On doit dire les choses d’un air plus ou moins sérieux et sur des sujets plus ou moins relevés, selon l’humeur et la capacité des hommes que l’on entretient, et leur céder aisément l’avantage de décider, sans les obliger de répondre quand ils n’ont pas envie de parler. […] Il ne faut jamais rien dire avec un air d’autorité, ni montrer aucune supériorité d’esprit. […] Il y a enfin des tons, des airs et des manières qui font tout ce qu’il y a d’agréable ou de désagréable, de délicat ou de choquant dans la conversation.
Je n’en veux pour preuve que l’air un peu fané de tel gros bouquet cueilli jadis, vers le commencement du siècle, dans des terrains réputés classiques, et où l’ivraie pourtant ne manquait pas. […] Ses discours ont grand air. […] M. de Turenne, qui avait une petite épée à son côté, l’avait aussi tirée, et après avoir regardé un peu, comme je vous ai déjà dit, il se tourna vers moi de l’air dont il eût demandé son dîner, ou de l’air dont il eût donné une bataille, et me dit ces paroles : « Allons voir ces gens-là ! […] Elle fait mal la révérence702 et d’un air un peu italien ; mais elle plaît, et je l’ai vu dans les yeux de tout le monde. […] L’air est déjà tout obscurci par la fumée de tant de coups, et l’on n’entend plus que le bruit affreux du salpêtre.
Ces règles sont exprimées dans ce triolet même, qu’on attribue à Scarron : Pour faire un bon triolet, Il faut observer ces trois choses Savoir, que l’air en soit follet, Pour faire un bon triolet ; Qu’il entre bien dans le rôlet, Et qu’il tombe au milieu des pauses ; Pour faire un bon triolet, Il faut observer ces trois choses. […] Quelle déesse est portée sur un char élevé au milieu des airs ? […] Pour célébrer un si beau jour, Dioné171 dans les airs portée, Répand, par les mains de l’Amour, Les riches trésors d’Amalthée172. […] Junon177 dans les airs embellis, De Borée178 enchaîne la rage : L’Hymen porté sur un nuage, Descend dans l’empire des Lys. […] La Chanson est un poème fort court, auquel on joint un air pour être chanté.
Bientôt après, le front élevé dans les airs, L’enfant, tout fier de sa victoire, D’une voix triomphante en célébrait la gloire, Et semblait pour témoin vouloir tout l’univers. […] Aujourd’hui, la chanson est toujours divisée en stances égales qu’on appelle des couplets (p. 136) ; à moins qu’elle ne soit faite tout entière sur un air déjà connu, auquel cas la longueur des vers est déterminée par l’air lui-même. […] Indiquons seulement ici l’épithalame, qui est une chanson de noces ; la musette, qui est une chanson champêtre ; le pot-pourri, qui est une chanson composée de couplets à chanter sur des airs différents, et par conséquent inégaux.
Chœurs des airs, répétez sa louange immortelle ! […] L’air du ciel ! l’air de tous ! […] La première amélioration importante qu’ils aient reçue date de la lampe à double courant d’air d’Argand. […] On se menace, on court, l’air gémit, le fer brille.
Je le trouve honnête homme et d’un air assez sage. […] Le premier est tout entier, ou presque tout entier en chansons, sur des airs connus. […] Il faut sur-tout que les airs soient bien choisis, et qu’ils conviennent aux sentimens, à la situation des personnages. […] Pourroit-il les ignorer, sans s’exposer à placer une syllabe sous une note brève, et des paroles gaies sur un air qui ne le seroit pas ? […] Ils disent que, pour qu’un air convienne à des paroles nouvelles, il faut qu’elles renferment les mêmes sentimens qu’expriment les paroles anciennes.
Lui seul ignore combien il est au-dessous du sublime et de l’héroïque ; et, incapable de savoir jusqu’où l’on peut avoir de l’esprit, il croit naïvement que ce qu’il en a est tout ce que les hommes en sauraient avoir : aussi a-t-il l’air et le maintien de celui qui n’a rien à désirer sur ce chapitre, et qui ne porte envie à personne. […] Une naissance auguste, un air d’empire et d’autorité, un visage qui remplisse la curiosité des peuples empressés de voir le prince6, et qui conserve le respect dans le courtisan ; une parfaite égalité d’humeur ; un grand éloignement pour la raillerie piquante, ou assez de raison pour ne se la permettre point1 : ne faire jamais ni menaces ni repròches ; ne point céder à la colère, et être toujours obéi ; l’esprit facile, insinuant ; le cœur ouvert, sincère, et dont on croit voir le fond, et ainsi très-propre à se faire des amis, des créatures et des alliés ; être secret toutefois, profond et impénétrable dans ses motifs et dans ses projets ; du sérieux et de la gravité dans le public ; de la brièveté, jointe à beaucoup de justesse et de dignité, soit dans les réponses aux ambassadeurs des princes, soit dans les conseils ; une manière de faire des grâces2 qui est comme un second bienfait ; le choix des personnes que l’on gratifie ; le discernement des esprits, des talents et des complexions3, pour la distribution des postes et des emplois ; le choix des généraux et des ministres ; un jugement ferme, solide, décisif dans les affaires, qui fait que l’on connaît le meilleur parti et le plus juste ; un esprit de droiture et d’équité qui fait qu’on le suit jusqu’à prononcer quelquefois contre soi-même en faveur du peuple, des alliés, des ennemis ; une mémoire heureuse et très-présente qui rappelle les besoins des sujets, leurs visages, leurs noms, leurs requêtes ; une vaste capacité qui s’étende non-seulement aux affaires de dehors, au commerce, aux maximes d’État, aux vues de la politique, au reculement des frontières par la conquête de nouvelles provinces, et à leur sûreté par un grand nombre de forteresses inaccessibles ; mais qui sache aussi se renfermer au dedans, et comme dans les détails4 de tout un royaume ; qui en bannisse un culte faux, suspect et ennemi de la souveraineté, s’il s’y rencontre ; qui abolisse des usages cruels et impies5, s’ils y règnent ; qui réforme les lois et les coutumes6, si elles étaient remplies d’abus ; qui donne aux villes plus de sûreté et plus de commodités par le renouvellement d’une exacte police, plus d’éclat et plus de majesté par des édifices somptueux ; punir sévèrement les vices scandaleux ; donner, par son autorité et par son exemple, du crédit à la piété et à la vertu ; protéger l’Église, ses ministres, ses droits, ses libertés1 ; ménager ses peuples comme ses enfants2 ; être toujours occupé de la pensée de les soulager, de rendre les subsides légers, et tels qu’ils se lèvent sur les provinces sans les appauvrir ; de grands talents pour la guerre ; être vigilant, appliqué, laborieux ; avoir des armées nombreuses, les commander en personne ; être froid dans le péril3, ne ménager sa vie que pour le bien de son État, aimer le bien de son État et sa gloire plus que sa vie ; une puissance très-absolue, qui ne laisse point d’occasion aux brigues, à l’intrigue et à la cabale ; qui ôte cette distance infinie4 qui est quelquefois entre les grands et les petits, qui les rapproche, et sous laquelle tous plient également ; une étendue de connaissances qui fait que le prince voit tout par ses yeux, qu’il agit immédiatement par lui-même, que ses généraux ne sont, quoique éloignés de lui, que ses lieutenants, et les ministres que ses ministres ; une profonde sagesse qui sait déclarer la guerre, qui sait vaincre et user de la victoire, qui sait faire la paix, qui sait la rompre, qui sait quelquefois, et selon les divers intérêts, contraindre les ennemis à la recevoir ; qui donne des règles à une vaste ambition, et sait jusqu’où l’on doit conquérir ; au milieu d’ennemis couverts ou déclarés, se procurer le loisir des jeux, des fêtes, des spectacles ; cultiver les arts et les sciences, former et exécuter des projets d’édifices surprenants ; un génie enfin supérieur et puissant qui se fait aimer et révérer des siens, craindre des étrangers ; qui fait d’une cour, et même de tout un royaume, comme une seule famille unie parfaitement sous un même chef, dont l’union et la bonne intelligence est redoutable au reste du monde. […] Zénobie ou la vanité de la magnificence Ni les troubles, Zénobie 2, qui agitent votre empire, ni la guerre que vous soutenez virilement contre une nation puissante depuis la mort du roi votre époux, ne diminuent rien de votre magnificence : vous avez préféré à toute autre contrée les rives de l’Euphrate pour y élever un superbe édifice ; l’air y est sain et tempéré, la situation en est riante ; un bois sacré l’ombrage du côté du couchant ; les dieux de Syrie, qui habitent quelquefois la terre, n’y auraient pu choisir une plus belle demeure ; la campagne autour est couverte d’hommes qui taillent et qui coupent, qui vont et qui viennent, qui roulent ou qui charrient du bois du Liban, l’airain et le porphyre ; les grues3 et les machines gémissent dans l’air, et font espérer à ceux qui voyagent vers l’Arabie de revoir à leur retour en leurs foyers ce palais achevé, et dans cette splendeur où vous désirez le porter, avant de l’habiter vous et les princes vos enfants. […] Si vous êtes si touchés de curiosité, exercez-la du moins en un sujet noble : voyez un heureux, contemplez-le dans le jour même où il a été nommé à un nouveau poste, et qu’il en reçoit les compliments ; lisez dans ses yeux, et au travers d’un calme étudié et d’une feinte modestie, combien il est content et pénétré de soi-même ; voyez quelle sérénité cet accomplissement de ses désirs répand dans son cœur et sur son visage ; comme il ne songe plus qu’à vivre et à avoir de la santé ; comme ensuite sa joie lui échappe, et ne peut plus se dissimuler ; comme il plie sous le poids de son bonheur ; quel air froid et sérieux il conserve pour ceux qui ne sont plus ses égaux ; il ne leur répond pas, il ne les voit pas : les embrassements et les caresses des grands, qu’il ne voit plus de si loin, achèvent de lui nuire2 : il se déconcerte, il s’étourdit ; c’est une courte aliénation3. […] Du même fonds… Ces obligeants diseurs d’inutiles paroles Qui de civilités avec tous font combat, Et traitent du même air l’honnête homme et le fat.
Ainsi, lorsque des monts séparés par Alcide Les aquilons fougueux fondent d’un vol rapide, Soudain les flots émus de deux profondes mers D’un choc impétueux s’élancent dans les airs : La terre au loin gémit, le jour fuit, le ciel gronde, Et l’Africain tremblant craint la chute du monde2. […] Suivez-moi l’un et l’autre aux remparts de Paris ; De la Ligue en marchant ramassez les débris : De Coligny vaincu surpassons le courage. » D’Aumale, en l’écoutant, pleure et frémit de rage Cet ordre qu’il déteste, il va l’exécuter : Semblable au fier lion qu’un Maure a su dompter, Qui, docile à son maître, à tout autre terrible, A la main qu’il connaît soumet sa tête horrible, Le suit d’un air affreux, le flatte en rugissant, Et paraît menacer, même en obéissant1… Des cieux en ce moment les voûtes s’entr’ouvrirent : Les mânes des Bourbons dans les airs descendirent. […] , VII, 8) : Mars autrefois mit tout l’air en émeute ; Certain sujet fit naître la dispute… Cf.
Le premier est l’ascendant, c’est-à-dire une manière impérieuse de dire ses sentiments, que peu de gens peuvent souffrir, tant parce qu’elle représente l’image d’une âme fière et hautaine, dont on a naturellement de l’aversion, que parce qu’il semble que l’on veuille dominer sur les esprits et s’en rendre le maître… C’est encore un fort grand défaut que de parler d’un air décisif, comme si ce qu’on dit ne pouvait être raisonnablement contesté ; car l’on choque ceux à qui l’on parle de cet air, ou en leur faisant sentir qu’ils contestent une chose indubitable, ou en faisant paraître qu’on leur veut ôter la liberté de l’examiner et d’en juger par leur propre lumière1, ce qui leur paraît une domination injuste. Ceux qui ont cet air affirmatif témoignent non-seulement qu’ils ne doutent pas de ce qu’ils avancent, mais aussi qu’ils ne veulent pas qu’on en puisse douter.
Cochin, avec un air austère et imposant, qui lui donnait quelque ressemblance avec Démosthène ; Le Normant, avec un air noble, intéressant, qui rappelait la dignité de Cicéron.
2 Je suis assez adroit, j’ai bon air, bonne mine, Les dents belles surtout, et la taille fort fine3. […] Dans le monde, à vrai dire, il se barbouille fort : Partout il porte un air qui saute aux yeux d’abord1 ; Et lorsqu’on le revoit après un peu d’absence, On le retrouve encor plus plein d’extravagance. […] Je le trouve honnête homme, et d’un air assez sage3. […] Mais5 vous savez qu’il est des choses6 dans la vie Qu’on ne peut excuser, quoiqu’on en ait envie ; Et je me vis contrainte à demeurer d’accord Que l’air dont vous vivez vous faisait un peu tort ; Qu’il prenait dans le monde une méchante face ; Qu’il n’est conte fâcheux que partout on n’en fasse ; Et que, si vous vouliez, tous vos déportements7 Pourraient moins donner prise aux mauvais jugements ; Non que j’y croie au fond l’honnêteté blessée : Me préserve le ciel d’en avoir la pensée ! […] Une pauvre servante, au moins, m’était restée, Qui de ce mauvais air n’était point infectée ; Et voilà qu’on la chasse avec un grand fracas, A cause qu’elle manque à parler Vaugelas.
Dépossédé des airs, son poids le précipite ; Dans la neige du mont il s’enfonce, et palpite, Et la glace terrestre a d’un pesant sommeil Fermé cet œil puissant respecté du soleil2. […] Car voici la chaleur, et voici le printemps4. » Le colibri Souvent dans les forêts de la Louisiane5, Bercé sous les bambous et la longue liane, Ayant rompu l’œuf d’or par le soleil mûri, Sort de son lit de fleurs l’éclatant colibri ; Une verte émeraude a couronné sa tête, Des ailes sur son dos la pourpre est déjà prête, La cuirasse d’azur garnit son jeune cœur, Pour les luttes de l’air l’oiseau part en vainqueur… Il promène en des lieux voisins de la lumière Ses plumes de corail qui craignent la poussière1 ; Sous son abri sauvage étonnant le ramier, Le hardi voyageur visite le palmier. […] Sa tête nonchalante, en arrière appuyée, Se cache dans la plume au soleil essuyée : Son poitrail est lavé par le flot transparent, Comme un écueil où l’eau se joue en expirant ; Le duvet qu’en passant l’air dérobe à sa plume Autour de lui s’envole, et se mêle à l’écume ; Une aile est son coussin, l’autre est son éventail ; Il dort, et de son pied le large gouvernail Trouble encore, en ramant, l’eau tournoyante et douce, Tandis que sur ses flancs se forme un lit de mousse De feuilles et de joncs, et d’herbages errants, Qu’apportent près de lui d’invisibles courants2.