours excusés à vos yeux, et nous devons l’être sans doute ; car vous savez assez que chacun de nous s’estime d’autant plus qu’il vous voit et vous fréquente davantage ; et c’est encore une raison pour vous de vous prêter avec une nouvelle indulgence à ce plaisir toujours nouveau.
Encore reste-t-il à savoir si, dans les Dionysiaques, les représentations tragiques n’étaient pas réparties entre plusieurs journées. Aristote parle évidemment pour des gens qui savaient toutes ces choses.
Jean-Baptiste Rousseau 1670-1741 [Notice] Ce que nous savons de sa vie ne le recommande guère à l’estime de la postérité. […] Mais de son ire4 éteindre le salpêtre, Savoir se vaincre et réprimer les flots De son orgueil, c’est ce que j’appelle être Grand par soi-même : et voilà mon héros !
C’est ce qu’on ne saurait trop répéter à ceux qui aspirent à la réputation de poètes, pour avoir rassemblé au hasard quelques lignes d’une prose mal conçue et mal écrite, et qui n’a rien de la poésie, que le refrain monotone d’une rime placée machinalement au bout d’un certain nombre de syllabes. […] Voyez, dans la belle ode Æquam memento rebus in arduis, avec quel art ce grand poète sait amener de grandes vérités de morale, et les fondre dans les descriptions les plus riantes. […] Tous les amateurs de la poésie savent par cœur, et ne se lassent point de répéter, ces beaux vers du quatrième chant : Chiama gli abitator dell’ombre eterne Il rauco suon de la tartarea tromba : Treman le spaziose atre caverne, E l’aer cieco a quel rumor rimbomba.
voilà donc l’instrument qu’il importe le plus de savoir manier pour celui-là même à qui le nom d’orateur semblerait mieux convenir que le nom d’écrivain. […] On sait combien Horace appuie sur cette idée dans son Art poétique. […] 3° C’est encore au maître à lui apprendre comment il faut, dans l’occasion, savoir s’écarter des règles, et obéir, en dépit d’elles, aux inspirations du goût, c’est-à-dire de cette faculté, moitié d’instinct, moitié de culture, qui nous fait discerner et sentir le beau, en dehors même des lois générales et des prévisions de l’art.
Cependant, l’éloquence de la chaire ne s’appuie pas exclusivement sur l’autorité divine, elle emploie aussi les armes humaines du raisonnement, selon les auditeurs auxquels elle s’adresse ; elle sait aussi prouver que les vérités qu’elle enseigne ne sont pas contraires aux lois de la raison ; mais elle nous met en garde contre les erreurs et les faiblesses de l’esprit ; là où la raison trébuche, l’autorité étend sa main bienfaisante pour la soutenir. […] Devant un peuple assemblé, l’éloquence prend un autre ton, un autre caractère ; elle s’adresse moins à la logique qu’à la passion ; elle emprunte plus de puissance à la voix, au geste, au regard, aux images, qu’à l’enchaînement des mots et des idées ; elle sait que son triomphe tient à l’ébranlement momentané des cœurs. […] Un avocat ne peut donc soutenir comme juste une cause qu’il sait être mauvaise ; il mentirait à sa conscience, à la conscience publique ; il ne serait pas honnête homme.
c’est que je ne sais pas me gouverner, c’est que ma volonté n’est pas unie à la vôtre, et, comme il n’y a pas autre chose où elle puisse se prendre, je suis devenu le jouet de tout ce qui souffle sur la terre1. […] De la hauteur nous descendîmes dans une gorge où s’ouvre une retraite marine (comme savaient en décrire les Anciens) à quelques flots de la mer qui viennent s’y reposer. […] Féli1 pour le même labeur ; les heures d’étude et d’épanchement poétique, qui nous mènent jusqu’au souper ; ce repas qui nous appelle avec la même douce voix et se passe dans les mêmes joies que le dîner, mais moins éclatantes, parce que le soir voile tout, tempère tout ; la soirée qui s’ouvre par l’éclat d’un feu joyeux, et, de lecture en lecture, de causeries en causeries, va expirer dans le sommeil ; à tous les charmes d’une telle journée ajoutez je ne sais quel rayonnement angélique, quel prestige de paix, de fraîcheur et d’innocence, que répandent la tête blonde, les yeux bleus, la voix argentine, les ris, les petites moues pleines d’intelligence d’un enfant qui, j’en suis sûr, fait envie à plus d’un ange, qui vous enchante, vous séduit, vous fait raffoler avec un léger mouvement de ses lèvres, tant il y a de puissance dans la faiblesse !
C’est un corps animé d’une infinité de passions différentes, qu’un homme habile fait mouvoir pour la défense de la patrie : c’est une troupe d’hommes armés qui suivent aveuglément les ordres d’un chef, dont ils ne savent pas les intentions : c’est une multitude d’âmes, pour la plupart viles et mercenaires, qui, sans songer à leur propre réputation, travaillent à celle des rois et des conquérants : c’est un assemblage confus de libertins, qu’il faut assujétir à l’obéissance ; de lâches qu’il faut mener au combat ; de téméraires, qu’il faut retenir ; d’impatients, qu’il faut accoutumer à la confiance, etc. » Malgré le respect dû au nom de Fléchier, et surtout à l’oraison funèbre de Turenne, son plus bel ouvrage, qui ne voit, dans le premier de ces deux morceaux, le véritable orateur, l’écrivain plein de son sujet ; et, dans le second, le rhéteur presque uniquement occupé du soin d’assembler et de faire contraster des mots ? […] On sait que l’art des contrastes habilement saisis et rendus heureusement, est un des grands moyens du style de Voltaire, et que personne n’a tiré parti comme lui de cette ressource, également ouverte cependant à tous les écrivains.
On sait de quelle manière Périclès s’adresse aux femmes d’Athènes dans l’oraison funèbre que lui prête Thucydide (II, 45), et, huit siècles plus tard, le rhéteur Ménandre, donnant des règles sur la manière de consoler dans une oraison funèbre, dit qu’il faut parler différemment aux hommes, aux enfants et aux fem mes, et que, pour ces dernières, il faut avoir soin d’abord « de relever un peu leur personnage par des éloges », ἵνα μὴ πρὸς φαῦλον ϰαὶ εὐτελὲς διαλέγεσθαι δοϰῇς πρόσωπον (Περὶ Ἐπιδειϰτιϰῶν, chap. […] Mais on ne sait pas à quel ouvrage se rapporte cette allusion.
La théorie n’est rien sans la pratique, nous le savons ; les poétiques et les rhétoriques ne suffiront jamais, seules, pour former un poète ou un orateur. […] Comment analyser Corneille, Racine, Molière, si l’on ne connaît pas les règles principales de l’art dramatique ; Bossuet, si l’on ne sait ce que c’est que l’éloquence ; J.
Mais si le système est dans la théorie, dans nos traités, il n’est point suivi dans la pratique, dans nos ouvrages ; le talent sait quelquefois heureusement s’affranchir des règles étroites que l’on oppose à son développement, et nous n’admirons pas moins ses succès. En effet, si vous nous donnez un bel ouvrage, où dans un style tour à tour simple, sublime et tempéré, vous nous ayez réellement attachés, et montré toutes les ressources d’un talent qui sait imiter la belle nature, ce qui est le don le plus heureux des grands peintres, que nous importe que nous ne puissions classer votre style dans un des trois genres créés par les rhéteurs ?
je croyais que vous étiez au milieu des pompes et des félicités de la cour, et je n’ai rien su de l’état où vous avez été ; personne assurément n’a osé me l’apprendre ; cette excuse est bonne pour me justifier auprès de vous ; mais elle ne me justifie pas auprès de moi, et mon cœur, qui me dit tant de belles choses de vous, devrait bien aussi me dire quand vous êtes malade. […] Je ne sais si le remède n’est point pire que le mal, et si je ne vous prierai point à la fin de me laisser ma goutte.
Nul poète n’a su mieux que lui répandre tous les trésors de la poésie, avec ce prestige de l’art, qui cache l’art même : il n’en est aucun qui offre plus de beautés de détail. […] Possédé d’un ennui qu’il ne saurait dompter, Il craint d’être à soi-même, et songe à s’éviter. […] En voici quelques vers : Je sais que du bon ton le vernis et la grâce. […] Savez-vous pour la gloire oublier le repos, Et dormir en plein champ le harnois sur le dos ? […] On y trouve encore toute la chaleur du génie, et un enthousiasme vraiment lyrique, qu’il sut toujours plier avec art aux règles du bon goût et de la raison.
Mais c’est à celui qu’un grand peuple charge de ses intérêts, à bien consulter son âme et ses forces, à se demander s’il saura s’élever au-dessus des petites passions, fronder l’opinion commune quand elle ne sera pas d’accord avec le bien général ; braver les clameurs de ce même peuple, qu’il faut quelquefois servir malgré lui, et sacrifier jusqu’à sa vie s’il le faut, plutôt que de trahir la vérité et la confiance de ses concitoyens. […] L’influence de l’orateur cesse nécessairement, du moment qu’il ne sait plus se commander à lui-même.
On ne sait pas à quelle doctrine de Xénophane il faut rapporter ces allusions. […] Au vers cité par Aristote, le texte d’Homère qui nous est parvenu porte ἄλλοι, au lieu de πάντες on sait que ce texte est le résultat d’un long travail de récension commencé à Alexandrie, postérieurement à Aristote.
Je ne sais cependant si je m’exprime bien exactement ; car au lieu d’extrême plaisir, je devrais dire2 3 douloureux plaisir ; j’ai été attendri jusqu’aux larmes par la fin de ta lettre, qui a touché la fibre la plus sensible de mon cœur. […] Il y a même, je t’assure, je ne sais quel charme secret qui naît de cette dure destinée qui m’a toujours séparé de toi ; c’est la tendresse multipliée par la compassion2.
On comprend eu effet que le style ne saurait être le même dans toutes les compositions : aussi devons-nous distinguer trois espèces de genres : le simple, le tempéré et le sublime. […] Ma fille, vous souhaitez que le temps marche ; vous ne savez ce que vous faites, vous y serez attrapée ; il vous obéira trop exactement, et quand vous voudrez le retenir, vous n’en serez plus la maîtresse. […] Il évite une église déserte et solitaire où il pourrait entendre deux messes de suite, le sermon, vêpres et compiles, tout cela entre Dieu et lui, et sans que personne lui en sût gré. […] La nature travaille sur un plan éternel, avec une sage lenteur, et sait ainsi donner la perfection à ses œuvres. […] Ces écrivains n’ont point de style, ou, si l’on veut, ils n’en ont que l’ombre : le style doit graver des pensées ; ils ne savent que tracer des paroles.
Les bornes qu’il leur a prescrites Sauront toujours les resserrer : Son doigt a tracé les limites Où leur fureur doit expirer. […] L’émotion que la grandeur ou la noblesse d’un objet excite dans notre âme, l’élève au-dessus d’elle-même, et produit je ne sais quel enthousiasme qui nous charme tant qu’il existe ; mais l’âme ne se maintient pas longtemps à ce haut point d’élévation, et elle tend naturellement à retomber dans son état ordinaire. […] Ton esprit qui se livre à des frayeurs si fortes, Se les reprocherait s’il savait qui tu portes.
Souvent on a loué la richesse d’imagination et de savoir qui se montre dans ce dernier ouvrage : on peut dire qu’aucun, dans le dix-huitième siècle, ne renferme plus de vues justes et fécondes, de principes vrais et lumineux, et plus de ces pensées efficaces, susceptibles de se réaliser par des applications pratiques1. […] On allait au temple pour demander les faveurs des dieux : ce n’était1 pas les richesses et une onéreuse abondance ; de pareils souhaits étaient indignes des heureux Troglodites ; ils ne savaient les désirer que pour leurs compatriotes ; ils n’étaient au pied des autels que pour demander la santé de leurs pères, l’union de leurs frères, l’amour et l’obéissance de leurs enfants. […] Vous savez que pour lors vous pourrez contenter votre ambition, acquérir des richesses et languir dans une lâche volupté, et que, pourvu que vous évitiez de tomber dans les grands crimes, vous n’aurez pas besoin de la vertu. » Il s’arrêta un moment, et ses larmes coulèrent plus que jamais. « Et que prétendez-vous que je fasse ?
Savoir sa valeur, et ne pouvoir l’imposer que par accident et surprise, entendre murmurer autour de soi le nom de Catilina, quand on aborde la tribune avec le courage d’un bon sens supérieur et convaincu ; subir des résistances occultes, sous lesquelles se cache l’injure d’un mépris anonyme ; rendre la vérité suspecte, parce qu’on en est l’interprète : telle fut l’expiation sous laquelle il courba la tête jusqu’au dernier jour, tantôt exaspéré par d’injustes outrages, tantôt abattu par le sentiment de son impuissance. […] Je conjure celui qui répond oui de considérer que son plan n’est pas connu ; qu’il faut du temps pour le développer, l’examiner, le démontrer ; que, fût-il immédiatement soumis à notre délibération, son auteur peut se tromper ; que, fût-il exempt de toute erreur, on peut croire qu’il ne l’est pas ; que, quand tout le monde a tort, tout le monde a raison ; qu’il se pourrait donc que l’auteur de cet autre projet, même ayant raison, eût tort contre tout le monde, puisque, sans l’assentiment de l’opinion publique, le plus grand talent ne saurait triompher des circonstances. […] Se mêlant familièrement avec les hommes, juste quand il fallait l’être, il avait applaudi au talent naissant de Barnave, quoiqu’il n’aimât pas ses jeunes amis ; il appréciait l’esprit profond de Sieyès, et caressait son humeur sauvage ; il redoutait dans Lafayette une vie trop pure ; il détestait dans Necker un rigorisme extrême, une raison orgueilleuse, et la prétention de gouverner une révolution qu’il savait lui appartenir.
Mais nous savons par l’histoire que dans ces temps reculés, les rois s’envoyaient par défi ces sortes de problèmes à résoudre, et qu’ils donnaient de grandes récompenses à ceux qui avaient le talent de le faire. […] Grandeur, savoir, renommée, Amitié, plaisir et bien, Tout n’est que vent, que fumée ; Pour mieux dire, tout n’est rien. […] Ces règles sont exprimées dans ce triolet même, qu’on attribue à Scarron : Pour faire un bon triolet, Il faut observer ces trois choses Savoir, que l’air en soit follet, Pour faire un bon triolet ; Qu’il entre bien dans le rôlet, Et qu’il tombe au milieu des pauses ; Pour faire un bon triolet, Il faut observer ces trois choses. […] Le nœud que vous allez former, Ne saurait être trop durable : L’Hymen fait un devoir d’aimer ; L’Amour rend ce devoir aimable.
On dira, par exemple : les lois qu’on n’a pas su maintenir, et qui devaient être maintenues ; au lieu de dire simplement, et qui devaient l’être. […] On dira donc : je ne suis pas surpris de la justice que vous ont rendue vos juges. = Vous savez les peines que m’a données cette affaire. […] Pas et point ne doivent jamais être employés après le verbe savoirpris dans le sens de pouvoir : = je ne saurais en venir à bout, pour, je ne puis en venir à bout. […] Je ne sai qui m’arrête ; que je ne coure forment encore un gallicisme. […] Nous ne prétendons alors que marquer un temps précis, et une seule de ces heures, savoir la sixième, qui est l’objet de notre pensée.
Un véritable poète sait le porter avec grâce. […] On peut avoir l’un sans l’autre, je le sais ; mais les vrais favoris de la nature les réunissent. » Il faut donc revenir à la définition de l’Académie, qui est en même temps celle de la raison et de l’opinion générale, et dire que la poésie est l’art de composer des ouvrages en vers, et que ces ouvrages en vers sont les seuls qu’on doive appeler des poèmes.
Mais c’est précisément parce que la métaphore est commune par elle-même, qu’il faut savoir la choisir et la placer avec goût. […] Sur le vaisseau public ce pilote égaré (Cicéron) Présente à tous les vents un flanc mal assuré : Il s’agite au hasard, à l’orage il s’apprête, Sans savoir seulement d’où viendra la tempête. […] ) Vous savez qu’on s’en peut reposer sur ma foi ; Que ces portes, seigneur, n’obéissent qu’à moi. […] Où se présentait-elle plus naturellement encore, que dans le tableau moral de l’homme, qui n’est, comme l’on sait, qu’un composé bizarre de tous les extrêmes réunis ? […] Quelque harmonieux, quelque beaux que soient ces vers, qui prouvent à quel point de douceur et de flexibilité le grand poète que nous venons de citer avait su réduire l’âpreté naturelle de la langue anglaise, qu’il y a loin encore de cette description à la molle facilité de ces vers du Tasse, où Homère est si heureusement imité !
S’il n’est ni dialecticien comme Bourdaloue, ni sublime et pathétique comme Bossuet, il a de l’onction, il est insinuant, il connaît intimement le cœur humain, met la passion aux prises avec la foi, et sait dire aux grands de courageuses vérités. […] Un seul jour perdu devrait nous laisser des regrets mille fois plus vifs et plus cuisants qu’une grande fortune manquée ; et cependant ce temps si précieux nous est à charge ; toute notre vie n’est qu’un art continuel de le perdre ; et, malgré toutes nos attentions à le dissiper, il nous en reste toujours assez pour ne savoir encore qu’en faire ; et cependant la chose dont nous faisons le moins de cas sur la terre, c’est de notre temps ; nos offices, nous les réservons pour nos amis ; nos bienfaits, pour nos créatures ; nos biens, pour nos proches et pour nos enfants ; notre crédit et notre faveur, pour nous-mêmes ; nos louanges, pour ceux qui nous en paraissent dignes ; notre temps, nous le donnons à tout le monde, nous l’exposons, pour ainsi dire, en proie à tous les hommes : on nous fait même plaisir de nous en décharger ; c’est comme un poids que nous portons au milieu du monde, cherchant sans cesse quelqu’un qui nous en soulage. […] Une démarche où la circonspection la plus attentive devrait encore craindre de se méprendre est toujours l’ouvrage des amusements et des goûts puérils de l’enfance : à peine commence-t-on à bégayer, qu’on décide déjà de l’affaire la plus sérieuse de la vie ; et ces paroles irrévocables qui prononcent sur notre destinée sont les premières qu’on nous apprend à former, avant même qu’on nous ait appris à les entendre ; on accoutume de loin notre esprit naissant à ces images suggérées ; le choix d’un état n’est plus qu’une impression portée de l’enfance ; ainsi, avant que nos penchants soient développés, et que nous sachions ce que nous sommes, nous nous formons des engagements éternels, et arrêtons ce que nous devons être pour toujours.
Cette règle trop négligée, et que les savants mêmes, en titre d’office, devraient observer jusqu’à un certain point, est celle-ci : Cache ton savoir. […] » Je fais mon devoir à merveille, et je sais vous en amuser ; je me joue avec votre hermine, j’égaye votre royauté. […] Et remarquez ceci, Monseigneur : celui qui sait rire avec vous de ses occupations et des vôtres est un homme grave, et même austère ; celui qui se joue avec vos dignités est l’homme qui attache le plus d’importance à votre rang, à vos fonctions, et qui les respecte le plus dans son esprit et dans son cœur ; enfin l’homme qui vous contredit le plus souvent est celui qui a pour vous, en secret, le faible le plus décidé ; l’homme qui vous est le moins asservi est aussi celui qui vous est le plus dévoué.
La pitié est un mouvement charitable et généreux, une tendresse de cœur, dont tout le monde se sait bon gré…. […] En effet, ni le mètre, ni les figures, ni la pompe du style, ni la justesse des métaphores, ni l’harmonie, ni le nombre ne sauraient avoir autant de douceur et de grâce qu’une fable bien conduite.
Villon sut le premier, dans ces siècles grossiers, Débrouiller l’art confus de nos vieux romanciers, etc. […] Le début manque à cette pièce, qui est de 1604 : elle n’a pas été achevée. — On sait que l’Orne est une rivière qui coule auprès de Caen, et l’on doit penser que Malherbe déplore ici la perte d’un de ses compatriotes.
Le calife répond qu’il le savait : pour de fausses louanges il leur a donné de faux diamants. […] – Je le savais, répond Ariste, et je veux t’obliger à ne plus jouer. […] Colomb se montre inflexible jusqu’au moment où il sait que l’éclipse va finir ; alors il pardonne. […] On la tirait, à grands frais, d’un pays lointain dont on ne savait pas même le nom. […] Delmance ne sait comment interpréter le trouble affreux qui agite Flavio ; mais son âme loyale est bien loin de soupçonner le crime qui se prépare.
Toutefois, leur importance a bien diminué chez les modernes ; la réflexion, la sagacité personnelle et le savoir sont les sources les plus fécondes de l’invention. […] Tu ne saurais cacher sa peine à sa victoire : etc. […] les beaux vers, mais je ne sais pourquoi je baille en les lisant ! […] ne puis-je savoir si j’aime ou si je hais ! […] Le Père de famille par Diderot, — Le Philosophe sans le savoir de Sedaine, etc.
On sait tous les obstacles qu’il eut à vaincre, et tous les efforts qu’il fit pour corriger, assouplir, perfectionner son organe, et pour rendre son action oratoire digne de sa composition. On sait qu’il s’enferma dans un souterrain, pour étudier avec moins de distraction ; qu’il allait déclamer sur le bord de la mer, pour s’exercer à haranguer ensuite devant le peuple.
En effet, dit-il, le jeune orateur qui saura se pénétrer du génie de Bossuet, sentir, penser, s’élever avec lui, n’aura pas besoin de se dessécher sur les préceptes des rhéteurs, pour se former à l’éloquence. […] La chair changera de nature, le corps prendra un autre nom ; même celui de cadavre ne lui demeurera pas longtemps : il deviendra, dit Tertullien, un je ne sais quoi qui n’a plus de nom dans aucune langue.
Que le cœur en soit épris ; que l’amour en devienne plus actif, à mesure que la connaissance en devient plus parfaite ; que la mémoire vous redise tous les jours : ceux qui nous l’ont acquise, sensibles au cri de l’honneur, à la voix de l’opinion, savaient braver les dangers. […] » Aussi ne sont-ce pas des pleurs, mais des consolations et une leçon que j’offre maintenant aux pères des guerriers dont nous célébrons la mémoire : ils savent que leurs fils naquirent soumis aux viscissitudes de la fortune.
On connaît le parallèle de Pierre Ier et du roi de Suède, par Voltaire ; on sait que c’est un des morceaux brillants de l’histoire de Charles XII. […] Ainsi, quoiqu’il y ait des principes généraux, dont on ne saurait trop recommander l’observation, il se trouve néanmoins dans le style, comme partout ailleurs, des beautés et des défectuosités purement relatives : c’est à les distinguer que s’attache la saine critique, et à les sentir que le goût doit s’exercer.
On sait combien elles furent stériles ; toutefois Massillon mourut avant que la sagesse du cardinal de Fleury eût cessé d’être un frein pour ce prince : il n’eut pas la douleur de voir les désordres scandaleux qui signalèrent la seconde partie de son règne. […] Il sut accorder une politique profonde avec une justice exacte ; et peut-être est-il le seul souverain qui mérite cette louange : prudent et ferme dans le conseil, intrépide dans les combats sans être emporté, compatissant comme s’il n’avait jamais été que malheureux.
L’ambition L’ambition montre à celui qu’elle aveugle, pour terme de ses poursuites, un état florissant où il n’aura plus rien à désirer, parce que ses vœux seront accomplis, où il goûtera le plaisir le plus doux pour lui, et dont il est le plus sensiblement touché ; savoir, de dominer, d’ordonner, d’être l’arbitre des affaires et le dispensateur des grâces, de briller dans un ministère, dans une dignité éclatante ; d’y recevoir l’encens du public et ses soumissions ; de s’y faire craindre, honorer, respecter. […] Ce qui fit un héros du prince de Condé J’appelle le principe de ces grands exploits cette ardeur martiale qui ; sans témérité ni emportement, lui faisait tout oser et tout entreprendre ; ce feu qui, dans l’exécution, lui rendait tout possible et tout facile ; cette fermeté d’âme que jamais nul obstacle n’arrêta, que jamais nul péril n’épouvanta, que jamais nulle résistance ne lassa, ni ne rebuta ; cette vigilance que rien ne surprenait ; cette prévoyance à laquelle rien n’échappait ; cette étendue de pénétration avec laquelle, dans les plus hasardeuses occasions, il envisageait d’abord tout ce qui pouvoit ou troubler, ou favoriser l’événement des choses : semblable à un aigle dont la vue perçante fait en un moment la découverte de tout un vaste pays ; cette promptitude à prendre son parti, qu’on n’accusa jamais en lui de précipitation, et qui, sans avoir l’inconvénient de la lenteur des autres, en avait toute la maturité ; cette science qu’il pratiquait si bien, et qui le rendait si habile à profiter des conjonctures, à prévenir les desseins des ennemis presque avant qu’ils fussent conçus, et à ne pas perdre en vaines délibérations ces moments heureux qui décident du sort des armées ; cette activité que rien ne pouvait égaler, et qui, dans un jour de bataille, le partageant, pour ainsi dire, et le multipliant, faisait qu’il se trouvait partout, qu’il suppléait à tout, qu’il ralliait tout, qu’il maintenait tout : soldat et général tout à la fois, et, par sa présence, inspirant à tout le corps d’armée, jusqu’aux plus vils membres qui le composaient, son courage et sa valeur, ce sang-froid qu’il savait si bien conserver dans la chaleur du combat, cette tranquillité dont il n’était jamais plus sûr que quand on en venait aux mains, et dans l’horreur de la mêlée ; cette modération et cette douceur pour les siens, qui redoublaient à mesure que sa fierté pour l’ennemi était émue ; cet inflexible oubli de sa personne, qui n’écouta jamais la remontrance, et auquel constamment déterminé, il se fit toujours un devoir de prodiguer sa vie, et un jeu de braver la mort ; car tout cela est le vif portrait que chacun de vous se fait, au moment que je parle, du prince que nous avons perdu ; et voilà ce qui fait les héros1.
Les actions feintes sont celles qui ne sont pas arrivées, ou que nous ne savons pas être arrivées réellement ; mais il faut qu’elles aient pu arriver, c’est-à-dire qu’il n’y ait rien dans ce qu’on nous en montre ou qu’on nous en dit qui se contredise assez pour empêcher l’action d’être. […] Nous savons déjà que l’esprit n’admet pas avec plaisir deux actions différentes qui distraient son attention et empêchent l’intérêt. […] Le meilleur moyen, mais le plus difficile, c’est que l’action s’expose d’elle-même et en se faisant ; que le poète sache adroitement fixer le lieu où se fait l’action, l’heure à laquelle elle commence ; qu’il détaille tout son plan, caractérise ses acteurs, et le tout en agissant. […] L’auteur dramatique évitera donc tout ce qui peut sentir l’art ou la déclamation, savoir : 1º. […] Racine sut éviter tous ces défauts, et devint le plus parfait modèle des poètes tragiques.
On ne saurait trop se remplir de ces pensées et de ces sentiments, dans l’âge où vous êtes, mon cher fils. […] Sainte-Beuve, quelle science, quelle langue et quelle littérature d’Aguesseau ne savait pas.
Mais qu’au lieu du mot Dieu, Bossuet dise avec sa parole magnifique : « Celui qui règne dans les cieux et de qui relèvent tous les empires, à qui seul appartient la gloire, la majesté et l’indépendance, » il explique par cette périphrase comment et pourquoi Dieu « est aussi le seul qui se glorifie de faire la loi aux rois, et de leur donner, quand il lui plaît, de grandes et de terribles leçons. » Que Racine désigne Dieu par ces mots : Celui qui met un frein à la fureur des flots, nous concluons du plus au moins ou du même au même que celui-là Sait aussi des méchants arrêter les complots. […] « Quand, dans un discours, dit avec raison Pascal, on trouve des mots répétés, et qu’essayant de les corriger, on les trouve si propres, qu’on gâterait le discours, il faut les laisser ; c’en est la marque, et c’est la part de l’envie qui est aveugle, et qui ne sait pas que cette répétition n’est pas faute en cet endroit : car il n’y a point de règle générale. » Au lieu de répéter le mot, souvent on répète l’idée, en accumulant soit des idées semblables, ce que les rhéteurs appellent expolition, soit les divers signes qui expriment la même idée, ce qu’ils nomment synonymie ou métabole. […] Elle ne sait pas toujours éviter la dureté, l’obscurité et le solécisme.
quel frein contiendrait un vulgaire indocile Qui sait, grâce aux docteurs du moderne évangile, Qu’en vain le pauvre espère en un Dieu qui n’est pas, Que l’homme tout entier est promis au trépas ? […] Allusion à ce début de l’épître de Voltaire à Boileau : Boileau, correct auteur de quelques bons écrits… Mais on sait qu’un autre jour Voltaire, mieux inspiré, a prononcé un mot dont eût dû profiter Marmontel : « Ne disons pas de mal de Nicolas (c’était le prénom de l’illustre satirique) : cela porte malheur. » 2.
Nous savons déjà que ce style diffère de la prose dans sa constitution grammaticale69 : il en diffère aussi par le choix des pensées et des expressions. […] Les petits poèmes modernes, c’est-à-dire cultivés par les poètes modernes, savoir, les apologues, idylles, épîtres, satires, contes en vers et odes, qui, bien que de genre ou de caractère différents, se ressemblent en ce point qu’ils ne sont pas divisés en plusieurs parties.
Il a de l’onction, il est insinuant, il connaît intimement le cœur humain, met la passion aux prises avec la foi, et sait dire aux grands de courageuses vérités. […] Un seul jour perdu devrait nous laisser des regrets mille fois plus vifs et plus cuisants qu’une grande fortune manquée ; et cependant ce temps si précieux nous est à charge ; toute notre vie n’est qu’un art continuel de le perdre, et, malgré toutes nos attentions à le dissiper, il nous en reste toujours assez pour ne savoir encore qu’en faire ; et cependant la chose dont nous faisons le moins de cas sur la terre, c’est de notre temps ; nos offices, nous les réservons pour nos amis ; nos bienfaits, pour nos créatures ; nos biens, pour nos proches et pour nos enfants ; notre crédit et notre faveur, pour nous-mêmes ; nos louanges, pour ceux qui nous en paraissent dignes ; notre temps, nous le donnons à tout le monde, nous l’exposons, pour ainsi dire, en proie à tous les hommes ; on nous fait même plaisir de nous en décharger : c’est comme un poids que nous portons au milieu du monde, cherchant sans cesse quelqu’un qui nous en soulage.
Ne me conduisez pas : j’en sais toutes les routes ; Parmi ces bois grandis, je les retrouve toutes ; J’irais, fermant les yeux, et, si rien n’est changé, Au bout du chemin creux de hêtres ombragé, Le château va paraître. […] La république tout entière Est assise sur un rocher, Et l’on n’en saurait approcher Sans escalader la frontière.
On ne peut donc que féliciter l’élève qui aura su comprendre et digérer un enseignement si complet et si solide, et nous ne doutons pas que les professeurs eux-mêmes ne soient heureux de profiter de l’expérience d’un collégue, qui met à leur disposition un aussi riche fond d’études personnelles. On doit savoir un gré particulier à l’auteur d’avoir disposé les matières de son enseignement dans un ordre parfaitement logique, et d’avoir posé toujours ses définitions avec une clarté parfaite.
Dans les passions, comme dans les mœurs, l’écrivain doit s’étudier d’abord ; mais comme il n’est pas absolument nécessaire, pour peindre ou inspirer la passion, de l’éprouver ou de l’avoir éprouvée soi-même, et qu’il suffit de la bien comprendre, il doit l’étudier aussi dans les autres, dans les assemblées publiques, dans la société intime, enfin, dans les écrivains qui ont su le mieux la traiter. […] Presque tous les sujets sont susceptibles de passion, mais il faut savoir préparer la passion, ne pas en abuser et l’éviter là où elle serait déplacée. […] L’interrogation, où l’on s’enquiert de ce que l’on sait fort bien.
Les romans continus ou suivis sont ceux où l’auteur se pose tout simplement comme narrateur, et raconte ce qu’il sait ou qu’il a appris s’être passé. […] dit le père en apostrophant son fils qui ne saurait l’entendre, combien de fois t’ai-je exhorté à renoncer au jeu !
On ne saurait le classer en aucun genre. […] Dans un dialogue qui rappelle Monsieur de Crac, la comédie de Collin d’Harleville, d’Aubigné le met aux prises avec un protestant de vieille roche, modèle de valeur, de désintéressement, de savoir et de patriotisme.
La paresse, terme abstrait, ne peut avoir de visage, elle ne saurait être engourdie. […] Quand Virgile a dit : Pedibus timor addidit alas, la frayeur a donné des ailes à ses pieds, il a fait une figure ; car les pieds ne sauraient avoir des ailes.
On ne saurait trop y montrer l’intérêt qu’on prend à la personne pour laquelle on demande quelque chose, ni trop appuyer sur ses talents ou ses vertus. […] Vous m’allez demander comment le feu s’était mis à cette maison ; on n’en sait rien ; il n’y en avait point dans l’appartement où il a pris.
S’il a trop manqué de ces vertus civilisées qui décorent la bravoure dans un Catinat, il sut se faire aimer du soldat, et lui « mettre des ailes au talon, du cœur au ventre ». […] Or, mes amis, montrés-leur ce que vous savez faire, et s’ilz frappent ung coup, donnés-en quatre.
Il est le premier qui ait su développer un talent original dans une œuvre de science laborieuse, sans perdre le charme du naturel, et sans l’étouffer sous l’artifice, comme fit Ronsard. […] Sus, adverbe, vient de susum, et a le sens d’en haut.
Mais si nous ne connaissons pas ceux qui lui appartiennent, nous savons du moins que les pécheurs ne lui appartiennent pas. […] c’est un malheur de leur rang, que souvent avec plus d’innocence que nous, ils ne sauraient jouir, comme nous, de l’impunité d’un seul de leurs vices.
Que m’importe, dit l’auteur113 que j’ai déjà cité, de savoir si Annibal avait les dents bêtes. pourvu que son historien me fasse connaître la grandeur de son génie ; qu’il me montre un esprit hardi, inquiet, des pensées vastes, un cœur intrépide, et tout cela animé d’une ambition désordonnée, mais soutenue d’une constitution robuste, comme l’a dépeint Tite-Live. […] Je dois remarquer ici que les militaires ne sauraient lire avec trop de réflexion Thucydide, Xénophon et Polybe. […] Il y a peu d’historiens, parmi même ceux qui écrivent le mieux, qui aient plus de savoir et plus d’exactitude que lui ; qui aient l’adresse d’attacher le lecteur autant qu’il fait ». […] Les portraits, les réflexions, les remarques donnent un nouveau prix à cet ouvrage si souvent réimprimé, et qu’on ne saurait trop relire.
Dans nos plaidoyers modernes, qui ne sont le plus souvent que des discussions arides, où le sentiment ne saurait être pour rien, la péroraison doit uniquement consister dans le résumé clair et rapide de la cause. […] Mais dans l’un ou l’autre cas, il faut savoir s’arrêter à propos, et dans le dernier principalement ; car, suivant la remarque du rhéteur Apollonius, citée par Cicéron et Quintilien, rien ne sèche si vite que les larmes : nec sine causâ dictum est nihil faciliùs quàm lacrymas inarescere .
Ce qui attire assez souvent je ne sais quoi d’odieux sur les actions des ministres, même les plus nécessaires, c’est que pour les faire ils sont presque toujours obligés de surmonter des obstacles dont la victoire ne manque jamais de porter avec elle de l’envie et de la haine. […] On sait, en effet, que de Retz, avancé en âge, répara par une conduite sage et appliquée à la piété les fautes de sa jeunesse.
Il n’y a point de cabinets4 si mystérieux qu’ils ne prétendent pénétrer ; ils ne sauraient consentir à ignorer quelque chose. […] Un nouvelliste parla du bombardement du château de Fontarabie4, et il nous donna soudain les propriétés de la ligne que les bombes avaient décrire en l’air ; et, charmé de savoir cela, il voulut en ignorer entièrement5 le succès.
Sans revenir sur l’importance de ce choix, nous ferons remarquer avec d’Aguesseau, qu’on ne saurait se proposer des modèles trop purs et trop parfaits, quand on veut arriver soi-même à la perfection. […] Qu’il nous suffise de dire sur ce point que pour bien traduire une langue, ce n’est pas assez de la savoir, mais qu’il faut encore manier habilement la sienne ; et que si une bonne traduction demande la précision, la clarté, la pureté et l’élégance, son vrai mérite consiste surtout dans la fidélité, qui fait qu’on n’altère en rien ni la pensée de l’écrivain, ni le génie de la langue.
Ce sentiment est fondé sur le témoignage de Pline, qui dit que les habitans de la Phrygie (contrée de l’Asie mineure, où fut bâtie la ville de Troie) surent atteler à un char deux chevaux, et Erichthon, quatre de front.
Nous venons d’entendre le grand orateur : écoutons maintenant le publiciste consommé établir avec autant de justesse que de profondeur les principes constitutifs des états ; et que les jeunes gens, qui ont si longtemps entendu déraisonner sur ces grandes questions de politique, apprennent enfin à fixer leurs idées, non d’après les sophistes modernes, mais d’après l’homme de l’antiquité qui a su le mieux, peut-être, joindre le grand art de bien écrire à l’art non moins difficile de penser toujours juste. […] Ces patriotes-là, sans doute, ne prêchent point l’athéisme avec une grossière impudeur ; ils savent trop ce qu’on doit de respect à la religion du pays ; ils ne gravent point sur la pierre sépulcrale que la mort est un sommeil éternel, persuadés qu’avec cette morale-là on ne fait que des brigands : ils ne proscrivent point par milliers leurs propres concitoyens.
Geruzez, les fleurs plaisent à l’ignorant comme au botaniste par leur parfum et l’éclat de leurs couleurs ; mais le naturaliste qui sait leurs noms, qui connaît leurs familles, les retrouve comme de vieilles connaissances avec un sentiment qui tient de l’amitié. […] « Métaphore, allégorie, métonymie, ce sont, dit Montaigne, titres qui touchent le babil de votre chambrière. » Selon Quintilien, en effet, le style figuré, et surtout la partie de ce style qui se rattache à la similitude, nous est si naturel, que les ignorants eux-mêmes en font un fréquent usage sans le savoir : translatio ita est ab ipsa nobis concessa natura, ut indocti quoque ac non sentientes ea frequenter utantur 97 D’où vient donc que le style figuré se présente ainsi tout à la fois comme naturel et comme opposé à la nature ?
Je le loue, et je sais qu’il n’est pas sans mérite ; Mais, près de ces grands noms, notre gloire est petite. […] Je la mangeai sans le su de mon maître : En ce faisant l’offensai grandement, Dont je requiers pardon très-humblement, N’espérant plus telle faute commettre… 1.
On le trouvera reproduit à la suite des Extraits des Problèmes, et nous espérons que le lecteur nous saura gré de cette utile addition.
La dernière édition de ce Traité d’élégance et de versification latine, malgré l’accueil favorable qu’a daigné lui faire un public judicieux et impartial, dont nous honorons beaucoup le savoir et l’expérience, renfermait encore des imperfections qu’il nous importait de faire disparaître.
On sait qu’il y avait aussi une ville de Mégare en Sicile.
Il exige deux précautions. 1° Il faut préparer l’esprit à l’accueillir ; car s’il est trop brusque, il surprend, déconcerte et laisse le lecteur peu satisfait ; mais le préparer n’est pas l’annoncer : en ce dernier cas, on détruirait l’intérêt ; 2° Il faut savoir s’arrêter à temps ; après un dénouement annoncé, il faut laisser l’esprit réfléchir sur les suites du fait, et se contenter, si l’on veut, d’une courte réflexion. […] Il les présente de façon à produire une vive impression, il entre dans des détails intéressants, il sait joindre à chaque idée générale toutes les idées accessoires qu’elle fait naître, il rend par ce moyen une preuve palpable, sans recourir aux mots inutiles.
Le chant est aussi souvent la marque de la tristesse que de la joie : l’oiseau qui a perdu ses petits chante encore ; c’est encore l’air du bonheur qu’il redit, car il n’en sait qu’un ; mais, par un coup de son art, le musicien n’a fait que changer la clef 1 et la cantate du plaisir est devenue la complainte de la douleur. […] La grandeur, l’étonnante mélancolie de ce tableau, ne sauraient s’exprimer dans les langues humaines ; les plus belles nuits en Europe ne peuvent en donner une idée.
C’est ainsi que, dans les vers suivants, Virgile a su rassembler, conformément au véritable esprit de la poésie pastorale, autant d’images qu’il était possible d’en offrir des plaisirs de la vie champêtre. […] Par conséquent, point de ces dialogues sans objet et quelquefois sans suite, point de ces personnages qui ne savent à quel propos ils commencent, ils continuent on ils finissent de parler.
Les premiers éléments ne sauraient être trop simplifiés.
On sait que les jeunes gens en sont avides : ils les dévorent, quand ils sont bien choisis.
Dans ta brutale fureur tu te tournes contre toi-même, et tu ne sais comment assouvir ta rage impuissante. […] Joad lui répond : Celui qui met un frein à la fureur des flots, Sait aussi des méchants arrêter les complots. […] On sait que la meilleure traduction d’un ouvrage n’en est qu’une copie imparfaite.
On sait d’ailleurs, du moins en France, que notre confrère a étudié avec le même soin les textes de la Rhétorique, de la Politique et des Météorologiques d’Aristote.
La personne qui cause avec le plus de charme est celle qui sait le mieux enchaîner ses idées et celles des autres par des transitions naturelles.
S'il en était ainsi, la langue latine ne saurait offrir de sérieuses difficultés ; car enfin, ces règles de grammaire, que l’on a beaucoup trop multipliées, peuvent se réduire à un petit nombre ; et, si on les étudie avec méthode, il sera facile de les apprendre en peu de temps ; puis, avec un peu d’attention et de discernement, on viendra facilement à bout de les appliquer d’une manière convenable.
. — Ce qui est remarquable ici, c’est qu’Aristote semble ne pas savoir que les poëmes d’Homère aient jamais été chantés.
Ce qui me distingue de Pradon, disait Racine, c’est que je sais écrire.
Après tout, il respecta sincèrement les vérités universelles qui sont la conscience même ; et, s’il faut se défier de son indolence trop voluptueuse, s’il ne convient pas de le suivre comme le meilleur des guides, on peut lui savoir gré d’avoir fait bonne guerre à l’orgueil des docteurs infatués. […] Il faut comprendre : « Je suis d’autant plus disposé à tout autre amusement, si léger qu’il soit, que mes livres, étant sous ma main, ne sauraient me faire défaut, en cas d’ennui. » 6.
Mais je ne saurais trop répéter que le romancier doit toujours présenter la vertu sons des couleurs favorables et attrayantes, la faire respecter, la faire aimer dans le sein même des plus affreux malheurs et des plus humiliantes disgrâces ; qu’il doit peindre le vice sous les couleurs les plus noires et les plus propres à inspirer l’horreur qu’il mérite, fût-il monté au faîte des honneurs, et parvenu au comble de la plus brillante prospérité.
C’est là ce qui manque aux animaux, bien plus que l’intelligence, dont on ne saurait dire qu’ils soient absolument dépourvus.
Ainsi, il n’y a point de césure au cinquième pied du vers suivant25 : Os homi | ni su | blime de | dit, cœ | lumque tu | eri.
On sait que les siècles d’ignorance ont été des siècles de barbarie, où la grossièreté des mœurs a enfanté les crimes les plus atroces, et les vices les plus monstrueux.
. — Je plains ces misères cachées que la crainte d’êtres connues rend plus pesantes1 Un homme aimable Étes-vous bien aise de savoir, mon cher ami, ce que le monde appelle quelquefois un homme aimable ?
Mais le péril ou la douleur ne saurait être la source unique du sublime.
On ne sait pas par quel auteur elle avait été traitée, ni même si le mot Πτωχεια en est le titre ou en indique seulement le sujet.
C’est qu’il a su tellement s’identifier avec tous les sujets, les revêtir d’un caractère et d’un style tellement inimitables, qu’il est arrivé à personnifier la fable en lui-même.
Cet exercice est des plus importants, et on ne saurait trop le recommander au zèle des professeurs.
Ces développements nous ont paru d’une utilité réelle, et nous sommes plus que jamais convaincu de leur importance, lorsque nous recevons d’un professeur distingué, dont les savants ouvrages sont connus dans toute la France, ces encouragements bienveillants : « Je vous félicite d’avoir compris que les abrégés ne profitent qu’à ceux qui les font, et vous avez sagement fait de donner aux préceptes un juste développement qui les fait bien comprendre. » Un autre juge également compétent voulait bien nous faire savoir, après avoir soigneusement examiné notre Poétique, qu’il se plaisait à reconnaître tout le mérite et toute la conscience de ce livre.