Vous voulez prouver par le dilemme que Dieu a créé le monde parfait en son espèce : — « Majeure : Si Dieu n’a pas créé le monde parfait, cela ne peut venir que d’un défaut de volonté ou d’un défaut de puissance ; — Mineure : mais cela ne vient ni d’un défaut de volonté, car alors il serait méchant, c’est-à-dire il ne serait pas Dieu ; ni d’un défaut de puissance, car alors il serait impuissant, c’est-à-dire encore il ne serait pas Dieu ; — Conclusion : donc il a créé le monde parfait en son espèce. » Je passe d’autres espèces d’arguments ; ce livre n’est pas un traité de logique ; mais ce peu de mots peut suffire, ce me semble, à établir le principe et les modes les plus ordinaires de la logique formelle.
Tout le reste, la visite à l’île, la colonisation de l’île, les combats contre les sauvages, les voyages en Chine et en Tartarie, c’est-à-dire au moins la moitié du livre, ne présente plus ni intérêt, ni originalité, ni rapport avec l’idée fondamentale ; et quand enfin l’auteur s’arrête, on ne sait pas pourquoi il le fait ; il n’a aucun motif pour ne pas continuer, pour ne pas ajouter autant de volumes qu’en peut admettre un voyage autour du monde. […] Le poëte avait à peindre le monde tel qu’il est ; or, dans le monde, l’astuce, l’égoïsme, l’impudence triomphent presque toujours de la bonne foi obstinée et maladroite.
Vieillards, vous aimerez à retrouver dans les livres de morale le tableau du monde où vous aurez joué votre rôle et le souvenir affaibli des agitations de votre cœur. […] Il veut connaître son origine, sa fin, les lois cachées du monde extérieur, et ce n’est plus aux poëtes, mais aux savants et aux sages qu’il demande l’explication de ces mystères. […] Mêlez-vous au monde, voyez des gens de tout métier, de toute profession.
Vous m’eussiez vu dans les plus effrayantes montagnes du monde, au milieu de douze ou quinze hommes les plus horribles que l’on puisse voir, et qui ont chacun deux ou trois balafres sur le visage et deux pistolets et deux poignards à la ceinture : ce sont les bandits qui vivent dans les montagnes des confins du Piémont et de Gênes. […] Il suffit de rappeler à l’honneur de ce salon les paroles suivantes de Saint-Simon : « Cette académie de beaux esprits, de vertu et de science, était le rendez-vous de ce qu’il y avait de plus distingué en condition et en mérite, un tribunal avec qui il fallait compter, et dont la décision avait grand poids dans le monde sur la conduite et la réputation des personnes, autant que sur les ouvrages qui s’y portaient à l’examen. » On peut voir les Mémoires de Dangeau, édit. de Lemontey, au 10 mai 1690.
Soyez désormais en garde contre les louanges ; défiez-vous des gens que vous ne connaîtrez point6Vous en pourrez rencontrer d’autres qui voudront, comme moi, se divertir de votre crédulité, et peut-être pousser les choses encore plus loin ; n’en soyez point la dupe, et ne vous croyez point, sur leur parole, la huitième merveille du monde. » En achevant ces mots, il me rit au nez et s’en alla. […] Les anciens comptaient sept merveilles du monde : 1° les jardins suspendus et les murs de Babylone ; 2° les pyramides de l’Égypte ; 3° le phare d’Alexandrie ; 4° le colosse de Rhodes ; 5° le Jupiter olympien de Phidias ; 6° le temple de Diane à Éphèse ; 7° le tombeau de Mausole, roi de Carie.
Aussi bien, ce que nous faisons ainsi à nous seuls, toute l’histoire moderne nous en est témoin, nous le faisons pour le monde, et si nous nous manquons à nous-mêmes, c’est au monde que nous aurons manqué2.
Exemple : Tout l’univers est plein de l’esprit du monde ; on juge selon l’esprit du monde ; on agit et on se gouverne selon l’esprit du monde… Le dirai-je ? on voudrait même servir Dieu selon l’esprit du monde. […] Alvarès dit à Gusman, dans Alzire : Votre hymen est le nœud qui joindra les deux mondes. […] je t’en conjure par les mânes de ton père, par ta mère, par tout ce que tu as de plus cher au monde, de ne pas me laisser seul dans ces maux que tu vois ! […] Pourquoi ce roi du monde et si libre et si sage, Subit-il si souvent un si dur esclavage ?
L’instruction que nous donnent nos travaux littéraires est comme un fonds de réserve dont nous faisons au besoin l’application ; mais c’est seulement dans nos relations avec le monde que nous pouvons puiser l’esprit de conduite, le tact des convenances, enfin ce vernis de politesse et de bon ton qui est l’expression de la bonne compagnie. […] Vous êtes vieille ; les Rochers 8 sont pleins de bois ; les catarrhes et les fluxions vous accableront ; vous vous ennuierez ; votre esprit deviendra triste, et baissera : tout cela est sûr et les choses du monde ne sont rien en comparaison de tout ce que je vous dis. […] Le plus grand déplaisir qui puisse m’arriver au monde, c’est s’il me revenait que vous êtes indévot, et que Dieu vous est devenu indifférent. […] J’ai un peu de tort : mais qui n’en a point en ce monde ? […] Dans la comédie des Plaideurs de Racine, l’Intimé, plaidant pour un chien qui a dérobé un chapon, remonte au chaos et à la naissance du monde ; Dandin lui crie : Avocat, ah !
Ainsi les âges se renouvellent ; ainsi la figure du monde change sans cesse ; ainsi les morts et les vivants se succèdent et se remplacent continuellement : rien ne demeure, tout s’use, tout s’éteint. […] Qui croirait que notre bon fabuliste, qui faisait si bien converser les rats et les souris, les loups et les moutons, ait un jour fait comparaître devant l’assemblée la plus auguste du monde païen, devant l’assemblée des dieux de Cinéas, un homme grossier, vêtu d’un rustique sayon de laine, et portant une chevelure inculte, un barbare en un mot ?
Le bonhomme, qui admirait les pièces de Corneille, répondit qu’il ne faisait aucune difficulté1, pourvu que ce fût à la campagne, et qu’il y eût peu de monde ; l’on convient qu’il n’y aurait que Madame et Mademoiselle de Vendôme, Madame de Choisi et M. de Turenne, M. de Brion, Voiture et moi. […] Ce défaut a fait qu’avec l’âme du monde la moins méchante, il a commis des injustices ; qu’avec le cœur d’Alexandre, il n’a pas été exempt non plus que lui de faiblesse ; qu’avec un esprit merveilleux, il est tombé dans des imprudences ; qu’ayant toutes les qualités de François de Guise, il n’a pas servi l’État en de certaines occasions aussi bien qu’il le devait, et qu’ayant toutes celles de Henri du même nom, il n’a pas poussé la faction où il le pouvait.
Dès que le jeune voyageur a percé les ténèbres, a débrouillé le chaos qui lui cachait ce monde nouveau qu’il vient habiter, tout le charme, tout l’étonne, tout le ravit ; une foule innombrable de vives sensations, de doux plaisirs, pénètrent dans son âme par les cinq parties que le ciel a placées artistement autour d’elle pour les y conduire. […] Dieu Toute existence émane de l’Être éternel, infini ; et la création tout entière avec ses soleils et ses mondes, chacun desquels enferme en soi des myriades de mondes, n’est que l’auréole de ce grand Être. […] On remarquera dans la période suivante que tous les membres, et les incises même, sont terminés par des mots pleins et sonores : Soit qu’il élève les trônes, | soit qu’il les abaisse ; (1er membre) : Soit qu’il communique sa puissance aux princes, | soit qu’il la relire à lui-même, | et ne leur laisse que leur propre faiblesse ; (2e membre) ; Il leur apprend leurs devoirs d’une manière souveraine et digne de lui ; (3e membre) ; Car, en leur donnant la puissance, il leur commande d’en user, comme il le fait lui-même pour le bien du monde ; (4e membre) ; Et il leur fait voir, en la retirant, que toute leur majesté est empruntée, | et que, pour être assis sur le trône, ils n’en sont pas moins sous sa main et sous son autorité suprême. (5e membre.)
De ce monde intellectuel, l’histoire le ramène au sein de l’univers. […] De Newton calculant le système du monde, ou de Leibnitz s’élançant dans les plaines de l’infini ?