Dès ses jeunes années, le fils du patricien, c’est-à-dire de l’homme public, envisage avec passion l’avenir qui l’attend en face de ses concitoyens. […] Le jeune patricien s’y plaît et s’y donne ; il s’y plaît comme Démosthène, il s’y donne comme Cicéron ; et toutes ces images du beau, en le préparant aux devoirs de la cité, lui font déjà une arme présente contre les erreurs trop précoces de ses sens. […] La nature même de mon auditoire, composé d’âmes jeunes, entraîne la mienne ; je me rajeunis sans cesse au feu de leur contact, et, toute préparation arrêtée m’étant impossible, je ne puis jamais répondre de m’asservir à une prudence qui me glacerait. […] S’il m’était permis de raconter vos efforts, vos veilles, votre dévouement de toutes les heures aux intérêts sacrés dont vous êtes les dépositaires, j’étonnerais certainement les esprits superficiels qui considèrent le noble métier des lettres comme une distraction élégante, mais en même temps j’enflammerais d’une sainte ardeur tous les jeunes courages impatients de lutte dédaigneux de la fortune sans la gloire, chastes amants des beautés idéales, serviteurs désintéressés du vrai !