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111. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Mirabeau, 1749-1791 » pp. 368-376

Une raison patriotique dont la clairvoyance devine le fort et le faible de chaque parti, une ironie amère, un mépris superbe de la contradiction, le sang-froid de la passion qui se maîtrise au milieu de la colère, des ripostes foudroyantes, une inépuisable fécondité de preuves, une action théâtrale et dramatique, une voix tonnante, l’éclat des images qui ne sont que des arguments rendus sensibles, l’audace d’une volonté dominatrice, l’attitude hautaine d’une âme sincère qui réunit l’intelligence politique à la passion populaire : voilà les traits saillants de sa physionomie. […] Il ripostait à l’instant même, coup sur coup, à tous et sur tout, avec une rapidité d’action et une justesse d’à-propos surprenante… Qu’y a-t-il dans l’histoire et dans les mouvements de l’éloquence antique de plus libre, de plus fier, de plus héroïque, de plus insolent, de plus inattendu, de plus victorieux, de plus étourdissant, de plus atterrant, de plus écrasant, que la repartie de Mirabeau au grand maître des cérémonies de la cour : “Les communes de France ont résolu de délibérer ; et vous, monsieur, qui ne sauriez être l’organe du roi auprès de l’assemblée nationale ; vous qui n’avez ici ni place, ni voix, ni droit de parler, allez dire à votre maître que nous sommes ici par la volonté du peuple, et que nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes !” 

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