Le Paon Si l’empire appartenait à la beauté et non à la force, le paon serait sans contredit le roi des oiseaux ; il n’en est point sur qui la nature ait versé ses trésors avec plus de profusion : la taille grande, le port imposant, la démarche fière, la figure noble, les proportions du corps élégantes et sveltes, tout ce qui annonce un être de distinction lui a été donné ; une aigrette mobile et légère, peinte des plus riches couleurs, orne sa tête, et l’élève sans la charger ; son incomparable plumage semble réunir tout ce qui flatte nos yeux dans le coloris tendre et frais des plus belles fleurs, tout ce qui les éblouit dans les reflets pétillants des pierreries, tout ce qui les étonne dans l’éclat majestueux, de l’arc-en-ciel : non seulement la nature a réuni sur le plumage du paon toutes les couleurs du ciel et de la terre, pour en faire le chef-d’œuvre de la magnificence, elle les a encore mêlées, assorties, nuancées, fondues de son inimitable pinceau, et en a fait un tableau unique, où elles tirent de leur mélange avec des nuances plus sombres et de leurs oppositions entre elles, un nouveau lustre, et des effets de lumière si sublimes, que notre art ne peut ni les imiter ni les décrire. […] Buffon nous recommande en termes élevés d’imiter la nature, lorsque nous voulons produire une œuvre de style. […] Imitons la nature dans sa marche et dans son travail ; prenons le temps de la réflexion ; elle nous aidera à former un ouvrage immortel. […] Mais s’il imite la nature dans sa marche et dans son travail, s’il s’élève par la contemplation, aux vérités les plus sublimes, s’il les réunit, s’il les enchaîne, s’il en forme un tout, un système par la réflexion, il établira, sur des fondements inébranlables, des monuments immortels.