C’est un tissu de préceptes, une suite de principes revêtus de l’expression et de l’harmonie de la poésie, ou au moins une instruction recouverte d’un voile qui déguise les leçons de l’auteur. […] De même, dans Lucrèce, les passages les plus beaux et les plus goûtés sont ses digressions sur les maux qu’enfante la superstition, la description de la peste, et plusieurs éclaircissements amenés d’une manière incidente, écrits avec une rare élégance, et embellis par les charmes d’une versification pleine de douceur et d’harmonie. […] Mais si le poète doit instruire, il faut qu’il anime l’instruction en offrant à l’imagination des figures et des circonstances qui lui plaisent, qui lui dérobent la sécheresse du sujet, et le couvrent en quelque sorte d’un vernis poétique ; il faut qu’il relève tout ce qu’il dit par le choix des épithètes, l’emploi des termes métaphoriques, l’harmonie et la vivacité des tours, la hardiesse et l’éclat des figures, en un mot, par tout ce que le style poétique a d’attrayant et d’enchanteur.