L’historien s’attachera donc à dévoiler les desseins, les pensées de ses personnages, à nous en faire connaître les mœurs et le caractère sans cependant s’amuser à nous peindre longuement leur extérieur45. […] Malgré la beauté de ces exemples, et beaucoup d’autres que nous pourrions citer, on peut dire que les portraits ne sont vraiment bons que comme résumés ; mais que c’est, en général, à propos des actes, et par eux, que les mœurs et l’esprit des hommes doivent se peindre ; qu’ils frappent alors bien plus le lecteur, et se gravent bien mieux dans sa mémoire que par une description abstraite et philosophique. […] On peint les faits : par exemple, le combat des Horaces et des Curiaces ; mais alors on évite les figures oratoires et véhémentes, parce que ces figures sont faites pour exprimer les passions. […] L’auteur, dépouillé de tout sentiment étranger à son objet, livré entièrement et uniquement à la vérité qu’il peint, la présente telle qu’elle est, avec la naïveté, la force, la candeur, qui lui sont propres. […] Le principal devoir de l’historien est de distinguer le ton, le talent, le génie particulier de chaque auteur ; de les peindre tous et de les caractériser d’après leurs ouvrages.