Madame de Sévigné nous attendrit profondément en réunissant, avec la plus touchante simplicité, les circonstances qui ont accompagné la mort de Turenne : « Il monta à cheval le samedi (27 juillet 1615), à deux heures après avoir mangé ; et, comme il y avait bien des gens avec lui, il les laissa tous à trente pas de la hauteur où il voulait aller, et dit au petit d’Elbeuf : « Mon neveu, demeurez là ; vous ne « faites que tourner autour de moi, vous me feriez reconnaître. » M. […] Le style naïf rentre dans le précédent ; mais il en diffère en ce qu’il consiste surtout dans la simplicité des pensées, tandis que le style simple, proprement dit, consiste dans la simplicité des mots. Marmontel définit ainsi la naïveté : « C’est cette espèce d’ingénuité aimable, d’abandon et de franchise qui semble nous donner une sorte de supériorité sur la personne qui se présente à nous avec un pareil caractère ; c’est, en quelque sorte, une simplicité enfantine que nous aimons, et à laquelle il échappe des traits que nous aurions sans doute en l’art de cacher, mais qui nous portent toujours à sourire quand nous les rencontrons dans le langage des autres. » La Fontaine est souvent cité comme un modèle de naïveté ; voyez comme il nous représente la laitière qui, jouissant d’avance du bénéfice qu’elle croyait faire à la ville, Comptait déjà dans sa pensée Tout le prix de son lait, en employait l’argent, Achetait un cent d’œufs, faisait triple couvée. […] Ce qui ajoute encore à la beauté de cette narration, c’est la simplicité énergique et majestueuse du style ; ce sont ces figures vives et naturelles : Les bataillons serrés, semblables à des tours, mais à des tours qui sauraient réparer leurs brèches.