Quel qu’ait été le motif de Voltaire en traduisant ce précis de l’Ecclésiaste, nous ne lui en avons pas moins l’obligation de lire en beaux vers des vérités aussi sublimes qu’intéressantes pour nous, et de compter, parmi les monuments distingués de notre poésie, le morceau le plus philosophique, et le plus précieux, sous ce rapport, de toute l’antiquité. […] Où se trouverait donc l’utilité sublime des conseils de l’écrivain sacré, si, après nous avoir si pleinement convaincus du néant de tout ce qui pourrait nous séduire ici-bas ; après nous avoir démontré si complètement que rien de tout cela ne peut être le bonheur, il ne plaçait sous nos yeux une perspective plus consolante, et encourageait la patience du juste, en lui montrant d’avance la récompense qui attend ses efforts pour les couronner ? […] La vraie philosophie n’a pas plus besoin du prestige des mots, que les idées vraiment grandes, vraiment sublimes, n’ont besoin, en poésie, du luxe et de la pompe de l’expression, pour produire leur effet. […] Une comparaison d’autant plus sublime, qu’elle rend plus sensible et plus vraie l’application des vers précéder, termine ce beau morceau : Semblables aux torrents dont la fange et les ondes Ravageaient avec bruit les campagnes fécondes, Et qui, formés soudain, mais plus vite écoulés, Se perdent dans les champs qu’ils avaient désolés. […] Que l’on essaie maintenant d’appuyer cette morale sublime, cette grande doctrine des tombeaux sur une base purement mythologique, et bientôt la voix éloquente d’Young se perdra stérilement dans le néant, avec les ombres auxquelles s’adresse sa douleur.