Un autre avantage des lettres de madame de Sévigné, c’est qu’elles nous font bien connaître et fort admirer le siècle qu’elle a honoré par ses talents. […] Ne jugez point, je vous prie, de mon Essai sur le Siècle de Louis XIV par les deux chapitres imprimés en Hollande avec tant de fautes qui rendent mon ouvrage inintelligible ; … mais surtout soyez un peu moins fâché contre moi de ce que j’appelle le siècle dernier le siècle de Louis XIV. […] Vous me dites cependant que son siècle ne sera pas appelé, dans l’Europe, le siècle du czar Pierre. Vous en concluez que je ne dois pas appeler le siècle passé le siècle de Louis XIV348. […] Ce n’est néanmoins que dans les siècles éclairés que l’on a bien écrit et bien parlé.
Dans l’espace de quelques siècles, vingt peuples helléniques, ou plutôt vingt petites villes ont déployé une activité sans égale pour réaliser tout ce qui se peut imaginer de bon, d’utile et de beau. […] Bien que le défilé soit devenu une plaine très-large par suite des atterrissements du Sperchius, bien que cette plaine soit plantée de betteraves dont un de nos compatriotes fait du sucre, il ne faut pas un grand effort d’imagination pour se représenter les Thermopyles telles qu’elles étaient cinq siècles avant notre ère. […] C’est ce que savait fort bien un magistrat illustre, qui, dans ce siècle où beaucoup de gens n’approuvent que l’étude des langues modernes, disait avec autant de courage que de raison : « Je veux que mon fils sache beaucoup de latin. » 2.
La parole de Jésus, fructifiant de siècle en siècle, a changé le monde, et, dans l’universel abandon, sur la croix, son dernier mot fut : « Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m’avez-vous délaissé1 ? […] N’est-ce pas une grande pitié que cela, lorsqu’on vient à considérer, après quelques siècles, l’espèce de rage qui armait les frères contre les frères pour des questions aujourd’hui pacifiées ? […] Il faut professer la vertu sur la terre, afin que non-seulement les hommes de notre temps, mais ceux des siècles futurs, en ressentent l’influence.
Le beau siècle de Louis XIV se faisait gloire de suivre les traditions de la Grèce et de l’Italie. […] Ces ouvrages sont ceux que le jugement des siècles, qu’une opinion bien prononcée, certaine, invariable, a placés au premier rang. […] Et lorsqu’on aura longtemps contemplé les merveilles de la Bible, le livre par excellence, et les grandes inspirations de la littérature chrétienne ; lorsqu’on aura étudié les chefs-d’œuvre des plus beaux siècles ; lorsqu’on aura appris à distinguer le beau réel de ce qui n’en a que l’apparence, alors on pourra entreprendre d’autres lectures, et faire connaissance avec les écrivains dont la réputation est moins éclatante.
Il le fut par Hésiode, bien long-temps avant le siècle d’Alexandre, dans un poëme intitulé ls. […] Voilà les deux poëtes qui, dans le siècle dernier, ont successivement régné sur la scène comique. […] Brueys le rajeunit vers la fin du siècle dernier, et en fit une pièce charmante. […] Le siècle dernier a produit une foule de poëtes comiques. […] Le théâtre n’y a été réformé que dans le siècle qui vient de s’écouler.
« Je vais vous marquer la chose du monde la plus étonnante, la plus surprenante, la plus merveilleuse, la plus miraculeuse, la plus triomphante, la plus étourdissante, la plus inouïe, la plus singulière, la plus extraordinaire, la plus incroyable, la plus imprévue, la plus grande, la plus petite, la plus rare, la plus commune, la plus éclatante, la plus secrète, jusqu’aujourd’hui, la plus brillante, la plus digne d’envie ; enfin une chose dont on ne trouve qu’un exemple dans les siècles passés ; encore cet exemple n’est-il pas juste ; une chose que nous ne saurions croire à Paris ; comment la pourrait-on croire à Lyon ? […] J’ai vu, sans mourir de douleur, J’ai vu… siècles futurs, vous ne pourrez le croire ; Ah ! […] La gloire du Seigneur sera célébrée dans tous les siècles : il se réjouira dans ses ouvrages. […] Les siècles, les générations, les empires, tout va se perdre dans ce gouffre. […] Le torrent des âges et des siècles coule devant ses yeux ; et il voit avec un air de vengeance et de fureur de faibles mortels, dans le temps même qu’ils sont emportés dans le cours fatal, l’insulter, en passant, profiter de ce seul moment pour déshonorer son nom, et tomber au sortir de là entre les mains éternelles de sa colère et de sa justice. » Celui-ci est la description du jugement dernier dans le poème de la Religion par Racine le fils.
Publié entre 1749 et 1788, cet ouvrage compta parmi les événements du siècle. […] Au milieu de la vie tumultueuse d’un siècle dissipé, Buffon avait su s’isoler. […] Mais malgré ces lumières de la tradition écrite, si l’on remonte à quelques siècles, que d’incertitudes dans les faits, que d’erreurs sur les causes des événements, et quelle obscurité profonde n’environne pas les temps antérieurs à cette tradition ! […] Ces temps où l’homme perd son domaine, ces siècles de barbarie pendant lesquels tout périt, sont toujours préparés par la guerre et arrivent avec la disette et la dépopulation. […] Isidore Geoffroy Saint-Hilaire apprécie ainsi Buffon : « Buffon fut sagace, ingénieux comme Linnée, mais dans un autre ordre d’idées ; négligeant de créer, de multiplier pour lui les faits d’observation, mais en saisissant toutes les conséquences, et, sur une base en apparence étroite et fragile, élevant hardiment un édifice dont lui seul et la postérité concevront le gigantesque plan ; dédaignant les détails techniques, les divisions systématiques, parce qu’il sait planer au-dessus dans ses hautes conceptions, et cependant, par une heureuse contradiction, créant lui-même un jour une classification méthodique digne de servir de modèle à tous ; s’égarant quelquefois dans ces espaces inconnus où il s’élance sans guide, mais de ces erreurs même sachant faire naître des vérités utiles ; passionné pour tout ce qui est beau, pour tout ce qui est grand ; avide de contempler la nature dans son ensemble, et appelant à son aide, pour en peindre dignement les grandes scènes, tous les trésors d’une éloquence que nulle autre n’a surpassée : en un mot, un de ces hommes puissants par la synthèse, qui franchissent d’un pied hardi les limites de leur époque, marchent seuls en avant, et s’avancent vers les siècles futurs en tenant tout de leur génie comme un conquérant de son épée. » Je lis dans M.
Mais il n’en va pas ainsi de la littérature antique ; car, réduite à quelques chefs-d’œuvre, et séparée de nous par la distance des siècles, elle a, comme la sculpture, je ne sais quelle beauté impersonnelle et abstraite, qui semble offrir des exemplaires immuables à l’admiration non d’un temps ou d’une école, mais de tous les âges et de l’humanité même. […] Dans les plus belles années de notre siècle, toute une école, poètes et prosateurs, a tenté cette restauration, et n’a point eu à s’en plaindre. […] C’est ce qui nous explique pourquoi l’école érudite eut gain de cause, en dépit des bons esprits qui réclamaient en faveur de la tradition populaire, malgré Ramus, entre autres, qui disait : « La vraie doctrine n’est point es-auditoires des professeurs hébraïques, grecs ou latins de l’Université de Paris ; elle est au Louvre, au Palais, aux halles, en grève, à la place Maubert. » Au siècle suivant, en pleine Académie, Bossuet devait aussi proclamer l’usage « le grand-maître des langues » ; et Malherbe renvoyer les Pindarisans et les Latinisans « à l’école des crocheteurs du port à foin ». […] Dans cette œuvre logique, les maîtres du grand siècle eurent une part de collaboration efficace. […] Elle ne sera donc jamais fixée définitivement, n’en déplaise aux doléances d’un goût trop exigeant qui n’accepte, dans la fortune littéraire d’une nation, qu’un siècle, et dans ce siècle, qu’un petit nombre d’élus.
En Grèce, la prose littéraire ne naquit visiblement que vers l’an 600 avant Jésus-Christ, et déjà, depuis environ trois siècles Homère avait composé ses immortels poèmes. […] Appliquée à la littérature ou aux arts, elle produit ces œuvres qui captivent l’admiration des hommes, et vont éveiller dans leurs âmes l’écho endormi de l’imagination : c’est par cet échange de sentiments que nous goûtons les charmes de la culture de l’esprit, et que nous nous félicitons d’appartenir à un siècle civilisé. […] Elle n’a plus que par intervalles des élans d’enthousiasme ; son lyrisme est mêlé de froides abstractions ; son épopée est une imitation calculée des siècles héroïques, à laquelle il manque la véritable inspiration.
[Notice] Né en 1651 au château de Fénelon, en Périgord, Fénelon fut un des derniers représentants de ce grand siècle, qu’il contribua tant à illustrer, et ne précéda Louis XIV au tombeau que de peu de mois. […] Après tant de siècles pendant lesquels tout est sorti d’elle, elle n’est point encore usée : elle ne ressent aucune vieillesse ; ses entrailles sont encore pleines des mêmes trésors. […] J’apprends avec joie que les vôtres sont encore après tant de siècles les délices des gens de lettres.
Toutefois, il faut lui savoir gré d’avoir admirablement parlé de l’âme t de Dieu à un siècle où il y eut des matérialistes et des athées. […] Que leurs grâces divines passent dans mes écrits, et ramènent mon siècle à vous, comme elles m’y ont ramené moi-même ! […] Les autres sont des corbeaux qui se disputent quelques plumes de cygne du siècle passé. » 2.