« Des bords du Pô jusqu’à ceux du Danube, on bénit de tous côtés, au nom du même Dieu, ces drapeaux sous lesquels marchent des milliers de meurtriers mercenaires, à qui l’esprit de débauche, de libertinage et de rapine ont fait quitter leurs campagnes ; ils vont, ils changent de maîtres ; ils s’exposent à un supplice infâme pour un léger intérêt ; le jour du combat vient, et souvent le soldat qui s’était rangé naguères sous les enseignes de sa patrie, répand sans remords le sang de ses propres concitoyens ; il attend avec avidité le moment où il pourra, dans le champ du carnage, arracher aux mourants quelques malheureuses dépouilles qui lui sont enlevées par d’autres mains. […] Quant à l’officier, il fut et sera le même dans tous les temps parmi nous, et partout on le reconnaîtra sans peine dans le portrait suivant : « Idolâtre de son honneur et de son pays, bravant de sang-froid la mort, avec toutes les raisons d’aimer la vie, quittant gaîment les délices de la société pour des fatigues qui font frémir la nature ; humain, généreux, compatissant, tandis que la barbarie étincelle de rage partout autour de lui ; né pour les douceurs de la société, comme pour les dangers de la guerre ; aussi poli que fier, orné souvent par la culture des lettres, et plus encore par les grâces de l’esprit. […] Mais si leurs grâces et leur franchise adoucit quelquefois les esprits les plus barbares, que n’a point fait leur valeur ?