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203. (1859) Principes de composition française et de rhétorique. Vol. I « Deuxième partie. Rhétorique. — Chapitre II. — Division de la rhétorique : Invention, Disposition, Élocution »

. — Invention L’Invention est une faculté de l’esprit qui imagine un sujet ou qui trouve dans un sujet donné les développements qui s’y rattachent. […] On doit non seulement instruire, mais aussi éclairer l’esprit, et intéresser, en faisant connaître le fait que l’on expose et en l’exposant agréablement. […] L’Enthymème est un syllogisme dans lequel on n’exprime que la première des prémisses ; la seconde, c’est-à-dire la mineure, reste dans l’esprit. […] Et ailleurs : Chaque âge a ses plaisirs, son esprit et ses mœurs. […] Et de là, comment ne pas remonter au principe, auteur et conservateur île cette admirable unité, à l’Esprit immortel qui, embrassant tout dans sa vaste prévoyance, fait tout marcher à ses fins avec autant de force que de sagesse ?

204. (1850) Rhétorique appliquée ou recueil d’exercices littéraires. Préceptes « Définition et division. »

Gerusez, est comme toutes les sciences, utile aux bons esprits, nuisible aux esprits faux ; c’est la liqueur que le vase améliore ou corrompt selon sa nature. […] Or, l’élocution n’étant autre chose que le style, on divise deux choses qui devraient rester unies. 2° A l’article de la composition, on se trouve obligé de parler de nouveau de l’invention, de la disposition et de l’élocution, ce qui peut jeter de la confusion dans l’esprit de l’élève.

205. (1876) Traité de versification latine, à l'usage des classes supérieures (3e éd.) « PREMIÈRE PARTIE. DE L'ÉLÉGANCE LATINE. — CHAPITRE III. De la disposition des mots qui composent le discours. » pp. 78-143

L'amitié renferme des avantages très-grands et très-nombreux ; mais le premier de tous, c’est qu’elle embellit notre avenir d’une douce espérance, et qu’elle ne laisse pas les esprits s’affaiblir et succomber dans les revers. […] Dans cette période, tout est satisfaisant pour l’esprit et pour l’oreille, tout est facile pour la respiration. […] Comme un champ, quelque fertile qu’il soit, ne peut produire des fruits, s’il n’est cultivé ; de même notre esprit n’est capable de rien sans l’étude. […] On n’a point encore exposé les deux objets du jugement exprimés par les deux infinitifs negare et efficere ; l’esprit les demande. […] La religion guérit nos esprits malades ; elle dissipe nos vaines inquiétudes, nous affranchit du joug des passions, et bannit la crainte de nos cœurs.

206. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section quatrième. Genre Démonstratif. Les Panéryriques. — Chapitre IX. Parallèle des Oraisons funèbres de Condé, par Bossuet et de Turenne, par Fléchier et Mascaron. »

Nous ne pouvons rien, faibles orateurs, etc. » Il s’en faut de beaucoup que cet exorde vaille celui de Fléchier : la différence même est trop sensible pour n’être pas aisément remarquée ; mais ce qui peut-être ne le serait pas de même, c’est que cette supériorité momentanée de Fléchier sur Bossuet est précisément ce qui distingue essentiellement ici l’esprit du génie. […] Voilà pourquoi l’homme d’esprit se tire à merveille d’une foule de morceaux de détails, de petites circonstances qu’il a le talent d’embellir, et où l’homme qui n’a que du génie échoue assez ordinairement. […] « Souvenez-vous, messieurs, dit-il, de ce temps de désordres et de trouble, où l’esprit ténébreux de discorde confondait le devoir avec la passion, le droit avec l’intérêt, la bonne cause avec la mauvaise : où les astres les plus brillants souffrirent presque tous quelque éclipse, et les plus fidèles sujets se virent entraînés malgré eux par le torrent des partis, comme ces pilotes qui se trouvent surpris de l’orage en pleine mer, sont contraints de quitter la route qu’ils veulent tenir, et de s’abandonner pour un temps au gré des vents et de la tempête. […] — Il se cache, mais sa réputation le découvre : il marche sans suite et sans équipage ; mais chacun, dans son esprit, le met sur un char de triomphe ; on compte, en le voyant, les ennemis qu’il a vaincus, non les serviteurs qui le suivent : tout seul qu’il est, on se figure autour de lui ses vertus et ses victoires qui l’accompagnent.

207. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Corneille, 1606-1684 » pp. 26-31

Ses acteurs ont l’âme, les mœurs, l’esprit, le langage de l’époque à laquelle ils appartiennent ; mais ils se gardent de cette érudition archéologique dont on a tant abusé depuis, et qui étouffe l’homme sous le costume, le principal sous l’accessoire. […] Les bons esprits trouvent que vous avez fait un chef-d’œuvre de doctrine et de raisonnement en vos Observations. […] Quand vous me demanderez mon amitié avec des termes plus civils, j’ai assez de bonté pour ne vous la refuser pas, et pour me taire sur les défauts de votre esprit que vous étalez dans vos livres. […] rends-moi mon Cid jusques au dernier mot ; Après tu connaîtras, corneille déplumée, Que l’esprit le plus vain est souvent le plus sot, Et qu’enfin tu me dois toute ta renommée.

208. (1867) Rhétorique nouvelle « Tableau des arguments » pp. 306-

Il y a dans cet enchaînement logique de trois propositions quelque chose de régulier qui satisfait l’esprit. […] Si la majeure ou la mineure lui paraît devoir laisser des doutes dans l’esprit, il la rend évidente par une démonstration. […] Parmi tous les traits caractéristiques de la chose qu’il veut décrire, l’orateur choisit ceux qui produiront sur l’esprit une impression favorable à sa cause, et laisse les autres dans une ombre savante. […] Rousseau nous en donne un exemple brillant dans son discours sur l’influence des lettres et des arts : — « Aujourd’hui que des recherches plus subtiles et un goût plus fin ont réduit l’art de plaire en principes, il règne dans nos mœurs une vile et trompeuse uniformité, et tous les esprits semblent avoir été jetés dans un même moule. » — Voilà l’idée générale.

209. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Cours complet de littérature à l’usage des séminaires et des colléges rédigé d’après les meilleurs critiques anciens et modernes par M. l’abbé A. Piron. Chanoine, Vicaire général, Membre de l’Académie des Arcades, ancien Professeur de littérature. » pp. 1-8

Cette nouvelle Poétique peut donc être mise très avantageusement entre les mains des jeunes humanistes, car non seulement elle ne leur offre aucun danger au double point de vue des croyances et des mœurs, mais elle est très propre à éclairer leur esprit, à épurer leur goût et à orner leur cœur. […] Oui, Monsieur le Vicaire général, votre ouvrage par l’exactitude et la netteté des définitions, par la justesse des divisions, par l’esprit si profondément chrétien qui l’inspire, me parait fait, entre tous les autres, pour développer sûrement le goût littéraire, élever les esprits et orner les cœurs. […] Le rapport qu’ils me font de votre Cours loi est très favorable : ils le trouvent rempli de méthode et de clarté ; c’est un ouvrage complet et vivifié par un excellent esprit.

210. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre III. Du Sublime dans les Compositions littéraires. »

L’esprit de l’homme était naturellement disposé alors à l’admiration, à la surprise. […] Du seuil des portes éternelles Des légions d’esprits fidèles À sa voix s’élancent dans l’air. […] Si l’auteur multiplie les mots sans nécessité, s’il surcharge d’ornements parasites la description d’un objet sublime par lui-même, il relâche la tension de l’esprit, et énerve la force de l’émotion : la description peut être belle, mais elle n’a plus rien de sublime. […] Ton esprit qui se livre à des frayeurs si fortes, Se les reprocherait s’il savait qui tu portes. […] Personne n’a plus de droits que Lefranc de Pompignan à cette espèce de réparation publique : personne n’eut plus à se plaindre que lui des vengeances de l’esprit de parti ; et, trop longtemps victime d’un zèle, indiscret peut-être, mais toujours estimable par son objet, il n’est guère connu de la jeunesse actuelle que par les pamphlets et les sarcasmes de Voltaire.

211. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XXI. des figures  » pp. 289-300

Sans prétendre en présenter une nouvelle, je crois pouvoir définir les figures des formes particulières de langage qui manifestent l’idée d’une manière plus noble, plus énergique, plus élégante que les formes ordinaires, ou qui indiquent mieux que celles-ci le mouvement de la pensée et la vue de l’esprit. […] « Dans toutes les langues, dit Voltaire, le cœur brûle, le courage s’allume, les yeux étincellent ; l’esprit est accablé, il se partage, il s’épuise ; le sang se glace, la tête se renverse ; on est enflé d’orgueil, enivré de vengeance, etc. » A ce penchant à l’imitation et à l’association, première source du style figuré, ajoutez la puissante influence qu’une imagination encore vierge et des passions libres et naïves exerçaient sur l’homme primitif. […] On accusa la métaphore de vulgarité, l’hyperbole, l’exclamation, l’apostrophe multipliées, de mauvais ton ; ceux qui avaient l’esprit droit et juste et le sentiment des convenances s’éloignèrent du style figuré des premiers âges, non point qu’il ne fût naturel, mais parce qu’il ne l’était plus. […] « Les paysans ont l’esprit trop tourné à la métaphore pour ne pas deviner très-vite les expressions figurées. » Observation fine d’un écrivain de notre siècle qui a étudié le peuple, quoiqu’il l’ait malheureusement flatté avec autant d’exagération qu’on flatte tous les autres tyrans. […] C’est ainsi que vous ajoute un e aux mots espace, esprit, formés du latinspatium, spiritus.

212. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — La Bruyère. (1646-1696.) » pp. 91-100

De l’esprit de conversation. L’esprit de la conversation consiste bien moins à en montrer beaucoup qu’à en faire trouver aux autres ; celui qui sort de votre entretien content de soi et de son esprit l’est de vous parfaitement3. […] C’est une grande misère que de n’avoir pas assez d’esprit pour bien parler, ni assez de jugement pour se taire. […] « Est eloquentiæ, lit-on en effet dans l’Orator de Cicéron, chap. 21, sicut reliquarum rerum, fundamentum sapientia. » M. du Châteaubriand a dit de même : « L’imagination et l’esprit ne sont point, comme on le suppose, la base du véritable talent : c’est le jugement et le bon sens. » 2.

213. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Montesquieu. (1689-1755.) » pp. 130-139

Esprit hardi mais sage, ami du progrès sans rompre avec le passé, magistrat érudit et homme vertueux, il a écrit pour éclairer ses semblables et pour les rendre meilleurs. Après un livre frivole, où des parties sérieuses portaient l’empreinte des on génie, il s’est immortalisé par plusieurs productions, entre lesquelles se distingue l’Esprit des Lois. […] Alexandre, dans la rapidité de ses actions, dans le feu de ses passions même, avait, si j’ose me servir de ce terme, une saillie de raison qui le conduisait, et que ceux qui ont voulu faire un roman de son histoire, et qui avaient l’esprit plus gâté que lui, n’ont pu nous dérober. […] Esprit des lois 1, X, 13 et 14. […] Toute autre lecture languit auprès de celle d’un si ferme et si lumineux génie, et je n’ouvre jamais l’Esprit des lois que je n’y puise ou de nouvelles idées ou de hautes leçons de style. » Ajoutons qu’un honneur solide de l’auteur fut de montrer, à une époque égarée par de faux systèmes, que le culte de la philosophie n’avait rien d’inconciliable avec le respect de la religion.

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