Vous savez peindre un cyprès : eh ! […] Tenez-vous à ne faire parler ni un jeune homme en vieillard, ni un enfant en homme mûr : attachez-vous scrupuleusement à peindre les traits et la physionomie de chaque âge. […] 54si celui qui est peint (qui se fait peindre), 55 son argent étant donné (pour son argent), 56s’échappe-à-la-nage et sans-espoir, 57 ses vaisseaux étant brisés ? […] Voici la paraphrase pleine de justesse que Du Marsais a faite de ce passage : « Si vous osez mettre sur la scène un sujet nouveau, un caractère qui n’ait pas encore été traité, si quid inexpertum, etc., et que, pour peindre ce caractère, vous inventiez un personnage jusqu’alors inconnu au théâtre, personam novam : que ce personnage conserve toujours son caractère ; qu’il ne se démente point, et que, jusqu’à la fin de la pièce, il soit tel qu’il aura paru au commencement. […] Pour peindre quelqu’un de ces caractères dont on n’a encore qu’une idée générale, communia, et qui n’existent qu’à l’état d’abstraction, on n’a aucun modèle devant soi, point d’auteur qui ait traité le même sujet : on n’a pour guide que la nature. » Exemple : Molière, en prenant l’avare pour sujet d’une de ses comédies, nous a peint un caractère général, communia ; et, par la conduite de sa pièce, par tout ce qu’il fait dire et faire à son Harpagon, personnage nouveau, il a traité ce sujet proprie : il a appliqué à ce personnage nouveau le caractère général d’avare : Harpagon est l’avare personnifié.