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55. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Première partie. Principes de composition et de style. — Principes de rhétorique. — Chapitre VII. Des différents exercices de composition. »

Je vois bien que je pourrais être morte deux ou trois ans sans vous en inquiéter, si mon ombre ne vous allait reprocher votre oubli. […] Un peintre habile sait ménager dans un tableau l’ombre et la lumière, et tirer du clair-obscur de merveilleux effets : l’art de l’écrivain est le même ; l’opposition des tons et des couleurs, donne à l’ensemble du mouvement, de la variété, et fait ressortir les parties essentielles. […] Dans une savane, de l’autre côté de la rivière, la clarté de la lune dormait sans mouvement sur les gazons ; des bouleaux agités par les brises, et dispersés çà et là, formaient des îles d’ombres flottantes sur cette mer immobile de lumière. […] Le soleil de nos jours pâlit dès son aurore ; Sur nos fronts languissants à peine il jette encore Quelques rayons tremblants qui combattent la nuit ; L’ombre croit, le jour meurt, tout s’efface et tout fuit.

56. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre second. Définition et devoir de la Rhétorique. — Histoire abrégée de l’Éloquence chez les anciens et chez les modernes. — Chapitre IV. De l’Éloquence chez les modernes. »

La servitude et l’ignorance, sa compagne nécessaire, consommèrent donc l’ouvrage que la corruption des mœurs avait commencé depuis longtemps ; et lorsqu’après des siècles de barbarie, la lumière voulut enfin se remontrer ; lorsque les peuples, fatigués par tous les genres d’oppression, essayèrent enfin de sortir de ce long sommeil de l’esclavage, il fallut un choc terrible et des crises affreuses pour lutter contre tant d’obstacles réunis, et pour reconquérir une ombre au moins de l’ancienne liberté.

57. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Voiture 1598-1648 » pp. 15-17

Regardez si je ferai jamais de beaux discours qui me valent tant, et s’il n’eût pas été mal à propos qu’en cette occasion, sous ombre que je suis de l’Académie, je me fusse piqué de parler bon français.

58. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Voltaire 1694-1778 » pp. 445-463

Ils vivent l’un par l’autre, ils triomphent du temps ; Tandis que sous leur ombre on voit de vils serpents, Se livrer, en sifflant, des guerres intestines, Et de leur sang impur arroser leurs racines. […] Sainte-Beuve : « Je le comparerais volontiers à ces arbres dont il faut choisir les fruits ; mais craignez de vous asseoir sous leur ombre. » D’Argenson disait en parlant de Voltaire, âgé de quarante ans (1734) : « Plaise au ciel que la magie de son style n’accrédite pas de fausses opinions et des idées dangereuses ; qu’il ne déshonore pas ce style charmant en prose et en vers, en le faisant servir à des ouvrages dont les sujets soient indignes et du peintre et du coloris ; que ce grand écrivain ne produise pas une foule de mauvais copistes, et qu’il ne devienne pas le chef d’une secte à qui il arrivera, comme à bien d’autres, que les sectateurs se tromperont sur les intentions de leur patriarche ! 

59. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — Ponsard 1814-1868 » pp. 583-600

A l’ombre les hahits ! […] Dans le théâtre antique, les confidentes n’étaient pas, comme dans notre tragédie, de froides et pâles ombres.

60. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section II. Des Ouvrages en Vers. — Chapitre II. Des petits Poèmes. »

Mais la faveur du ciel vous donne en récompense Du repos, du loisir, de l’ombre et du silence, Un tranquille sommeil, d’innocents entretiens ; Et jamais à la Cour on ne trouve ces biens. […] Ainsi le glaive fidèle De l’Ange exterminateur, Plongea dans l’ombre éternelle Un peuple profanateur, Quand l’Assyrien274 terrible Vit, dans une nuit horrible, Tous ses soldats égorgés, De la fidèle Judée275 Par ses armes obsédée, Couvrir les champs saccagés. […] Je disais à la nuit sombre : Ô nuit, tu vas dans ton ombre M’ensevelir pour toujours. […] Quel plaisir de voir les troupeaux, Quand le midi brûle l’herbette, Rangés autour de la houlette, Chercher l’ombre de ces ormeaux ! […] Dans le sein de la mort ses noirs enchantements               Vont troubler le repos des ombres.

61. (1863) Précis de rhétorique : suivi des règles auxquelles sont assujettis les différents ouvrages de littérature pp. 1-100

Ainsi, la définition oratoire accumule les traits, les circonstances qui caractérisent la chose, et anime le tableau qu'elle en fait des couleurs les plus vives et les plus brillantes qu'offre le sujet ; et la définition poétique est plus brillante et plus variée encore ; elle jette ses couleurs dans le discours de manière que le mélange des ombres et de la lumière ajoute à leur éclat. […] Cher ami, si mon père, un jour désabusé, Plaint le malheur d'un fils faussement accusé, Pour apaiser mon sang et mon ombre plaintive, Dis-lui qu'avec douceur il traite sa captive, Qu'il lui rende…..  » A ce mot, ce héros expiré 1 N'a laissé dans mes bras qu'un corps défiguré : Triste objet où des dieux triomphe la colère, Et que méconnaîtrait l'œil même de son père. […] Et si l'ombre, la paix, la liberté m'inspire. […] L'ombre est propice à ta candeur ; Dans nos bosquets tu t'es cachée, Et l'œil encor cherche ta fleur Quand l'odorat l'a devinée. […] Sans doute ton berceau touche à l'éternité : Quand rien n'était encore, enseveli dans l'ombre De cet abîme sombre, Ton germe y reposait, mais sans activité.

62. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Joubert 1754-1824 » pp. 214-217

L’amitié de M. de Fontanes lui confia le poste d’inspecteur général de l’Université ; mais il rechercha l’ombre comme d’autres aspirent à l’éclat du grand jour.

63. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Seconde section. Des grands genres de poésie — Chapitre III. Du genre épique » pp. 207-250

Les muses aiment à rêver dans ces monastères remplis des ombres d’Antoine, de Pacôme, de Benoît, de Basile. […] Mais quel essaim de vénérables ombres, à la voix d’un poète chrétien, se réveille dans la caverne de Membré ? […] L’auteur de la Henriade, au contraire, n’a pas d’autres agents du sien que ces allégories inférieures : la Discorde, la Politique, l’Envie, le Fanatisme, agissant sous des figures humaines et symboliques, jouent les principaux rôles de la Ligue ; et le héros n’a, de son côté, que l’ombre de saint Louis.

64. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre cinquième. De l’Éloquence des Livres saints. — Chapitre III. Beautés de sentiment. »

La Mort, déployant ses ailes, Couvrait d’ombres éternelles La clarté dont je jouis ; Et dans cette nuit funeste, Je cherchais en vain le reste De mes jours évanouis. […] tu vas dans ton ombre M’ensevelir pour toujours.

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